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La douleur de l’escarre peut être spontanée ou non, limitée aux soins, aux changements de position ou aux mobilisations ou présente en continu. Elle ralentie la cicatrisation, car elle entraîne une vasoconstriction locale (réduction de l’apport d’oxygène à la plaie cutanée). Elle n’est pas corrélée à la taille de l’escarre. Soulager la douleur de l'escarre de façon efficace et durable implique généralement la prescription d'un traitement antalgique. (3,9,67)

Il est recommandé d’évaluer régulièrement la douleur pour mieux orienter sa prise en

L’analyse de la douleur comprend une évaluation :

De ses causes : Soins de la plaie, mobilisations, changements de position.

De son intensité :

◦ Par une auto-évaluation par le patient en utilisant une échelle validée (échelle visuelle analogique, échelle numérique, échelle verbale simple).

◦ Complétée d’une observation clinique pendant les soins (intensité, localisation, circonstance d’apparition, durée, posture, faciès, gémissements, attitude antalgique, limitation des mouvements).

◦ Chez le patient incapable de communiquer, l’observation clinique ou l’utilisation d’une échelle telle que Doloplus (Annexe 5) ou ECPA (Annexe 6) est préconisée.

De son retentissement sur le comportement quotidien et l’état psychologique du

patient. (3)

A chaque composante de la douleur correspondent des molécules antalgiques spécifiques actives sur le mécanisme physiopathologique. La durée et la période d'apparition de la douleur vont déterminer le type, la galénique et l'heure d'administration de l'antalgique prescrit. Il faut donc distinguer la douleur intense paroxystique de la douleur continue, et analyser la douleur induite par les soins (mobilisation du patient, débridement et détersion de la plaie…) qui peut être immédiate et/ou se prolonger après le soin. (67)

a) Les sensations douloureuses en fonction du stade de la plaie

Nécrose sèche : Indolore.

Plaie fibrineuse : Brûlure, piqûre, douleur lancinante ou vive.

Bourgeonnement : Sensation d’oppression, due à la formation de collagène, due à la

contraction de la plaie.

b) En cas de douleur nociceptive (la plus fréquente)

Pour une douleur nociceptive, il est recommandé d'utiliser les antalgiques non opioïdes, les opioïdes faibles ou forts en respectant les 3 paliers de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). (67)

Un changement de palier est nécessaire lorsque les médicaments du palier précédent, correctement prescrits, sont insuffisants. Cependant, des douleurs intenses lors des soins d’escarre peuvent justifier d’emblée l’utilisation d’un antalgique de palier 3 (opioïdes forts). Dans tous les cas, il ne faut pas s’attarder plus de 24 à 48 heures sur un palier qui s’avère inefficace. Un traitement antalgique en continu peut être nécessaire. (3)

Palier I : Antalgique non opioïde ou d’action périphérique :

• Paracétamol : Dolpirane ®, Efferalgan ®, Dafalgan ® • AINS : Aspirine ®, Voltarène ®, Advil ®, Kétoprofène ®

Palier II : Antalgiques opioïdes faibles associés ou non au paracétamol :

(Douleurs modérées à fortes ou non soulagées par les antalgiques du palier I)

• Codeïne associée au Paracétamol : Codoliprane ®

• Tramadol : Topalgic ®

• Nefopam : Acupan ®

Palier III : les antalgiques opioïdes forts si la douleur est d'intensité forte :

• Morphine

◦ Par voie orale:

▪ Libération immédiate : Sevredol ®, Actiskenan ® , Oramorph ® ▪ Libération prolongée : Moscontin LP ® , Skenan ®

◦ Injectable qu'en cas d'impossibilité de déglutition (coma, cancer ORL…) ou de vomissements.

• Oxycodone

◦ Par voie orale uniquement :

▪ Libération immédiate : Oxynorm ® , Oxynormoro ®

▪ Libération prolongée : Oxycontin ®

• Fentanyl

◦ Par voie intra-nasale : Instanyl ® ◦ Par voie sublinguale : Abstral ®

◦ Par voie jugale : Actiq ®

◦ Par voie gingivale : Effentora ®

◦ Par voie transdermique: Durogesic ® (durée d’action de 72h)

• Hydromorphone

◦ Par voie orale uniquement

▪ Libération prolongée uniquement : Sophidone ® (9,67)

Si la douleur est induite (douleur liée aux soins), les anesthésiques locaux (bien que n'ayant

pas l'AMM) et le mélange équimoléculaire oxygène protoxyde d'azote (MEOPA) sont préconisés en complément. (67)

Les Anesthésiques locaux

◦ EMLA 5% crème (association de lidocaïne et de prilocaïne) est appliqué 45minutes avant la détersion sous un pansement occlusif. Son efficacité perdure une heure environ. Son anesthésie est limitée à 3 mm de profondeur environ.

◦ Xylocaïne ® 5% spray (lidocaïne) agit au bout de 3 à 5 minutes assurant également une anesthésie de surface pendant plus d'une heure. (67)

Le Mélange équimoléculaire oxygène et protoxyde d'azote (MEOPA)

◦ Actuellement sorti de la réserve hospitalière, est une technique de sédation consciente qui permet rapidement (au bout de 3 minutes) par absorption pulmonaire de prévenir et diminuer la douleur et l'anxiété du patient lors du soin. Son utilisation est de plus en plus courante. La durée d'inhalation se superpose à la durée du soin et ne doit pas dépasser une heure en continu. (67)

Il est important de toujours anticiper les douleurs induites par les soins (mobilisation, détersion, réalisation du pansement) à l'aide de prescriptions anticipées. (67)

c) En cas de douleur neuropathique

L'atteinte du derme peut causer des lésions des terminaisons nerveuses périphériques et donc générer des douleurs de composante neurogène.

Ces douleurs peuvent être spontanées, continues ou paroxystiques, à type de décharge électrique, brûlure… ou provoquées par la stimulation tactile, thermique associées à des troubles de la sensibilité.

Une fois le diagnostic posé, il n'y a pas de consensus sur la prescription médicamenteuse. Les opioïdes n'ayant qu'une très discrète action dans ces situations, les traitements instaurés sont en première intention les antidépresseurs et les antiépileptiques. (67)

Les antidépresseurs tricycliques les moins sédatifs sont des molécules privilégiées, elles ont l’AMM sur les douleurs neuropathiques continues et paroxystiques :

◦ Amitriptyline : Laroxyl ® ◦ Clomipramine : Anafranyl ®

Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine / noradrénaline (IRSNA) ont aussi une efficacité documentée :

◦ Duloxetine : Cymbalta ®, seule la duloxetine a l'AMM pour les douleurs neuropathiques

Les antiépileptiques de nouvelle génération sont privilégiés :

◦ Prégabaline : Lyrica ®

◦ Gabapentine : Neurontin ® (67)

d) En cas de douleur psychogène associée

L'escarre a un impact physique en cas de douleurs mal contrôlées et / ou si elle limite la mobilité. Elle a également un impact social par la dépendance aux soins, un impact psychologique potentiel par l'altération de l'image de soi. Malgré les moyens non médicamenteux à visée anxiolytique, la présence d'une anxiété ou la survenue d'un état dépressif peut être constatée et justifier un traitement anxiolytique, antidépresseur ou la majoration des doses d'un antidépresseur déjà prescrit à visée antalgique. (67)

Comme l'exprime Epicure : «le plus grand plaisir pour le corps consiste à ne pas souffrir et pour l'âme à être sans trouble». Le médicament est un enjeu relationnel majeur, notre devoir et notre défi de soignant est de traiter toutes les formes de la douleur de l'escarre en connaissant au mieux tous les traitements médicamenteux à notre disposition afin d'utiliser «le bon