1. Des protéines toxoplasmiques exportées modulent l’expression
génique de la cellule hôte
A mon arrivée dans l’équipe en 2010, un des axes de recherche de l’équipe visait à mieux
comprendre la communication entre le parasite et sa cellule hôte par l’identification et la
caractérisation de protéines exportées par le parasite après l’invasion (PSP), qui viendraient
interférer avec les voies de signalisation de la cellule infectée.
Plusieurs effecteurs parasitaires ont été découverts, dont GRA16 qui est la première
protéine de granule dense exportée au-delà de la vacuole parasitophore vers le noyau de la
cellule infectée (84). Cette protéine régule la transcription de gènes de l’hôte impliqués
principalement dans le métabolisme et le cycle cellulaire. Son action est médiée par une
interaction avec l’ubiquitine-protéase HAUSP, un régulateur du suppresseur de tumeur p53,
et par une autre interaction avec la phosphatase 2A (PP2A) contribuant à la translocation
nucléaire de cette enzyme.
Une deuxième protéine exportée par le parasite, GRA24, promeut une réponse immune de
type Th1 chez l’hôte l’infecté, en stimulant la sécrétion de plusieurs cytokines (IL-12) et
chimiokines (MCP-1) pro-inflammatoires. GRA24 agit ainsi en stimulant
l’auto-phosphorylation de la MAP-Kinase p38α, qui stimule à son tour l’expression/activation de
plusieurs facteurs de transcription (c-Fos, EGR1, CREB…) responsables de la régulation de
l’expression des cytokines proinflammatoires. GRA24 contribue ainsi au contrôle la
réplication précoce du parasite au site d’infection dans l’intestin (85).
GRA16 et GRA24 constituent donc désormais une nouvelle famille de protéines hébergées
par les granules denses qui, une fois déversées dans l’espace vacuolaire, ont la capacité
inédite de traverser la PVM et d’être dirigées dans le noyau de la cellule hôte où elles
modulent l’expression génique (132).
2. Une enzyme plasmodiale à activité cytokinique est un facteur de
virulence sécrété
Cet axe de recherche PSP a trouvé un écho particulier avec les travaux publiés dans Nature
en 2011 par nos collaborateurs le Dr. Amit Sharma (ICGEB, New Delhi) et le Dr. Hassan
40
Tyrosyl-ARNt Synthétase, une enzyme cytoplasmique de Plasmodium falciparum
(PfTyrRS) (133). Cette protéine, à l’image de son homologue humaine aux activités
cytokiniques pro-angiogéniques, possède un motif ELR (glutamate-lysine-arginine) –
retrouvé également dans la séquence de l’IL-8. Cependant, dans la version humaine, ce
motif nécessite, pour se retrouver exposé à la surface de la molécule, le clivage d’un peptide
EMAP II-like C-terminal et la libération de la forme mini-TyrRS, tandis que la version
plasmodiale exprime ELR de manière constitutive (Figure 6 A). L’utilisation d’anticorps
dirigés contre PfTyrRS suggérait la présence de la protéine dans le cytoplasme des
érythrocytes infectés (Figure 6 C), malgré l’absence d’un signal d’export dans sa séquence.
Figure 6. Sécrétion de PfTyrRS. A : organisation des Tyrosyl-RS humaine, de P. falciparum et de S. cerevisiae. B : Chimiluminescence de lysats et de surnageants de culture cellulaire ; anticorps dirigés contre PfTyrRs, PfDTD, PfmsP1 and Pf falcipaïne 2. C : Microscopie confocale de P. falciparum (stades asexués ; anti-sérum de lapin dirigé contre PfTyrRS). D : Microscopie confocale montrant la liaison et l’internalisation de PfTyrRs (PfTyrRs : souche sauvage ; contrôles : sérum de lapin avant immunisation ; mutant de PfTyrRs avec motif ELR remplacé par AAA, et anticorps seuls sans TyrRS).
Reprinted by permission from Macmillan Publishers Ltd: Nature communications, 2, Bhatt TK, Khan S, Dwivedi VP, Banday MM, Sharma A, Chandele A, et al. Malaria parasite tyrosyl-tRNA synthetase secretion triggers pro-inflammatory responses. 2011, 530, copyright 2011.