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2.5 Technique d’extraction au point trouble (CPE)

2.5.1 Principe de l’extraction au point trouble

méthodes instrumentales modernes. Rappelons que les normes de Santé Canada concernant les rejets d’uranium et de plutonium dans l’eau potable sont de 20 µg/L et de 0,004 µg/L respectivement. De plus, les limites de détection de l’ICP-MS varient entre 0,01 et 0,6 ng/L. [56]

Au regard de ces informations, les limites de détection sont inférieures aux normes pour l’eau potable. Toutefois, comme expliqué précédemment ce n’est pas la totalité de l’uranium et du plutonium rejetée dans l’eau qui est biodisponible pour les poissons. Seulement une certaine quantité sera assimilée et cette quantité sera inférieure à celle présente dans le lac. En plus, les matrices de ces échantillons contiennent des concentrations élevées en interférents. Pour remédier à ce problème, une méthode utilisée en chimie analytique est celle de l’extraction au point trouble (CPE) qui permet d’extraire l’analyte cible et de le préconcentrer. La CPE est une méthode d’extraction analogue à la micro-extraction liquide-liquide dispersive (DLLME) puisqu’elle utilise également une phase organique micro-dispersée pour l’extraction. L’extraction au point trouble est basée sur la solubilité du surfactant non-ionique utilisé qui varie selon la température. [39] De plus, la CPE offre plusieurs avantages. Elle permet d’extraire une variété d’analyte provenant d’échantillon de différentes natures (sol, eau, biologique) avec des récupérations et des facteurs de préconcentration très élevés. La CPE est peu coûteuse et sécuritaire puisqu’une faible quantité de réactif est utilisée. Les surfactants non-ioniques ont une faible toxicité par rapport aux solvants organiques classiques et ils sont plus faciles à éliminer. [40]

2.5.1 Principe de l’extraction au point trouble

L’extraction au point trouble est basée principalement sur l’utilisation d’un surfactant non- ionique, de sa concentration et de sa solubilité en solution qui dépend de la température. L’une des principales familles de surfactant utilisée pour la CPE est celle du Triton X (Figure 11). Ces surfactants sont des molécules organiques amphiphiliques. Ils possèdent une chaîne de polyéthylène glycol hydrophile et un groupement aromatique hydrophobique leur permettant d’être à la fois soluble en solution aqueuse et dans un solvant organique.

En solution aqueuse et à une certaine concentration, les monomères de surfactant Triton X vont s’assembler entre eux pour former des micelles. Pour assurer la formation de micelle en solution, la concentration de surfactant doit excéder la concentration micellaire critique (CMC). [42] Cette concentration varie selon la structure du Triton X (tableau 2). Plus la chaîne hydrophile de la molécule est longue plus la CMC est élevée. Les micelles et les monomères en solution sont en équilibre dynamique (figure 12). Cet équilibre peut être favorisé en faveur de la formation de micelle en changeant la température de la solution.

Figure 12 : Formation de micelle en solution. [43]

À basse température, les micelles sont solubles en solution aqueuse. Avec l’augmentation de la température, la solubilité de celles-ci diminue et il y a formation d’agrégats de micelle insoluble. À ce stade, la solution va se séparer en deux phases distinctes soit la phase riche en surfactant et la phase aqueuse. La phase riche en surfactant qui représente un faible volume de la solution totale contient l’analyte à extraire si un agent d’extraction avec une bonne affinité pour l’analyte est ajouté au système. La température à laquelle se produit la séparation de phase se nomme la température au point trouble (CPT). [40, 42] Pour la famille du Triton X, cette température dépend du nombre d’unité oxyde d’éthylène présent dans la molécule (tableau 3). Plus le nombre d’unités augmente, plus la CPT augmente. L’ajout de surfactants ioniques et de sels peut également influencer la température au point trouble. [43]Il en sera discuté davantage dans la section suivante.

Tableau 3 : La température au point trouble et la concentration micellaire critique selon la longueur de la chaîne de polyéthylène glycol du Triton X. [44]

Triton X Nombre d’unité oxyde d’éthylène présent (n) CPT (°C) CMC (mg/L) X-114 7,5 25 120 X-100 9,5 66 189 X-102 12 88 267 X-165 16 ˃100 570

Cependant, le mécanisme lors duquel il y a formation de deux phases distinctes fait encore l’objet de débat. Plusieurs théories tentent d’expliquer la diminution subite de la solubilité du Triton X après avoir atteint la CPT. Selon la première, en augmentant la température, il y aurait accroissement de la taille des micelles suite à l’agrégation de celles-ci par collision. [45]

Selon la seconde théorie, puisqu’il devient entropiquement défavorable de stabiliser la forme hydratée des micelles, il y aurait déshydratation de ces dernières suite à l’augmentation de la température. [46, 47]

Afin de choisir la technique d’extraction au point trouble la plus adéquate possible pour l’extraction de l’uranium et du plutonium, plusieurs techniques de la littérature ont été comparées (voir tableau 4). Les CPE présentées au tableau 4 utilisent des surfactants de la famille du triton X soit le TTX-114 et le TTX-100 ainsi que différents agents extractants soit le H2DEH[MDP], le

D2EHPA, le TBP et le Br-PADAP. Les extractions avec le H2DEH[MDP], le D2EHPA et le Br-

PADAP permettent d’obtenir des efficacités d’extraction de plus de 97% tandis qu’avec le TBP seulement 55 % d’efficacité d’extraction est obtenue et cela pour des échantillons dont la matrice est aqueuse. Plusieurs CPE permettent donc une bonne récupération en uranium, mais la technique avec l’efficacité la plus élevée est celle du doctorant Charles Labrecque du groupe de recherche du professeur Larivière. L’utilisation du TTX-114 comme surfactant et du H2DEH[MDP] comme

agent d’extraction permet d’obtenir une efficacité d’extraction de l’uranium de 99 %. Pour ce qui est du plutonium, peu d’études sur l’extraction de ce radionucléide par CPE ont été menées. Toutefois, Labrecque et ses collègues ont démontré qu’il est possible d’obtenir des efficacités d’extraction de 98 % pour le plutonium et cela à partir de différents types d’échantillon, soit d’urine, de sol, d’eau de mer, d’eau potable, d’eaux usées et de sédiments. [52]

Il a donc été décidé d’utiliser cette stratégie de la CPE pour ce projet basée sur les travaux de Labrecque et ses collègues. L’extraction de l’uranium et du plutonium par CPE utilisant le TTX-114 et le

H2DEH[MDP] permet d’obtenir des efficacités d’extraction très élevées pour divers échantillons

environnementaux.

Tableau 4 : Comparaison de l’extraction de l’uranium et du plutonium par CPE de la littérature.

Analyte Surfactant d’extraction Agent Type de matrice

Efficacité d’extraction (%) Référence Uranium TTX-114 H2DEH[MDP] Eau naturelle, eaux usées 99 Labrecque et coll. [48]

Uranium TTX-100 D2EHPA Eaux usées 97

Sanaa et coll.

[49]

Uranium TTX-114 TBP Eau naturelle 55 Constantinou

et coll. [50]

Uranium TTX-114 Br-PADAP Eau naturelle 98 Ferreira et

coll. [51]

Plutonium TTX-114 H2DEH[MDP]

Sol, urine, eau de mer, eau potable,

eaux usées, sédiments

98 Labrecque et coll. [52]

2.5.2 Les réactifs utilisés et leurs rôles pour l’extraction de l’uranium et

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