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3.1 Formulation des problèmes direct et inverse

3.1.2 Problème inverse

Comme son nom l’indique, c’est l’inverse du problème direct. En effet, il vise à déterminer l’information électrique à la surface du cœur sous forme de potentiel électrique ou de temps d’activation1à partir du potentiel électrique mesuré à la surface du torse. En effet, il s’agit de tenter de déterminer la cause d’un phénomène physique à partir des observations de ses effets. Contrairement au problème direct, le problème inverse ne possède pas une solution unique. Ceci s’explique par le fait que différentes distributions de sources électriques cardiaques peuvent générer le même potentiel à la surface

1. c’est le moment où l’onde électrique atteint un point bien déterminé de la surface cardiaque.

du torse. De plus, ce problème est connu par son caractère mal posé au sens d’Hadamard2 [Had23]. Ce dernier justifie sa théorie à travers l’équation suivante : −∆un = 0 dans(x, y) ∈ R × R+,∂un ∂y (x, 0) = 1 nsin(nx), u(x, 0) = 0. (3.2) un = 1

n2 sin(nx) sinh(ny) est une solution du système (3.2). Théoriquement, on sait que un−→ 0 quand n −→ ∞ d’après la condition au bord. Par contre, la solution 1

n2 sin(nx) sinh(ny) explose.

La solution du problème inverse est instable et peut être énormément modifiée à cause de la moindre perturbation ou erreur au niveau des données électriques ou géométriques. Ce caractère mal-posé est intensifié par le fait que le problème discrétisé est sous-déterminé, c-à-d, le nombre de mesures ECG est inférieur au nombre de mesures du potentiel électrique à déterminer sur la surface du cœur. Pour y remédier, on applique à la solution des contraintes temporelles et spatiales. La technique la plus utilisée est la régularisation mais le vrai défi consiste à choisir le meilleur type de régularisation à appliquer pour obtenir la bonne solution. Comme mentionnée précédemment, le modèle adopté dans cette thèse est le modèle du thorax exprimé par :

div(∇u(x)) = 0 x ∈ ΩT, u(x) = uT(x) x ∈ ΓT, ∂u(x) ∂n = 0 x ∈ ΓT. (3.3)

Pour résoudre le problème inverse en électrocardiographie, on a besoin de deux composantes principales : un modèle géométrique décrivant le domaine thoracique ΩT dans lequel se crée et se propage le courant électrique de la surface du cœur jusqu’à la surface du torse et les mesures des signaux électriques à la surface du torse uT(x). Comme on a mentionné

2. Un problème est mal posé au sens d’Hadamard s’il ne vérifie pas une des 3 propriétés suivantes :

— une solution existe — la solution est unique

— La solution dépend de façon continue des données.

précédemment, le modèle géométrique est construit généralement à partir des images cardiaques (CT-Scan ou IRM) en utilisant des méthodes de traitement d’images [KE91 ; Ama+17 ; Zac+17]. Quant aux signaux électriques, ils sont des données expérimentales ou simulées.

Dans la littérature, on distingue deux approches de formulation du problème inverse en électrocardiographie (3.3). La première consiste à décomposer le problème mal-posé en deux sous-problèmes bien posés :

∆˜u(x) = 0 dans ΩT, ˜ u(x) = uT(x) sur ΓT et ∂ ˜u ∂n = ˜φ sur Σ, (3.4) et ∆ˆu(x) = 0 dans ΩT, ˆ u(x) = ψˆ sur Σ et ∂ ˆu ∂n = 0 sur ΓT, (3.5)

nφ, ˆ˜ ψoest l’extension des conditions aux limites sur le bord Σ. Résoudre le problème (3.3) revient à trouvernφ, ˆ˜ ψooù ˆu = ˜u, la solution du problème inverse. Pour ce faire, des méthodes itératives sont utilisées pour résoudre les sous-problèmes [ABA06 ; Cim+01 ; DCP02 ; LEI97]. Parmi les premières contributions à ce sujet, Kozlov et al. ont introduit la méthode itérative appelée algorithme KMF [KMF91 ; TA14]. On parle aussi de l’approche de Steklov-Poincaré [BEF05]. Ces méthodes ont été appliquées au problème inverse en électrocardiographie dans [BZH13 ; HTBE10 ; Zem13 ; ZBC14]. Ces méthodes ont maints avantages allant de la facilité d’implémentation des schémas de résolution à la haute précision et stabilité de la solution. Néanmoins, leur inconvénient majeur est le grand nombre d’itérations nécessaires à la convergence et par suite le coût important en temps et en ressources de calcul. Ceci empêche ces approches d’être cliniquement exploitées. En alternative, l’approche basée sur la matrice de transfert initialement introduite par [BRIS77] permet d’écrire le problème (3.3) sous la forme matricielle suivante :

Ax = b, (3.6)

où A est la matrice de transfert qui dépend du modèle utilisé appartenant à

RN ∗M tel que N est le nombre de mesures sur le torse et M est le nombre des inconnus sur le cœur, b contient les mesures électriques et x est le vecteur des

inconnus. La matrice de transfert peut être estimée en utilisant la méthode des éléments finis, la méthode des éléments frontières ou la méthode des solutions fondamentales. Ces dernières vont être détaillées dans la partie qui suit. Quelle que soit la méthode utilisée, la matrice de transfert est mal conditionnée ce qui engendre des difficultés de calcul de la solution numérique. Pour résoudre ce type de problèmes, la méthode des moindres carrés est souvent utilisée. Il s’agit de résoudre le problème de minimisation de la norme euclidienne du résidu suivant :

min

x kAx − bk2

2. (3.7)

La solution du problème vérifie l’équation suivante :

x = (ATA)−1ATb. (3.8) Vu que le problème est mal posé, la matrice ATA est encore plus mal conditionnée que la matrice A. Par suite, la solution exprimée par (3.8) possède une amplitude énorme et ne correspond pas à la bonne solution. Comme mentionnée précédemment, pour obtenir la bonne solution d’un problème inverse en électrocardiographie ou autre, il faut appliquer des contraintes à la formulation du problème. Pour ce faire, on distingue deux familles de techniques. La plus répandue est l’approche déterministe connue sous le nom de régularisation. Il s’agit de minimiser non seulement le résidu comme dans l’équation (3.7), mais de rajouter un terme ou plusieurs termes de contrainte. La deuxième approche est probabiliste consistant à considérer la solution comme aléatoire et exprimée par un modèle probabiliste bien déterminé.