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L’étude des déformations plastiques de hautes températures (foliations, linéations, textures et sens de cisaillement) dans les harzburgites mantelliques du massif de Sumail a Figure 6 : Modèles d’accrétion de la croûte océanique inférieure d’après Korenaga et Kelemen (1998) : a) modèle “gabbro-glacier” ; b) modèle hybride ; c) modèle “sheeted sill”. Les sills sont illustrés en noirs, les flèches fines et épaisses indiquent respectivement le fluage magmatique et le transport des magmas. Pour plus de détails sur ces modèles voir le texte et les références associées.

permis de caractériser un flux asthénosphérique ascendant entouré de zones à flux divergent dans la région de Maqsad reflétant la présence d’un ancien diapir asthénosphérique (diapir de Maqsad) (Ceuleneer, 1986 ; Ceuleneer et al., 1988 ; Nicolas et al., 1988a ; fig.7a). Ce diapir est allongé parallèlement à la direction de la paléo-ride océanique définie par l’orientation générale du complexe filonien (cf. paragraphe III.3.c).

L’étude pétrologique et géochimique des filons mantelliques recoupant le manteau dans cette zone de remontée diapirique (Ceuleneer et al., 1996 ; Benoit, 1997 ; Benoit et al., 1999 ; fig.7a) et dans l’ensemble de l’ophiolite (Python, 2002 ; Python et Ceuleneer, 2003 ; Python et al., 2008 ; fig.7b) a mis en évidence deux points essentiels : 1) l’existence de deux familles de filons issues de magmas parents distincts : une série tholéiitique de type N-MORB (filons de troctolite, gabbro à olivine, gabbronorite pauvre en orthopyroxène et gabbro à oxydes) et une série provenant d’un magma parent plus siliceux et déprimé en éléments traces incompatibles, c'est-à-dire d’affinité andésitique (filons de pyroxénite, gabbronorite riche en orthopyroxène, diorite et tonalite - trondhjémite) (fig.7a-b) ; 2) la répartition non aléatoire des filons dans l’ophiolite : les troctolites et les gabbros à olivine, cumulats de haute température appartenant à la série tholéiitique, affleurent préférentiellement au niveau de certaines régions et indiquent des zones de remontée asthénosphérique tandis que les gabbronorites et les pyroxénites, cumulats de plus basse température appartenant à la série andésitique, affleurent dans la majorité de la section mantellique et sont quasi-absents dans ces zones diapiriques (fig.7b). Un modèle de fusion d’une lithosphère altérée par des fluides hydrothermaux (i.e. fusion hydratée) a été proposé pour expliquer les magmas d’affinité andésitique (Benoit et al., 1999). La répartition des filons dans le massif de Sumail, apportant une information sur la structure thermique du manteau indépendante des données structurales, confirme la présence d’un diapir asthénosphérique dans la région de Maqsad (fig.7a-b).

Figure 7 : a) Carte de répartition des faciès filoniens dans la section mantellique (zone en blanc) de la région de Maqsad (massif de Sumail) dans laquelle un diapir asthénosphérique fossile a été observé (d’après Ceuleneer et al., 1996). La section crustale inclue la zone de transition (zone grisée) ; les flèches indiquent le flux mantellique : les blanches les flux mantelliques divergents (périphérie du diapir) et les grisées les linéations mantelliques en dehors du diapir ; la double ligne noire indique l’orientation de la paléo-ride océanique. Pour plus de détail voir l’article. b) Carte de répartition des deux familles de filons mantelliques dans les différents massifs de l’ophiolite d’Oman (d’après Python, 2002 et Python et Ceuleneer, 2003). Le carré noir indique la région de Maqsad (fig. a) et le trait noir en pointillés souligne la paleo-ride médio-océanique.

(a)

Depuis les années 1980, de nombreuses études ont été réalisées sur la section crustale profonde de l’ophiolite (i.e. unité des cumulats lités) mais se sont essentiellement focalisées sur certains massifs ou sur certaines coupes particulières ; aucune étude globale ou comparative n’a été effectuée sur cette séquence à l’échelle de l’ophiolite, contrairement aux filons ou aux péridotites mantelliques (Python, 2002 ; Nicolas et al., 2000 ; Le Mée et al., 2004). En examinant en détail la littérature sur la section crustale profonde de l’ophiolite d’Oman, on constate que (cf. fig.8) :

− Dans certains massifs, cette séquence a été étudiée succinctement ou en détail à l’échelle du massif : Fizh (Smewing, 1981 ; Reuber, 1988 ; Adachi et Miyashita, 2003), Hilti (Ernewein, 1987 ; Ernewein et al., 1988 ; Reuber, 1991), Wadi Tayin (Hopson, 1981 ; Pallister et Hopson, 1981), Bloc Ouest du massif de Wuqbah (Quatrevaux, 1995), Aswad et Khor (Khawr) Fakkan (massifs situés dans les Emirats Arabes Unis ; Goodenough et al., 2010)

− Dans d’autres massifs, cette séquence a été étudiée en détail au niveau de certaines coupes types mais peu étudiée dans les autres zones du massif : coupe du wadi Abyad dans le massif de Nakhl (Browning, 1982 ; MacLeod et Yaouancq, 2000 ; Yaouancq, 2001), coupe du wadi Haymiliyah dans le massif de Haylayn (Dahl, 1984 ; Juteau et al., 1988 ; Lachize, 1993 ; Lachize et al., 1996 ; Yamasaki et al., 2006) et coupe du wadi Shafan dans le massif de Sarami (Smewing, 1981 ; Browning, 1982 ; Ernewein, 1987). Ces coupes ont été préférentiellement étudiées soit parce qu’elles ont des caractéristiques lithologiques particulières, soit parce qu’elles correspondent à de belles séquences cumulatives continues et complètes. − Dans certains massifs, cette séquence a été peu étudiée (massif de Sumail) ou n’a

fait l’objet d’aucune étude : Samad, Kawad, Ibra, Bahla, Bloc Est du massif du Wuqbah.

A partir de l’ensemble des études réalisées sur la section crustale profonde de l’ophiolite, à l’exception de celles effectuées sur certaines coupes particulières (e.g. le wadi Haymiliyah dans le massif de Haylayn et le wadi Ragmi dans le massif de Fizh), il est Figure 8 : Carte géologique simplifiée de l’ophiolite d’Oman localisant les différents massifs et les principaux wadis (i.e. cours d’eau). Seuls les massifs situés dans le sultanat d’Oman sont indiqués. Les coupes qui ont fait l’objet de nombreuses études sont illustrées par un trait gras.

généralement admis que les cumulats lités sont issus de la cristallisation fractionnée de magmas de type N-MORB dans la (les) chambre(s) magmatique(s).

L’étude comparative entre les filons mantelliques, i.e. chenaux d’alimentation des magmas du manteau vers la (les) chambre(s) magmatique(s), et les cumulats lités, i.e. produits de cristallisation des magmas dans le(s) réservoir(s) magmatique(s), met en évidence un paradoxe essentiel : les cumulats lités ont un magma parent de type N-MORB alors que les filons mantelliques présentent deux magmas parents distincts, un magma tholéiitique de type N-MORB et un magma déprimé d’affinité andésitique.

L’objectif principal de cette thèse est de réaliser une étude pétrographique, géochimique et structurale de la section crustale profonde, i.e. la zone de transition, l’unité des cumulats lités et les intrusions ultrabasiques, dans plusieurs massifs de l’ophiolite d’Oman (fig.8) dans lesquels cette séquence est soit non étudiée dans la littérature (Bloc Est du massif de Wuqbah chap.2 ; massif de Bahla chap.3), soit peu étudiée ou seulement localement (Bloc Ouest du massif de Wuqbah chap.2 ; massif de Sumail chap.4 ; massifs de Sarami et de Nakhl chap.6), soit relativement bien connue (massif de Hilti chap.5). A partir des connaissances actuelles sur l’ophiolite d’Oman et les rides médio-océaniques (cf. paragraphes précédents) et des travaux antérieurs réalisés sur les sections mantellique et crustale de la nappe ophiolitique, cette thèse a plusieurs objectifs et va tenter de répondre à un certain nombre de questions (chap.7) :

Objectif : Etudier la séquence crustale profonde dans les différents massifs de l’ophiolite, en particulier dans le massif de Bahla et dans le bloc Est du massif de Wuqbah qui sont situés au front de la nappe ophiolitique et, dans le massif de Sumail qui présente un diapir asthénosphérique fossile. Comparer cette étude avec les travaux antérieurs réalisés sur la section crustale profonde dans d’autres secteurs.

Questions : Quelles sont les caractéristiques pétrographiques, géochimiques et structurales de l’ensemble de la section crustale profonde de l’ophiolite d’Oman ? Existe-t-il une variabilité lithologique et/ou chimique au sein de la section crustale profonde à l’échelle des massifs et de l’ophiolite ? En particulier, l’étude des massifs situés en front de nappe (Bahla, bloc Est du massif de Wuqbah) va permettre de tracer une éventuelle évolution dans le temps des processus d’accrétion et de la nature des magmas alimentant la section crustale. Existe-t-il un lien entre la composition des cumulats crustaux et leur position paléo- géographique par rapport au diapir de Maqsad et donc par rapport à la paléo-ride océanique ?

Objectif : Comparer la pétrologie et la géochimie de la séquence crustale profonde (cette étude et les études précédentes) avec celles des filons mantelliques.

Questions : Est-ce que le magma parent des cumulats crustaux a réellement une composition de pure N-MORB ? Existe-t-il un lien entre la répartition des filons mantelliques et la composition des cumulats crustaux à l’échelle des massifs et de l’ophiolite ? Quelle est l’importance des fluides, et en particulier des fluides hydrothermaux, dans la genèse de la section crustale profonde ? Les chambres magmatiques jouent-elles vraiment le rôle de « mélangeurs » qu’on leur attribue souvent ?

Objectif : Etudier la pétrologie et la géochimie des cumulats lités à différentes échelles : à l’échelle de l’ophiolite (~ 500 km de long), à l’échelle de coupes métriques à kilométriques (1 m à 2 km) et à l’échelle de la lame mince (3 - 6 cm). Questions : Quels sont les processus affectant les magmas et/ou les cumulats dans

la (les) chambre(s) magmatique(s) ? Comment se construit l’unité des cumulats lités ?

Objectif : Etudier la zone de transition à la base de la séquence cumulative et les intrusions ultrabasiques recoupant cette dernière afin d’infirmer ou de confirmer les hypothèses invoquées dans la littérature pour expliquer la formation de ces unités (cf. paragraphe III.2 et III.3.e).

Questions : Quels sont les processus ayant lieu dans la zone de transition, autrement dit, les dunites transitionnelles sont-elles uniquement résiduelles ? Est- ce que les intrusions ultrabasiques sont contemporaines de l’accrétion océanique, c'est-à-dire de la cristallisation des cumulats lités, ou du détachement intra- océanique, c'est-à-dire co-génétiques avec les laves V2 ?

Objectif : Etudier les caractéristiques structurales de la section crustale profonde dans certaines zones fortement tectonisées de l’ophiolite (e.g. massifs de Bahla et de Sumail).

Question : Quelle est l’importance des processus tectoniques dans la construction de la croûte océanique ?

Objectif : Apporter de nouvelles contraintes sur le contexte géodynamique de l’ophiolite d’Oman (paragraphe II) à partir des résultats obtenus sur la section crustale profonde couplés aux études antérieures réalisées sur les différentes unités lithologiques de l’ophiolite d’Oman et aux travaux entrepris depuis de nombreuses années sur les centres d’expansion océanique et les ophiolites.

Questions : L’ophiolite d’Oman se forme t-elle dans un contexte de zone de subduction (modèle 2, fig.2a-d) ou de ride médio-océanique (modèle 1, fig.2a-c) ? L’ophiolite d’Oman correspond-elle réellement à une dorsale rapide ?