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Partie I. Étudier les conflits territoriaux et l’acceptabilité sociale de la transition

Chapitre 3. Prendre le pouls de la transition énergétique et des conflits associés : éléments

Comment appréhender méthodologiquement les conflits liés à l'implantation des nouvelles infrastructures énergétiques sur les littoraux français, qu'elles soient nucléaires ou renouvelables ? Ce chapitre permettra de présenter mon travail de terrain, les hypothèses et les questionnements qui l'ont guidé, la façon dont je l'ai préparé, les difficultés que j'ai pu rencontrer, ainsi que les méthodes qui ont présidé à l'analyse des entretiens et observations. En géographie, le « terrain » renvoie à la fois au lieu d'enquête et à une méthode de collecte des données destinées à comprendre ce lieu. Tout chercheur construit son terrain d'enquête. Yann Calbérac souligne ainsi combien le géographe « construit le terrain en fonction des questions qu'il pose et des questions qu'il met en œuvre » (Calbérac, 2011), afin de confronter les hypothèses à la réalité.

Pour mener à bien la réflexion sur les différents projets dits de « transition énergétique » sur les littoraux français et de leur acceptabilité, j’ai effectué un perpétuel « va-et-vient entre théorie et empirie, entre fabrication des données et fabrication des hypothèses, entre vérification des données et vérification des hypothèses » (Beaud et Weber, 2003, p. 293). Beaucoup d'allers-retours ont ainsi été réalisés entre terrain et analyse – des allers-retours qui se sont géographiquement matérialisés, puisque je me suis rendue à plusieurs reprises sur chacun de mes terrains pour pouvoir faire progresser l'enquête. Comme cette enquête s'est concentrée sur des études de cas français, il s'agissait d'une enquête par distanciation, consistant à rendre étrange ce qui est familier, et non par dépaysement, consistant au contraire à rendre familier ce qui est étranger (Beaud et Weber, 2003).

Plusieurs outils méthodologiques ont été utilisés. On se demandera avec Emmanuelle Petit « comment bricoler des techniques de terrain protéiformes en une méthodologie qualitative cohérente en géographie » (Petit, 2010). Trois techniques d'enquêtes principales ont été sélectionnées pour mener à bien cette recherche : les entretiens, l'observation directe ou participante, la recherche documentaire. 105 personnes ont été interrogées pour mener à bien cette enquête (annexe 2). La plupart des entretiens étaient individuels, certains ont été collectifs. Cette méthode, essentiellement qualitative, sera explicitée tout au long de ce chapitre.

1. Prendre le pouls de la transition énergétique

Comment étudier et employer la notion de « transition énergétique », soumise aux fluctuations de l'actualité politico-médiatique et au rythme d'un projet de loi ? On reviendra sur les difficultés engendrées par le fait de suivre un processus en perpétuelle évolution. Nous verrons ensuite que si le processus dit de « transition énergétique » est largement ancré dans l'actualité, il puise toutefois ses racines dans des mobilisations citoyennes plus anciennes, ce qui appelle un recul historique sur la question.

1.1. La transition énergétique, une notion ambiguë

La notion de « transition énergétique » est solidement ancrée dans l’actualité : loi relative à la « transition énergétique pour une croissance verte » parue en août 2015, multiplication des projets renouvelables à partir de différents montages politiques, sociaux et financiers, débats sur la place du nucléaire dans le bouquet énergétique français, etc. Comment dès lors parler de transition énergétique et en faire un objet d’étude en géographie sans céder aux sirènes médiatiques et politiques ?

À bien des égards, cette notion de « transition énergétique » pose les mêmes problèmes de décalque dans le champ scientifique que celle de « développement durable ». Dans un article intitulé « Les géographes français face au développement durable », Anne Jégou souligne « la réticence [des géographes français] à s’approprier des thématiques d’actualité, qui s’est déjà manifestée dans les années 1970 lors de l’introduction de la notion de développement dans la discipline. Les géographes sont en effet gênés par la connotation politique du développement durable et l’effet de mode qu’il suscite » (2007, p. 2). Développement,

développement durable, ville durable, transition énergétique : autant de notions d’actualité mais malaisées à manipuler scientifiquement.

Dans leur ouvrage méthodologique, Stéphane Beaud et Florence Weber postulent que, dans une situation d’enquête, trois univers se mêlent : l'univers de la « demande sociale » (qui donne lieu à des questionnements de nature politico-médiatique), l'univers académique (qui propose des sujets de recherche) et l'univers de l'enquête, qui est l'univers personnel du chercheur confronté à son terrain. Une des difficultés de la situation d'enquête est de parvenir à poser des questions qui soient compréhensibles par les enquêtés, c'est-à-dire d'arriver à traduire les thèmes (les questions politiques nées hors de l'enquête) et les sujets (les questions académiques, empiriquement inadaptées) en objets (les questions adaptées aux réponses empiriques des enquêtés). Pour parler de la transition énergétique, il a ainsi fallu se détacher des injonctions politiques et médiatiques autour de la notion, ce qui n’est pas aisé car il y a souvent confusion dans le discours des acteurs : certains ont largement adopté la vulgate politico-médiatique de ce qui est appelé « transition énergétique ». Ce qui rend parfois difficile la distinction entre ces trois sphères est la façon dont la recherche scientifique a repris à son compte certains mots d’ordre de la sphère politico-médiatique : j’ai pu par exemple participer à un colloque, en janvier 2015, à Lille, intitulé « Réussir la transition énergétique, quelles dynamiques de changement ? ». Le choix même du verbe « réussir » montre que la recherche est passée du côté du normatif sur ces questions : il faudrait à tout prix « réussir » la transition énergétique (au singulier).

Un malaise persiste avec l’emploi de l'expression « transition énergétique ». Il s’agit d’une notion qui vient de la sphère sociale et politique et qui s’est peu à peu imposée dans la sphère économique, comme en témoignent les appels récurrents du monde de l’industrie à une « croissance verte » ou « bleue ». Comment donc transposer cette question dans le champ universitaire ? Celui-ci suit une demande sociale tout en s’en distinguant. Il a fallu toutefois se dégager de cette demande sociale et c’est ici que l’angle d’approche par les oppositions entre acteurs trouve sa pertinence : étudier les conflits liés à une notion qui semble faire consensus dans la sphère sociale est un bon moyen de prendre de la distance avec les injonctions politiques et médiatiques, en réintroduisant de la controverse au cœur de la notion. Pour ce qui est du troisième univers, l’univers de l’enquête menée par le chercheur, si au départ je nommais moi-même les projets étudiés comme « projet de transition énergétique », j’ai remplacé assez rapidement cette expression par « nouvelles installations énergétiques », ce qui me permettait de voir si les acteurs parlaient d’eux-mêmes de la transition énergétique et de voir la façon dont ils la définissaient. Récupérer le terme de « transition énergétique » à des fins de recherche pose deux types de problèmes. Tout d’abord existe le risque de sacrifier la rigueur scientifique aux injonctions médiatiques et d’autre part subsiste le risque d’utiliser une notion trompeuse et éphémère : trompeuse car elle est souvent utilisée comme un slogan politique plus que comme une notion scientifique (la rupture qu’on nous présente au gré des projets et des textes de loi sera-t-elle effective ?) ; éphémère car bien des projets étudiés ne sont encore, justement, que des projets.

1.2. Travailler avec l'actualité

1.2.1. Une enquête soumise à l'actualité

Travailler sur la transition énergétique, c'est travailler sur un processus soumis aux fluctuations politiques et médiatiques ainsi qu’à des évènements ponctuels qui peuvent venir perturber les analyses. La loi de programmation de la transition énergétique, dite « loi pour une croissance verte », a ainsi subi des atermoiements pendant plusieurs années. Discuté au Parlement à l’automne 2013 et repoussé à des échéances plus lointaines, le texte a finalement été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 14 octobre 2014 avant d’être modifié par le Sénat le 3 mars 2015, adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée le 26 mai 2015, puis en deuxième lecture le 22 juillet 2015. Elle est parue au journal officiel le 18 août 2015. Le chantier de l’EPR, quant à lui, n’en finit plus de s’étirer. Les premiers objectifs annonçaient un EPR fonctionnel dès 2012, puis en 2016. On sait désormais qu’il ne devrait pas rentrer en service avant 2018. Plusieurs évènements, des « pics d’actualité », sont venus perturber le chantier : la mort d’un soudeur sur le site en janvier 2009 après une chute depuis une passerelle, l’« affaire de la cuve» en avril 2015 (une anomalie de

fabrication a été révélée par l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), mettant en cause la résistance de l’acier sur le fond et le couvercle de la cuve), puis la découverte d’anomalies concernant les soupapes de sécurité en juin 201539, etc. Les énergies marines renouvelables sont elles aussi concernées par

des retards et évènements perturbateurs : l’hydrolienne-test destinée au site de Paimpol-Bréhat a été coincée pendant plusieurs mois au fond de la rade de Brest à la suite d’une panne survenue sur le moteur d’un des treuils censé la récupérer ; à l’été 2014, les pêcheurs de la baie de Saint-Brieuc ont protesté contre la volonté du consortium Ailes Marines de changer les fondations jacket des éoliennes pour les remplacer par des fondations gravitaires, etc.

Ces évènements perturbateurs et pics d’actualité ont eu un impact sur mes enquêtes, qui étaient souvent influencées par l’actualité immédiate. Lors de mon terrain en avril 2015 dans la presqu’île du Cotentin, mes entretiens ont eu lieu quelques jours seulement après l’annonce de la défaillance de la cuve du réacteur. Cette actualité était souvent commentée par les enquêtés.

1.2.2. Méthode de la revue de presse : une approche chronologique et méthodologique Pour suivre l’actualité et de façon systématique, une méthode s’est imposée : celle de la revue de presse. J’ai réalisé un suivi de l’hebdomadaire Le Marin, en croisant une approche chronologique et thématique : chronologique parce qu’il s’agissait de voir les évolutions du traitement des problématiques énergétiques liées à la mer sur plusieurs années ; thématique parce que j’ai essayé de voir quels thèmes étaient privilégiés, pourquoi, et ce que cela disait sur la structuration d’une nouvelle filière. Le Marin est un hebdomadaire français spécialisé dans les questions maritimes à différentes échelles (locale, régionale, nationale, internationale) et selon différentes thématiques (évolution des politiques des pêches, chantiers navals, nautisme, enjeux géopolitiques ou environnementaux, structuration politique des acteurs travaillant en lien avec la mer, énergies marines, etc.). Cette revue de presse a concerné essentiellement la partie « énergies marines renouvelables » de ma thèse. En effet, le choix a été fait de ne pas procéder à une revue de presse sur la partie nucléaire de mon sujet, notamment parce que l’essentiel des articles collectés sur l’EPR de Flamanville tournaient autour du retard du chantier, ce qui me semblait trop éloigné d’un sujet centré sur les conflits d’acteurs et les stratégies d’acceptabilité. En outre, l’industrie nucléaire, malgré la loi n° 2006-686 relative à la transparence et à la sécurité, reste largement soumise au secret industriel, il va donc de soi que ce qui a trait aux stratégies d’acceptabilité ou aux techniques de contestation des opposants n’est pas abordé par les médias. Au contraire, la filière « énergies marines renouvelables », parce qu’elle véhicule une image méliorative des territoires sur lesquels elle s’implante, est suivie pas à pas par la presse.

J’ai donc consulté de façon systématique Le Marin, « hebdomadaire de l’économie maritime » traitant des différentes façades maritimes, plutôt que la presse locale. Il m’était en effet difficile de suivre à la fois l’hebdomadaire Le Marin et plusieurs quotidiens locaux (Ouest France, Le Télégramme, La Presse de la Manche, etc.). De plus, le traitement des EMR dans la presse locale se fait de façon beaucoup plus ponctuelle, par exemple en cas d’avancée décisive d’un projet ou lors d’un pic de contestation. Ces articles de la presse locale m’ont surtout servi à identifier les acteurs que j’allais interroger par la suite.

Pour ce qui est du Marin, j’ai systématiquement relevé les articles traitant des énergies marines depuis juillet 2009, année du Grenelle de la mer qui donne le feu vert et l’appui politique nécessaire au lancement des EMR. J’ai arrêté cette revue de presse le 28 juin 2017. Elle prend en compte 938 articles (figure 16). Le contenu de chaque article n’a pas fait l’objet d’une analyse statistique ou textuelle détaillée. En revanche, cette revue de presse a constitué un arrière-plan indispensable à mes enquêtes. Elle m’a permis de contextualiser chacun de mes études de cas locaux au sein d’une filière en voie de structuration. Les informations contenues dans cette thèse, sur les appels d’offres, les lauréats qui les remportent, les phases de consultation publique, les dernières avancées techniques, sont en grande majorité issues de cette revue de presse40.

39L’acier de la cuve et du couvercle de l’EPR a été reconnu défectueux. Malgré la découverte de ces anomalies,

l’Autorité de Sûreté Nucléaire a autorisé, en juin 2017, la mise en service du réacteur. Elle impose toutefois à EDF le changement du couvercle d’ici à 2024, ainsi que des contrôles renforcés sur la cuve.

Pour analyser l’évolution de la filière EMR, j’ai sélectionné dix thèmes qui me paraissaient représentatifs : les avancées politiques de la filière (annonces politiques, lancement et résultats des appels d’offres), les avancées techniques, la visibilité des acteurs industriels (nature des acteurs porteurs de la filière, manière dont leur parole est retranscrite et interprétée, identités des « champions » de la filière), les aménagements portuaires liés à l’arrivée prochaine des EMR (travaux, espaces fonciers disponibles ou restreints, etc.), la construction navale (adaptation de la filière navale aux nouveaux besoins exigés par les travaux en mer et l’acheminement des éoliennes offshore), le volet « formation et emploi », la question environnementale (impacts environnementaux du développement des énergies renouvelables en mer), la concertation et les conflits (déroulé de la concertation dans différentes instances, conflits éventuels, forces en présence), les focus réalisés sur des projets locaux (implantation des EMR dans les territoires), les retours d’expérience internationaux (dans une approche comparative avec la filière française). Le graphique obtenu pour ce traitement de la filière EMR est reproduit ci-dessous, suivi d’un commentaire de l’évolution générale de la filière EMR telle qu’elle est présentée par Le Marin.

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Figure 16. Graphique récapitulatif de la revue de presse du journal Le Marin (juillet 2009-juin 2017) Réalisation : A. Oiry, 2017

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de ce graphique. On peut tout d’abord souligner l’inflation du nombre d’articles parus sur les énergies marines renouvelables entre juillet 2009 et juin 2017, signe d’une montée en puissance de la filière : 18 articles paraissent sur le sujet entre juillet et décembre 2009, 37 en 2010, 56 en 2011, 62 en 2012, 121 en 2013 et 149 en 2014, 169 en 2015, 222 en 2016 et 104 entre janvier et juin 2017. Le nombre d’articles qui traitent des EMR a été multiplié par six entre 2010 et 2016. De sujet ponctuel, les EMR se sont progressivement imposées comme un sujet structurant pour le monde maritime, jusqu’à obtenir depuis quelques années une rubrique à part entière dans les pages du Marin.

Sous-titré « l’hebdomadaire de l’économie maritime », le journal privilégie logiquement certains axes. Il fait notamment le choix de donner une large visibilité aux industriels lancés dans la course aux EMR (DNCS, Dong Energy, Vestas, Siemens, General Electric, Adwen, etc.). Le nombre d’articles qui leur est consacré augmente progressivement : 8 articles en 2010, 20 en 2012, 43 en 2015, 72 en 2016. Sur toute la durée de la revue de presse, 281 articles font la part belle aux industriels. Le Marin permet à certains chefs de file du secteur, souvent présentés comme des « champions » de la filière, de s’exprimer dans des tribunes ou lors d’entretiens retranscrits, comme Frédéric Le Lidec, directeur Énergies marines renouvelables de DCNS le 18 novembre 2011 et le 5 avril 2013, ou encore Jérôme Pécresse, président du secteur Alstom Renewable Power le 5 avril 2013. Les articles sont dans leur grande majorité focalisés sur la France, même si la part des retours d’expériences internationaux augmente, notamment entre 2015 et 2016. La France peut de moins en moins se permettre de faire cavalier seul dans la course aux EMR, elle a besoin de l’expérience développée à l’étranger. En outre, la plupart des industriels n’œuvrent pas qu’en France : EDF EN gère par exemple certains pars éoliens en mer au Royaume-Uni. Le Marin suit également l’arrivée de nouveaux pays sur le marché des EMR : « L’Italie se lance dans la course à l’éolien offshore avec un premier parc » (3 janvier 2017), « L’Inde se lance dans la course à l’éolien offshore » (26 janvier 2016), « Éolien : la Corée du Sud a produit ses premières kWh offshore » (30 septembre 2016), « Première licence d’exploitation pour un parc éolien délivré à Taïwan » (9 mai 2017), etc. Le journal se penche également sur l’avancée de la filière EMR aux États-Unis avec une quinzaine d’articles entre 2015 et 2017. Il suit précisément les avancées de la filière, qu’elles soient politiques (résultats des appels d’offres et AMI) ou techniques (suivi de l’innovation), l’évolution des différents projets industriels liés aux EMR (les infrastructures énergétiques en elles-mêmes, mais aussi les sous- stations électriques, les câbles de raccordement, les nouveaux navires dédiés à l’installation des éoliennes offshore, etc.).

A contrario, certains thèmes sont bien moins traités. Les impacts environnementaux sont les grands absents. Entre juillet 2009 et juin 2017, seulement huit articles traitent la question environnementale : le suivi des études d’impacts réalisées par des bureaux d’études est très peu abordé. Le volet « emploi et formation » est largement passé sous silence, avec quinze articles sur toute la durée de la revue de presse : cela semble étrange compte tenu des attentes fondées sur des EMR perçues comme levier potentiel de développement local. Cela peut s’expliquer par les incertitudes pesant notamment sur le nombre d’emplois potentiellement générés par les projets de transition énergétique et par la volonté des consortiums de ne pas donner de faux espoirs aux collectivités. Enfin, l’aspect « conflits et concertation » est reste relativement peu développé, avec seulement une trentaine d’articles. Cela donné l’impression que les EMR s’imposent sans heurts et sans oppositions. Pourtant, si l’opposition reste faible, elle est présente, comme nous le montrerons. Le Marin semble avoir choisi de montrer une filière qui avance résolument, même si elle connaît des incertitudes et des difficultés, une filière qui est portée par des acteurs techno-industriels et des collectivités, dans une logique qui reste largement top-down. Le terme de « transition énergétique » est quant à lui peu usité dans cette revue, c’est la structuration industrielle de la filière et son impact sur les territoires qui sont mis en valeur, plus que les débats idéologiques sur la nature de la transition en cours. Le fait que le journal se focalise essentiellement sur l'économie maritime, comme le mentionne son sous-titre, explique le choix privilégié de certaines thématiques, de certaines postures et oriente son discours. Clairement positionné du côté des industriels, du suivi des projets et de la défense des intérêts des filières maritimes, le journal décrypte peu les conflits provoqués par de nouvelles installations énergétiques : non que le journal tente de les dissimuler,

mais il propose plutôt un panorama descriptif de la nouvelle filière des EMR, qui a servi de contextualisation à toute notre étude.

1.3. Saisir le sens du positionnement des acteurs : la nécessité d'un recul historique

Il m'a paru important, pour chaque territoire étudié, de me pencher sur l'historique des projets énergétiques. Il est frappant de constater à quel point les territoires concernés par les projets d'énergies littorales renouvelables l’étaient déjà par des projets d'implantation de centrales nucléaires. C'est le cas à l'île de Sein, où le projet de centrale nucléaire de Plogoff, avorté en 1981, est encore présent dans les mémoires des îliens. C'est également le cas à Paimpol, sur la côte nord- bretonne, qui espère aujourd'hui profiter de l'image positive transmise par le site test d'hydroliennes au large de l'île de Bréhat, mais qui a vu un fort conflit s'exacerber en 1985-1986 lorsqu'était discuté

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