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Chapitre 4 : Accessibilité de l’espace atlantique

4.2. Portes d’entrée et de sortie : les réseaux portuaires

4.2.1. La situation européenne

Á l’échelle mondiale, la mer est un rimland et l’Europe une péninsule eurasienne. Or, pour suivre Yves Lebahy (1996), « la réalité continentale de l’Europe constitue la donnée majeure à prendre en considération avant tout approche » mais dénonce l’occultation qui en

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est déduit, celle « d’un foyer majeur (…) de l’économie-monde [qui] dépend de la mer pour environ 85% de ces échanges ». L’Europe constitue avec le Sud-Est Asiatique et l’Amérique du Nord, les trois grands pôles maritimes qui ont vu leur développement accéléré par la mondialisation et l’adaptation des modes de transport. Les axes transatlantique, transpacifique et Europe/Extrême-Orient sont devenus les routes maritimes tissant la trame du réseau mondial. Les grandes compagnies de transport se sont d’ailleurs focalisées sur ces dernières et par effet d’association ont formé des alliances globales. Ces routes aboutissent évidement à des points, des nœuds : les ports. Ils constituent les portes d’entrées et de sorties des échanges de marchandises. Leur existence cristallise la fonctionnalité de façade maritime.

La façade atlantique, malgré son passé dynamique, apparaît en retrait vis-à-vis de la Méditerranée ou de la Baltique dans de nombreux domaines. Malgré cela, André Vigarié (2004) déclare que les « marges atlantiques sont une incitation permanente aux échanges par mer ». Il rappelle tour à tour la navigation « millénaire » de « cap à cap » marquée par le transport des vins entre l’Aquitaine, la région du Douro (Porto) et le Royaume-Uni, le commerce du sel vers les pays nordiques ou encore l’approvisionnement en charbon anglais lors de la révolution industrielle le long du littoral atlantique. Cependant, le modèle économique, emprunt à dégager de nouvelles rentabilités pour pouvoir lutter dans le concert de la compétitivité entre modes de transport, a provoqué un glissement des activités portuaires vers de nouveaux processus logistiques. Il a pour fondement « la massification du transport maritime, de la manutention portuaire et de la desserte ferroviaire » (P. Tourret, R. Lacoste, 2004). Ainsi, se sont édifiées de véritables plaques tournantes de la trame maritime de transport. Les grands armateurs, après s’être rassemblés au sein d’alliances globales, ont choisi de s’appuyer sur quelques nœuds du réseau pour décharger, recharger, stocker et redistribuer leurs marchandises. Ces ports de transbordement appelés « hubs » se situent sur les liaisons océaniques (deep sea) citées précédemment. Les interconnexions (short sea) se réalisent grâce à des navires de petites tailles (feeder) plus adaptés à la rentabilité de redistribution liée à la conteneurisation. Cette conteneurisation des marchandises concourt à la logique de massification qui réduit le nombre d’escales. Or, dans une concurrence accrue, chaque port parfait ses atouts pour attirer les armateurs. Les ports de la Rangée Nord européenne (du Havre à Hambourg) ont profité de la présence d’un vaste hinterland à fortes capacités économiques pour jouer cette fonction de nœud multipolaire du réseau maritime mondial (l’Allemagne est par exemple un des plus grands pays exportateurs au monde). En 2006, le transit du port de Rotterdam était supérieur à 370 millions de tonnes de marchandises (dont plus de 9 millions d’EVP52), Anvers plus de 160 millions (dont 6 millions d’EVP), Hambourg plus de 125 millions (dont 8,1 millions d’EVP). Á titre de comparaison, au niveau mondial, les ports de Shangaï et de Singapour, en 2006, atteignaient respectivement 443 et

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423 millions de tonnes de marchandises (pour 18,1 et 23,2 millions d’EVP). Au niveau de la façade atlantique, le faible nombre de ports déteint sur ses performances, si on excepte les ports du Havre (75 millions de tonnes dont 2,1 millions d’EVP) et d’Algeciras (68 millions de tonnes dont 3,2 millions d’EVP) situés aux extrémités de l’espace atlantique. Pour le tonnage en 2006, le port de Milford Haven (Wales) était le leader avec 37,5 millions de tonnes de marchandises, soit dix fois moins que celui de Rotterdam (figure 36). Le port de Liverpool maintient sa première place atlantique sur le trafic des conteneurs avec 612 milliers d’EVP pour un score dix fois inférieur à celui d’Anvers. Positionné entre la puissante Rangée Nord et la Méditerranée, zone dans laquelle des ports de transbordement comme Algeciras (Andalucia), Gioia Tauro et Tarente en Italie du Sud ou Malte se sont érigés en grands ports de transbordement sur la route maritime Est-Ouest, la façade atlantique se retrouve marginalisée. Néanmoins, André Vigarié perçoit une certaine vitalité du transport maritime atlantique à travers les lignes feeder de redistribution (le cabotage), les lignes historiques toujours actives et la présence de niches liées à la multiplicité des arrière-pays atlantiques dégageant des spécificités.

Figure 36 : Trafic total de marchandises en 2006 dans les principaux ports européens et atlantiques

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4.2.2 : Le réseau portuaire atlantique, une façade ?

Il faut une fois de plus reconsidérer l’objet d’étude à travers cette fois le prisme du réseau portuaire européen. Pour conséquences, les ports d’Algeciras, du Havre (Haute-Normandie) et de Southampton (Hampshire) sont considérés comme ports atlantiques. Toutefois, dans nombre d’études, Algeciras appartient au littoral méditerranéen, ce que justifie sa position de carrefour des routes Nord/Sud et Est/Ouest que parcourent les flux méditerranéens. Si le port du Havre est englobé dans la Rangée Nord, celui de Southampton, à l’instar de Felixtowe, tend à y être inclus dans les analyses comme celle effectuée par Tourret et Lacoste pour l’ISEMAR et l’IAAT à propos de « l’état et contexte des trafics des ports atlantiques » (2004). En les réintégrant au sein du trafic atlantique, ces trois ports demeurent les plus dynamiques et forment les têtes de pont du réseau atlantique portuaire (figure 37)).

Le port du Havre (et de Rouen) profite évidemment de la présence du bassin parisien connecté à lui via la Seine. Le Havre est un cas exemplaire d’ambitions portuaires pour rester compétitifs vis-à-vis de la concurrence. En ce sens, le vaste projet d’aménagement « Port 2000 », une fois parachevé, aura permis de tripler les capacités d’accueil notamment du trafic conteneurisé. La construction des deux nouveaux terminaux successivement en 2006 et 2007 (Terminal de France et Terminal Porte Océane) se traduit déjà en termes d’augmentation pour l’année 2007 : +6,6% en tonnage total et +25,3% en EVP. Cette politique volontariste d’investissements (1,3 milliard d’euros pour 1400 mètres de quais) est la résultante d’une vive concurrence au sein des ports de la Rangée Nord. Pourtant, le port normand possède un arrière-pays de dimension européenne relié par le réseau autoroutier, fluvial ou encore ferroviaire, avec des plates-formes logistiques acheminant plus de 100 000 EVP53, en provenance d’Italie du Nord (Novare/Turin), d’Allemagne (Mannheim) et de France (Dourges, Paris-Valenton, Strasbourg, Lyon, Marseille, etc.). D’autres étaient en projet pour 2008 (Bâle, Duisbourg, Angers). La réouverture d’une liaison de fret ferroviaire entre la plate-forme de Cognac (Charente) et du Havre symbolise et résume toute la complexité du transport maritime (lire encadré54). Outre la concurrence que l’on a pu saisir précédemment entre les modes routier et ferroviaire, l’organisation du transport de spiritueux (Cognac et vodka) souligne l’invisibilité de la façade atlantique, pourtant kilométriquement proche, au profit des véritables portes de sortie et d’entrée sur le marché mondial, situées sur la Rangée Nord entre Seine et Elbe. Le port de La Rochelle est délaissé (1h18 par route pour 109 km) tout comme celui de Bordeaux (1h30 pour 130 km), ville vers laquelle se dirigeaient les camions auparavant avant de…rejoindre Le Havre par voie ferrée ! L’exportation de spiritueux démontre toute l’incongruité des logiques de transports de marchandises (notamment de la prédominance du tout-camion) tout comme l’influence et la concurrence qu’opère

53 Données chiffrées provenant de la brochure éditée par le Port Autonome du Havre (janvier 2008) 54

Figure 37 : Trafic portuaire en 2006 sur la façade atlantique

(…) Chaque mardi et jeudi, un train d’une contenance de 30 containers part de la gare de Cognac, direction Le Havre. « Un train de containers, c’est 40 à 50 poids lourds en moins sur les routes », assure Pierre Duprat, le directeur général de Naviland Cargo [l’affréteur]. Dans le sens montant, les containers sont essentiellement chargés en spiritueux. Dans l’autre sens, ce sont des bois pour la tonnellerie, des produits manufacturés et du carrelage chinois qui sont déchargés à Cognac. Á lui seul, Henessy utilise dix wagons par voyage. Chez le leader du cognac, la logistique, c’est l’affaire de Jean de Miranda. Chaque année, il expédie près de 1 ,5 million de caisse vers l’Asie, [soit] l’équivalent de 1000 wagons. Le fret ferroviaire ne couvre évidemment pas tous les trajets en camion. Des caisses conditionnées dans un container partent en poids-lourds depuis les sites de production vers la gare de Cognac, (…) direction Le Havre, où il [ndlr : le container] est chargé dans un porte containers qui file ensuite vers la plate-forme de Singapour. « Après tout est dispatché vers les marchés asiatiques, explique Jean de Miranda. Avant la remise en service de Cognac-le Havre, nous allions en camion jusqu’à Bordeaux, puis par le train jusqu’au Havre. Vu de Cognac, une ligne de fret jusqu’au Havre, c’est bien. Jusqu’à Anvers, c’est mieux ». Jean de Miranda l’avoue sans détour : « Si une ligne de fret nous reliait à Anvers [port d’où partent les expéditions maritimes vers les Etats-Unis, principal marché du cognac], on l’utiliserait c’est sûr. Nous avons du mal à trouver des transporteurs belges. En général, ils sont obligés de descendre à vide. Ils n’aiment pas trop ».

Pour Naviland Cargo, le marché apparaît alléchant. Les Etats-Unis, ce sont 4,5 millions de caisses par an pour la catégorie cognac, soit un potentiel de 3000 wagons annuels. Olivier Marembaud [ndlr : directeur général délégué du fret SNCF] déclare : « Ouvrir une ligne jusqu’à Anvers, c’est imaginable. S’il y a une vraie demande, nous l’étudierons, d’autant que nous avons une ligne Hendaye-Anvers. Nous pourrions réfléchir à son raccordement à Cognac. » (…)

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le port du Havre sur l’arrière-pays atlantique. Or, lui-même demeure en sursis au profit du port d’Anvers, porte de sortie vers l’Amérique du Nord. Enfin, les acteurs du réseau portuaire atlantique doivent travailler à exploiter les avantages que lui offre son arrière-pays dont on a vu la moindre accessibilité. Cette désaffection prouve que les grandes lignes maritimes mondiales excluent la façade atlantique qui finalement pour 2004 ne couvrait que 9% du commerce par la mer de l’Union européenne des 15. Pour André Vigarié, ces chiffres « révèlent déjà un mélange de forces et de faiblesses ».

En réalité, les ports atlantiques s’appuient essentiellement sur un arrière-pays national. Comme le souligne Tourret (2004), à « (….) la différence du reste du continent, la dimension plurinationale des hinterlands des ports de l’extrême Ouest européen est quasi nulle ». En 2004 et en 2007, seuls quatre ports, en termes de trafics globaux, dépassent 30 millions de tonnes (Milford Haven, Bilbao, Nantes-St Nazaire, Liverpool). En Grande-Bretagne, Milford Haven traite essentiellement des produits pétroliers mais semble stagner. Le port de Liverpool conserve son marché vers l’Amérique du Nord mais endure le délicat rétablissement de son arrière-pays touché par le déclin. Cette régionalité de la façade atlantique britannique diffère des autres façades notamment pour Southampton, classé ici en Manche, ou en mer du Nord (Felixtowe, Londres, Hull, etc.), qui traitent « les hydrocarbures des plates-formes, les importants flux rouliers (voitures neuves, camions) et conteneurs » (P. Tourret, 2005) en provenance de la mer du Nord ce qui explique également le tonnage développé par Sullon Voe. En Irlande, l’évolution du port de Dublin est fortement attachée au dynamisme du pays. Or, celui-ci semble ralentir et malgré une position de porte d’entrée insulaire, son rang reste secondaire au sein du réseau atlantique. Positionnés sur des secteurs spécifiques, les ports de Shannon (charbon) et Cork (pétrole) se rendent visibles alors que Rosslare ou Waterford privilégient les trafics passagers. En Irlande du Nord, Belfast concentre les trafics, Larne et Warrenpoint complétant la façade intérieure de la Mer d’Irlande, au final bien pourvue en sites portuaires. Au Portugal, le port principalement vraquier de Sines progresse de 20% en fréquentations entre 2003 et 2006 ce qui est considérable à l’échelle atlantique. L’investissement dans la construction du Terminal pour traiter le Gaz Naturel Liquide y a contribué (figure 38). Néanmoins, le port souffre d’une desserte routière et ferroviaire réduite. Les autres ports de premier ordre au Portugal sont ceux de Lisboa et de Porto (Leixoes) mais restent discrets sur la façade atlantique, Lisboa stagnant entre 2003 et 2006. Ils demeurent actifs sur certaines liaisons à travers des services Nord-Sud (Afrique de l’Ouest, Amérique du Sud) ou par des feeders vers l’Europe du Nord. Setubal et Aveiro se hissent également au sein du réseau portuaire portugais. Comme pour l’Irlande actuellement, le Portugal a souffert d’un ralentissement de la croissance économique dès 2002 se répercutant sur le trafic portuaire. En Espagne, la « masse épaisse ibérique » selon les propos d’André Vigarié « n’est pas toujours favorable à la circulation maritime ». L’éloignement de la région madrilène n’a pas incité au développement portuaire atlantique. La façade dynamique espagnole est d’ailleurs

Figure 38 : Évolution de l’infrastructure portuaire de Sines (R. Macário, 2006)

méditerranéenne. Cependant, Bilbao tire profit de sa fonction de porte d’entrée pour le trafic des conteneurs notamment. Le port est en constante augmentation avec pour 50% de trafics vers l’Europe du Nord. Le port sidérurgique de Gijón (charbon, fer) et le port énergétique et chimique de Huelva connaissent la stabilité. Les ports espagnols (Ferrol, A Coruña, Santander, Avilés) ont bénéficié de l’explosion de la demande chinoise en matière de produits sidérurgiques et continuent de faire vivre la façade maritime nord espagnole mais reste dangereusement dépendants de leur spécificité et de la situation internationale. En France, Nantes-St Nazaire se hisse en troisième position du réseau atlantique et en première pour la partie française. Ce résultat doit être relativisé par le fait que ce port ne représente qu’un tiers du trafic des ports du Havre/Rouen et de Marseille. Nantes se positionne encore sur des liaisons Nord-Sud notamment vers les Antilles Françaises, l’Afrique de l’Ouest ou l’Océan Indien. Les autres ports français sont cantonnés vers une sphère régionale courtisée et stagnent dangereusement. Nantes, La Rochelle et Bordeaux se retrouvent directement en concurrence sur les mêmes services. En Aquitaine, le port de Bayonne continue de subsister face à Bordeaux. En Bretagne, la coexistence oblige à se situer sur des niches de marchandises : produits frais et viandes pour Brest, agroalimentaires pour Lorient, etc.

L’intérêt de différencier le trafic vraquier au trafic « divers » est l’écart en termes de valeur ajoutée. En effet, le trafic vraquier se partage en deux catégories, les vracs liquides (pétrole brut, produits pétroliers raffinés et des gaz) et les vracs secs (minerai de fer, charbon et céréales). Comme le précise Paul Tourret, « ces marchandises [ne possèdent pas] de forte valeur unitaire à la tonne et supportent mal les coûts de transport terrestre ». Les conséquences sur l’utilisation du réseau portuaire en découlent avec une proximité des zones où les marchandises sont extraites (région agricole, bassin sidérurgique, complexe énergétique) avec les ports vraquiers. Ces derniers constituent des niches où la concurrence est réduite car dépendante de l’arrière-pays. Ainsi, le port de Milford Haven prend son importance dans sa spécialisation sur la façade maritime britannique atlantique par le traitement du trafic pétrolier : en 2006, pour 36,5 millions de tonnes traitées, 97% étaient des

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Figure 39 : Répartition des trafics de marchandises pour les ports atlantiques en 2006

vracs liquides (figure 39). D’autres ports apparaissent dans ce sillage avec des caractéristiques similaires : Nantes-St Nazaire, Sines, Sullon Voe ou Orkney. En Écosse, nombreux sont les ports tournés vers les gisements pétrolifères de la mer du Nord le long de la façade orientale. Le port de Nantes-St Nazaire possède sur le site de Montoir le seul terminal méthanier de la façade maritime, permettant de lui adjoindre une position majeure dans le secteur énergétique en Europe. Pour Sines, l’aménagement du terminal GNL a été déterminant. Mais ces deux ports se reportent également sur le secteur des vracs secs (exportation de blé) complétant leur panel et les rendant plus généralistes. D’autres ports atteignent un trafic vraquier conséquent (supérieur à 20 millions de tonnes) mais sont plus généralistes et moins dépendants des produits vraquiers : Le Havre, Algeciras, Southampton, Bilbao ou Liverpool (figure 40). En 2006, le poids de ce type de trafic oscille entre 35% (Algeciras) et 76% (Southampton). Là encore, les vracs liquides, notamment les produits pétroliers, sont présents pour les ports de Southampton et Bilbao, portes d’entrée dans ce domaine pour le sud de l’Angleterre et le nord de l’Espagne. Paul Tourret dénonce malgré tout une « dualité effacée, entre un port dominant les trafics pétroliers et un port secondaire qui fut autrefois rival ». Il s’agit pour la France de Nantes et Bordeaux, pour le Royaume-Uni de Milford Haven et du couple Manchester/Liverpool, pour l’Espagne de Bilbao avec A Coruña, pour le Portugal de Sines avec Leixoes et même en Irlande où le port de Cork domine celui de Dublin.

Figure 40 : Poids du trafic vraquier dans les ports atlantiques en 2006

Les autres ports qui transparaissent au niveau atlantique se reportent sur un trafic de vracs secs et se spécialisent sur le créneau des produits sidérurgiques. Ainsi, les ports de Gijón (19,6 millions de tonnes de vracs secs) et de Port Talbot (8,6) sont à la pointe de la sidérurgie en Europe. Leur situation géographique, sur les flancs de la chaîne cantabrique pour le premier, à l’extrémité des Midlands de tradition minière pour le second, a installé et concentré l’exploitation sidérurgique dont les ports font office de portes d’entrée. Dans ce secteur, on retrouve les ports de Nantes/St Nazaire (unité de fabrication d’acier plat et de bobines) et de Ferrol (fabrication d’aluminium générant l’importation de bauxite et d’alumine). Enfin le secteur agro-alimentaire en France notamment entraîne l’activité de ports spécialisés comme Rouen, La Rochelle ou Nantes (marché du blé), Bordeaux ou Bayonne (maïs), Lorient (tourteaux de soja), Brest (volailles). Dans le reste de la façade atlantique, les autres ports (Santander, Shannon, Glensada, Setubal, Aviles, etc.) disparaissent sur le marché des produits divers de plus forte valeur ajoutée. On s’aperçoit nettement d’une spécialisation du trafic de vraquier autour du Golfe de Gascogne. Les grands ports (Le Havre, Southampton, Algeciras) intégrés au réseau mondial sont plus diversifiés mais surtout portés vers la conteneurisation, modèle en cours de transport de marchandises de forte valeur ajoutée. Ce système profite aux

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grands ports même si les ports de Liverpool, Dublin, Lisboa, Bilbao ou Leixoes parviennent à émerger. Le maintien de lignes historiques Nord-Sud ou la connexion par feedering aux lignes principales est indispensable à cette survie.

La disparition d’un grand nombre de port sur la conteneurisation est signe de non intégration au réseau mondial. Certains ports se rattrapent sur le trafic roulier qui repose en grande partie par la présence d’îles et les flux liées à l’industrie automobile intra-européenne (figure 41). Ce type de trafic se localise à proximité des lieux de production : Dublin et Cork en Irlande, Bristol et Southampton en Angleterre, Setubal au Portugal, Vigo, Santander, Bilbao et Pasajes en Espagne, Le Havre et Nantes/St Nazaire en France. Le fret de passages et de véhicules offre également aux ports une activité certaine. Les liaisons de type car-ferry sont présentes exclusivement en Mer d’Irlande et en Manche. Les ports d’interface en Mer d’Irlande sont Dublin (20 millions de tonnes en trafic RoRo dont 1,2 millions de passagers), Larne (5,4 dont 0,9 millions de passagers), Liverpool (11,1 dont 0,6 millions de passagers), Belfast (1,4 millions de passagers), Holyhead (2,1) ou Stranaer (1,2). En Manche, on trouve Portsmouth (2,7), St Malo (1,1), Cherbourg (0,8), Roscoff (0,7) ou Plymouth (0,6). On voit alors s’ériger un réseau intra-atlantique, certes discret (faible connexion entre le Sud et le Nord), mais réel où se mêlent lignes de cabotage passager, lignes feeder et liaisons maritimes mondiales.

L’existence d’un réseau portuaire se définit donc par le dynamisme de ces nœuds, ces ports, et les liens entre eux. Il est cependant délicat de fixer sur une carte les liaisons maritimes tant celles-ci s’esquissent, naissent et meurent au gré des opportunités, des velléités des amateurs et des politiques portuaires. Pour les passagers, si la saisonnalité peut primer, on note plusieurs lignes comme constaté à partir des îles britanniques. La compagnie P&O et sa filiale Irish Ferries assure au départ de Larne (Irlande du Nord) des liaisons vers Troon et Cairnryan

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