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ETUDE PETROGRAPHIQUE ET CLASSIFICATION

I. Principes de la classification

Dans cette étude pétrographique, j’attribue le statut d’échantillon à la fois aux bancs centimétriques à métriques, définis sur le terrain, et aux lits millimétriques à centimétriques définis à partir de l’étude des lames minces ; environ 720 échantillons ont ainsi été individualisés. Un lit ou un banc est décrit comme une unité lithologique homogène pour ce qui concerne la paragenèse quelle que soit son épaisseur. Les critères définissant une paragenèse sont à la fois minéralogiques (nature et abondance modale des phases) et texturaux (ordres de cristallisation, évidences d’équilibre ou de déséquilibre, etc.…). La réalisation d’une telle classification fut une tache ardue du fait de la diversité des lithologies échantillonnées et de la nature souvent transitionnelle des caractères pétrographiques permettant de définir la paragenèse.

Les roches décrites dans ce chapitre proviennent majoritairement de la base de la section crustale de l’ophiolite, située immédiatement au-dessus du Moho pétrologique, et, dans une moindre mesure, de la zone de transition. Ce sont essentiellement des cumulats lités ou laminés associés en moindre proportion à des faciès d’imprégnation (injection d’un magma partiellement cristallisé dans un autre) et à des intrusions (injection d’un magma dans une roche préexistante) parallèles ou transverses au litage des cumulats. Des péridotites mantelliques (dunite, wehrlite, harzburgite et lherzolite) ont été échantillonnées à la base de la section crustale de certaines coupes afin d’avoir des données chimiques de référence pour le manteau (09HIL1, 08MA35, 08MA34, 08NA01B, 08NA2A, 08NA1B). Ces échantillons ne sont pas décrits dans ce chapitre et les dunites, harzburgites et lherzolites dont il sera question ici sont tous des cumulats avérés. Les péridotites mantelliques se distinguent des péridotites cumulatives par leur texture porphyroclastique et leur fabrique de forme et de réseau. Cette distinction est relativement aisée sauf dans le cas de certains faciès dunitiques.

Pour classer mes échantillons j’ai décidé de ne pas me baser totalement sur la classification de Streckeisen (1976) qui ne prend en compte que les seuls pourcentages des minéraux majeurs de la roche. L’ordre de cristallisation des phases minérales étant essentiel dans la suite de mon étude, j’ai principalement basé ma classification sur l’occurrence et l’ordre d’apparition des minéraux constitutifs, cet ordre étant directement déduit de la texture des roches et de la morphologie des minéraux.

La texture des roches et la morphologie des phases minérales, décrites dans ce chapitre, sont basées sur la terminologie descriptive des cumulats d’Irvine (1982). Dans cette nomenclature le terme de cristal cumulus fait référence aux cristaux automorphes à sub- automorphes qui se forment lors d’une première étape de cristallisation et qui constituent la charpente du cumulat. Le terme de matériel ou cristal post-cumulus fait, quant à lui, référence aux cristaux qui cristallisent tardivement à partir d’un liquide intercumulus dans les interstices de la structure formée par les cristaux cumulus. Dans cette terminologie descriptive les textures font essentiellement référence au matériel post-cumulus. La texture orthocumulat est caractérisée par un matériel post-cumulus, souvent interstitiel, abondant (25 % - 50 % en volume), la texture mésocumulat est définie par un matériel post-cumulus moins abondant (7 % - 25 % en volume) et la texture adcumulat est caractérisée par une quantité mineure de matériel post-cumulus (0 % - 7 % en volume).

A partir de ces définitions j’ai donc réalisé ma classification en tenant compte de la présence ou de l’absence des différents minéraux cumulus et post-cumulus dans les échantillons (hors phases mineures : amphiboles, minéraux opaques). Deux grandes familles ont ainsi été définies : les roches gabbroïques caractérisées par les plagioclases et les minéraux ferromagnésiens en phase cumulus et les péridotites et pyroxénites définies par

l’absence de plagioclase en phase cumulus, les minéraux ferromagnésiens étant les seules phases cumulus. Les deux tableaux suivants montrent les principaux groupes de roches observés dans ces deux familles et font ressortir la logique de la classification. Pour ne pas surcharger les tableaux, toutes les lithologies n’ont pas été répertoriées. Lorsque plusieurs phases post-cumulus sont observées, j’ai indiqué la présence de ces phases en ajoutant leur nom après celui de la roche. Lorsque les phases post-cumulus ont une position particulière dans la séquence de cristallisation, j’ai précisé cette position dans le nom de la roche. Pour faciliter la description des roches, je vais utiliser les abréviations suivantes dans l’ensemble de ce chapitre : Plg = plagioclase, Cpx = clinopyroxène, Opx = orthopyroxène, Px = pyroxènes (Opx + Cpx), Ol = olivine.

Classification simplifiée des roches gabbroïques :

Cumulus Post- cumulus Plg Cpx - Plg Ol - Plg Opx - Plg Ol - Cpx - Plg Opx - Cpx - Plg Opx - Cpx - Plg - Ol

aucune - Gabbro* Troctolite* - Gabbro à

Ol* Gabbronorite* Gabbronorite à Ol* Ol - - - - - - Cpx - Troctolite à Cpx Norite - - - Opx Gabbro à Opx - - Gabbro à Ol et Opx - - Cpx - Opx Plagioclasite - Troctolite à 2 Px - - - -

Classification simplifiée des péridotites et pyroxénites :

* lithologies avec une classification particulière (voir dans le texte)

Pour les gabbros, gabbros à Ol, gabbronorites, gabbronorites à Ol et troctolites des sous-groupes ont été définis en fonction des proportions modales des minéraux cumulus (Ol et/ou Px et Plg). Des préfixes sont alors ajoutés au nom de la roche en fonction du pourcentage de Plg : leuco- quand Plg > 65 % et méla- quand Plg < 35 %. Ces sous-groupes vont faciliter la classification car le nom de la roche indique directement l’abondance relative des minéraux. Dans la description qui suit les différents sous-groupes sont étudiés en détails

Cumulus Post- cumulus

Ol Cpx Ol - Cpx Ol - Opx Cpx - Opx Ol - Opx - Cpx

aucune Dunite - Wehrlite* - - -

Ol - Clinopyroxénite à Ol - - - - Cpx Wehrlite* - - Harzburgite lherzolitique - - Opx - Clinopyroxénite à Opx Wehrlite à Opx - - - Plg Dunite à Plg Clinopyroxénite à Plg Wehrlite à Plg - Webstérite à Plg Lherzolite à Plg

pour les gabbros à Ol car cette lithologie est la plus abondante ; elle correspond à plus de la moitié de mes échantillons (cf. tableau 1.2). Pour les gabbros, gabbronorites, gabbronorites à Ol et troctolites, lithologies moins abondantes, les sous-groupes n’ont pas été détaillés dans ce chapitre mais apparaissent dans le tableau de synthèse (tableaux 1.1 et 1.2).

Les wehrlites qui correspondent aux roches à Cpx et Ol apparaissent deux fois dans le tableau. Dans la logique de ma classification une wehrlite est une roche à Cpx + Ol en phase cumulus. Cependant dans la littérature sur l’ophiolite d’Oman, le terme wehrlite fait généralement référence à des roches à Ol automorphes/sub-automorphes et à Cpx poecilitiques donc post-cumulus. J’ai donc décidé de mettre le même nom dans ma classification générale mais en faisant la distinction entre « wehrlite à Cpx précoce » et « wehrlite à Cpx tardif ».

Pour chaque groupe la séquence de cristallisation sera donnée sous la forme suivante :

(V –) V + W (+ X) – V + X + Y – Z {A}

Dans cet exemple, V et W sont les minéraux cumulus et X, Y et Z sont les minéraux post- cumulus. Le symbole " – " montre les différentes étapes de la cristallisation et le symbole " + " signifie que les phases co-cristallisent donc dans l’exemple V-W et V-X-Y sont contemporains, le minéral cumulus V a une cristallisation étalée dans le temps et le minéral post-cumulus Z est plus tardif que X et Y. Le symbole " ( ) " signifie que le ou les minéraux cristallisent parfois plus précocement, donc dans l’exemple le minéral cumulus V est parfois plus précoce que W et le minéral post-cumulus X se forme parfois en fin de cristallisation des minéraux cumulus. Le symbole " { } " indique le ou les minéraux issus de réaction sub-solidus (hors exsolutions).