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Prise en charge médicamenteuse

II- Prise en charge thérapeutique du cancer du sein

2- Prise en charge médicamenteuse

2.1- Chimiothérapie

La chimiothérapie est un traitement systémique du cancer qui a pour but la destruction des cellules cancéreuses ; elle est particulièrement importante dans le cancer du sein qui est très sensible à ce type de traitement. L’administration se fait historiquement principalement par voie intraveineuse mais l’avènement des chimiothérapies par voie orale sous forme de gélules ou de comprimés permet à la patiente une amélioration de son confort par la possibilité d’avoir accès à son traitement dans sa pharmacie habituelle.

Ces traitements touchent toutes les cellules capables de division, qu’elles soient tumorales ou non, ce qui explique pourquoi ils présentent de nombreuses toxicités. Ils vont exercer leur action en inhibant la synthèse de l’ADN, provoquant des lésions irréversibles conduisant à la mort cellulaire.

Des principes théoriques élaborés en 1979 par JH. Goldie et AJ. Coldman (93) ont permis d’établir de solides bases pour élaborer des protocoles de chimiothérapie efficaces :

- La création de lésions sur plusieurs cibles cellulaires simultanées est primordiale et nécessite d’associer des molécules aux mécanismes d’action variés, diminuant ainsi les phénomènes de résistance cellulaire.

- L’utilisation de médicaments aux mécanismes de résistance cellulaire qui doivent être non croisés.

- L’association de molécules ayant un profil de toxicité varié permet d’éviter au maximum l’apparition d’effets secondaires potentiellement graves.

Le fonctionnement de ce type de traitement est établi sous forme de cures successives. La pause inter-cure permet ainsi une meilleure maîtrise de la toxicité des médicaments antinéoplasiques.

Néanmoins, la chimiothérapie malgré ses qualités rencontre des obstacles, notamment concernant la vascularisation de la tumeur ; en effet, la vascularisation au centre de la tumeur

est peu développée, rendant les cellules presque quiescentes à ce niveau, et donc beaucoup moins sensibles à la chimiothérapie. Le principal inconvénient des traitements par chimiothérapie reste la cytotoxicité des molécules pouvant conduire à une baisse de l’adhésion des patients à leur traitement.

2.1.1- Déroulement d’une chimiothérapie

De nombreux facteurs doivent être pris en compte avant de débuter une cure de chimiothérapie : le type de cancer, la réponse tumorale, l’âge de la patiente, les pathologies et traitements associés, la balance entre bénéfice et risque .

Il existe plusieurs types de chimiothérapie :

- La chimiothérapie néo- adjuvante est effectuée avant la chirurgie, notamment dans le cadre de tumeurs volumineuses (supérieures à 1 cm de diamètre) ou infiltrantes, permettant ainsi de diminuer le volume tumoral et ainsi de faciliter la chirurgie mammaire ; ce choix permet souvent d’éviter à la patiente une mastectomie qui peut être parfois traumatisante. Elle est également indiquée pour les patientes jeunes (moins de 35 ans au moment du diagnostic), en cas d’atteinte ganglionnaire, d’absence de récepteurs hormonaux ou de surexpression des récepteurs HER2, ou encore en cas de grade histologique élevé.

- La chimiothérapie adjuvante est effectuée après la chirurgie et / ou la radiothérapie, permettant ainsi d’éviter un risque de rechute potentiellement lié à la présence de cellules tumorales restantes ; elle est presque toujours prescrite chez les femmes de moins de 50 ans ou les femmes plus âgées non ménopausées.

La coordination entre professionnels de santé est primordiale dans la mise en place d’un protocole de chimiothérapie ; les dates des cures ainsi que le détail des protocoles et médicaments utilisées sont remis à la patiente avant le début du traitement. Le début de la cure doit être précédé d’un rendez- vous avec l’oncologue afin d’évaluer l’état général de la patiente (fatigue, palpation des seins, tension artérielle…) et de réaliser un hémogramme (leucocytes, plaquettes, hémoglobine…), un bilan biochimique et d’éventuels bilans biologiques (cardiaque, hépatique, rénal…) qui permettront au médecin de valider ou non le début de la cure, en modifiant parfois la posologie. Les chimiothérapies sont alors préparées de manières extemporanées à la pharmacie hospitalière.

En fonction des molécules utilisées, la forme galénique du traitement peut varier ; la plupart du temps, la chimiothérapie est administrée par voie intraveineuse. Pour les chimiothérapies disponibles par voie orale, la prise s’effectue sous forme de comprimés ou de gélules.

Lors des cures de chimiothérapie par voie intraveineuse, l’hospitalisation se fait généralement en ambulatoire dans la journée mais il arrive parfois que l’administration se fasse au domicile du patient. L’administration des cures de chimiothérapie en ambulatoire se fait généralement à l’aide d’un perfuseur simple par gravité auquel est relié la poche de chimiothérapie.

Les ponctions veineuses répétées et la toxicité des médicaments injectés pouvant provoquer des infections ou des inconforts sur le lieu d’injection, il est le plus souvent décidé de réaliser l’administration au niveau d’une chambre implantable (aussi appelée port-à-cath ou PAC). Quelques jours avant le début du traitement, la chambre implantable est posée sous anesthésie locale ou générale par le chirurgien au niveau de la veine sus- clavière ou de la veine jugulaire ; puis une radiographie thoracique permet de vérifier son positionnement. Beaucoup moins contraignant que des injections répétées, ce système permet de conserver une activité physique normale. Les effets indésirables possibles de ce système sont des thromboses sur le site d’injection, les infections ou les risques de retournement de la chambre (94).

Figure 10: Illustration d'une chambre à cathéter implantée en sous- cutanée, reproduit de (95)

Un autre système, le PICC- line, permet également l’administration des médicaments. Il s’agit d’un cathéter veineux central inséré par voie périphérique dans une veine profonde du bras (veines brachiales, basilique ou céphalique) dont l’extrémité est positionnée au niveau de la veine cave supérieure (94).

Figure 11: Illustration du PICC Line, reproduit de (96)

2.1.2- Principaux protocoles de chimiothérapie utilisés

Il existe de très nombreux protocoles de chimiothérapie de cancer du sein ; si on observe des protocoles souvent similaires, il est intéressant de constater que chaque établissement de soins apporte des nuances et des adaptations à ces protocoles.

C’est pourquoi nous avons jugé intéressant de comparer ces protocoles dans le tableau 6 en utilisant ceux de l’institut Gustave Roussy, premier centre de soins du cancer en Europe avec ceux mis en place par le réseau ONCO AURA (Réseau Régional de Cancérologie Auvergne- Rhône- Alpes).

Tableau 6: Comparaison des protocoles de chimiothérapie du cancer du sein en situation adjuvante et néo- adjuvante entre l'institut Gustave Roussy et le réseau ONCO AURA, adapté

de (47) et (97)

Protocoles Gustave Roussy Protocoles ONCO AURA

Chimiothérapie adjuvante HER2 -

3-4 (F)EC* 100 suivis de 3-4 Docétaxel100 (5FU optionnel) 4AC ou 3-4 (F)EC100 + 12 Paclitaxel hebdomadaire sans pause

4 Docétaxel-Cyclophosphamide (femmes âgées, maladie limitée N-) Options :

AC60/EC75 dose dense q2w x 4-6 suivis de 12 Taxol hebdo ou 4 Docétaxel (Schéma CITRON +++ ou SIM- Giacchetti et al, BJC 2014) FEC100 x 6 (CI aux taxanes)

6 Docétaxel- Cyclophosphamide si CI aux anthracyclines ou déjà traitées par anthracyclines

Si microenvahissement ganglionnaire : - 6 TAC

- 3FEC100 puis 3 Docetaxel - 4 TC (Docétaxel-

Cyclophosphamide) Si macrométastases :

- 6 TAC

- 3 FEC100 puis 3 Docetaxel - 4AC puis 12 Paclitaxel

hebdomadaire - 4 AC puis 4 docétaxel - 4TC (Docétaxel- Cyclophosphamide) Chimiothérapie adjuvante HER2 +

3-4 (F)EC100 suivis de 3-4 Docétaxel, Trastuzumab à partir du Docétaxel pour 1 an

AC-TH : 4 AC/(F)EC100 suivis de 12 Paclitaxel hebdomadaire,

Trastuzumab à partir du Paclitaxel pour 1 an

4-6 Taxotere- Cyclophosphamide + Trastuzumab (Ref Jones 2013)- Trastuzumab pour 1 an au total Options :

TCH : Taxotere Carboplatine x 6, Trastuzumab dés la première cure Schéma Tolaney : Paclitaxel hebdo 12 injections + Trastuzumab 1 an, reserve à des cancers du seins T1N-

Passer à Trastuzumab en SC en option après la phase de chimiothérapie pour l’entretien.

3 FEC100 puis 3 Trastuzumab- Docétaxel puis Trastuzumab seul pour 1 an 4 AC puis 12 Trastuzumab- Paclitaxel hebdomadaire puis Trastuzumab seul pour 1 an

4 AC puis 4 Trastuzumab- Docétaxel puis Tastuzumab seul pour 1 an

A discuter : 6 TCH (Docétaxel- Carboplatine- Trastuzumab)

4 TC + Trastuzumab puis Trastuzumab seul pour 1 an (pas d’AMM en association avec TC en adjuvant) Si tumeurs N0 :

12 Trastuzumab- Paclitaxel

hebdomadaire puis Trastuzumab seul pour 1 an

Chimiothérapie néo- adjuvante

HER 2-

3-4 (F)EC 100 suivis de 3-4 Docétaxel 100

4AC ou 3-4 (F)EC100 + 12 Paclitaxel hebdomadaire sans pause

Options :

AC60/EC75 dose dense q2w x 4-6 suivis de 12 Paclitaxel hebdomadaire ou 4 Docetaxel

6 Docetaxel- Cyclophosphamide si CI aux anthracyclines

4 AC puis 4 Docetaxel 6 TAC

3 FEC 100 puis 3 Docetaxel

Chimiothérapie néo- adjuvante

HER2 +

3-4 (F)EC100 suivis de 3-4 Docetaxel, Trastuzumab à partir du Docétaxel pour 1 an

AC-TH : 4 AC/(F)EC100 suivis de 12 Paclitaxel hebdomadaire,

Trastuzumab à partir du Paclitaxel pour 1 an

Pertuzumab à discuter pour les stades III. Schéma séquentiel (pas de

remboursement au 20/11/2016) Options :

6 Docétaxel Cyclophosphamide + Trastuzumab (en cas d’exposition antérieure aux anthracyclines)- Trastuzumab pour 1 an au total

4 AC puis 4 Trastuzumab- Docétaxel 3 FEC100 puis 3 Trastuzumab- Docétaxel 6 TCH (Docétaxel- Carboplatine-

Trastuzumab) si Ci aux anthracyclines Options :

6 Trastuzumab- Docétaxel si CI aux anthracyclines

Les protocoles de chimiothérapie seront donc différents si le cancer est HER2 positif ou HER2 négatif en fonction de la quantité de protéines HER2 présentes en surface.

La chimiothérapie adjuvante administrée à l’issue de la chirurgie permet de réduire significativement le risque de rechutes (5% pour les femmes de moins de 50 ans et 20% pour les femmes de plus de 50 ans) et de décès (27% à 10 ans pour les femmes de moins de 50 ans et 11% à 10 ans pour les femmes de plus de 50 ans) (98).

La chimiothérapie néo- adjuvante administrée avant la chirurgie est choisie dans 10% des cas, chez les femmes qui souhaitent une chirurgie conservatrice du sein et dont la tumeur mesure entre 2 et 5 cm. Dans 15 à 50% des cas, la tumeur est répondante à ce type de chimiothérapie et permet ainsi la réduction de sa taille, facilitant ainsi la tumorectomie (99).

Concernant la chimiothérapie adjuvante et néo-adjuvante HER2+ différents protocoles peuvent être mis en place suivi d’un traitement par immunothérapie à base de trastuzumab qui est un anticorps monoclonal recombinant spécifique des récepteurs HER2/neu; les cancers

du sein HER2- ne comportent pas de traitement par trastuzumab, les cellules cancéreuses ne possédant pas de protéines HER2 à leur surface.

Les protocoles sont très variés et de nombreuses options et variations sont possibles en fonction de la réponse de la patiente au traitement, des effets indésirables développés, de l’âge de la patiente ou des contre- indications de certaines molécules. Néanmoins on retrouve des protocoles plus courants, que ce soit dans les protocoles de Gustave Roussy ou ceux du réseau ONCO AURA :

- FEC : association de cyclophosphamide, épirubicine et 5 fluoro- uracile ; parfois le protocole EC sans 5 fluoro- uracile le remplace. L’appellation FEC100 correspond à un dosage de 100 mg/m2 d’épirubicine qui peut être diminué à 50 ou 75 mg/m2 ; on parle alors de protocoles FEC 50 ou FEC75. Le risque d’extravasation de l’épirubicine demande une surveillance continue par le personnel soignant lors de l’administration afin de limiter le risque de nécrose sévère. La dose est administrée en IV lente.

- AC : association de doxorubicine administrée puis de cyclophosphamide.

- AC-TH : association du protocole AC et (F)EC100 suivi du traitement par paclitaxel. - TC : association de paclitaxel et de cyclophosphamide.

- TAC : association de paclitaxel ou docetaxel, suivi de doxorubicine et cyclophosphamide.

- Protocole associant docetaxel et cyclophosphamide. - (TCH : association de docétaxel et carboplatine).

L’administration des chimiothérapies est réalisée en cycles ou cures qui sont suivies d’une période de repos thérapeutique permettant aux cellules saines de récupérer.

Selon les différents schémas thérapeutiques utilisés, un traitement est généralement composé de 4 à 6 cures qui sont réparties sur 3 semaines, et la durée totale de chimiothérapie est de 3 à 6 mois.

En fonction de la réponse de la patiente aux protocoles de chimiothérapie, le traitement sera poursuivi ou adapté, on parle alors de chimiothérapie de première, seconde ou troisième ligne :

- Une chimiothérapie de première ligne est administrée chez les malades n’ayant jamais suivies de chimiothérapie ; ces traitements ont une efficacité prouvée sur la survie des patients et la progression de la maladie.

- Une chimiothérapie de deuxième ligne est administrée lorsque la première ligne n’a pas donné de résultats satisfaisants ou lors des récidives de cancer.

- Une chimiothérapie de troisième ligne (dite également de rattrapage ou de sauvetage) est administrée lorsque la deuxième ligne n’a pas donné de résultats satisfaisants ou en cas de rechute de cancer.

Les autres lignes de chimiothérapie qui concernent de nouvelles molécules sont proposées à la patiente après échec des autres lignes de chimiothérapie ou lorsque pour des raisons de toxicité il est impossible de lui administrer.

S’il est intéressant de comparer les différents protocoles de chimiothérapie, il est nécessaire de comprendre pourquoi ces molécules sont utilisées et leur rôle, ainsi que les effets indésirables qui leur sont propres.

2.1.3- Principales molécules rencontrées

Cette partie ne prendra en compte que les molécules actuellement couramment utilisées dans les protocoles de chimiothérapie du cancer du sein (100). Les médicaments de thérapies ciblées seront abordés plus spécifiquement dans la partie Immunothérapie et thérapies ciblées, page 78.

• Cyclophosphamide- Endoxan®

Le cyclophosphamide est un agent alkylant bifonctionnel de type oxazaphosphorine de la famille des moutardes azotées utilisé dans le traitement de nombreuses tumeurs solides. Il s’agit d’une pro- drogue, c’est-à-dire qu’il va agir après transformation par l’organisme. C’est la moutarde phosphoramide qui va provoquer la cytotoxicité de la molécule, induisant des pontages bi- fonctionnels de l’ADN.

Il est indiqué dans le traitement du cancer du sein, de l’ovaire, du testicule, des bronches, de la vessie, des sarcomes, des lymphomes, myélomes, certaines leucémies, et dans le traitement immunodépresseur de certaines maladies auto- immunes graves (101).

Par voie orale, la posologie est de 300 à 800 mg/m2/jour en cycles de 1 à 5 jours tous les 21 à 28 jours. Le traitement est disponible en ville sous forme de boîtes de 50 comprimés dosés à 50mg.

Ses principaux effets indésirables sont hématologiques (leucopénie, thrombopénie), allergiques (réactions cutanées principalement), digestifs (nausées, vomissements), cutanés (alopécie, hyperpigmentation, desquamation palmo- plantaire), rénaux (cystite hémorragique, rétention hydrique le plus souvent 5 à 20 jours après le début du traitement pour une durée de 10 à 12 jours), cardiaques (troubles du rythme, insuffisance cardiaque congestive), gonadiques (aménorrhée pendant un an).

Devant ce risque conséquent d’effets indésirables, il est nécessaire de prendre des précautions avant et pendant la mise en place du traitement avec des bilans hématologiques réguliers, une hydratation par voie orale ou parentérale, le recours à un traitement anti- coagulant en cas de risque thrombotique avec un contrôle régulier de l’INR et le recours au Mesna® en cas de cystite hémorragique (agent cytoprotecteur préventif du risque de toxicité urinaire).

Cette molécule est contre- indiquée en cas d’insuffisance rénale sévère, d’hypersensibilité à la molécule, d’insuffisance médullaire sévère, de porphyrie hépatique, d’infection urinaire aigüe ou de risque de cystite hémorragique, de cystites hémorragiques préexistantes, chez les femmes non ménopausées sans contraception, et en cas de grossesse et d’allaitement.

• Doxorubicine- Adryamycine® et Epirubicine- Farmorubicine®

Ces deux molécules font partie de la famille des anthracyclines. Il s’agit d’agents provoquant des coupures de l’ADN en s’intercalant entre deux paires de bases et stabilisant les

complexes clivables entre ADN et topoisomérase II. La doxorubicine provoque la formation de radicaux libres.

Ils sont indiqués dans le traitement du cancer du sein, de l’ovaire, des sarcomes osseux et des parties molles, des cancers du poumon, des leucémies, des cancers de la vessie et de l’estomac (102) (103).

L’administration est réalisée par perfusion intraveineuse lente pour éviter les risques de nécrose.

La posologie usuelle moyenne de la doxorubicine est de 40 à 75 mg/m2 et entre 40 et 100 mg/m2 pour l’épirubicine.

La formation de radicaux libres pas les anthracyclines est la cause d’une toxicité aigüe qui survient dans les 48h suivant l’injection et est indépendante de la dose administrée. Elle se

manifeste principalement au niveau cardiaque par des troubles du rythme cardiaque (tachycardie, extrasystoles, bloc auriculo- ventriculaire…), des troubles de l’électrocardiogramme sans forcément de retentissement clinique et plus rarement des formes graves de myocardo- péricardite. Les anthracyclines provoquent également une toxicité chronique qui apparait quelques jours à plus de huit mois après la dernière injection et qui est cette fois corrélée à la dose injectée.

D’autres effets indésirables sont possibles au niveau hématologique (leucopénie, thrombopénie, anémie), local (veinite, risque de thrombose, phlébite), digestif (nausées, vomissements, mucites, hémorragies digestives), cutané (alopécie).

Il est nécessaire de réaliser un bilan cardiaque (ECG, doppler, échographie) avant la mise en place du traitement et d’assurer une surveillance tout au long du traitement ; un bilan hématologique et hépatique est nécessaire avant et pendant le traitement. Le risque thrombotique nécessite souvent le recours à des anticoagulants et un contrôle régulier de l’INR.

L’usage des anthracyclines est contre- indiqué en cas de grossesse, d’allaitement, de pathologie rénale, d’insuffisance cardiaque et de troubles rythmiques.

• 5-fluorouracile (5-FU)

Le 5-fluorouracile est un antimétabolite analogue des bases pyrimidiques qui va être métabolisé en 5-dUMP qui va bloquer la synthèse de l’ADN, en 5-FUTP et 5-FdUTP qui vont s’incorporer directement dans l’ADN ou l’ARN nucléaire.

Il est indiqué dans le traitement du cancer du sein après traitement locorégional ou rechute, des cancers du seins digestifs et colo-rectaux, des carcinomes épidermoïdes des voies aérodigestives supérieures et des adénocarcinomes ovariens (104).

La posologie usuelle est de 400 à 600 mg/m2 en voie intraveineuse.

Les principaux effets indésirables sont des troubles hématologiques, des troubles digestifs, (nausées, vomissements, diarrhées, stomatites) et cutanés (alopécie, hyperpigmentation, photosensibilisation, desquamation palmo-plantaire), oculaires (conjonctivites, hypersécrétion lacrymale).

Depuis Avril 2019, il est nécessaire de conduire un test de toxicité chez les personnes amenées à suivre ce traitement car 1505 personnes ont été victimes d’effets indésirables graves et 133

personnes sont décédées entre 2005 et 2015, à cause d’un déficit rare en DPD (dihydropyrimidine déshydrogénase), une enzyme du foie permettant la dégradation du 5-FU. Ce déficit est présent chez 0,1 à 0,5% de la population caucasienne. Le test effectué par une prise de sang permet la mesure du taux d’uracile chez le patient (105).

Un bilan hématologique avant et pendant le traitement est nécessaire, tout comme une surveillance cardiaque régulière, et un recours aux anticoagulants peut être nécessaire en cas de risque thrombotique.

L’usage de cette molécule est contre- indiqué en cas de grossesse et d’allaitement.

• Paclitaxel- Taxol® et Docétaxel- Taxotere®

Ces deux molécules sont des taxanes, dérivés hémi-synthétiques de l’if ; ils se lient à la tubuline, favorisant la polymérisation en microtubules. En se liant à celle- ci, ils stabilisent les microtubules et inhibent leur capacité de dépolymérisation, conduisant à l’interruption de la mitose et de la réplication cellulaire ; ils sont actifs en phase S du cycle cellulaire. Ils peuvent induire la différenciation cellulaire ainsi que la fragmentation de l’ADN suggérant une implication du mécanisme d’apoptose dans l’action de la molécule.

Le paclitaxel est indiqué dans le traitement du cancer du sein, du cancer de l’ovaire, du cancer bronchique à petites cellules avancé ; le docétaxel est indiqué dans le traitement du cancer du sein et du cancer bronchiques non à petites cellules avancé (104).

Le paclitaxel est administré par perfusion par voie IV à la dose de 175 mg/m2 pour une durée de 3 à 24h. Le docétaxel est administré par voie IV stricte en perfusion d’une heure toutes les 3 semaines ; en monothérapie il est utilisé à la dose de 100 mg/m2 et 75 mg/m2 en association.

Les principaux effets indésirables des taxanes sont des troubles hématologiques (neutropénie, thrombopénie, anémie), des hypersensibilités (prurit, rash, flush, réactions cutanées, hypotension), des troubles digestifs (nausées, vomissements, mucites, diarrhées), des myalgies, une alopécie, une asthénie. Le docétaxel peut aussi provoquer des dyspnées, un syndrome main-pied, des troubles de la rétention hydrique alors que le paclitaxel aura une influence au niveau hépatique (augmentation des enzymes hépatiques et de la bilirubine). Une surveillance hebdomadaire de la NFS est nécessaire devant le risque de troubles hématologiques conséquent, ainsi qu’une surveillance hépatique pour le docétaxel. Une

prémédication à base de corticoïdes et d’antihistaminiques est indispensable avant les cures. Le risque d’œdème du docétaxel rend l’utilisation d’un diurétique souvent nécessaire et l’utilisation d’un traitement anti- coagulant avec une surveillance régulière de l’INR est fréquent lors de l’utilisation de taxanes afin de limiter le risque thrombotique.

Les taxanes sont contre- indiquées en cas de grossesse, d’allaitement et d’insuffisance hépatique sévère pour le docétaxel.

2.1.4- Chimiothérapies orales

L’évolution de la prise en charge du cancer du sein et son glissement vers la médecine de ville