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Chapitre 1. Synthèse bibliographique

II. Les techniques d’analyse en écologie microbienne

II.2. Les approches génétiques

II.2.1. Les approches génétiques partielles

II.2.1.1. Les principaux gènes marqueurs utilisés

Différents gènes marqueurs peuvent être employés afin d’étudier les communautés microbiennes d’un milieu. Cependant, bien que n’importe quel gène puisse théoriquement être employé, le choix de celui-ci obéit à quelques règles. Par exemple, une partie de la séquence de ce gène doit être connue afin de disposer des amorces11 nécessaires à son amplification par PCR. Les séquences d’ADN connues doivent être également stables afin de

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Macromolécule biologique (acide nucléique) présente dans toutes les cellules ainsi que dans certain virus, constituée généralement de deux brins enroulés en double hélice. Les brins sont formés chacun d'une succession de nucléotides et code l'information génétique permettant le développement et le fonctionnement de la cellule.

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Acide nucléique très proche chimiquement de l'ADN. Les ARNs sont issus de la transcription de l’ADN. Il existe de nombreuses familles d’ARN comme par exemple : (1) les ARNs messagers (ARNm) qui sont utilisés par les organismes vivants comme support intermédiaire des gènes pour synthétiser les protéines, (2) les ARNs ribosomiques (ARNr) entrant dans la composition des ribosomes et (3) les ARNs de transfert (ARNt) qui portent des acides aminés et permettent leur incorporation dans les protéines.

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De l'anglais polymerase chain reaction. Technique de biologie moléculaire d'amplification génique in vitro, qui permet de multiplier une séquence d'ADN ou d'ARN connue, à partir d'une faible quantité de cette séquence.

11Courte séquence d’ADN ou d’ARN, complémentaire d’un fragment d’acide nucléique simple brin, servant de point de départ à la reproduction de celui-ci par un enzyme synthétisant l’acide nucléique (appelé ADN (respectivement ARN) polymérase).

permettre l’hybridation de ces amorces. Suffisamment de données doivent être présentes concernant ce gène au sein de la communauté scientifique afin de s’assurer, par exemple, qu’il soit bien présent chez la population microbienne visée, ou bien qu’il soit le plus adapté à la technique d’analyse que l’on souhaite utiliser.

Le gène codant pour la petite sous-unité ribosomique est un des gènes marqueurs les plus utilisés pour révéler la structure des communautés microbiennes peuplant un milieu donné. Les ribosomes, constitués d’une petite et d’une grande sous-unité, sont des organites essentiels au bon fonctionnement de la cellule, car responsables de la synthèse des protéines. Ils sont présents dans tout organisme vivant.

Chez les procaryotes, le gène codant pour la petite sous-unité des ribosomes est appelé gène ribosomique de la fraction 16S du génome (16S rRNA gene) et est utilisé depuis de nombreuses années comme marqueur phylogénétique. En effet, ce gène est composé de neuf régions variables permettant de discriminer les différents microorganismes (Gutell et al., 1994). Ces régions variables sont espacées de régions hautement conservées (Figure 1.8), c’est-à-dire qui sont restées très stables au cours de l’évolution (Van de Peer et al., 1996). De plus, la taille de ce gène (entre 1500 et 1600 paires de bases12 (pb)) est assez longue pour permettre l’identification des individus, mais également assez courte pour en faciliter l’amplification, le séquençage et l’analyse.

Figure 1.8 - Structure du gène ribosomique 16S

D’après Cox et al. (2013). Les régions variables sont numérotées de V1 à V9 et apparaissent en rouge, alors que les régions conservées apparaissent en blanc. pb : paires de bases.

Du fait de son utilisation par la communauté scientifique comme marqueur phylogénétique, de nombreuses séquences du gène ribosomique 16S ont été déposées dans différentes base de données génétiques disponibles en ligne comme RefSeq (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/refseq/), Greengenes (http://greengenes.lbl.gov/) ou encore

Silva (http://www.arb-silva.de), permettant ainsi l’affiliation d’une grande partie des séquences nucléiques obtenues par séquençage13.

En plus de l’identification des différentes espèces présentes dans un milieu, ce gène permet d’obtenir une estimation semi-quantitative de leur abondance (voir ci-après certaines techniques d’empreintes génétiques et de séquençage haut débit par exemple). Cependant, cette estimation est limitée par le fait que le gène ribosomique 16S peut être présent un nombre de fois variable au sein du génome microbien. En effet, le nombre de copie du gène ribosomique 16S pour un génome peut varier de 1 à 15, voire plus (Klappenbach et al., 2001). Il a été également montré que, même si le nombre de copie du gène ribosomique 16S semble être spécifique à chaque taxon, certaines variations peuvent être enregistrées (Acinas

et al., 2004), ou encore que les séquences du gène ribosomique 16S d’une même espèce ou d’un même génome peuvent différer (Clayton et al., 1995 ; Vetrovsky et Baldrian, 2013). Toutefois, l’objectif de nombreuses études d’écologie microbienne est de suivre la dynamique au cours du temps des populations microbiennes, c’est-à-dire de s’intéresser aux changements éventuels au niveau de l’abondance relative pour un même organisme entre deux temps de prélèvement. Ainsi, l’impact sur les résultats finaux peut être qualifié de négligeable, car les approximations relatives à la quantification des différent microorganismes par l’utilisation du gène ribosomique 16S restent les mêmes pour tous les échantillons analysés. Par conséquent, une diminution ou une augmentation de l’abondance relative au cours du temps d’un organisme pourront tout de même être mises en avant par l’analyse de ce gène ribosomique 16S.

Malgré les limites évoquées précédemment due à l’utilisation du gène codant pour la petite sous-unité des ribosomes, l’utilisation de ce gène d’analyse permettant le suivi et l’étude de populations microbiennes, par différente techniques, a permis de révéler que la diversité microbienne était bien plus importante que supposée précédemment par les approches de microbiologie pasteurienne (Hofman-Bang et al., 2003).

Chez les microorganismes eucaryotes, le gène codant pour la petite sous-unité des ribosomes est appelé gène ribosomique 18S (18S rRNA gene). Ce gène est l’outil adapté dans le but de présenter une analyse phylogénétique des taxons eucaryotes présents dans un échantillon (Hadziavdic et al., 2014). Cependant, ce gène est insuffisant pour identifier l’ensemble des espèces présentes.

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Technique de biologie moléculaire permettant de déterminer la séquence (suite) des nucléotides constituant un fragment d’ADN.

Un autre gène, en lien avec les ribosomes, est également beaucoup utilisé comme gène marqueur. En effet, alors que le gène 16S (respectivement 18S) décrit précédemment code pour la petite sous-unité ribosomique chez les procaryotes (respectivement les eucaryotes), le gène 23S (respectivement 28S) code quant à lui pour la grande sous-unité. L’espace intergénique (ou IGS pour InterGenic Spacer, Figure 1.9) entre ces deux gènes ribosomiques peut également être utilisée afin de caractériser la structure des communautés microbiennes au sein d’un ou plusieurs échantillons. En effet, la longueur et la séquence de l’IGS ribosomique est variable suivant les espèces (entre 60 et 1 500 paire de bases environ) et les allèles des différentes espèces (Gürtler et Stanisich, 1996). De ce fait, de par l’utilisation d’amorces spécifiques aux séquences conservées des gènes ribosomiques 16S et 23S (respectivement 18S et 28S), l’IGS peut être amplifié par PCR et donc servir à l’analyse de la structure des communautés microbiennes présentes dans un échantillon. Ce gène est couramment utilisé pour l’analyse des populations de champignons présentes dans un échantillon et ce, souvent en complément avec d’autres gènes (cas de Aspergillus, Fusarium et Penicillium, par exemple).

Figure 1.9 - Position de l’espace intergénique ribosomique dans le génome des procaryotes IGS : espace intergénique (InterGenic Spacer), pb : paires de bases.

Enfin, certains gènes fonctionnels, c’est-à-dire associés à une fonction biologique spécifique comme le gène mcrA (pour methyl coenzyme-M reductase) (Luton et al., 2002), codant pour une enzyme essentielle dans la formation microbienne du CH4, peuvent être également utilisés en tant que gène marqueur.

Une fois choisi, le gène marqueur peut être analysé de différentes façons afin de révéler la structure et la diversité des différents microorganismes peuplant le milieu étudié.

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