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Les principes vecteurs de collaboration

62. – Tout autant que les principes, vecteurs de concurrence, qui gouvernent le

fonctionnement du réseau sont au nombre de deux, les principes vecteurs de collaboration forment une paire ; une paire composée d’une part, du principe d’intelligibilité (section 1) et d’autre part, du principe d’interopérabilité (section 2).

Section 1 L’intelligibilité du réseau

63. – Collaboration et progrès. Collaboration et innovation, voilà deux mots qui,

dans l’esprit des bâtisseurs de l’ARPANET, raisonnent à l’unisson. Tel un écho, issu tout droit du siècle des Lumières, leur tintement est loin d’avoir laissé indifférents celles et ceux qui, dans le droit fil de Diderot et d’Alembert, étaient déterminés à élever l’édifice numérique. Animés par le profond désir d’innover, il ne leur a fallu que peu de temps pour s’apercevoir que le succès d’une pareille entreprise tenait à leur capacité à collaborer. La découverte de cette relation de cause à effet ne date pas d’hier. Déjà, dans l’Antiquité, Aristote avait fait le lien entre le partage des idées et la marche en avant de la science57. Bien plus tard, c’est d’Alembert qui n’hésita pas à affirmer que le progrès repose sur l’« union » – c'est-à-dire la mise en commun et l’échange – avec nos semblables58. Ainsi, les pères fondateurs de l’ARPANET ont-ils été touchés par la même étincelle qui avait fait naître, chez les auteurs de l’Encyclopédie, l’envie de faire « changer la façon commune de penser »59. Comme le souligne Jacques Vallée, ces derniers se sont, en quelque sorte, investis de la mission de provoquer l’élaboration

57 Aristote affirme, en ce sens, que « le progrès ne vaut que s’il est partagé par tous ».

58 L’Encyclopédie s’ouvre de la sorte : l’« avantage à nous unir avec eux pour démêler dans la nature ce qui peut nous conserver ou nous nuire. La communication des idées est le principe et le soutien de cette union, et demande nécessairement l'invention des signes: telle est l'origine de la formation des sociétés avec laquelle les langues ont dû naître. Ce commerce, que tant de motifs puissants nous engagent à former avec les autres hommes, augmente bientôt l'étendu de nos idées, et nous en fait naître de très nouvelles pour nous, et de très éloignées, selon toute apparence, de celles que nous aurions eues par nous-mêmes sans un tel secours. » (D. Diderot et M. D’Alembert, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, édité par J. L. Pellet, Genève, 1750, Discours préliminaire, p. v).

d’« un nouveau contrat social fondé sur la Connaissance plutôt que la richesse,

conduisant vers une ère d’entente universelle et de paix »60. Pour y parvenir, c’est donc

la voie de la collaboration pour laquelle ils ont opté, ce qui s’est traduit par une mise en commun du savoir, à partir duquel l’édifice numérique a été édifié. Le réseau a, de la sorte, été construit de telle façon, que ses principes de fonctionnement soient portés à la connaissance de tous. Ses bâtisseurs avaient, en somme, pour ambition de rendre le système numérique intelligible.

64. – Notion d’intelligibilité. Par intelligible, il faut entendre, selon le dictionnaire

Robert, ce « qui est (plus ou moins) aisé à comprendre »61. Pour Molière, par exemple,

« la parole est […] le plus intelligible de tous les signes humains »62. Ainsi, est

intelligible ce qui est accessible à la compréhension. Dire d’un système qu’il est intelligible n’implique pas que les principes qui régissent son fonctionnement peuvent être compris par tout un chacun. Cela signifie seulement qu’il existe suffisamment d’informations disponibles qui se rapportent à ces principes, pour qu’ils puissent être étudiés et appréhendés par l’esprit humain. La boisson gazeuse Coca Cola n’est, en ce sens, pas intelligible, dans la mesure où l’on ignore la formule chimique sur laquelle elle repose. À l’inverse, le plat culinaire que constitue le bœuf bourguignon peut être qualifié d’intelligible, sa recette étant largement diffusée. La notion d’intelligibilité apparaît très étroitement liée à celle d’accessibilité à l’information. Pour comprendre un code, un mécanisme, une langue, l’entendement humain a besoin d’un minimum d’informations, sans quoi cela lui est impossible. La découverte de la pierre de rosette par Champollion en est une illustration topique. Pour qu’une information soit accessible, non seulement elle doit exister, mais aussi il faut qu’elle ait été divulguée. C’est, manifestement, ce à quoi vont s’employer les bâtisseurs du réseau pour faire de lui un système intelligible.

65. – Absence de rapports hiérarchiques entres les chercheurs. Le réseau a,

certes, été conçu dans le cadre d’un projet mené à bien pour le compte du ministère de 59 Ibid., p. vii.

60 J. Vallée, op.cit. note 9, p.70.

61 A. Rey et alii, Dictionnaire culturel de la langue française, éd. Le Robert, 2005, vol. 2. 62 Molière, Mariage forcé, Acte 1, scène 6.

la défense des États-Unis. Pour autant, sa réalisation toute entière est le fruit du travail d’universitaires et non de militaires. Cette nuance n’est pas des moindres. Il en est résulté une approche bien particulière dans les rapports qu’ont entretenu entre eux les bâtisseurs de l’ARPANET. Les décisions prises quant à la conception du système, ne reposaient pas sur la position hiérarchique de leurs auteurs, mais sur la pertinence théorique de ce qu’ils avançaient. Comme le souligne, très justement, Patrice Flichy, « dans un monde scientifique […] la compétence l’emporte largement sur la

hiérarchie »63. Au même titre que l’architecture technique du réseau numérique, le

processus décisionnel qui lui était associé, revêtait également un caractère décentralisé, de sorte que tous ses participants étaient mis sur un pied d’égalité. Cette égalité s’est traduite par une pleine collaboration entre les chercheurs qui travaillaient au développement du réseau. Cette collaboration consistait surtout, dans le partage de leurs travaux, les décisions y afférant étant prises de manière consensuelle. Preuve de la grande volonté de ces derniers de pérenniser, autant que possible, cette manière de travailler. Elle ne faisait finalement que rejoindre celle déjà plébiscitée par les grands penseurs tout au long de l’histoire des sciences. Par un concours de circonstances, il a été décidé qu’elle devait être institutionnalisée.

66. – Formalisation des comptes rendus de réunion. Afin de bien comprendre en

quoi cette institutionnalisation a bien pu consister, il convient, dès à présent, de faire un saut dans le passé, et plus précisément, de revenir à l’été de l’année 1968. À cette époque, l’ARPANET n’était encore qu’à l’état de projet. Tout était à construire. D’où, l’organisation de nombreuses réunions entre chercheurs au cours desquelles était discutées des modalités techniques de mise en œuvre du futur réseau. Parmi ces réunions, l’une d’elles voyait se rassembler régulièrement de jeunes diplômés et des étudiants64. Il leur avait été confié la tâche de se pencher sur un point très précis de l’architecture du réseau. Comme habituellement dans toute réunion, certains de ces participants prenaient très scrupuleusement des notes sur ce qui était exposé. Ils rédigeaient, à la fin de chaque séance, des comptes rendus détaillés. De cette façon, ceux qui n’avaient pas pu assister aux réunions pouvait savoir ce qui avait été dit. En

63 P. Flichy, « Internet ou la communauté scientifique idéale », Réseaux, 1999, vol. 17, n°97, p. 90.

64 Il s’agissait du Network Working Group. Cette organisation comprend des représentants de quatre université que sont l’université de Californie à los Angeles, l’université de Stanford, l’université de Californie à Santa Barbara et enfin l’université d’Utah.

outre, il resterait une trace écrite – pouvant donc être diffusée – des conclusions et décisions issues des débats. Ainsi, le cheminement intellectuel suivi par le groupe et sa position sur les points techniques qu’il discutait, faisait l’objet d’une restitution fidèle. Ayant conscience de la portée, somme toute limitée, de ces travaux au sein de la communauté des informaticiens compte tenu, entre autres, du jeune âge et du manque d’autorité des différents membres du groupe, l’un d’entre eux, Steve Crocker, prend l’initiative, en avril 1969, de formaliser les réflexions menées au sein de son groupe, dans l’espoir de leur conférer un peu plus de poids.

67. – Les RFC. Son idée est très simple65 : chaque compte rendu de réunion doit

être intitulé Request For Comment (appel aux commentaires), numéroté pour être archivé et rédigé selon des critères bien précis. Comme le mentionne le troisième

Request For Comment (RFC), ces documents « peuvent être produits sur n’importe quel site par tous ceux qui le veulent »66. Il y est, par ailleurs, précisé que leur contenu peut

être constitué de « réflexions philosophiques abstraites, ou de descriptions précises, de

suggestions spécifiques ou de mises en œuvre de dispositifs techniques sans introduction ou explication du contexte, ou enfin de questions explicites sans tentative de réponse »67. Force est de constater que le système de notes envisagé par Steve Crocker

est très ouvert, ce qui, incontestablement, a intéressé nombre de chercheurs et d’utilisateurs du réseau. Ils se sont dès lors empressés de l’adopter. Par le biais de ce dispositif, ils voyaient là un formidable moyen de « promouvoir l’échange et la

discussion, au détriment des propositions autoritaires »68. Aussitôt que les RFC ont été

instaurés, leur publication a été soumise au respect d’une procédure très stricte au cours de laquelle les décisions étaient toujours prises de concert. Cette collégialité, entourant le processus d’élaboration de ces écrits, dont le nombre ne va cesser de croitre jusqu’à aujourd’hui69, reflète le souci des bâtisseurs de l’ARPANET de collaborer et de vouloir doter le réseau d’une base de documentation technique, afin que se crée une certaine uniformisation de ses principes architecturaux. Pour chaque innovation qui améliore le réseau un RFC sera, de la sorte, rédigé.

65 Pour une étude détaillée des RFC V. C. Huitema, Et Dieu créa l’internet, Eyrolles, 1996, 216 p. 66 S. Crocker, Documentation conventions, RFC 3, avr. 1969, Disponible sur : http://tools.

ietf.org/html/rfc3. 67 Ibid.

68. – Plan de construction du réseau. Plus qu’une simple ressource documentaire,

les RFC constituent, « une extraordinaire mémoire du processus de construction

collectif et d’évolution du réseau »70. Ils sont, en quelque sorte, devenus les plans de son

architecture. En soi, il n’est rien d’étonnant à ce que l’ARPANET ait été réalisé selon des plans. C’est là, le propre de tout ouvrage d’une telle ampleur. Ce qui devient étonnant, en revanche, c’est que ces plans n’ont pas été esquissés par la main d’un seul homme, un architecte, mais par une communauté d’hommes, celle des arpanautes. L’usage de ces plans a, par ailleurs, été laissé à la libre disposition de tous, alors que, habituellement, de tels documents sont précieusement conservés par leur auteur qui, bien souvent, préfère garder jalousement le secret technologique qu’ils renferment, de peur de le voir exploité par d’autres. Dans le cas des RFC, c’est tout l’inverse qui s’est produit. Cette documentation a, justement, été mise en place pour que les principes techniques sur lesquels repose le réseau, puissent être étudiés, améliorés et utilisés par quiconque en manifesterait l’envie ou le besoin. Ainsi, les bâtisseurs de l’internet ont-ils rendu le système qu’il constitue intelligible. En œuvrant de la sorte, sans doute avaient- ils en tête que la collaboration à laquelle ils s’étaient livrés pour poser les premières pierres de l’édifice numérique, se perpétue dans le futur. Leur philosophie rejoignait donc celle de Diderot et d’Alembert pour qui, le moteur du progrès réside dans la collaboration. Cette collaboration à laquelle se sont adonnés les bâtisseurs du réseau est sans nul doute à l’origine du succès qu’ils allaient embrasser quelques années plus tard, notamment lorsque tous les réseaux qui s’étaient déployés à côté de l’ARPANET sont devenus suffisamment interopérables entre eux pour former un réseau de réseaux.

69 On recense, à l’heure actuelle, près de 6873 RFCs, la dernière ayant été publiée en février 2013. Disponible sur : http://abcdrfc.free.fr/ressources-vf/Titres.html.

70 M. Elie, « Témoignage sur l’Internet et les réseaux », Entreprises et histoire, 2002/1, Vol. n°29, p. 56.

Section 2 L’interopérabilité du réseau

69. – Réunir ce qui est épars. Quel meilleur instrument que le réseau pour créer de

l’unité là où il y a de la diversité ? Le propre du réseau, n’est-il pas de réunir, au sein d’une même entité, ce qui, par nature, est disjoint ? En projetant de rassembler l’Humanité toute entière en recourant au concept de réseau, les bâtisseurs de l’ARPANET ont, probablement, enclenché un processus qui a conduit l’Homme à s’approcher comme jamais il ne l’avait fait auparavant, de la concorde universelle. Cette unité, générée par le réseau numérique, ne s’est, d’ailleurs, pas réalisée au seul niveau humain, mais sur plusieurs autres plans : ceux de la connaissance, des nations, des cultures et plus généralement tout ce qui se décline au pluriel, l’important étant d’être raccordé au système. C’est là, la condition essentielle, pour qu’un réseau engendre de l’unité. Pour que celle-ci s’accomplisse, il est absolument indispensable que ledit réseau s’étende partout où se trouve ce qui, par lui, doit être unifié. Il doit, en d’autres termes, être ubiquitaire, car meilleure est l’ubiquité d’un réseau, plus grande est l’unité qu’il est susceptible d’engendrer. S’agissant du réseau ARPANET, cela supposait qu’il enlace la surface du globe de toutes parts. C’est la raison pour laquelle, ses pères fondateurs n’ont pas cherché à relier entre eux les seuls chercheurs. Pour eux, il est apparu comme relevant de l’ordre naturel des choses que le réseau, imaginé par Licklider, devait, à mesure de son développement, tendre vers l’unification de tous les êtres humains afin que, progressivement, se forme une « supercommunauté »71. Bien que la création de celle-ci se soit, rapidement, imposée aux yeux de tous comme une évidence, encore fallait-il que les administrateurs des différents réseaux qui s’étaient déployés sur le territoire des États-Unis, acceptent de collaborer entre eux, d’une part, et que, d’autre part, cette collaboration puisse se traduire techniquement, ce qui était loin d’être chose aisée.

70. – Notion d’interopérabilité. Curieusement, la plus grande difficulté rencontrée

par les bâtisseurs de l’internet n’a pas été de convaincre les exploitants d’infrastructures réseautiques de collaborer pour construire un réseau de réseaux, mais plutôt de faire en

sorte que les machines qu’ils avaient pour ambition d’interconnecter, soient en mesure de communiquer. À l’époque, leur hétérogénéité était telle, qu’elle constituait un redoutable obstacle quant à leur mise en réseau. Les systèmes d’exploitation et les langages de programmation utilisés, variaient grandement d’un ordinateur à l’autre. Pour les informaticiens, se posait alors la question de leur interopérabilité. Qu’est-ce que l’interopérabilité ? Elle se caractérise par « la capacité de plusieurs éléments à

effectuer une forme quelconque de communication entre eux »72. Plus précisément,

l’interopérabilité peut être définie comme « l’aptitude de deux ou plusieurs organes,

logiciels ou systèmes ayant des fonctions complémentaires à opérer ensemble grâce à l’utilisation de standards communs »73. Le premier défi à relever par les concepteurs de

réseaux informatiques à l’époque, consistait à trouver un moyen de faire interopérer les ordinateurs entre eux, de manière à ce qu’ils ne forment qu’un seul et même système. Comme le rapportent Katie Hafner et Matthew Lyon, c’est un dénommé Wes Clark qui, en quelques coups de crayon, résolut cet épineux problème que constituait l’interopérabilité. Faisant remarquer à Larry Roberts que le réseau ARPANET, tel qu’il avait été envisagé, était pensé « à l’envers »74, ce brillant ingénieur lui exposa, par le

biais d’un schéma très synthétique, l’idée selon laquelle, il n’était pas opportun de relier directement entre elles les machines des utilisateurs. Pour lui, il était nécessaire que s’intercalent entre ces machines, dits hôtes, des ordinateurs, dont la fonction serait de servir, entre autres, de traducteur, permettant ainsi, à deux machines n’utilisant pas le même langage, de dialoguer. Clark préconisait, en ce sens, la création d’un sous-réseau, qui jouerait le rôle d’interlocuteur unique, avec lequel les ordinateurs hôtes communiqueraient et, à l’intérieur duquel, toutes les machines parleraient le même langage.

71. – Un réseau de réseaux. En adoptant cet astucieux montage qui,

immédiatement, conquit Larry Roberts, la difficulté de l’interopérabilité allait pouvoir être, pour partie, surmontée. Pour partie seulement, car elle réapparaitra quelques années plus tard lorsque, jouissant d’une renommée mondiale – du moins au sein de la communauté scientifique –, se posera la question de l’interconnexion de l’ARPANET

72 F. Duflot, « L’interopérabilité dans tous ses états », in S. Lacour (dir.), La sécurité aujourd’hui dans la société de l’information, L’harmattan, 2007, pp. 239 et s.

73 P. Morvan (dir.), Dictionnaire informatique, éd. Références Larousse, 1996. 74 K. Hafner et M. Lyon, op. cit. note 21, p. 87.

avec d’autres réseaux. Toujours plus animés par l’envie d’étendre ce réseau numérique de façon à ce que ses ramifications s’étendent au-delà de l’enceinte de la DARPA, l’idée de réaliser un réseau de réseaux vient, progressivement, à l’esprit de ses géniteurs. Pour ce faire, cela supposait que les différents systèmes que l’on ambitionnait de relier entre eux soient interopérables. Le premier à s’être sérieusement intéressé à la question, est Bob Kahn, recruté par Larry Roberts, au milieu de l’année 1972, afin de promouvoir l’ARPANET, notamment à l’occasion de la fameuse conférence de Washington qui allait se tenir en octobre 197275. Prêtant une attention particulière au

phénomène de multiplication des réseaux de communication, tel le réseau satellite SATNET76, le réseau radio ALOHANET77 ou encore les systèmes d’informations

voyant le jour à l’étranger78, Bob Kahn ne peut s’empêcher de tirer les conclusions qui

s’imposaient : tous ces réseaux qui fleurissent un peu partout reposent, sans exception, sur les principes de la commutation par paquet, de sorte que s’offre là une formidable opportunité de les relier les uns aux autres. Ce sentiment fut très largement partagé par les participants de la conférence de Washington, déterminés à construire « un réseau

international de réseaux »79. Leur volonté de collaborer était dorénavant officialisée.

Restait à œuvrer, afin de mettre techniquement en œuvre cette collaboration.

72. – Le protocole TCP. Preuve de l’enthousiasme des différents exploitants de

réseaux, une fois la conférence terminée, l’ambition qu’elle avait fait naître chez eux, se concrétisa aussitôt par la formation d’un groupe de travail désigné par l’acronyme INWG (International Network Working Group) dont la direction est assurée par l’universitaire Vinton Cerf. En très étroite collaboration avec ce dernier, Bob Kahn, soutenu par Larry Roberts, commence, dans ce contexte, à réfléchir à un moyen d’interconnecter des réseaux dans lesquels le langage de communication, quant à la commutation par paquets – langage que l’on appelle protocole – était différent de celui

75 Ibid. p. 207 et s.

76Le réseau SATNET est le premier réseau satellite qui repose sur le principe de commutation par paquets.

77Le réseau ALOHANET, que l’on appelle aussi ALOHA, était, à l’origine, un système développé à l'université d’Hawaii. D'abord déployé, en 1970, par Bruce Rights, pour permettre les transmissions de données par radio entre les îles, ses principes de base ont été repris pour élaborer l’Ethernet, protocole de réseau local à commutation de paquets.

78 En France va naître le réseau RENATER, en Grande Bretagne le système JANET. En Allemagne sera créé le réseau DFN. Pour plus de détails V. infra, n°361 et s.

utilisé par l’ARPANET80. Cette réflexion qui débuta, dès le début de l’année 1973, est conduite dans le cadre de l’Internetting project. Afin de mener à bien cette entreprise, une seule option s’offre aux deux informaticiens : élaborer un langage commun à tous les réseaux, sans qu’il en résulte une quelconque modification de leur fonctionnement, chacun d’eux étant optimisé pour un environnement qui leur était propre. Non sans