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Afin d’éclairer la problématique de ce travail, les auteures ont décidé de choisir la théorie de gestion des symptômes (TGS) de Dodd et Humphrey (2001) comme cadre théorique de référence. La théorie employée est la version française de cette théorie de niveau intermédiaire. Cette version est à la fois une traduction et une adaptation de la théorie réalisée par Eicher et al. (2013).

L’université de Californie à San Francisco (UCSF), a introduit le modèle de gestion des symptômes. La conceptualisation de ce modèle théorique s’est basée sur plusieurs modèles préexistant tels que : la théorie de l’autosoin (Denyes, Orem, & Bekel, 2001) et le modèle de « Symptoms of Self-care » (Sorofman, Tripp-Reimer, Lauer, & Martin, 1990).

Les membres de l’UCSF, après voir réalisé cette analyse, ont décrété que les modèles ci-dessus ne suffisaient pas à montrer de façon suffisante le rôle

des personnes dans leurs autosoins et dans leur stratégie de gestion des symptômes. C’est pour cette première raison, qu’ils ont jugé pertinent de réaliser un nouveau modèle sur la gestion des symptômes. En 2001, ce modèle a été peaufiné par Dodd, Janson & al et en 2008 par Humphrey, Lee & al. Cette théorie a pour but de placer l’expérience vécue des symptômes, des personnes atteintes de maladies chroniques, au centre des soins infirmiers (Dodd et al., 2001 ; Humphreys et al., 2008).

En effet, mettre l’expérience vécue de la personne atteinte dans sa santé à la base du processus de soins infirmiers représente, aujourd’hui, un réel enjeu pour la pratique. De plus, le tableau des symptômes se complexifie avec l’arrivée des pathologies chroniques et évolutives. C’est pour cette raison que cette théorie a un intérêt certain pour l’évolution de la pratique clinique infirmière ainsi que pour la recherche.

Dodd, Janson, et al.,(2001) ont soumis six hypothèses pour l’utilisation de la théorie :

1. L’évaluation des symptômes doit se baser sur la perception de l’individu qui expérimente le symptôme et qui l’auto-évalue.

2. Ce modèle s’applique aux personnes qui vivent une expérience de symptômes mais il peut être aussi utilisé pour les personnes susceptibles de développer des symptômes à cause de l’influence du contexte de vie.

3. Lorsque les personnes ne peuvent pas s’exprimer verbalement, les soignants doivent tenir compte de l’interprétation de l’expérience des symptômes proposés par les proches.

4. Tout symptôme gênant doit être géré.

5. Les stratégies de gestion de symptômes peuvent s’adresser à la personne, une famille, un groupe ou un environnement de travail.

6. La gestion des symptômes est un processus dynamique qui peut être modifié par les résultats obtenus par la personne et par les interrelations entre la personne, la santé/maladie et l’environnement. (Dodd et al., 2001)

De plus, comme dit précédemment dans le travail, il est relevé qu’actuellement l’espérance de vie des populations augmente mais parallèlement à cela, il y a également une augmentation des maladies chroniques ainsi que des symptômes associés. Ceci sous-entend que la gestion des symptômes est un défi considéré comme majeur pour le XXIe siècle.

Concernant l’ancrage disciplinaire du modèle employé pour ce travail, cette théorie appartient au paradigme de l’intégration, selon les paradigmes identifiés par Newman, Sime et Corcoran (1991). La TGS fait également partie de l’école de pensé des besoins.

La théorie de gestion des symptômes est représentée schématiquement, voir Figure 1 : Schéma conceptuel de la TGS . Dans cette théorie, Dodd, Janson, et al (2001) on décrit trois concepts tirés du métaparadigme infirmier (Fawcett, 2005), ce qui permet de l’insérer à la science infirmière. Les concepts sont les suivants pour Dodd, Janson, et al :

Le concept de personne fait explicitement appel aux variables démographiques, psychologiques, sociologiques, développementales et physiologiques. Ces dernières font intrinsèquement partie de la manière dont un individu perçoit et répond à une expérience de symptôme. […] Le concept d’environnement fait appel aux conditions ou contextes externes à la personne dans lesquels un symptôme apparaît. Il inclut des variables physiques, sociales et culturelles. […] Enfin, le concept de santé/maladie comprend des variables liées à l’état de santé d’une personne et inclut ses propres facteurs de risque, les accidents subis et ses handicaps.(Dodd et al., 2001, p. 16)

Ce modèle théorique met en avant trois concepts majeurs interreliés qui sont les suivants : « expérience des symptômes, stratégies de gestion du symptôme, résultats obtenus sur l’état du symptôme ».

Le premier concept est l’expérience du symptôme. Celui-ci est un changement dans les sensations habituelles d’une personne. Face à l’évaluation et à la perception individuelle qu’une personne fait face à un changement, elle va adopter une réponse. La réponse va permettre à la personne soit de diminuer le symptôme soit de le supporter si elle décide de ne rien faire. Ce concept peut inclure un symptôme unique ou un groupe de symptômes « symptom cluster » (Eicher et al., 2013). En lien avec la thématique de ce travail, le groupe de symptôme en relation avec l’insuffisance cardiaque serait par exemple : dyspnée, fatigue, œdèmes.

La perception et la réponse face au symptôme vont varier selon le contexte. Un symptôme qui perdure va certainement être vu comme un désagrément dans sur la vie quotidienne de la personne.

La stratégie de gestion des symptômes est le deuxième concept de la théorie. Il correspond « aux efforts fournis par la personne pour prévenir, retarder ou encore atténuer l’expérience de ses symptômes » (Eicher et al., 2013). Dans cette théorie, l’importance est portée sur l’autogestion des symptômes ce qui donne plus de responsabilité à la personne. Dans la TGS,

les notions d’auto soins (Orem, 2001) ou d’autogestion des symptômes (Bodenheimer, Lorig, Holman, & Grumbach, 2002) sont importantes.

Pour préciser le concept de stratégies de gestion des symptômes, les auteurs de la théorie proposent de définir les stratégies comme étant une combinaison d’interventions qui influence les symptômes des bénéficiaires de soins. La stratégie des symptômes à plusieurs objectifs : « réduire la fréquence de l’expérience du symptôme, minimiser la sévérité du symptôme et soulager le fardeau associé au symptôme » (Portenoy et al., 1994).

La notion d’individualisation est également un élément essentiel. En effet, il a été prouvé que le développement de stratégies/d’interventions individualisées à la personne (ou à sa famille) augmente significativement l’adhérence aux comportements nouveaux.

Finalement, le troisième concept est « Les effets obtenus sur l’état des symptômes ». Ce dernier : « inclut les changements objectivables de l’état du symptôme » (Eicher et al., 2013). Ces résultats qui découlent des différentes stratégies utilisées, doivent être mesurables et précis. Le but de ces effets est d’améliorer la qualité de vie de la personne. L’objectif, à travers ce concept, c’est de pouvoir estimer l’efficacité de la stratégie de l’individu.

Ce qui est intéressant avec cette théorie, dans le cadre de ce travail de Bachelor, c’est qu’une amélioration de l’état des symptômes va avoir un impact positif sur le fonctionnement physique mais également psychique de la personne. Cette amélioration va amener une meilleure qualité de vie mais va

également avoir un impact au niveau économique. En effet, si les symptômes diminuent (en intensité, en pénibilité ou en fréquence), la durée de l’hospitalisation va également diminuer, entraînant ainsi une réduction des coûts. Tout cela a un impact positif sur le système de santé en général.

Dans ce modèle de théorie de soins infirmier, le concept de l’adhérence est primordial. En effet, il se définit : « comme la manière dont le destinataire reçoit ou utilise la stratégie prescrite » (Dodd et al., 2001). Ce concept a une action importante sur les liens entre stratégies de gestion du symptôme et les résultats obtenus. Effectivement, la gestion des symptômes ne peut être pertinente si l’individu n’adhère pas aux différentes stratégies mises en place. A partir de là, la notion de non-adhérence intervient : En effet, « la non adhérence est observée dans un contexte où les interventions sont trop exigeantes, non applicables ou d’application inconsistantes » (Dodd et al., 2001).

La non-adhérence est représentée sur le modèle de la théorie par une flèche brisée, qui se situe entre stratégie des symptômes et effets obtenus. La non-adhérence est un concept modifiable, c’est pour cette raison que les auteures ont trouvé pertinent d’intégrer ce concept, aux concepts prioritaires de ce travail de Bachelor.

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