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L’objectif de ce deuxième chapitre était de tester la capacité du bactériome à répondre aux infections systémiques de la larve par des bactéries libres, afin de mieux comprendre les mécanismes immunitaires qui caractérisent ce tissu. Les expériences d’injection des larves par des bactéries pathogènes et de quantification des transcrits de gènes ont montré que l’expression des gènes codant des PAMs sont induits dans le bactériome en réponse à l’injection de bactéries à Gram négatif et à Gram positif. Ces résultats démontrent l’existence d’une réponse immunitaire inductible dans le bactériome, coexistant avec la réponse interne impliquée dans l’homéostasie symbiotique. Un des points les plus intriguants de cette réponse est l’induction, en cas d’infection, du gène codant pour la ColA. En conditions standard, ColA reste intracellulaire dans le bactériome (Login et al., 2011). Or, chez la drosophile, les PAMs produits lors de l’élicitation d’une réponse immunitaire systémique ou locale sont sécrétés par les tissus dans lesquels les gènes correspondants ont été induits (Lemaitre and Hoffmann, 2007). Le gène colA possède une séquence signal (Anselme et al., 2008), suggérant la sécrétion de sa protéine à la fin de sa synthèse. Si la sécrétion de ColA en cas d’infection se confirme, l’implication de ce gène à la fois dans la réponse interne et dans la réponse externe du bactériome soulève ra des questions quant à la gestion de cette séquence signal par la machinerie cellulaire et quant à la double localisation (intra- et extracellulaire) de ce PAM en conditions d’infection systémique.

Bien qu’impliquant les mêmes effecteurs (PAMs), la réponse du bactériome se différencie de la réponse systémique sur deux aspects : le niveau d’induction des gènes effecteurs est plus faible dans la réponse du bactériome, et un nombre plus restreint de gènes régulateurs montre un changement d’expression après infection de la larve. Elle se différencie également de la réponse immunitaire locale de l’insecte développée par l’intestin. Bien qu’impliquant l’induction des mêmes gènes, la réponse du bactériome est quantitativement plus faible que la réponse intestinale. Le fait que les gènes codant des effecteurs immunitaires soient maintenus à des niveaux d’expression plus faibles dans le bactériome que dans les autres organes en cas d’infection systémique suggère une régulation tissu-spécifique dans cet organe. Cette régulation, qui pourrait aussi

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92 impliquer des mécanismes épigénétiques, ou des signaux immuno-modulateurs provenant des endosymbiotes, reste à analyser.

Aucune différence de nombre de symbiotes ou de structure du bactériome n’a pu être détectée entre les larves infectées par D. dadantii et les larves contrôle. Ceci suggère que, dans nos conditions expérimentales, le bactériome est capable de générer une réponse inductible en cas d’infection sans altérer le contrôle immunitaire interne dirigé contre les endosymbiotes. En tant qu’organe immunoactif, le bactériome ne se limiterait donc pas à une fonction de confinement intracellulaire des endosymbiotes, mais également à une fonction de protection de ces derniers contre les agressions extérieures.

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C

HAPITRE

3

L

A DYNAMIQUE ENDOSYMBIOTIQUE

DE L

INTESTIN ADULTE EST

ASSOCIEE A UN BRIDAGE DE

L

IMMUNITE

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1. Introduction à l’étude

La larve de S. oryzae présente une symbiose « stable ». Le nombre d’endosymbiotes augmente sensiblement au cours des quatre stades larvaires, mais l’état morphologique et cellulaire du bactériome demeure relativement stable. Les régulations immunitaires de l’homéostasie endosymbiotique larvaire ont été largement abordées dans le travail présenté dans les chapitres 1 et 2, dans lesquels nous avons montré l’existence de deux réponses immunitaires dans le bactériome. La première, qualifiée d’« interne », est intracellulaire et dirigée contre le symbiote pour assurer son confinement. La seconde, qualifiée d’ « externe », est inductible et est probablement dirigée contre les bactéries exogènes en cas d’infection systémique de la larve. Ces deux réponses assurent à la fois le maintien et la protection des endosymbiotes pendant la vie larvaire. Lors de la métamorphose de l’insecte, l’état homéostatique larvaire laisse place à un état dynamique au cours duquel le bactériome se restructure, passant d’un seul organe bien délimité chez la larve à une multitude de petits bactériomes situés à l’extrémité de chacun des caeca mésentériques chez l’adulte. Outre ce changement de localisation et de nombre des bactériomes, les endosymbiotes montrent une dynamique très contrastée au cours des deux premières semaines de vie adulte. Leur nombre augmente drastiquement jusqu’au sixième jour suivant la mue finale, qui intervient immédiatement à la fin de la métamorphose. Il a été montré que cette augmentation permet de répondre aux besoins métaboliques grandissants de l’imago pendant la synthèse de sa cuticule (Vigneron et al., 2014). Une fois cette synthèse achevée, les symbiotes sont éliminés et recyclés par des mécanismes d’autophagie et d’apoptose (Vigneron et al., 2014). Ce troisième et dernier chapitre s’intéresse aux changements de régulation génétique qui permettent le passage de l’état symbiotique stable chez la larve à l’état dynamique chez l’adulte. Quelles sont les voies de signalisation et les processus cellulaires impliqués dans la régulation de la dynamique symbiotique ? L’immunité joue-t-elle un rôle dans l’élimination et le recyclage des endosymbiotes ?

L’identification des processus impliqués dans la dynamique symbiotique a été réalisée par une approche de séquençage d’ARN total (RNAseq) de l’intestin (incluant l’intestin et les bactériomes portés par les caeca). Nous avons analysé

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95 les données transcriptomiques provenant des trois stades suivants : premier jour (J1), sixième jour (J6) et neuvième jour (J9) suivant la mue finale de l’imago, correspondant respectivement au premier jour d’accroissement du nombre d’endosymbiotes, au jour où ils atteignent leur nombre maximal, et à la fin du processus de recyclage symbiotique. Les résultats du RNAseq ont été analysés par une méthode d’annotation utilisant l’orthologie des transcrits avec la base de données Kyoto Encyclopedia of Genes and Genomes (KEGG). Cette méthode a été choisie car elle permet l’identification de voies de signalisation de façon plus précise que les annotations basées sur les Gene Ontology (GO), plus fréquemment utilisées. L’analyse KEGG a mis en évidence plusieurs processus et voies de signalisation dont l’activité était corrélée à la dynamique symbiotique. Ces corrélations ont été confirmées par le suivi en cinétique de l’expression de gènes représentatifs de chaque voie par RT-qPCR. De façon surprenante, aucune voie de signalisation régulant la synthèse de PAMs n’a été identifiée lors de l’analyse KEGG. Des analyses complémentaires en RT-qPCR sur des régulateurs immunitaires, ainsi que des observations du processus de recyclage des endosymbiotes en microscopie ont été réalisé es afin de comprendre pourquoi l’immunité ne semblait pas sollicitée durant la dynamique symbiotique.

L’ensemble de ces travaux a fait l’objet d’une publication en octobre 2015 dans

BMC Genomics, présentée ci-après.

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