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B. La radiothérapie pour le cancer du sein

3. Principe et déroulement de la radiothérapie pour le cancer du sein

La possibilité de mettre en place une radiothérapie en tant que traitement contre le cancer fut possible suite au constat d’une différence de radiosensibilité entre les cellules saines et les cellules tumorales, ce qui a fait naître le concept de fenêtre thérapeutique [27]. L’objectif du radiothérapeute, lors d’une radiothérapie, est d’obtenir une dose cumulée générant le meilleur contrôle possible de la zone tumorale tout en restant à une probabilité acceptable de générer des lésions aux tissus sains. Le fonctionnement de la radiothérapie est détaillé

Figure 8.

Figure 8 : Le fonctionnement de la radiothérapie face au cancer

Au cours de la planification d’un traitement en radiothérapie, plusieurs volumes sont déterminés pour définir la zone à irradier. Le volume tumoral macroscopique (GTV, Gross Tumor Volume) correspond à la zone tumorale observable par imagerie (scanner ou IRM). Le volume-cible clinique (CTV, Clinical Target Volume) inclut le GTV ainsi que les extensions

38 tumorales infracliniques non détectables par l’imagerie (mais connue par l’évolution classique de la pathologie). Le volume-cible planifié (PTV, Planned Target Volume) prend en compte l’incertitude de positionnement ainsi que les potentiels mouvements des organes et du patient. Le volume traité est celui qui reçoit effectivement la dose de traitement et il doit ainsi correspondre au plus près au PTV. Une fois l’ensemble de ces éléments calculés, la zone irradiée correspond à la zone à traiter ainsi que les tissus à proximité recevant une dose partielle. On peut ainsi déterminer facilement les surfaces exposées à un certain pourcentage de la dose totale.

La détermination de ces volumes nécessaires pour traiter au mieux le volume tumoral est également indispensable pour protéger les organes à risques (OAR), c’est-à-dire les tissus sains proches de la tumeur. Leur tolérance respective à l’irradiation constitue la principale limite dans la détermination de la dose délivrable à la tumeur. Il est donc fondamental de connaître quels sont les tissus sains présents à proximité directe de la zone à traiter et quelles sont leurs tolérances respectives face aux rayonnements ionisants. Pour chaque protocole de radiothérapie, il faut donc identifier quels sont les organes potentiellement exposés aux rayonnements, quelles doses maximales ils peuvent supporter et quel est le volume de tissu concerné, ceci afin de restreindre au maximum les risques de toxicité.

Concernant la dose qui sera délivrée, celle-ci dépend de la nature du cancer et de l’association ou non de la radiothérapie à d’autres méthodes de traitement. Pour les cancers du sein, la gamme de dose classiquement utilisée est comprise entre 45 et 54 Gy selon une fréquence de 4 à 5 séances par semaine avec des fractions allant de 2 à 2,5Gy, le tout programmé sur plusieurs semaines.

Ainsi, d’importantes avancées en termes de balistique ont permis de diminuer considérablement le volume de tissus sains irradié lors du traitement en permettant de cibler précisément la tumeur et d’assurer un meilleur contrôle.

Ces dernières années, de grands essais cliniques ont changé les pratiques, notamment la définition des volumes cibles. Ces essais ont évalué l’intérêt de l’irradiation supplémentaire des aires ganglionnaires en cas de présence de nodules, en plus de l’irradiation classique du sein. Poortmans et al., dans l’étude EORTC portant sur 4004 femmes atteintes d’un cancer du sein [28], ont montré l’intérêt de l’irradiation systématique de la CMI et de l’irradiation

39 sus-claviculaire en cas de présence de nodules. En effet, à 10 ans, la survie globale était de 82,3% dans le groupe avec irradiation des aires ganglionnaires et de 80,7% dans le groupe témoin, tandis que le taux de survie sans maladie était de 72,1% et de 69,1% dans le groupe contrôle. Enfin, le taux de mortalité due au cancer du sein était de 12,5% contre 14,4% chez le groupe contrôle. Peu d’effets secondaires liés à cette irradiation supplémentaire étaient constatées. Dans l’étude MA.20 de Whelan et al., portant également sur une irradiation des aires ganglionnaires supplémentaires (1832 femmes) [29], le taux de survie sans maladie était de 82% dans le groupe irradié et de 77% dans le groupe témoins.

Le plus souvent, la radiothérapie du cancer du sein est une radiothérapie externe, dont la source d’irradiation est à l’extérieur du malade. La radiothérapie conformationnelle permet alors de délivrer la dose maximale sur la zone tumorale tout en minimisant la dose pour les tissus voisins. Plusieurs orientations de faisceaux (4 à 6) sont alors utilisées en les adaptant individuellement à la forme du champ d’irradiation et au volume tumoral.

Or, quand un faisceau de rayonnements ionisants traverse un tissu biologique, une partie de son énergie est absorbée, une autre partie se diffuse au reste des tissus et la dernière partie est transmise sans interaction avec la matière. Cette énergie provoque des ionisations ou des excitations électroniques dans les tissus biologiques.

L’action biologique des rayonnements ionisants se décline alors en 3 phases distinctes [30– 32] :

 Une phase physique de très courte durée correspondant à des ionisations et des ex-citations moléculaires faisant suite à la traversée du faisceau ;

 Une phase physico-chimique qui dure quelques secondes à quelques minutes. Pen-dant cette phase, les molécules ionisées et excitées lors de la phase précédente réa-gissent entre elles et avec les molécules voisines. On assiste alors à un effet direct sur les macromolécules comme l’ADN et indirect par l’intermédiaire des radicaux libres générés par la radiolyse de l’eau. On comprend ainsi mieux « l’effet oxygène » qui correspond à la plus grande radiosensibilité des cellules en présence d’oxygène du fait de la création de radicaux libres à fort pouvoir oxydant.

40  Une phase biologique qui apparaît comme la conséquence des radiations ionisantes sur les macromolécules et qui se traduit par une perturbation des principales fonc-tions cellulaires. On distingue ainsi l’action sur les acides nucléiques, les protéines et les lipides. Sur les acides nucléiques qui représentent la cible élective, on constate le plus souvent des cassures simple brin mais aussi des cassures simple brin avec gap, c'est-à-dire perte d’un sucre et d’une base, des altérations des bases et des cassures double brin. L’altération des protéines conduit à une altération de la perméabilité membranaire, une diminution de la communication intercellulaire et des modifica-tions de la transduction transmembranaire. Au niveau des lipides, on assiste à des peroxydations lipidiques ayant différentes conséquences telle qu’une diminution de la fluidité membranaire.

Cette action sur les différentes structures peut conduire à des lésions létales, non réparables d’emblée, à l’accumulation de lésions sublétales ou à la non-réparation de lésions potentiellement létales. Un paramètre simple permet de caractériser la radiosensibilité d’un tissu, il s’agit de la fraction survivante à 2 Gy (SF2). Plus la SF2 est grande, moins la lignée cellulaire est radiosensible. Généralement, moins la cellule est différenciée, plus elle est radiosensible. Pour une même lignée, la radiosensibilité est fonction de différentes caractéristiques cellulaires comme la position des cellules dans le cycle cellulaire, le degré d’oxygénation, le pH, le contenu en ADN, la teneur en glutathion et thiols, l’efficacité des systèmes de réparation des lésions radio-induites mais aussi en fonction de la technique d’irradiation et en particulier la nature du rayonnement, du fractionnement (nombre total de séances) et de l’étalement (durée du traitement) du débit de dose [30,31,33].

L’intérêt du fractionnement est multiple. Il permet la réparation des lésions dites sublétales qui deviennent létales en cas d’accumulation et facilite la repopulation, la réoxygénation du tissu tumoral et la redistribution des cellules. La réparation des tissus sains avoisinants peut s’initier grâce à ce fractionnement et ce beaucoup plus vite que dans les tissus tumoraux. C’est sur cet effet différentiel entre tissu sain et tumoral qu’est basée la radiothérapie.

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4. Irradiation du cœur au cours d’une