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CHAPITRE 3 : PRISE EN CHARGE NON PHARMACOLOGIQUE

1.3. Praticien

Les idées préconçues peuvent influencer le bon développement de la séance de soins, or on sait que très tôt l’enfant reçoit une quantité plus ou moins véridique d’informations concernant le chirurgien dentiste.25

1.3.1. Image

En effet, le praticien est souvent représenté comme le bourreau, « l’arracheur de dent », celui qui fait mal. L’image du chirurgien-dentiste est donc assez négative et peut être source de peur chez l’enfant.

E. BERNHEIM a décrit dans sa thèse, avec ironie, les rapports entre l’humoriste et le chirurgien-dentiste. Après le psychanalyste, le praticien est le second personnage le plus représenté dans les histoires drôles, à travers les stéréotypes du patient victime et du dentiste bourreau.113

Dans l’inconscient collectif, l’image stéréotypé du chirurgien-dentiste puissant et craint survit encore, en faisant un personnage hautement « castrateur ».44 Mais heureusement, pour certains psychanalystes, il n’est plus castrateur mais au contraire « revitalisant », en mesure de restituer la puissance masticatoire et l’efficacité esthétique.148 Et comme nous l’avons vu précédemment, ce sont aussi les images de l’inconscient collectif qui sont transmises à l’enfant par ses proches ou ses camarades, il nous reste donc à espérer, quand un enfant entre dans notre cabinet, que c’est le second personnage qui lui a été conté….

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1.3.2. Personnalité

La personnalité du chirurgien dentiste influence, de façon positive ou négative, le niveau d’anxiété de l’enfant et son comportement.160

Ainsi certains praticiens ont naturellement une approche assez autoritaire de l’enfant alors que d’autres ont une approche plus empathique, plus personnelle de l’enfant. Le contexte culturel joue un rôle dans la personnalité du chirurgien dentiste. Il affecte sa manière de communiquer et son rapport à l’autorité.82

Les jeunes patients et leurs parents sont très attentifs au mode de communication des professionnels de santé en général. Le comportement communicatif du chirurgien-dentiste est un facteur majeur dans la satisfaction des patients. Ce comportement agit sur celui de l’enfant et sur l’implication de ses parents dans les soins dentaires.9

1.3.2.1. Facteurs comportementaux de la

personnalité du praticien.

Parmi les nombreux facteurs de la personnalité, on peut citer les trois principaux qui interviennent dans la relation thérapeutique. 25; 82; 149

L’autorité : la façon dont le chirurgien dentiste gère son autorité vis à vis de son jeune patient au cours du soin agit sur le comportement de celui-ci. Les praticiens qui donnent des instructions claires et encouragent l’enfant sont ceux qui rencontrent le moins de conduites non productives. Au contraire les instructions négatives, la contrainte ou la répression semblent conduire à l’augmentation de l’anxiété et donc à des problèmes de comportements au fauteuil. Il faut cependant faire bien attention à alterner les récepteurs de notre communication verbale ( l’enfant mais aussi ses parents ou notre assistance) sous peine de « noyer » notre jeune patient sous un flot auditif trop important.

L’empathie : L’empathie est la faculté de s’identifier à quelqu’un, de ressentir ce qu’il ressent. C’est une autre aire du comportement influencée par la personnalité du chirurgien dentiste. L’empathie comprend une dimension affective et une dimension cognitive. La dimension affective, c’est le fait d’être proche émotionnellement de son patient qui souffre ou se pose des questions, en gardant cependant une distance suffisante pour une relation thérapeutique efficace. La dimension cognitive permet au praticien de saisir par interférence ou par intuition

106 le message de son patient. Ce message peut être transmis par communication verbale ou non verbale et nous renseigne sur les émotions de celui-ci.

Ainsi questionner l’enfant au cours du soin sur ce qu’il ressent et prendre en compte ce ressenti à une influence positive et tend à le rassurer. L’enfant comprend qu’il « participe » au soin et la perte de contrôle au fauteuil, souvent anxiogène, diminue.

Le contact physique : La faculté d’entretenir un contact physique avec un jeune patient est plus ou moins naturelle selon les praticiens. Un contact positif (petite tape sur l’épaule, caresse sur la joue) a des effets bénéfiques en confortant un enfant dans son bon comportement ou en l’aidant à se détendre.

1.3.2.2. Influence de la personnalité sur le

comportement du patient

White décrit 4 types de personnalités : pragmatique, extraverti, aimable, analytique162.

Selon lui, la plupart des praticiens auraient une personnalité de type pragmatique, ils aiment l’autorité qu’ils ont sur leur patient, apprécient le titre de Docteur, et montrent leur autorité par un style vestimentaire assez expressif (blouse blanche, costume, uniforme très identifiable…). Ils comprennent très rapidement le fond des propositions et sont très rapides à prendre des décisions car sûrs d’eux.

Au contraire, le tempérament aimable est lent à se décider et donne plus d’importance à la solidité des liens amicaux qu’aux faits lorsqu’il prend des décisions. Ce sont des personnes plus émotives, chaleureuses qui préfèrent « materner » une décision.

L’extraverti est chaleureux, amical et agressif. Il ne donne aucune importance aux détails, il apprécie les évènements sociaux, politiques et sportifs de haut niveau.

Le type analytique n’est pas agressif et apprécie énormément les détails. Il est plutôt passif et froid. Lorsqu’il s’agit de prendre une décision, il donne souvent l’impression d’avoir besoin d’un détail supplémentaire pour y aboutir.

Il semblerait que les enfants aient plutôt une personnalité de type aimable et les étudiants

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nous allons voir surtout les rapports avec les pragmatiques étant donné que la majorité des dentistes sont de ce type.

aimable-pragmatique : le patient est souvent déconcerté par la rapidité du praticien pragmatique qui souhaite une soumission rapide pour débuter les soins alors que lui souhaite,

avant de démarrer, établir une relation. Le patient veut poser énormément des questions et met trop de temps à se décider pour ce type de praticien.

extraverti-pragmatique : le patient peut paraître difficile car il se base sur l’ « énergie» des

évènements pour prendre une décision. Il ne se sent pas concerné par les détails c’est pourquoi les longues discussions concernant les radiographies ou les modèles prothétiques peuvent être bannies.

analytique-pragmatique : ce type de patient aime développer les détails et demande de

nombreuses explications. La difficulté vient du fait qu’il veut connaître chaque détail avant le début du traitement et avant de pouvoir prendre sa décision. Pour le praticien pragmatique, ces patients semblent repousser constamment la décision à opter pour un traitement.

1.3.3. Influence de l’anxiété de l’enfant sur le

Chirurgien-dentiste

Comme nous l’avons vu précédemment, le comportement du chirurgien-dentiste peut induire de l’anxiété chez l’enfant. A l’inverse, l’anxiété de jeunes patients peut influencer le comportement du praticien.102; 145

Le chirurgien-dentiste est constamment confronté à ce vécu anxieux et il est pleinement conscient d’en être le responsable. Ces conditions de travail créent un climat qui rend la situation de soins difficile pour les deux parties ; au début le chirurgien-dentiste qui n’a pas l’habitude de soigner des enfants a souvent du mal à être détendu à l’approche de son patient anxieux, ce qui a un impact sur l’anxiété de ce même patient.25 Et ce « double » stress peut entraîner une diminution des visites chez le dentiste voire un abandon des soins ce qui, bien sûr, a un effet négatif sur la santé bucco dentaire de cet enfant.145

En 1999, une étude menée par Ten Berge et coll. a en effet mis en évidence l’adaptation du comportement du chirurgien-dentiste au niveau d’anxiété de son jeune patient. Les résultats de cette étude montrent que les enfants qui ont été adressés dans des centres spécialisés en soins dentaires ont vu leur anxiété diminuer. Une approche plus directive a été observée ; il

108 semblerait que face à un enfant nerveux, le chirurgien-dentiste ait besoin de plus prendre le contrôle et ce afin de structurer l’enfant. On peut donc conclure que ce type d’approche a eu un effet positif au long terme chez ces enfants.145

Il est donc nécessaire pour le praticien de gérer au mieux son stress en limitant au

maximum ses comportements négatifs comme l’irritabilité, l’impatience, l’agressivité ou

encore les maladresses envers son jeune patient.126

1.3.4. Expérience de soins avec un enfant

Comme nous l’avons vu précédemment, l’état émotionnel du chirurgien-dentiste a un impact important sur les enfants et vice versa. Ceci devient évident quand on observe un étudiant soigner ses premiers jeunes patients. Ainsi une augmentation des problèmes

comportementaux de l’enfant a été observée chez les étudiants en comparaison avec des

cliniciens expérimentés.25

Cependant il est à noter que l’expérience ne fait pas tout et que l’on peut aussi observer un comportement défavorable chez un praticien installé et ceci à cause d’aléas professionnels ou personnels.9

L’intérêt de l’expérience en odontologie pédiatrique est d’acquérir un sens clinique qui permettra au praticien d’évaluer le niveau d’anxiété de son jeune patient et donc par la suite de s’y adapter. En identifiant correctement les raisons du refus de soin chez l’enfant on

peut ainsi mettre en place une stratégie de prise en charge adaptée.68