ck,n−i+1.
Nous injections cela dans l’équation (7.4) afin d’obtenir
ck,n+1 = n+1 X i=1 (−1)i+1 2n + k + 1 − i i ! ck,n−i+1 ce qui donne le résultat souhaité à la substitution i 7→ i + 1 près.
7.3 Généralisation : nombres de Fuss-Catalan
Soit s ∈ N. Nous considérons la suite de nombres (FC(s, n))n∈Ndéfinie de la manière suivante : FC(s, n) := 1 (s − 1)n + 1 sn n !
Cette suite s’appelle la suite des nombres de Fuss-Catalan, et nous voyons aisément que la suite (cn)n∈Ndes nombres de Catalan est un cas particulier de cette suite en prenant s = 2. De plus, cette suite admet une interprétation similaire à celle des nombres de Catalan en termes de chemin sur la grille, à savoir la suivante [HP91] :
Nous supposons que nous disposons d’une grille à deux dimensions composée de n × (s − 1)n carrés, c’est-à-dire un rectangle dont le côté horizontal est (s − 1) fois plus grand que son côté vertical. La diagonale de cette grille est la droite passant par les points (x, (s − 1)x). Nous considérons les chemins que nous pouvons tracer en partant du point (0, 0) en bas à gauche
jusqu’au point (n, (s − 1)n) en haut à droite en faisant uniquement des pas vers la droite ou vers le haut sur les arêtes de la grille, et tels que ce chemin ne descend jamais en dessous de la diagonale. Le nombre FC(s, n) donne alors le nombre de tels chemins sur une grille n × (s − 1)n : nous pouvons appeler ces chemins les chemins de Dyck rectangulaires de taille n et de paramètre s. Nous utiliserons la notation Ds,npour l’ensemble de ces chemins, et nous pouvons noter qu’un élément de Ds,ncomporte toujours n + (s − 1)n = sn arêtes et
n + (s − 1)n + 1 = sn + 1sommets. Nous numérotons les sommets de 1 à
sn + 1en commençant par en bas à gauche.
FIGURE 7.2 – Exemple d’un chemin de Dyck rectangulaire de taille 3 et de paramètre 3.
Dans ce qui suit, nous allons supposer que s ≥ 2. En effet, F C(1, n) = 1 quel que soit n ∈ N, et même si cela colle avec l’interprétation ci-dessus en termes de chemins1, bien des éléments que nous introduisons par la suite ne sont valables que lorsque s ≥ 2.
Nous avons alors le résultat suivant, qui est l’équivalent de l’équation (7.2) : Théorème 13. La suite (FC(s, n))n∈Ndes nombres de Fuss-Catalan satisfait la relation de récurrence suivante par rapport à n :
FC(s, n + 1) = n X i=0 (−1)i s(n + 1) − (s − 1)(i + 1) i + 1 ! FC(s, n − i).
Nous expliquons maintenant comment adapter la preuve du Théorème12 afin de démontrer ce résultat.
Définition 36 (Crochet). Nous appelons crochet l’unique chemin de Dyck
rectangulaire de paramètre s et de taille 1 P1, formé d’une arête montante puis de (s − 1) arêtes allant vers la droite.
1. En effet, quel que soit n ∈ N, il existe un seul chemin allant de (0, 0) à (n, 0) en n’utilisant que des pas vers la droite et vers le haut sur les arêtes de la grille.
Nous disons que nous augmentons un chemin Pn ∈ Ds,n au niveau du sommet i si nous insérons un crochet partant de ce sommet, ce qui donnera un chemin Pn+1∈Ds,n+1. Nous noterons cette opération Aug(Pn, i).
Lemme 20. L’ensembleDs,n+1vérifie
Ds,n+1 = {Aug(Pn, i) : Pn∈Ds,n, 1 ≤ i ≤ sn + 1}
Démonstration. Le chemin résultant d’une augmentation d’un chemin Pn ∈ Ds,n de taille n au niveau de n’importe quel sommet i reste au-dessus de la diagonale et est donc un chemin de Dyck de taille n + 1.
De plus, n’importe quel chemin Pn+1 ∈ Ds,n+1 terminent par au moins deux arêtes horizontales : s’ils terminaient par une arête verticale puis une arête horizontale, le point (n, (s − 1)n − 1), qui est en-dessous de la diagonale passant par les points (x, (s − 1)x), serait sur le chemin. Par conséquent, il y a au moins deux arêtes horizontales après la dernière arête verticale du chemin, i.e. il y a un crochet. Et en enlevant ce crochet, nous obtenons un chemin
Pn+1∈Ds,n+1.
Contrairement aux chemins de Dyck « classiques », avec les chemins de Dyck de paramètre s et de taille n ≥ 2, il est possible d’avoir un seul crochet sans que le chemin soit un « agrandissement de facteur n ». Néanmoins, lorsqu’il y a plus de deux crochets, nous avons le résultat suivant :
Lemme 21. Soit n ≥ 2. Si Pn ∈ Dncontient plus de deux crochets, alors il existe Pn−1, Pn−10 ∈Dn−1, non nécessairement distincts, et i 6= j tels que Pn = Aug(Pn−1, i) = Aug(Pn−10 , j).
En particulier, nous pouvons constater que dans un chemin de longueur
n ≥ 2, s’il y a un crochet au niveau du sommet i, alors le chemin comporte un deuxième crochet. Dans ce cas, le lemme précédent nous assure qu’il existe un i > 1 tel que ce chemin peut également être obtenu en augmentant un chemin de longueur (n − 1) au niveau du sommet i, i.e. nous pouvons « oublier » les augmentations au niveau du sommet 1. Cela nous permet de préciser le Lemme20:
Corollaire 7. L’ensembleDs,n+1vérifie
Ds,n+1 = {Aug(Pn, i) : Pn∈Ds,n, 2 ≤ i ≤ sn + 1}
Ensuite, nous définissons l’augmentation multiple, et nous démontrons que l’ensemble des chemins Pn ∈ Ds,nobtenus à travers une augmentation
multiple d’un chemin Pn−j ∈ Ds,n−j est identique à l’ensemble des chemins
Pn∈Ds,nqui peuvent être obtenus en augmentant un chemin Pn−1 ∈Ds,n−1
au niveau de j sommets différents.
Définition 37. Soient n, j ∈ N, Pn ∈ Ds,n, et soit Ij ⊂ {1, . . . , sn + 1}
un multi-ensemble de taille j. On définit Aug(Pn, Ij)comme étant l’insertion simultanée de j crochets dans le chemin Pnau niveau des sommets dont les labels sont donnés par Ij.
Les résultats suivants montrent que cette définition est cohérente.
Lemme 22. Soient i ≥ 0 et Pi ∈ Ds,i. Alors, n’importe quel Pi+2 ∈ Ds,i+2 s’obtient en effectuant Pi+1= Aug(Pi, u)pour un 1 ≤ u ≤ si + 1, puis Pi+2= Aug(Pi+1, v)pour un 1 ≤ v ≤ s(i + 1) + 1.
La preuve de ce lemme repose, comme pour le lemme 19, sur une renumérotation des sommets. Et modulo cette renumérotation, nous avons le résultat suivant :
Corollaire 8. Soient i ≥ 0 et Pi ∈ Ds,i. N’importe quel chemin Pi+2 ∈Ds,i+2 s’obtient en effectuant Ps,i+2 = Aug(Pi, I2) pour un multi-ensemble I2 ⊂ {1, . . . , si + 1} de taille 2.
Corollaire 9. Soient n ≥ 1 et 1 ≤ j ≤ n. Tout chemin Pn ∈ Ds,ns’obtient à partir d’un chemin Pn−j ∈Ds,n−jen effectuant Aug(Pn−j, Ij)pour un multi-ensemble Ij ⊂ {1, . . . , s(n − j) + 1} de taille j.
Nous introduisons maintenant des notations pour les ensembles de sommets obtenus via des augmentations simples et multiples.
Définition 38.
1. Soit 1 ≤ i ≤ s(n − 1) − 1. On définit Wi,n := {Aug(Pn−1, i) : Pn−1∈Ds,n−1}, i.e., Wi,n est le sous-ensemble de
Ds,nobtenu en augmentant un élément deDs,n−1au niveau du sommet numéro i.
2. Soit Ij ⊂ {1, . . . , s(n − j) + 1} un multi-ensemble de taille j, 1 ≤ j ≤
n. On définit WIj,n := {Aug(Pn−j, Ij) : Pn−j∈Ds,n−j}, i.e., WIj,nest le sous-ensemble deDs,nobtenu à travers une augmentation multiple d’un élément deDs,n−jà des positions indiquées par Ij.
Proposition 13. Soient 1 ≤ i1 < · · · < ij ≤ s(n − 1) + 1. Alors il existe 1 ≤ i01 ≤ · · · ≤ i0j ≤ s(n − j) + 1 tels queTj
u=1Wiu,n = WIj,n, où Ij est le multi-ensembleni01, . . . , i0jo.
Cette proposition se démontre de façon similaire à la Proposition12. Nous avons maintenant tous les éléments nécessaires pour prouver le Théorème13.
Preuve du Théorème13. Le Corollaire 7 peut se reformuler de la manière suivante : Ds,n+1 = sn+1 [ i=2 Wi,n+1. Par conséquent FC(s, n + 1) = |Ds,n+1| = sn+1 [ i=2 Wi,n+1 .
Nous utilisons le principe d’inclusion-exclusion, en nous arrêtant à n + 1 au niveau des indices de la somme externe puisqu’un chemin de longueur (n+1) a au plus (n + 1) crochets. FC(k, n+1) = n+1 X i=1 (−1)i+1 X 2≤j1<j2<···<ji≤sn+1 |Wj1,n+1∩ Wj2,n+1∩ · · · ∩ Wji,n+1| . (7.5) Ensuite, nous utilisons la Proposition13:
Wj1,n+1∩ Wj2,n+1∩ · · · ∩ Wji,n+1 = WIi,n+1
pour un multi-ensemble Ii ⊂ {2, . . . , s(n + 1 − i) + 1} de taille i. Par conséquent, nous pouvons simplifier l’équation (7.5) :
FC(s, n + 1) = n+1 X i=1 (−1)i+1 X Ii⊂{2,...,s(n+1−i)+1}multi-ensemble |WIi,n+1| . (7.6) Mais par définition, |WIi,n+1| est le nombre d’éléments de Ds,n+1 qui s’obtiennent en augmentant i fois chaque élément de Ds,n+1−iaux positions indiquées par Ii. Il y a donc autant de tels chemins qu’il y a d’éléments de Ds,n+1−i, par conséquent |WIi,n+1| = FC(k, n + 1 − i)pour n’importe quel
Ii. Et il y a s(n+1−i)+i−1 i
multi-ensembles Iipossibles. Donc, finalement :
X Ii⊂{2,...,s(n+1−i)+1}multi-ensemble |WIi,n+1| = s(n + 1 − i) + i − 1 i ! FC(k, n−i+1) . Nous injectons cela dans l’équation (7.6) afin d’obtenir
FC(s, n + 1) = n+1 X i=1 (−1)i+1 sn − (s − 1)(i − 1) i ! FC(k, n − i + 1)
Nous pouvons remarquer que pour i = n+1, le terme binomial correspondant vaut sn−(s−1)n
n+1
= n+1n
= 0, donc il suffit d’aller jusqu’à i = n dans la somme. Enfin, la substitution i 7→ i + 1 donne le résultat souhaité :
FC(s, n + 1) = n−1 X i=0 (−1)i sn − (s − 1)i i + 1 ! FC(k, n − i)
Concluons par une remarque sur cette preuve : pour obtenir la formule souhaitée, nous avons utilisé le Corollaire7et non le Lemme20. Si nous avions utilisé ce lemme à la place, la preuve se serait déroulé de la même manière avec les différences suivantes : nous aurions pris des multi-ensembles Ii ⊂ {1, . . . , s(n + 1 − i) + 1}et nous n’aurions pas pu supprimer le terme de la somme pour i = n + 1. Nous aurions alors obtenu la formule
FC(s, n + 1) = n X i=0 (−1)i sn − (s − 1)i + 1 i + 1 ! FC(k, n − i). En effet, dans ce cas .
7.4 Une question ouverte
Nous concluons ce chapitre sur la remarque suivante au sujet d’une question ouverte : le Théorème 12 est plus général que le Théorème 13 dans la mesure où il fait intervenir les convolutions des nombres de Catalan. Nous pouvons donc nous demander s’il existe un résultat similaire pour les convolutions des nombres de Fuss-Catalan. Cela nécessiterait d’étudier si le résultat prouvé dans [Ted11] dont nous nous sommes servi se généralise aux nombres de Fuss-Catalan. Nous n’avons pas étudié cette question puisqu’elle était périphérique à nos sujets d’étude principaux. Néanmoins, si cela est vrai, il est vraisemblable que le résultat suivant l’est également :
Conjecture 1. Pour tout s, k ∈ N, s ≥ 2 et k ≥ 1, la suite (FCk(s, n))n∈N
de la convolution k-ème des nombres de Fuss-Catalan satisfait la relation de récurrence suivante par rapport à n :
FCk(s, n + 1) = n X i=0 (−1)i sn − (s − 1)(i + 1 − k) + 1 i + 1 ! FCk(s, n − i).
Le Théorème 12 prouve cette conjecture pour s = 2 et k quelconque, alors qu’il est facile d’adapter la preuve du Théorème13pour prouver cette conjecture pour s quelconque et k = 1 (cf. la remarque après la preuve de ce théorème).
Conclusion
L’apport principal de la première partie de cette thèse est théorique, en clarifiant certaines subtilités autour du modèle φ-LOCAL et en proposant un modèle plus adéquat qui ne souffre pas des limites du modèle φ-LOCAL. Mais ce nouveau modèle est plus complexe que le modèle φ-LOCAL classique, et les problèmes y sont plus difficiles à étudier, ce qui va à l’encontre de la motivation derrière le modèle φ-LOCAL, à savoir pouvoir résoudre plus facilement la question de la possibilité de certains algorithmes quantiques distribués.
Dans la deuxième partie de cette thèse, nous avons donné une description complète des distributions de probabilités 1-localisables sur les mots hard-core. Ce faisant, nous avons également démontré que la 3-coloration 1-localisable est impossible. Nous avons vu que ce résultat s’étend facilement aux distributions de probabilités k-localisables sur ce que nous avons appelés des mots k-hard-core, et qui sont liés au problème de coloration à distance
kcomme les mots hard-core le sont au problème de coloration. Cependant, il n’est pas clair dans quelle mesure nos résultats se généralisent aux « motifs sur les graphes », qu’il s’agisse de motifs de coloration ou motifs hard-core : nous n’avons réussi à généraliser qu’une partie de nos résultats. Enfin, pour prouver nos résultats, nous avons démontré des résultats intéressants en soi : un théorème sur la solution explicite d’un programme linéaire ayant une forme particulière, et une formule sur les nombres de Catalan et une généralisation de ces nombres, les nombres de Fuss-Catalan.
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