La fluorescence X est une technique non-destructive d'analyse utilisée pour identifier les éléments
présents dans des échantillons solides, liquides ou en poudre et en déterminer les concentrations. Le
spectromètre XRF mesure les longueurs d'onde individuelles des composants dans l'émission
fluorescente produite par l’échantillon lorsqu'il est irradié par des rayons X. Par cette technique nous
avons évalué en 2D la présence des éléments chimiques suivants : Al, As, Br, Ca, Fe, K, Mn, P, Pb,
Rb, S, Si, Sr, Ti, V, Zn, Zr à l’aide d’un Bruker M4 TORNADO équipé d’un tube à rayon X Rh à
50 kV et 300 µA disponible à l’IFSTTAR de Nantes. Les mesures obtenues à l’issue de cette analyse
sont semi-quantitatives, correspondant à des variations relatives de chaque espèce chimique.
3.3. Etude d’un bloc de sédiment du Bassin d’Arcachon (juillet 2013)
par microfluorescence X
3.3.1. Site d’étude
Le sédiment a été prélevé en juillet 2013 sur la partie fortement végétalisée de Germanan, station de
référence localisée au centre du Bassin d’Arcachon (Figure 1, chapitre 1). Le gel 2D a été déployé
pendant 14 h environ avant de réaliser le prélèvement du sédiment en vis-à-vis. Une fois sorti du
sédiment puis redimensionné, l’ensemble tranche de sédiment + gel 2D a été congelé dans de la
carboglace puis transporté à l’IFSTTAR de Nantes. L’analyse a été effectuée sous vide et à
température ambiante sur le bloc congelé. Il est ainsi important de noter que l’on observe un passage
en phase liquide au centre des images ce qui atténue le signal en cette zone. De plus, les images en
lumière naturelle présentées dans les figures 5 à 7 ont été réalisées à la fin de l’analyse par
microfluorescence X et laissent apparaître des marques de dessication qui ont empêché une analyse
plus détaillée du sédiment.
3.3.2. Résultats préliminaires et discussion
L’analyse par microfluorescence X du sédiment a été réalisée en trois étapes : une grande image du
sédiment à la résolution de 500 µm n’incluant pas l’interface (Figure 5) ; une image de la surface à la
résolution de 200 µm (Figure 6) et une image ciblant une structure à plus haute résolution (25 µm ;
Figure 7).
Au centre des images de la figure 5 une zone de givre est observée, venant perturber les images des
éléments chimiques par une zone sombre au centre. Néanmoins, la figure 5 permet de distinguer des
structures verticales importantes se réduisant progressivement avec la profondeur. Le prélèvement de
sédiment permet de montrer dans un premier temps qu’aucun entraînement de feuilles en profondeur
n’est visible lors du déploiement des gels 2D. En revanche des structures peut apparentes à l’œil nu et
ne correspondant donc pas à un entraînement de feuilles ou des racines depuis la surface, sont
observables sur les analyses de l’Al, du Ca, du Fe, du K, du S, du Si, du Ti et du V (Figures 5 à 7). Ces
structures peuvent correspondre à un système racinaire en place ou à une activité de bioturbation non
affleurante. Des structures liées à la macrofaune sont également visibles à l’œil nu et notamment la
présence d’un mollusque bivalve observable principalement en haut à droite de l’image après analyse.
Un transect réalisé sur l’image de la figure 7 permet d’étudier le comportement de chacun des
éléments précédents et notamment la réponse du Fe, du Ca et du S (Figure 8). Différentes réponses
quant à la présence d’une bioturbation sont observables selon les espèces chimiques. Le transect du Ca
présente deux augmentations successives respectivement à 1,4 et 1,6 cm du début du transect. A
l’inverse une diminution du Fe et du S sont visibles à environ 1,5 cm du début du transect. La présence
d’une structure en profondeur, qu’elle soit issue d’une bioturbation animale ou d’une racine, entraîne
une réoxydation et une remobilisation des phases solides de Fe ainsi que du S comme le décrivent par
exemple Hebert et Morse (2003), Sundby et al. (2003), Deborde et al. (2008) et Delgard et al. (2013).
L’oxydation a lieu au centre de la structure. Les oxydes de fer sont alors réduits en Fe(II) lorsque
l’oxygène est consommé. Afin d’étudier cet enrichissement en fer dissous autour des racines dans la
phase dissoute, la figure 9 présente un gel DET 2D déployé en mai 2011 à Germanan (Bassin
d’Arcachon) pour l’analyse du fer dissous. L’objectif initial était de comparer le dissous et le
particulaire sur des échantillons prélevés simultanément mais le gel correspondant a été mal conservé
et donc perdu. Cependant la structure analysée sur le DET est très semblable à la structure décrite en
négatif sur le solide servant ainsi d’analogue dissous. Une image de la distribution de H
2S a également
été obtenue lors de ce déploiement, donc correspondant exactement à la distribution des sulfures en
face du sédiment analysé. La réalisation d’un profil horizontal, recoupant une structure racinaire ou
une bioturbation animale, permet d’étudier la distribution du fer dissous et de H
2S. H
2S présente un
minimum au centre de la structure à 24 mm du début du transect tandis que le Fe(II) possède deux
zones à fortes concentrations correspondant aux bords de la structure. Au centre de cette structure, la
concentration en Fe(II) diminue atteignant un minimum local à 24 mm du début du profil horizontal.
Ce profil est typique de séquence diagénétique dans la phase dissoute : les produits de la diagenèse
précoce comme le Fe(II) et les H
2S se forment autour de la structure en profondeur, le Fe(II) est
ensuite très rapidement piégé par les sulfures à mesure que l’on s’éloigne du centre de la structure et
que le H
2S est présent (Azzoni et al. 2001 ; Hebert et Morse 2003). Cette distribution avec un déficit
en H
2S dans la structure peut être observée également sur les figures 5 à 7 où une image de H
2S est
représentée.
L’augmentation en Ca sur les bords de la structure de bioturbation pourrait être associée soit 1) à une
précipitation de carbonate de calcium en raison d’une augmentation du pH aux abords de la structure
ou 2) à la présence plus en profondeur de coquilles calcaires telles que celles de certains foraminifères
benthiques. Ainsi selon la nature de la structure observée, la présence de coquilles calcaires pourraient
provenir 1) d’un entraînement des coquilles par l’action d’un organisme bioturbateur ou 2) de
microhabitat privilégié pour les organismes avec coquille calcaire par les microniches oxiques
avoisinantes les racines des herbiers.
Figure 5 : Distribution 2D de H2S, photographies et traitement pour la zone encadrée en rouge par microfluorescence X de la tranche de sédiment prélevée dans l’herbier de Zostera noltei du Bassin d’Arcachon pour différentes espèces chimiques. Le quadrillage observé sur la photographie en lumière artificielle et sur l’image noir et blanc (N&B) correspond à une sous-division artificielle réalisée par la microfluorescence X. Pour échelle de quantité : plus la coloration est marquée, plus la quantité de l’élément chimique est importante.
Figure 6 : Distribution 2D de H2S, photographies et traitement pour la zone encadrée en rouge par microfluorescence X de la tranche de sédiment prélevée dans l’herbier de Zostera noltei du Bassin d’Arcachon pour différentes espèces chimiques. Le quadrillage observé sur la photographie en lumière artificielle et sur l’image noir et blanc (N&B) correspond à une sous-division artificielle réalisée par la microfluorescence X. Pour échelle de quantité : plus la coloration est marquée, plus la quantité de l’élément chimique est importante.
Figure 7 : Distribution 2D de H2S, photographies et traitement pour la zone encadrée en rouge par microfluorescence X de la tranche de sédiment prélevée dans l’herbier de Zostera noltei du Bassin d’Arcachon pour différentes espèces chimiques. * correspond au tracé du profil horizontal pour la figure suivante. Le quadrillage observé sur la photographie en lumière artificielle et sur l’image noir et blanc (N&B) correspond à une sous-division artificielle réalisée par la microfluorescence X. Pour échelle de quantité : plus la coloration est marquée, plus la quantité de l’élément chimique est importante.
Figure 8 : Transects des espèces chimiques suivantes :Al, As, Br, Ca, Fe, K, Mn, P, Pb, Rb, S, Si, Sr, Ti, V, Zn, Zr. Le tracé du transect est représenté sur l’image de la tranche de sédiment ainsi que sur la figure précédente par un astérisque.
Figure 9 : Distribution 2D et profil horizontal du H2S et du Fe(II) des eaux porales de sédiment colonisé par l’herbier de Zostera noltei du Bassin d’Arcachon prélevé en mai 2011. Le trait plein horizontal représente le profil réalisé pour le graphique du dessous ; le trait en pointillé correspond à l’interface eau-sédiment.