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Aux fins de notre étude, des prédicats ont été sélectionnés en fonction de la variété du degré d’engagement qu’ils expriment, c’est-à-dire de l’affirmation, la mitigation et la non affirmation de la valeur de vérité des propositions où l’engagement du locuteur est total, partiel ou absent. Nous avons construit une échelle représentant un continuum d’engagement en tenant compte dans un premier temps de la distinction factif /non-factif présentée par Kiparsky et Kiparsky (1970). Nous avons aussi considéré les travaux de Hooper et Terrell (1974) avec les distinctions assertion/présupposition, de Givón (1994) avec la distinction réalis / irréalis et de Giorgi & Pianessi (1997) avec la source ordonnante des contextes d’évaluation.

Les prédicats de notre étude sont organisés comme il suit : 1) assertions :

a. engagement fort du locuteur i. phrases impersonnelles ii. phrases personnelles b. engagement mitigé du locuteur c. engagement faible du locuteur d. verbes créateurs de mondes

2) non-assertions : a. présuppositions i. informatives ii. non-informatives b. non-présuppositions : i. ordres

Dans notre sélection nous avons inclus des prédicats épistémiques (d’assertion et de doute) où se trouve une étendue difficile à préciser dans la zone intermédiaire du continuum du degré d’engagement du locuteur. Nous avons également inclus des prédicats factifs-émotifs qui entrainent des présuppositions et qui exigent le subjonctif (non-informatifs) alors que les prédicats factifs d’activité mentale exigent l’indicatif (informatifs). Finalement, nous avons inclus des prédicats d’ordre pour vérifier si ces derniers sont plus faciles à acquérir que les prédicats épistémiques. Nous voulions observer s’il y avait des différences dans l'acquisition de ces prédicats en relation avec la langue maternelle (L1) des individus et leur niveau de compétence en L2.

Nous pouvons ordonner les prédicats assertifs dans un continuum selon le degré d’engagement du locuteur par rapport à la valeur de vérité de la proposition commençant avec saber (savoir) et continuant avec des affirmations impersonnelles telles que es verdad (il est vrai), es indudable (il est indubitable), es evidente (il est évident) et está clarísimo (il est très claire). Nous continuons avec des affirmations personnelles telles que estar seguro de (être sûr de), asegurar (assurer), apostar a (parier) et afirmar (affirmer) (61-66). Ensuite, au milieu de ce continuum nous trouvons creer (croire), pensar (penser) et parecer (impersonnel - il semble). Et dans la continuité à un dégré moindre nous avons suponer (supposer) et adivinar (deviner). Et tous ceux-ci entrainent l’indicatif à l’exception de suponer (supposer) qui peut entrainer le subjonctif dans certains dialectes. Les assertifs niés (102-112) bien qu’acceptant l’indicatif favorisent le subjonctif. Ce dernier représente un moindre degré d’engagement du locuteur.

(102) Pierre affirme que la fête de Marie est en avril (103) Pierre n’affirme pas que la fête de Marie est en avril (104) Pierre n’affirme pas que la fête de Marie soit en avril (105) Pierre a affirmé que la fête de Marie était en avril (106) Pierre n’a pas affirmé que la fête de Marie était en avril (107) Pierre n’a pas affirmé que la fête de Marie soit/fût en avril

À l’intérieur des verbes assertifs (de fiction) qui entrainent l’indicatif, nous trouvons aussi des verbes tels que imaginarse (s’imaginer) (108-112), inventar (inventer) et soñar (rêver).

(108) Pierre imagine que la fête de Marie est en avril (109) Pierre n’imagine pas que la fête de Marie soit en avril (110) Pierre imaginait que la fête de Marie était en avril

(111) Pierre n’imaginait pas que la fête de Marie était en avril (112) Pierre n’imaginait pas que la fête de Marie soit en avril

Dans le même continuum mais plus proche de l’extrémité du non engagement, nous trouvons des phrases impersonnelles telles que es más que probable (il est plus que probable), es muy probable (il est très probable), es totalmente imposible (il est totalement impossible) et es imposible (il est impossible). Ces phrases entrainent le subjonctif. Finalement, à l’extrême du continuum, nous trouvons le verbe dudar (douter) qui entraine lui aussi le subjonctif. Ces prédicats ne sont ni des assertions ni des présuppositions. Ils s’apparentent à des assertions (115) très nuancées (113-114) :

(113) Dudo que haya llegado Je doute qu’il soit arrivé est plus proche de

(114) No creo que haya llegado Je ne pense pas qu’il soit arrivé que de

(115) Creo que llegó

Par ailleurs, nous trouvons les prédicats évaluatifs ou factifs-émotifs qui présupposent la vérité de la subordonnée et qui ne présentent pas de nouvelle information ; d’une certaine manière, ils en sont une conséquence : alegrar (réjouir) (116-117), dar alegría (rendre heureux), dar gusto (faire plaisir), gustar (plaire - aimer), dar pena (faire de la peine), es una pena (il est dommage), indignar (indigner), fastidiar (énerver), entristecer (rendre triste), doler (avoir de la peine), dar vergüenza (faire honte), avergonzarse de (avoir honte), sorprender (suprendre), parecer (atributif sans OI) (trouver) et parecer (atributif avec OI) (il me semble).

(116) Me alegra que haya venido Il me fait plaisir qu’il soit venu (117) Me alegró que viniera

Il m’a fait plaisir qu’il soit venu

Malgré le fait d’être émotif, tener miedo de (avoir peur de) diffère du groupe précédent parce qu’il n’est pas factif, il ne présuppose pas la vérité de la subordonnée mais anticipe plutôt une possibilité.

(118) Tengo miedo de que se haya ido J’ai peur qu’il soit parti

(119) Tuvo miedo de que se fuera Il a eu peur qu’il fût parti

Les prédicats factifs d’activité mentale qui présupposent aussi la vérité de la subordonnée sont supposés ajouter de la nouvelle information aux connaissances partagées et c’est pourquoi ils entrainent l’indicatif : recordar (se souvenir), olvidar (oublier) et olvidarse de (oublier).

(120) Pedro olvida siempre que el cumpleaños de María es en abril. Pierre oublie toujours que la fête de Marie est en avril

(121) Pedro nunca olvida que el cumpleaños de María es en abril. Pierre n’oublie jamais que la fête de Marie est en avril

Finalement, nous avons inclus des prédicats déontiques pour vérifier si ces derniers sont plus faciles à acquérir que les prédicats épistémiques. Parmi les six verbes que nous avons choisis, deux sont implicatifs : hacer (faire) et impedir (empêcher), tandis que les quatres autres ne le sont pas : sugerir (suggérer), pedir (demander de) et ordenar (ordonner) ainsi que prohibir (interdire).

Ces prédicats ni assertifs ni présuppositionnels se trouvent dans une échelle d’implication allant de l’affirmation à la négation et il y a entre les deux extrémités du spectre une suspension de la valeur de vérité : affirmation (122), ni affirmation- ni négation (123), négation (124).

(122) Le hace que se quede hasta las 5 todos los días Elle le fait rester jusqu’à cinq heures tous les jours Elle fait qu’il reste jusqu’à cinq heures tous les jours Est-ce qu’il reste jusqu’à 5h?

Il reste (p = vrai)

(123) Le ordena quedarse hasta las 5

Elle lui ordonne de rester jusqu’à cinq heures tous les jours Elle ordonne qu’il reste jusqu’à cinq heures tous les jours Est-ce qu’il reste jusqu’à 5h?

Il reste (p = ni vrai, ni faux)

(124) Le impide que se quede hasta las 5

Elle l’empêche de rester jusqu’à cinq heures tous les jours Elle empêche qu’il reste jusqu’à cinq heures tous les jours Est-ce qu’il reste jusqu’ à 5h?

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