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III. SYSTEME D’ANALYSE DE LA VALEUR DES ESPACES ENVIRONNEMENT

2. Services environnementaux

2.1. Préservation de la biodiversité

La valeur de la biodiversité est la dimension a priori la plus importante. Ce n’est pas pour autant la plus facile à évaluer. Elle est relativement facile à quantifier quand on focalise l’analyse sur des espèces naturelles qui ont ou acquièrent une valeur économique.

Pour les espèces, ou les cortèges d’espèces, sauvegardées au titre de la conservation de la biodiversité, mais dont la valeur ne peut être établie sur un marché, les approches classiques consistent à estimer les niveaux de consentement à payer auxquels consent la société pour assurer cette conservation. On raisonne alors sur les espèces ayant une valeur emblématique, d’ordre symbolique ou culturelle (le loup, l’ours…), ou une valeur d’usage (pour la chasse notamment).

Valeur des espèces

Exemple 1 : Fiche 78. Forêts de mangrove en Thaïlande.

• Estimer les conséquences économiques de la diminution de la biodiversité due à la déforestation de la Mangrove dans la province de Surat Thani (Golf de Thaïlande)

Méthode : Les mangroves sont considérées comme un « intrant » dans la production alimentaire. L’étude évalue le rôle joué par la mangrove dans la production de poissons. Cette démarche croise deux réflexions de nature différente.

● La connaissance approfondie du rôle que joue la mangrove dans le cycle de vie des espèces de poissons exploitées. Elle requiert l’étude des processus biologiques à l’œuvre et des analyses statistiques des relations entre les populations de poissons et la mangrove.

● La connaissance du marché de la pêche et des facteurs qui le sous-tendent. La valeur des forêts de mangrove est évaluée en prenant en compte les changements de valeur des poissons sur le marché qui sont consécutives à l’altération de la mangrove.

Résultat : En Thaïlande, les auteurs estiment que :

ƒ Les conséquences de la perte de 1200 ha de mangrove (taux annuel de déforestation de la région étudiée au début des années 90) dépendent à la fois des espèces de poissons concernées et des caractéristiques du marché.

ƒ Les estimations de pertes de crustacés et coquillages sont généralement moins importantes que celles de poissons démersaux (qui vivent en profondeur). ƒ Si les ressources sont exploitées par des sociétés de pêche, les pertes pouvant

résulter du recul de la mangrove sont estimées à 100 000 US$ par an (soit 77 000 euros), attribuées pour moitié à une baisse de production de coquillages et crustacés et, pour l’autre moitié, au recul de la pêche de poissons démersaux. ƒ Pour la pêche en libre accès, les pertes dépendent de la sensibilité des consommateurs aux variations de prix du poisson. Ces pertes économiques consécutives à la disparition de 1200 ha de mangroves sont supérieures quand les consommateurs sont très sensibles aux évolutions des prix : on estime qu’elles peuvent atteindre 132 000 US$ soit près de 105 000 euros.

ƒ Lorsque les consommateurs sont peu sensibles aux variations de prix, les pertes sont inférieures (40 000 US$, soit 31 500 euros) : dans ce cas-ci, les pêcheurs peuvent compenser la diminution de poisson par une augmentation des prix. Les pertes se situeront entre ces deux valeurs.

Préservation des espèces emblématiques

Exemple 2 : Fiche 87. Zones protégées d’Alberta (Canada).

• Mesurer la valeur d’usage du caribou par le biais de la méthode de modélisation des choix (cf. partie méthodes).

Résultat : Les populations de caribou et les zones naturelles qui constituent leurs habitats ont des utilités marginales significatives et positives. Les préférences exprimées pour la présence des caribous augmentent en fonction du nombre de bêtes, jusqu’à un seuil de population d’environ 600 individus. Les préférences n’augmentent pas au-delà de ce seuil.

Le consentement à payer pour augmenter la population de caribou à un niveau plus élevé que le niveau actuel est relativement bas : pour accroître la population de 600 à 800 individus, les ménages de la région d’Alberta seraient disposés à débourser 26$ par an par ménage (19 euros).

Services fournis par les espèces

La valeur de la biodiversité ne se réduit pas à la valeur d’existence et de legs pour les générations futures. La biodiversité rend des services écologiques qui ont un intérêt économique direct. Le plus emblématique est la pollinisation assurée par les insectes, processus essentiel à la réussite de certaines cultures.

Exemple 3 : Fiche 88. Etats-Unis.

• Estimer la valeur des services fournis par les insectes, en particulier la pollinisation, la protection des végétaux (contrôle des insectes nuisibles aux cultures), la dégradation de la matière organique et la nutrition de la faune.

Méthode : Comme dans la plupart des études évaluant l’intérêt économique des services

environnementaux, c’est la méthode des coûts évités qui est privilégiée.

Résultat : Les insectes constituent une ressource alimentaire essentielle pour la faune

sauvage, source d’activités récréatives telles que la chasse, la pêche ou encore l’observation. Les citoyens américains dépensent environ 60 milliards de dollars (42 milliards d’euros) dans ces activités (recensement 1996).

Les auteurs estiment la valeur des services écologiques fournis aux Etats-Unis par les insectes à au moins 57 milliards $ (38 milliards €). Ils considèrent que leur estimation globale est relativement basse, notamment parce qu’ils ne disposent pas des données nécessaires à l’évaluation d’autres services fournis pas les insectes qui peuvent être potentiellement importants. Le montant estimé se répartit comme suit : 0,4 milliards $ (23 milliards €) liés à l’enfouissement des déjections animales, 4,5 milliards $ (3 milliards €) pour la protection des cultures, 3 milliards $ (2 milliards €) pour la pollinisation et 50 milliards $ (33 milliards €) pour les loisirs. Ces montants justifient, à eux seuls, de plus amples investissements dans la conservation des espèces et la maximisation de ces services.