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3.2 Gravure chimique humide

3.2.1 Principe de fonctionnement

Réactions chimiques

La microfabrication par gravure humide du GaAs est réalisée en milieu aqueux par une réaction chimique de gravure typiquement composée d’une réaction d’oxydo-réduction et d’une réaction de dissolution. Le bain de gravure est constitué d’un oxydant (Br2, HNO3, H2O2) qui oxyde la surface sur une profondeur de quelques nanomètres, d’un composant acide (H2SO4, H3PO4, HF, HCl, C6H8O7, HNO3) ou basique (NH4OH, NaOH) qui dissout la surface oxydée, et éventuellement d’un diluant (H2O, CH3OH) permettant une meilleure mobilité des particules et de grandes variations dans les vitesses de dissolution [93].

Deux phénomènes gouvernent la cinétique de la réaction : la diffusion des espèces chimiques dans les différents milieux et les réactions chimiques entre le substrat et le bain [94].

— Dans le cas d’un procédé limité par la diffusion, le temps mis par les espèces chimiques pour atteindre le fond de la tranchée détermine la vitesse de réaction globale. Si la ré-partition des espèces est homogène près de la surface à graver, la vitesse de gravure sera donc la même pour n’importe quelle orientation cristalline. La gravure suit un processus isotrope et lisse les surfaces attaquées car les excroissances sont plus exposées que les surfaces planes.

— Dans le cas d’un procédé limité par la réaction, c’est la cinétique de la réaction chimique entre les espèces qui influence la vitesse de gravure. De petites variations dans les pro-portions des réactifs peuvent entraîner de grandes variations de la vitesse de gravure. La gravure suit un processus anisotrope : selon la nature et la structure cristalline du matériau gravé les réactions chimiques peuvent être plus ou moins rapide en fonction des directions de gravure. Selon les réactions chimiques mises en jeu, les surfaces exposées peuvent être plus ou moins structurées et donc rugueuses [93].

64 CHAPITRE 3. GRAVURE PROFONDE DU GAAS De nombreux bains de gravure se situent entre ces deux extrêmes. Il est même parfois possible de passer de l’un à l’autre en changeant simplement les concentrations des produits chimiques. Une gamme variée de résultats est donc atteignable.

Anisotropie de la gravure

On a vu dans la section 1.3.2 que le GaAs est un matériau monocristallin avec un agencement des atomes particulier. L’absence de symétrie par rapport à un plan dans la maille cristalline du GaAs, qui produit notamment l’effet piézoélectrique, donne différentes propriétés chimiques aux deux familles de plans (111) : les plans (111)As terminés par des atomes d’arsenic, également appelés plans (111)B, et les plans (111)Ga, ou plans (111)A, terminés par des atomes de gallium. Lors d’une gravure anisotrope, les plans (111)As sont gravés plus vite que les plans (111)Ga [49]. Le lecteur intéressé trouvera plus de détails concernant les mécanismes de gravure chimique dans la référence [95].

En fait, on peut montrer que la vitesse de gravure décroît dans le sens (011) > (111)As > (001) > (111)Ga. Depuis une face (001) cela donne des flancs de gravure en forme de pyramide pour une tranchée dans la direction h110i et en forme de pyramide inversée dans la direction perpendiculaire h¯110i (voir figures 3.2 et 3.3) [45][96]. Le résultat est inversé pour une gravure depuis la face (00¯1).

À l’aide de considérations trigonométriques dans un tétraèdre régulier, figure formée par quatre atomes du même type au sein de la maille élémentaire, on peut calculer l’angle θ entre le flanc sortant, c’est-à-dire le plan dense (111)Ga, et la surface du wafer.

θ = arctan√ 2

54,73 (3.4)

Figure 3.2 – Schéma d’une gravure humide anisotrope d’un motif rectangulaire orienté selon les directions h011i et h01¯1i dans un wafer de GaAs (100) [97].

Sachant que dans le cas d’une gravure très anisotrope le plan le plus lent à graver est le plan (111)Ga, il est possible, si l’on connaît les vitesses de gravure verticale V(100) et du plan dense V(111)A, de calculer le rapport d’anisotropie A à partir des équations (3.3) et (3.4).

A= 1 − V(111)A

3.2. GRAVURE CHIMIQUE HUMIDE 65 Masque 〈100〉 〈110〉 〈1 10〉 125° 55° 125° 55°

Flancs rentrants Flancs saillants

Flancs saillants Flancs rentrants Flancs verticaux

Figure 3.3 – Schéma de la vue en coupe de gravures chimiques anisotropes du GaAs (001) suivant les directions h100i, h110i et h¯110i.

On constate que pour une tranchée dans la direction h100i ou h010i sur un wafer (001), les flancs présentent la même structure que la surface du wafer. Dans le cas d’une gravure anisotrope, ils sont verticaux mais se gravent à la même vitesse que le fond de gravure. Le rapport d’anisotropie vaut alors 0.

Caractéristiques

La gravure humide de matériaux cristallins possède plusieurs avantages. Elle est plutôt simple à mettre en œuvre puisqu’elle ne nécessite pas d’équipement complexe. Le protocole de fabrication consiste à mélanger les réactifs dans les bonnes proportions et à immerger le wafer recouvert d’un masque sur les deux faces pendant un temps déterminé dépendant de la vitesse de gravure du mélange et de la profondeur de gravure visée. Il faut également contrôler la température et l’agitation du bain. L’attaque étant purement chimique, la sélectivité du masque est très élevée si on choisit un matériau résistant à la solution de gravure. Certaines résines sont ainsi conçues pour résister à de nombreux acides. La rugosité des flancs dépend uniquement de la réaction chimique. Les gravures très anisotropes, surtout si elles ont une vitesse de gravure élevée supérieure à 15 µm.min−1, peuvent donner une surface rugueuse mais en général les surfaces sont plutôt lisses. La gravure humide permet donc de respecter les spécifications C1, C3 et C6 de la section 2.1 qui imposent un usinage collectif de tranchées profondes aux flancs lisses.

En revanche cette méthode est sujette à un inconvénient important pour la fabrication de MEMS : son profil de gravure et son facteur d’anisotropie sont dépendants de l’orientation de la tranchée par rapport à l’orientation du cristal. La solution de gravure gravera plus ou moins rapidement certaines directions selon la densité d’atomes des plans perpendiculaires, les plans denses ralentissant la gravure. Le profil de gravure dépend donc de l’orientation du plan du fond de gravure par rapport aux plans denses. Les défauts géométriques ainsi obtenus, des facettes au lieu d’angles droits par exemple, sont appelés figures d’attaque. Ces dernières contraignent l’architecture du MEMS puisque l’obtention de tranchées verticales ne peut se faire que pour certaines directions. Les spécifications C2 et C4 faisant références à des gravures sur wafer de GaAs (001) de tranchées verticales dans les directions h110i semblent donc difficiles à tenir.

66 CHAPITRE 3. GRAVURE PROFONDE DU GAAS