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Schématiquement la prise en charge d’une patiente ayant eu une perte de grossesse précoce se répartit en deux périodes : une autour de l’obtention de la vacuité utérine et une autre après l’obtention de la vacuité utérine

1. L’obtention de la vacuité utérine:

Dans le cadre de la grossesse arrêtée précoce ne se conçoit que par une analyse du bénéfice/ risque de chaque méthode (expectative, misoprostol, aspiration,…) permettant d’atteindre cet objectif dans un délai acceptable et en fonction de la situation clinique dont il s’agit. Pour ce, nous avons consulté les résultats d’une revue de littérature effectuée à l’aide des bases de données informatiques

Medline et de la Cochrane Library entre 1990 et mai 2014 [59].

Ainsi en fonction de la situation clinique de la grossesse arrêtée précoce nous présentons l’analyse du bénéfice/ risque de chaque méthode thérapeutique :

 La grossesse arrêtée asymptomatique:

L’expectative en cas de grossesse arrêtée augmente les risques d’absence d’expulsion spontanée nécessitant un traitement chirurgical non programmé et de transfusion sanguine.

Le traitement chirurgical par aspiration d’une grossesse arrêtée asymptomatique est plus efficace que le traitement médical par le misoprostol. Les risques de complications à court terme, traumatiques, hémorragiques ou infectieuses sont rares (moins de 5%).

En cas de grossesse arrêtée au premier trimestre, les techniques médicale et chirurgicale comportent des risques de complications à court terme, traumatiques, hémorragiques et infectieuses, rares et comparables (moins de 5%). Le traitement médical par misoprostol est responsable de saignements plus prolongés et de douleurs plus fréquentes que le traitement chirurgical. Le risque d’une hospitalisation non programmée est également plus élevé. Le recours à une consultation en urgence et le degré de satisfaction des patientes sont comparables entre les deux techniques.

Les effets secondaires du traitement médical par misoprostol (troubles digestifs, douleurs et fièvre) sont en général bien tolérés. Le traitement médical par misoprostol permet de réduire les coûts de la prise en charge des grossesses arrêtées du premier trimestre en diminuant les hospitalisations et les actes d’anesthésie et de chirurgie.

La patiente doit être informée des avantages et inconvénients de chaque technique. Elle doit également être informée de l’utilisation du misoprostol hors AMM.

Lorsqu’un traitement médical a été choisi, le misoprostol doit être administré par voie vaginale à la dose unique de 800 µg, éventuellement renouvelée au bout

de 24-48 heures (taux de succès le plus souvent supérieur à 80 %). L’administration préalable de mifépristone n’est pas recommandée. En cas de persistance du sac gestationnel après la prise de misoprostol, il semble raisonnable de respecter un certain délai (deux jours à deux semaines) avant d’envisager une autre alternative thérapeutique.

 Fausse couche en cours d’expulsion

Aucune étude n’a comparé différentes attitudes thérapeutiques (expectative versus évacuation utérine immédiate) dans cette circonstance.

En cas de fausse couche hémorragique nécessitant une évacuation chirurgicale utérine urgente, il n’existe pas d’études prospectives ayant comparé et évalué les différentes alternatives thérapeutiques telles que le tamponnement intra-utérin ou l’embolisation artérielle. L’utilisation d’une sonde de Foley ou de Bakri a été rapportée en cas de saignements excessifs survenant lors d’une évacuation chirurgicale du contenu utérin [56-57]. Des courtes séries d’embolisation des artères utérines ont montré des taux de succès de 90 à 100 % dans cette indication [58].

 Fausse couche incomplète

Une attitude d’expectative permet d’obtenir une évacuation complète de l’utérus dans plus de 75 % des cas sans augmentation des risques de complications hémorragiques et infectieuses. Elle peut être proposée en première intention. Il n’est pas possible de définir une limite à la durée d’expectative car celle-ci varie en fonction des études (de trois jours à huit semaines).

En cas de fausse couche incomplète, le traitement médical par misoprostol n’améliore pas le taux d’évacuation utérine complète à deux semaines par rapport à une simple expectative et ne réduit pas les risques de complications hémorragiques et infectieuses.

Le traitement chirurgical permet des taux d’évacuation complète élevés (97-98 %) pour des risques de complications hémorragiques et infectieuses

faibles (moins de 5 %). Il permet également de réduire les risques de consultations et de traitement chirurgical non programmés par rapport aux autres alternatives. Il ne doit pas être imposé à la patiente en raison de la bonne efficacité (plus de 75 %) et des risques de complications hémorragiques et infectieuses rares de l’expectative. L’aspiration chirurgicale doit être préférée au curetage car elle est plus rapide, moins douloureuse et moins hémorragique.

En cas de suspicion de rétention trophoblastique prolongée après une fausse couche du premier trimestre, l’hystéroscopie diagnostique permet de confirmer le diagnostic et d’éliminer une anomalie de la cavité utérine associée. L’hystéroscopie opératoire permet d’effectuer une résection sélective sous contrôle visuel du résidu trophoblastique. Celle-ci semble être plus efficace que le curetage à l’aveugle, être moins responsable de synéchies post-opératoires et permettre des délais de conception plus courts. En cas de suspicion de rétention trophoblastique prolongée, une hystéroscopie diagnostique est recommandée.

NB : En continuité avec la prise en charge durant cette phase il faut rappeler que la PRÉVENTION DE L’ALLO-IMMUNISATION RHÉSUS est réalisée par injection d’Immunoglobuline anti-D à la dose de 200 µg. (Rophylac®) par voie veineuse ou intramusculaire. Le contrôle des RAI passifs et le test de Kleihauerne sont pas indiqués avant 15 SA.[55]

2. Après obtention de vacuité utérine

Dans toutes les situations de grossesse arrêtée précoce, une consultation doit être prévue après obtention de la vacuité utérine pour répondre aux questions qui se posent sur:

• la fertilité ultérieure

• les fausses couches à répétition

• l’impact psychologique accompagnant la perte de la grossesse

 Fertilité ultérieure

identique quel que soit le traitement d’une fausse couche du premier trimestre. La découverte de synéchies utérines dans les douze mois suivant le traitement chirurgical d’une fausse couche du premier trimestre est fréquente, environ chez une femme sur cinq. Il s’agit le plus souvent de synéchies de sévérité minime à modérée dans 85 % des cas. Le risque de synéchies utérines et leur sévérité augmente significativement au-delà de deux et de deux traitements chirurgicaux. La réalisation d’une hystéroscopie diagnostique après une fausse couche du premier trimestre n’est pas recommandée en l’absence de signes cliniques évoquant des synéchies utérines. [59]

 Fausses couches spontanées précoces à répétition

Des fausses couches précoces à répétition (FCR) sont définies par une histoire de 3 fausses couches précoces consécutives. Elles concernent 1 à 5 % des couples fertiles.

 Facteurs de risque

Les facteurs de risque connus de FCR sont : l’âge féminin ≥36 ans, les malformations congénitales utérines, l’obésité (IMC ≥30), l’hypothyroïdie, la présence d’anticorps anti-thyroïdiens (anti-TPO, anti-TG), l’endométrite chronique, l’exposition maternelle au tabac, les carences en vitamines B9, B12 et l’hyperhomocystéinémie, une consommation de caféine quotidienne supérieure à 100 mg/j (plus d’une tasse de café), les aneuploïdies embryonnaires, les anomalies chromosomiques parentales et le stress.

 Bilan à réaliser devant des FCR:

En cas de FCR, il est recommandé de rechercher un diabète, un syndrome des Ac anti phospholipides, une hypothyroïdie avec la présence d’Ac anti-TPO et anti-TG, une carence vitaminique (B9, B12), une hyperhomocystéinémie, une hyperprolactinémie, une altération de la réserve ovarienne (CFA à l’échographie pelvienne à J3 du cycle et/ou dosage d’AMH), une malformation utérine ou une

anomalie utérine acquise accessible à un traitement chirurgical. Selon l’expérience des équipes et l’accessibilité des examens, plusieurs examens peuvent être proposés pour le diagnostic des malformations utérines:

Echo (sono) graphie 2D ou écho(sono)graphie 3D ou hystéroscopie diagnostique ou IRM pelvienne. Du fait de ses performances diagnostiques inférieures dans cette indication, l’hystérosalpingographie n’est pas recommandée pour l’évaluation de la cavité utérine.

Dans le cadre de FCR, il est recommandé de réaliser une analyse des caryotypes du couple dès 3 fausses couches et si cela est facilement réalisable, une analyse cytogénétique du produit de FC.

Dans le cadre de FCR (sans facteur identifié), il n’est pas recommandé de réaliser un bilan de thrombophilie, ni l’étude des polymorphismes génétiques.

 Prise en charge desFCR

La supplémentation en acide folique n’a pas été évaluée chez les patientes ayant des FCR dans le but de diminuer le risque de récidive de fausse couche. La supplémentation à la dose de 0,4 mg/j est cependant recommandée en périconceptionnel pour les femmes en projet de grossesse.

Chez les femmes ayant des FCR avec une carence vitaminique diagnostiquée en vitamine B9 et/ou une hyperhomocystéinémie, une vitaminothérapie est recommandée en antéconceptionnel et à poursuivre en cas de grossesse : association B6 (250 mg x 3/jour par voie orale) + B9 (15 mg/jour par voie orale). Chez les femmes ayant des FCR avec une carence vitaminique B12, une substitution en vitamine B12 (250 à 500 µg/jour par voie orale ou 1 000 µg/semaine par voie parentérale) est recommandée en antéconceptionnel et à poursuivre en cas de grossesse.

En cas de FCR, il est recommandé de traiter par L-Thyroxine une patiente présentant une hypothyroïdie et/ou porteuse d’Acanti-thyroïdiens (anti-TPO, ou

anti-TG), que la patiente soit en euthyroïdie, hypothyroïdie ou hypothyroïdie sub-clinique.

Il est recommandé de traiter par bromocriptine une femme présentant une hyperprolactinémie isolée et des FCR. En cas de FCR inexpliquées, il n’est pas recommandé de prescrire de l’aspirine, des HBPM, ou des immunoglobulines intraveineuses pour prévenir les récidives. Il est recommandé de prescrire un traitement associant aspirine et HBPM uniquement chez les femmes présentant des FCR et un syndrome des Ac anti phospholipides.

Chez les femmes ayant des FCR et une thrombophilie génétique sans manifestation thromboembolique, l’association HBPM + aspirine n’est pas recommandée pour prévenir les récidives.

Après trois antécédents de fausses couches précoces, il est recommandé de corriger les anomalies acquises de la cavité utérine.

 L’impact psychologique de perte de la grossesse:

Une revue de la littérature traitant la relation entre psychologie et pertes fœtale précoce (en consultant les données de Midline jusqu’à 2014), nous a parue utile pour apporter des précisions permettant l’évaluation de cet impact et proposer des conduites adaptées.

La dépression est un symptôme fréquent après une fausse couche, observé chez 10à 50% des femmes dans les premiers mois suivant la fausse couche, un retour à la normale des scores de dépression est fréquemment observé à un an de l’épisode de fausse couche, également, l’anxiété est un symptôme fréquent après fausse couche, observée chez 20 à 40 % des femmes , qui peut persister jusqu’à 6 mois après l’épisode de fausse couche. A distance de l’évènement, les femmes ayant fait l’expérience d’une fausse couche présentent des scores de dépression et/ ou d’anxiété identiques à ceux de la population générale.

Cependant, le retentissement psychologique en cas de fausse couche n’est pas influencé par les modalités de prise en charge de la fausse couche.

L’impact d’une fausse couche sur le déroulement des grossesses ultérieures peut se traduire par une majoration transitoire des symptômes anxieux, dépressifs et de stress post –traumatique, notamment au premier trimestre.

La prise en charge psychologique systématique après un épisode de fausse couche ne semble pas apporter un bénéfice évident à un an de la fausse couche, en termes d’amélioration des différents scores d’anxiété et de dépression et ce, quel que soit le schéma proposé. Néanmoins, un soutien psychologique à court terme peut être proposé du fait du niveau élevé des scores d’anxiété et de dépression à la phase initiale de la fausse couche.

Une politique de réassurance par des consultations répétées avec réalisation d’une échographie en cas de fausse couche à répétition est associée à une diminution de l’incidence des récidives de perte précoce de grossesse. [60]

CIRCUIT MEDICAL DES GROSSESSES

ARRETEES PRECOCES:

I. OBJECTIF

La mise en place d’une plate forme d’enquête rétro / prospective axée sur la grossesse arrêtée précoce qui peut servir d’analyse médico-économique d’un problème de santé publique. En Instaurant des outils simples et recommandés par les sociétés savantes faisant émerger un modèle facilement duplicable certifié d’efficacité.

D’un point de vue opérationnel notre réflexion envers ce sujet s’inscrit dans une approche cadrée par:

• La gestion du risque de la grossesse arrêtée précoce.

• La participation des patientes dans leurs prises en charge

• La programmation de l’obtention de la vacuité utérine

• La prise en charge complète de la grossesse arrêtée précoce

• La mise en place d’une conduite thérapeutique qui reste modulable en fonction des résultats de nouveaux essais cliniques

II. MATERIELS ET METHODES:

Nous avons évalué le circuit médical de la grossesse arrêtée précoce de notre structure depuis sa mise en marche sur une période de 6mois.

Nous rappelons que nous avons adopté un référentiel interne de prise en charge qui cible les éléments suivants:

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