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Chapitre I – Cadre conceptuel, problématique de l'étude et la démarche méthodologique

1.2. La problématique de l’étude

Le Bénin, jadis producteur et exportateur de pétrole17 est confronté depuis plusieurs

décennies à une grave difficulté de disponibilité de l’énergie électrique. Cette indisponibilité est due à une demande sans cesse croissante en énergie électrique, expliquée par la croissance démographique et l’absence d’aménagement cohérent de l’espace national, à laquelle n’arrive pas encore à faire face l’État béninois. L’énergie électrique par forme d’énergie au Bénin ne représente que 2 % de la consommation nationale finale et 2 % de la consommation finale d’énergie des ménages (SIE, 2017, p. 36, 38). Il est difficile de définir exactement les parts des différents secteurs dans les trois pourcents (3%) d’énergie électrique consommé au Bénin sur le total énergétique, mais on peut néanmoins estimer à partir des données de la SBEE les grands groupes de consommateurs d’énergie électrique dans le pays.

En 2015, selon un document commun du gouvernement béninois et du deuxième compact du Millenium Challenge Account dans le cadre de l’élaboration d’un projet de contrat plan entre l’Etat et la SBEE pour la période 2016 – 2019 et d’appui à la mise en place du conseil d’administration au recrutement du directeur général et de son adjoint (Gouvernement du Bénin, MCA II, 2015, p 31, 32), les ventes d'énergie électrique dans le secteur industriel, connecté au réseau haute tension, ne représentent qu’environ 18 % de la consommation totale d'énergie électrique au Bénin. Le secteur industriel béninois est essentiellement constitué de l’industrie cimentière et de l'industrie textile (égrenage et traitement du coton fibre, filature et tissage) et l’industrie alimentaire composée de quelques usines de transformations de produits agricoles (arachide, fruits…etc.). L’éclairage public et les administrations publiques ne consomment respectivement que 2% et 8% de l’énergie électrique distribuée. En ce qui concerne le secteur des services, constitué des hôtels et restaurants, généralement connectés sur le réseau moyenne tension, ils ont une part de 31% dans les ventes totales d’énergie électrique.

Sur l’ensemble de la consommation totale d’énergie électrique au Bénin, la consommation d’énergie électrique des ménages est la plus élevée ; les ménages, souvent connectés au réseau basse tension comptent pour environ 40% de la consommation totale de l’énergie électrique. Cette énergie électrique leur permet de satisfaire d’une part leurs besoins fondamentaux comme l’éclairage, le confort. L’énergie est consommée selon les revenus des ménages et aussi utilisée pour la réfrigération, la climatisation (avec l’utilisation de brasseurs ou de climatiseurs en fonction de la classe sociale des ménages), la télévision, la radio, les téléphones cellulaires, et les équipements électroniques.

17 Une production limitée avait commencé en 1982 dans le champ pétrolier côtier de Sème, atteignant

rapidement 8 000 barils/jour avant de décliner à 1 900 baril/jour en 1996 (Kupper & Vaghi, 2014).

Selon les estimations de la banque mondiale, cette exportation de pétrole démarré en 1981 a contribué à hauteur de 3,68% du produit intérieur brut en 1985 au moment fort de la production et s’est brutalement achevé en 2004.

Cette situation de faible consommation en énergie électrique par habitant évaluée à 100,225 KWh/habitant par la banque mondiale en 2014 sur une moyenne mondiale de 3132,148 KWh/habitant, nécessite de définir de nouvelles stratégies de diffusion de l’énergie électrique.

C’est pour cette raison que, dans le cadre de notre étude, nous nous sommes aussi intéressé aux théories de diffusion d’une technologie nouvelle auprès de populations spécifiques. A ce propos, par une double comparaison avec les exemples du succès rapide de la pénétration des téléphones portables auprès des populations béninoises (taux de 82,78%18 en 2019) et

l’échec relatif de l’acceptation du gaz domestique (environ 1% de l’énergie finale consommée depuis plus d’une décennie), nous avons essayé de déterminer dans ce travail, les considérations sociales qui pourraient ralentir la diffusion de la technologie solaire photovoltaïque au Bénin.

(Lecordier-Ferlay, 2012) a dans sa thèse, essayé d’identifier les vecteurs de réussite ou d’échec des nouveaux produits. Elle s’est principalement intéressée aux caractéristiques liées au système social dans ce processus pour déterminer les freins sociaux qui interviennent dans le processus de diffusion d’une innovation. Ainsi, elle a pris en compte la théorie des représentations sociales pour la compréhension du comportement d’achat innovateur et déterminé les éléments de la représentation sociale des panneaux solaires photovoltaïques. Au terme de son étude, trois freins à la diffusion des panneaux solaires photovoltaïques ont été mis en évidence à savoir premièrement le changement social induit par l’acceptation de l’innovation ; deuxièmement la potentielle multiplicité des représentations sociales et le problème que cela engendre sur la communication interpersonnelle ; et troisièmement le refus d’appartenance au groupe de référence perçu du produit nouveau.

Pour compléter son approche, nous avons proposé une réflexion sur les autres déterminants de l’acceptation de la nouveauté à savoir les caractéristiques liées aux interactions sociales à partir du modèle de diffusion de Rogers. En effet, le degré d’intégration dans la communauté ou l’appartenance à un groupe social peut influencer les choix d’adoption. Le citoyen peut aussi systématiquement rejeter tout outil novateur qui demande un niveau de compétence donné. Il peut aussi refuser de l’accepter en raison d’une mauvaise expérience vécue ou observée qui détermine son refus d’acceptation. De même, la valeur du produit est un facteur important, cette valeur peut se traduire d’une part par le coût du produit par rapport aux anciens usages traditionnels et d’autre part par la plus-value19 que ce nouvel

outil est susceptible d’apporter au quotidien de l’individu.

18 Au Bénin, selon l’autorité de régulation des communications électroniques et de la poste (Arcep Bénin), à

la page 4 de sa publication intitulée : observatoire de la téléphonie mobile, le taux de pénétration de la téléphonie mobile au Bénin est de 82,78% en 2019. Il était de 87,36% en 2018.

19 La nouvelle plus-value peut s’entendre en termes de prestige social. Ce fut le cas des latrines publiques

La variété des approches a certainement amené (Chaabouni, Belkahla, & Triki, 2018) à dire qu’il n’y a pas de consensus dans la littérature en ce qui concerne les facteurs individuels déterminant la diffusion des panneaux solaires photovoltaïques.

Toutefois, au terme de la vingtaine d’entretiens qu’ils ont réalisé, ils ont confirmé trois facteurs récurrents à savoir la prise de conscience des problèmes environnementaux, l’implication à l’égard des énergies renouvelables et « l’innovativité ». Cette innovativité devrait faire l’objet d’un transfert approprié de connaissances et de compétences tant au niveau local que dans les relations de l’Etat avec ses partenaires. Le Bénin ne dispose pas encore aujourd’hui d’industrie capable de fabriquer ni même d’assembler les équipements solaires photovoltaïques. Cette contrainte l’oblige donc à importer la totalité des produits liés à l’énergie solaire et à être à nouveau dépendant de l’extérieur, avec les coûts budgétaires exorbitants que cela engendre.

Pour (Hendrickx, 1996, p. 3) :

« L’enjeu du transfert de compétences pour le récepteur consiste à combiner des éléments technologiques locaux et étrangers dans le but de développer des capacités propres du pays et de les rendre plus efficients. Face aux nombreux échecs, des ‘’éléphants blancs’’ des années 60 et 80, c’est-à-dire des unités industrielles ébauchées20 dans certains pays, et qui résultaient des transferts de

technologies entre les pays développés et les pays en voie de développement (Judet, 1989, p. 16), il était judicieux de changer d’approche. Ainsi, le pays récepteur acquiert un avantage concurrentiel qui lui permet d’élaborer une nouvelle trajectoire technologique. De ce point de vue, le transfert de compétence ne se résume pas à l’unique assimilation d’une technologie extérieure mais doit consister à un réel transfert de capacités combiné à une logique de diffusion épidémiologique ».

Pour accompagner cet ensemble, les acteurs publics pourraient mettre en place des facilités commerciales et sociales, tant pour les investisseurs privés du secteur que pour les populations bénéficiaires. Ces dispositions pourraient-elles consister en des subventions sur l’achat des équipements, des facilités douanières pour les importations, des définitions des critères de qualité ou de labellisation, des facilités de crédits ou en la mise en place de cellules de suivi-conseils et réparation des équipements solaires photovoltaïques ?

20 C’est l’exemple de la centrale nucléaire TRICO II en République démocratique du Congo, d’une puissance