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Un jeu multijoueur sur les graphes. Avant de détailler la preuve de Linial sur le nombre minimal de rondes de communications nécessaires pour la coloration, nous allons définir un type de jeu à plusieurs joueurs sur un graphe

G = (VG, EG).

Notons pour cela N := |V | le nombre de sommets du graphe et m le nombre de joueurs, et Jile joueur numéro i pour 1 ≤ i ≤ m.

Dans ce jeu, y a un arbitre dont le rôle est de placer les m joueurs sur s ≤ m sommets du graphe G (donc, potentiellement, plusieurs joueurs peuvent être placés sur le même sommet), et les joueurs doivent résoudre un problème

communiquer et convenir d’une stratégie avant le début du jeu, mais ils n’ont plus le droit de communiquer une fois qu’ils sont placés sur les sommets du graphe.

Plus précisément, on donne • un graphe G = (VG, EG)

• un ensemble G de sous-graphes de G de taille ≤ m • pour chaque sous-graphe H ∈ G , un ensemble

Π(H) = {π : {J1, . . . , Jm} → VH} de fonctions de placement des joueurs (ces fonctions étant surjectives mais non nécessairement injectives).

• un ensemble Y = {YH,π| H ∈G , π ∈ Π(H)} de sorties autorisées pour chaque graphe H et chaque placement de joueurs sur ce sous-graphe.

1. Au moment où le jeu commence, l’arbitre choisit un sous-graphe H ∈ G et une fonction de placement π ∈ Π, et place chaque joueur Ji sur le sommet π(Ji)du sous-graphe H.

2. Chaque joueur i doit sortir une valeur yitelle que (y1, . . . , ym) ∈ YH,π.

Un cas particulier : le graphe des voisinages. Nous nous intéresserons plus particulièrement au cas particulier suivant du jeu général défini ci-dessus :

Nous considérons l’ensemble H de tous les graphes étiquetés qu’il est possible d’obtenir à partir d’un même graphe et d’un même ensemble d’étiquettes (par exemple, l’ensemble de tous les cycles de longueur n étiquetés à l’aide d’une permutation σnde {1, . . . , n}). Nous fixons un paramètre t ≤ n et nous définissons le graphe G de la manière suivante : les sommets de G sont les voisinages de taille t (ou encore t-voisinages) des graphes dans H , et deux sommets de G sont reliés si et seulement s’ils sont des t-voisinages de deux sommets adjacents d’un graphe H ∈ H .

Autrement dit (en utilisant la notation Nt(v) pour le t-voisinage d’un sommet v :

VG= {Nt(u) | u ∈ VH, H ∈H }

EG= {{Nt(u), Nt(v)} | u, v ∈ VH, {u, v} ∈ EH, H ∈H }

Le graphe G ainsi défini s’appelle le graphe des voisinages à distance t des graphes de H .

H = {1 → 2 → 3, 1 → 3 → 2, 2 → 1 → 3, 2 → 3 → 1, 3 → 1 → 2, 3 → 2 → 1} 1 → 2 1 → 3 2 → 1 2 → 3 3 → 1 3 → 2 3 1 2

FIGURE 2.1 – Graphe des voisinages à distance 1 du 3-chemin orienté. Nous considérons ensuite qu’il y a autant de joueurs que de sommets dans les graphes de H , et nous prenons l’ensemble des sous-graphes G sur lesquels les joueurs seront placés comme étant tout simplement identique à H .

L’ensemble des sorties autorisées Y sera quant à elle l’ensemble de toutes les bonnes colorations de chaque sous-graphe.

Résultats de Linial. L’article de Linial comporte les résultats suivants (entre autres) :

1. Un graphe est q-coloriable en t rondes si et seulement si son graphe de voisinages à distance t est q-coloriable.

2. Pour les chemins et les cycles de longueur n, il faut prendre t = Ω(log(n))afin que le nombre chromatique du graphe des voisinages à distance t soit 3.

Nous allons maintenant donner l’idée de la preuve de ces deux points : 1. Un graphe est q-coloriable en t rondes si et seulement si son graphe de voisinages à distance t est q-coloriable.

Démonstration. Notons qu’il s’agit d’une équivalence.

Commençons donc par démontrer la direction : si le graphe des voisinages à distance t d’un graphe d’une famille donnée est q-coloriable, alors ce graphe est q-coloriable en t rondes. Pour cela, rappelons le principe selon lequel t fois une ronde de communication est identique à une t-ronde de communication.

En effet, au bout d’une t-ronde de communication, chaque nœud connaîtra son t-voisinage, et il doit décider de sa couleur en fonction de ce t-voisinage. Mais une q-coloration du graphe de voisinage fournit justement une fonction allant des voisinages possibles de chaque nœud à une couleur parmi q couleurs possibles. Donc, si nous avons une q-coloration du graphe des voisinages à distance t d’un graphe d’une famille donnée, il est aisé d’en déduire une q-coloration pour n’importe quel graphe de cette famille.

Démontrons maintenant l’autre direction : si chaque graphe d’une famille donnée est q-coloriable en t rondes, alors le graphe des voisinages à distance

test q-coloriable aussi. Pour cela, notons qu’un sommet doit décider de sa couleur une fois qu’il connaît son t-voisinage. Autrement dit, il y a une fonction qui renvoie chaque t-voisinage sur une couleur parmi q, et on peut ainsi colorier le graphe des voisinages à distance t en appliquant cette fonction à chaque nœud de ce graphe (i.e. à chaque t-voisinage).

2. Pour les chemins et les cycles de longueur n, il faut prendre t = Ω(log(n))afin que le nombre chromatique du graphe des voisinages à distance t soit 3.

Démonstration. Pour prouver ce point, Linial considère, pour un n ∈ N fixé, une famille de graphes paramétrés (Bs,n)s∈N, proches du graphe de de Bruijn, dont les sommets et les arêtes sont comme suit :

V (Bs) = {(v1, . . . , vs) | vi ∈ VGet vi 6= vjpour i 6= j ∈ {1, . . . , s}}

E(Bs) = {{(v1, . . . , vs), (v2, . . . , vs+1)} | (v1, . . . , vs), (v2, . . . , vs+1) ∈ V (Bs), v1 6= vs+1}

Et où le paramètre n donne le nombre de vidistincts possibles.

Son argument utilise également la notion de line graph L(G) d’un graphe orienté G, dont nous rappelons la définition : il s’agit du graphe dont les sommets sont les arêtes de G, i.e. V (L(G)) = E(G), et dont deux sommets sont adjacents si les arêtes correspondantes dans G partagent une extrémité.

Sa preuve repose alors sur les arguments suivants :

1. B2t+1,nest un sous-graphe de Nt(Pn), donc χ(B2t+1) ≤ χ(Nt(Pn))(cela reste vrai si l’on remplace Pnpar Cn).

2. B1,ns’obtient à partir du graphe complet Knen remplaçant chaque arête par deux arêtes orientées.

4. χ(L(G)) ≥ log χ(G)

Le point (2) a pour conséquence que χ(B1,n) = n. En itérant les points (3) et (4), on a que

Bs,n= Ls−1(B1,n) et χ(Ls(G)) ≥ logsχ(G) d’où finalement χ(B2t+1,n) = χ(L2t(B1,n)) ≥ log2tχ(B1,n) = log2t(n)

On utilise ceci et le point (1) pour conclure que log2t(n) ≤ χ(Nt(Pn)). Donc, pour avoir χ(Nt(Pn)) = 3, il faut prendre 2t ≥ log(n) − 1.

2.4 La preuve de Linial : passage au quantique