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Polynôme caractéristique d'une transformation linéaire

Soitf :V→V une transformation linéaire, de matricesMetMdans les bases

B

et

B

. Rappelons que nous avons défini le polynôme caractéristique deM (page151) : c’est le polynôme CM(z) = det(M− zIn). Puisque M= P−1M P, où P est la matrice de

passage de

B

à

B

, on a M−zIn= P−1M P−P−1zInP = P−1(M−zIn)P. Comme le déterminant d’un produit de matrices est le produit des déterminants, on en déduit

CM = det(M− zIn) = det

P−1(M− zIn)P

= det(P−1) det(M− zIn) det P = det(M− zIn) det(P−1) det P = C

M(z) , car det(P−1) = (det P )−1.

Si des matrices représentent la même transformation linéaire dans des bases différentes, elles ont le même polynôme caractéristique.

Le polynôme CM ne dépend donc que de la transformation f.

Définition

Si la transformation f a pour matrice M dans une base de V, le polynôme CM

s’appelle le polynôme caractéristique de f et se note Cf.

Pour calculer le polynôme caractéristique d’une transformation f, on peut utiliser la matrice de f dans n’importe quelle base.

Conséquence. Comme le polynôme caractéristique ne dépend que de f, chacun de ses coefficients ne dépend que de f. Puisqu’on a

CM(z) = (−1)n

zn+ (−1)n−1(tr M )zn−1+· · · + a1z + det M ,

on en déduit que

®le déterminant de M ne dépend que de f : on pose det f = det M.

2.3 Noyau et image d'une application linéaire

Soient V et V des K-espaces vectoriels et f : V → V une application linéaire.

®L’ensemble N ={u ∈ V | f(u) = 0} est un sous-espace vectoriel de V.

Le vecteur nul de V appartient à N , car f (0) =0. De plus, si u et v appartiennent à

N, on a f (u + v) = f (u) + f (v) =0+0=0 et pour tout λ∈ K, f(λu) = λf(u) = λ0=0, donc u + v et λu appartiennent à N .

®Soit W un sous-espace vectoriel de V. L’ensemble f (W ) des vecteurs f (w), où

w parcourt W, est un sous-espace vectoriel de V.

En effet, si v1 et v2 sont des vecteurs de la forme v1 = f (w1) et v2 = f (w2), alors

w1+ w2∈ W et v

1+ v2 = f (w1+ w2) est bien image par f d’un vecteur de W ; de même, λw1 appartient à W et λv1 = f (λw1).

Définitions

Soit f : V → V une application linéaire.

®Le sous-espace vectoriel de V formé des vecteurs v∈ V tels que f (v) = 0

s’appelle le noyau de f et se note Ker f.

®L’image de l’application f, c’est-à-dire l’ensemble f (V ), est un sous-espace vectoriel de V noté Im f.

Lorsque les espaces vectoriels sont de dimension finie, le calcul matriciel permet de trouver les vecteurs du noyau et de l’image : on utilise pour cela la proposition suivante.

Proposition. Supposons que

B

et

B

 sont des bases de V et V. Soit f : V → V une application linéaire et soit M la matrice de f dans ces bases.

®Un vecteur v∈ V est dans Ker f si et seulement si ses coordonnées X sont solution du système linéaire M X = 0.

®Un vecteur v∈ V est dans Im f si et seulement si ses coordonnées sont combinaison linéaire des vecteurs-colonne de M.

Corollaire. Supposons V et V de dimension finie. On a les égalités :

i)dim Ker f = dim V rgM;

ii)dim Im f =rgM;

iii)dim Ker f + dim Im f = dim V (formule de la dimension)

Démonstration.Les solutions de l’équation M X = 0 forment un sous-espace vectoriel de

dimension n−r, où n=dimV et r =rgM (résultat2page114). D’après les propriétés page165, ce sous-espace vectoriel a la même dimension que le noyau de f , d’où(i). Posons dim V= p. Par définition de la matrice de f , la dimension de Im f est celle du sous-espace vectoriel de Kp engendré par les colonnes de M . D’après le théorème page137, cette dimension est égale au rang de M , ce qui montre(ii). L’égalité(iii)résulte immédiatement de (i)et (ii). 

Corollaire. Soient V et V des espaces vectoriels tels que dim V = dim V et soit

f : V → V une application linéaire.

®f est bijective si et seulement si Ker f ={0}.

®On a les équivalences : f est bijective ⇐⇒ Im f = V⇐⇒ dim(Im f) = dim V.

Démonstration.Choisissons des bases de V et V et soit M la matrice de f . Puisque

dim V = dim V= n, la matrice M est carrée de taille n. D’après une proposition page 170, l’application linéaire f est bijective si et seulement si M est inversible. Utilisons la proposi-tion page138 : M est inversible si et seulement si le système linéaire M X = 0 a pour seule solution X = 0, ce qui équivaut à Ker f ={0}. D’après la même proposition, M est inversible

si et seulement si rg M = n, ce qui équivaut à dim(Im f ) = dim V, ou encore à Im f = V puisque Im f est un sous-espace vectoriel de V (propriété (4)page 165). 

3. Diagonalisation

Dans ce paragraphe,

®V est un K-espace vectoriel de dimensionn et (e1, e2, . . . , en) est une base de V ;

®f est une transformation linéaire de V et M est la matrice de f dans la base

(e1, e2, . . . , en).

Définitions

Un vecteur v non nul tel que f (v) est colinéaire àv s’appelle unvecteur propre de

f. Si v est un vecteur propre, le scalaire λ∈K tel que f (v) = λv s’appelle lavaleur propre associée. On dit aussi que v est vecteur propre pour la valeur propre λ.

Exemple. f (av) (1/2)av av f (av + bw av + bw ) f (bw) (3/2)bw bw x y

Pour la transformation de R2 définie par

f (x, y) = (x− y/2, −x/2 + y) :

®on af (1, 1) = (1/2)(1, 1), donc le vecteur v = (1, 1)

est vecteur propre pour la valeur propre 1/2;

®le vecteur w = (1,−1) est propre pour la valeur propre 3/2, car f (w) = (3/2)w.

La droite dirigée parv est transformée en elle-même, de même que la droite dirigée par w.

Exemples

®Si r :R2R2 est une rotation de centre l’origine et d’angle θ∈ [0, 2π[ et si v est un vecteur non nul, l’angle v, r(v)a pour mesure θ : une rotation d’angle différent de 0 et de π n’a donc pas de vecteur propre.

®Soit p :R3R3 la projection orthogonale sur un plan vectoriel P (figure page

168). Pour tout vecteur v∈ P, on a p(v) = v : tout vecteur non nul du plan P est donc vecteur propre de p, avec 1 comme valeur propre. Soit u un vecteur non

nul et orthogonal à P; alors p(u) est le vecteur nul, donc p(u) = 0u : le vecteur

u est vecteur propre pour la valeur propre 0.

®D’une manière générale, les éventuels vecteurs non nuls de Ker f sont les vecteurs propres de f pour la valeur propre 0.

Supposons queλest une valeur propre def. Pour toutx∈V, posonsg(x)=f (x)−λx, ce qui définit la transformation linéaire g = f− λ idV. Par hypothèse, il existe un vecteur propre v tel que f (v) = λv, donc g(v) = 0. Le vecteur v est non nul et appartient au noyau de g : d’après le dernier corollaire du paragraphe précédent, l’application g n’est donc pas bijective.

Réciproquement, si λ est un scalaire et si la transformation f − λ idV n’est pas bijective, il existe un vecteur v non nul dans le noyau de f− λ idV. On a alors

0 = (f− λ idV)(v) = f (v)− λv, donc f (v) = λv et λ est une valeur propre. Puisque la matrice de f − λ idV est M− λIn, on en déduit :

un scalaire λ∈K est une valeur propre de f si et seulement si la matrice M− λIn n’est pas inversible.

Rappelons que, par définition, le polynôme caractéristique def estCf(z)=det(M−zIn)

(page171). Puisque la matriceM−λInest inversible si et seulement si son déterminant est non nul, on a la proposition suivante.

Proposition. Les valeurs propres de f sont les nombres λ∈K qui sont racines du

polynôme caractéristique de f.

Le polynôme caractéristique de f étant de degré n, f possède au plus n valeurs propres.

Remarques

®Si M est une matrice triangulaire, les valeurs propres def sont les nombres situés sur la diagonale de M.

En effet, si M = [mij] est triangulaire, alors M− zIn aussi, donc det(M− zIn) est le produit (m11− z)(m22− z) · · · (mnn− z) des termes diagonaux.

®Si t est un scalaire, la matrice M− tIn est inversible sauf pour un nombre fini de valeurs exceptionnelles de t, constituées précisément des racines du polynôme caractéristique de M.

®Si toutes les racines du polynôme caractéristique de M sont dans K, la somme des valeurs propres de M est égale à la trace de M.

Si ces racines sont λ1, . . . , λn, alors (−1)nCM= (z−λ1)· · ·(z−λn)(page171). Puisque le coefficient de zn−1 est − tr M , il vient − tr M = −λ1−λ2− · · · −λn.

Exemple 1. Reprenons la transformation f de R2 de matrice M = 1 −1/2 −1/2 1 (exemple page173). On a det(M−zI2) =  1−z −1/2 −1/2 1−z   = z2−2z + 3 4 =  z− 1 2   z− 3 2 

Les valeurs propres de f sont 1/2 et 3/2. Pour calculer, par exemple, les vecteurs propres pour la valeur propre 1/2, on résout le système linéaire



M−1 2I2



X = 0 : les solutions sont les vecteurs t(1, 1).

Exemple 2. PosonsMθ=

cos θ − sin θ sin θ cos θ 

, où0θ<2π. Le polynôme caractéristique de M est CM= det(A− zI2) = cos θ− z − sin θ sin θ cos θ− z   = (cosθ − z)2+ sin2θ .

®Supposonsθ différent de0et deπ, c’est-à-diresinθ=0. AlorsCM n’a pas de racine réelle, ce qui correspond au fait que la rotation d’angleθ n’a pas de vecteur propre.

®Supposons θ = 0. On a M0 = I2, le polynôme caractéristique est (1− z)2

et la transformation de R2 définie par X → M0X est l’identité : tout vecteur non nul de R2 est propre pour la valeur propre 1.

®Supposons θ = π. On a Mπ =−I2, le polynôme caractéristique est (1 + z)2 et la transformation de R2 définie par X → MπX est − idR2 : c’est la symétrie par rapport à l’origine. Tout vecteur non nul deR2 est propre pour la valeur propre−1.

®Soit f :C2 C2 la transformation définie par X → MθX. Puisqu’on a CM =

z2−(2cosθ)z+1=(z−ei θ)(z−e− i θ), les valeurs propres def sontei θete− i θ. On a

Mθ 1 i  = cos θ− i sin θ sin θ + i cos θ  = e− i θ1 i  et Mθ  1 − i  = ei θ  1 − i  donc  1 − i 

est vecteur propre de f pour la valeur propre ei θ et le vecteur conjugué

1 i 

est propre pour la valeur propre conjuguée e− i θ.

Étude des vecteurs propres

Proposition. Supposons que λ1, λ2, . . . , λk sont des valeurs propres deux à deux diffé-rentes. Siu1,u2,. . .,uk sont des vecteurs propres pour ces valeurs propres, alorsu1,u2,. . .,uk

sont indépendants.

Démonstration.Si k = 1, la propriété est vraie car u1 est un vecteur non nul. Raisonnons

par récurrence en supposant que la propriété est vraie pour k− 1 vecteurs. Supposons que

les vecteurs u1, u2, . . . , uk satisfont la relation

(1) x1u1+ x2u2+· · · + xkuk=0.

Par hypothèse, on a f (ui) = λiui, donc en appliquant f à l’égalité (1), il vient (2) x1λ1u1+ x2λ2u2+· · · + xkλkuk=0.

Multiplions (1) par λk et soustrayons à (2) :

x11− λk)u1+ x22− λk)u2+· · · + xk−1k−1− λk)uk−1=0.

Les vecteurs u1, . . . , uk−1 sont indépendants. D’après l’hypothèse de récurrence, on a donc

xii− λk) = 0 pour tout i = 1, . . . , k− 1. Puisque λi= λk, on en déduit xi= 0 pour tout

i = 1, . . . , k− 1. L’égalité (1) devient xkuk= 0, d’où xk= 0, car uk n’est pas le vecteur nul. 

Définition

Soit λ une valeur propre de f. Le noyau de la transformation f− λ idV s’appelle le sous-espace propre pour la valeur propre λ et se note V (λ).

Un vecteur v est dans V (λ) si et seulement si f (v)− λv = 0 : les vecteurs propres de f pour la valeur propre λ sont exactement les vecteurs non nuls appartenant à

V (λ). Un sous-espace propre contient donc des vecteurs non nuls.

Notation. Si λ est une valeur propre de f, notons m(λ) la multiplicité de λ

comme racine du polynôme caractéristique de f (page47). Si λ est racine simple du polynôme caractéristique, on dit que c’est unevaleur propre simple.

Proposition. Pour toute valeur propre λ de f, on a dim V (λ) m(λ).

Démonstration.Soient v1,v2,. . .,vdune base de V (λ). Si d = n, alors V (λ) = V : dans ce cas,

tous les vecteurs non nuls de V sont propres avec λ pour valeur propre ; on a alors f = λ idV,

Cf(z) = (λ−z)n et la multiplicité de λ est n. Supposons maintenant d < n. D’après le théorème de la base incomplète (page164), il existe une base de V de la forme (v1, . . . , vd, wd+1, . . . , wn). Puisqu’on a f (vi) = λvi pour i = 1, . . . , d, la matrice de f dans cette base est de la forme

M= 

λId

0 N



, où N est une matrice carrée de taille n− d.

On a M− zIn= ⎡ ⎢ ⎢ ⎢ ⎢ ⎢ ⎢ ⎣ (λ−z)Id 0 N−zIn−d ⎤ ⎥ ⎥ ⎥ ⎥ ⎥ ⎥ ⎦

et d’après la proposition page151, il vient

Cf(z) = det(M− zIn) = det (λ−z)Id

det(N− zIn−d) = (λ− z)ddet(N− zIn−d) .

La racine λ de Cf a donc une multiplicité au moins égale à d. 

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