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Le président de Lagardère Publishing, patronyme adopté en 2006, met en œuvre une politique de concentration dans trois bassins linguistiques cité ci-dessus : l’anglophone (Etats-Unis et Grande-Bretagne), l’hispanophone (Espagne et Amérique latine) et le francophone ; il se penchera ensuite seulement sur les pays en développement, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), tenant compte des études sur les potentiels de développement du marché du livre dans ces nouveaux marchés émergents. (Voir graphique page x).

Arnaud Nourry renforce son management pour appliquer sa politique de concentration. En 2008, un poste de directeur responsable des fusions et acquisitions auprès du président d’Hachette Livre est créé et confié à une jeune économiste, Maria Dorriots. « A ce titre, elle est en charge des relations avec les banques d'affaires et assure la coordination des projets de croissance externe du Groupe. » (Communiqué du groupe, 20 février 2008)

Le profil de Maria Dorriots, née en Argentine et d’origine suédoise, est éloquent : la nouvelle directrice avait commencé sa carrière dans la banque d’affaires Lehman Brothers à Londres, puis elle était entrée dans le cabinet de conseil en stratégie McKinsey & Co à Stockholm, puis à Paris.

Elle ne reste au poste stratégique des fusions et acquisitions que deux ans (jusqu’en 2010) ; la fonction est conservée, mais le changement de titulaire démontre l’instabilité des structures nouvelles mises en place par le groupe. Maria Dorriots prendra la direction de la co-entreprise Hachette Jeunesse Collection Disney.

Lagardère justifie sa politique de concentration par l’évolution du marché mondial du livre :

« Les éditeurs français vendent plus qu’ils n’achètent (6637 titres cédés, 1672 acquis en 2004), tous secteurs et toutes langues confondus. Les cessions se font essentiellement vers les marchés d’Europe du sud ou hispanophones, d’Europe centrale et orientale. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni fournissent plus des 2/3 des acquisitions des droits des éditeurs français (source SNE/

Centrale de l’édition, Les échanges de droits étrangers en 2004) » (Source :

Dominique Cartellier, 2007)

La tendance s’est accentuée : en 2013, les éditeurs français ont vendu 11 892 droits de traduction (en augmentation de 10,1 % par rapport à 2012) et en ont acquis 2 710 (+ 38,1 %) (Source : SNE, Statistiques France et international, donnée 2013, juin 2014)

Les principaux marchés du livre

Le graphique ci-dessous met en évidence les six principaux marchés du livre et notamment la prépondérance du marché américain, celui sur lequel Hachette s’interroge et dans lequel il cherche à améliorer son implantation.

(Source : Global Trends in Publishing 2014, rapport de Rüdiger Wischenbart pour la Foire du Livre de Francfort, du 7 au 12 octobre 2014, p. 3)

1 – En France et dans le bassin hispanophone

L’éclatement du groupe Vivendi permet à Lagardère de prendre le contrôle de sa branche édition (Vivendi Universal Publishing, VUP) en 2002 ; l’opération a déclenché la colère des éditeurs indépendants :

« Lorsqu’il s’est posé comme repreneur, le groupe de Lagardère était soutenu par l’Etat. Outre ses liens particuliers avec le pouvoir politique, divers arguments ont pu justifier un tel soutien, parmi lesquels celui d’ordre économique de permettre l’émergence d’un champion national susceptible de rivaliser avec les acteurs du marché mondial. Ce faisant, le degré de concentration de l’édition frnaçaise atteignait un niveau inédit, avec une position quasi monopolistique dans le secteur scolaire et majoritaire dans celui du poche et la distribution et risquant de mettre en péril nombre de petits éditeurs. »

(Dominique Cartellier, 2007)

Les autorités de la concurrence européennes ont limité le périmètre des maisons reprises, Lagardère conserve néanmoins un éditeur universitaire, Armand Colin, un éditeur d’ouvrages techniques, Dunod, et le célèbre Larousse (qui édite non seulement le dictionnaire, mais aussi la collection des ouvrages de référence en grammaire française, le Bescherelle), renforçant son pouvoir de marché sur ce segment d’activité éditorial.

Certes, Lagardère aurait souhaité conserver l’intégralité des marques et maisons d’édition de VUP, mais la cession ordonnée par les autorités de la concurrence de Bruxelles du dictionnaire Le Robert, de Nathan, Bordas, Plon, Perrin, Robert Laffont, Julliard, les livres de poche 10/18 ou Belfond Pocket, lui permet de renforcer son périmètre.

Le rachat de VUP permet en outre à Lagardère de prendre le contrôle du groupe espagnol Anaya. Celui-ci, constitué par voie de fusions successives d’une vingtaine de maisons d’édition, permet à Hachette de devenir également leader de l’édition scolaire et universitaire en Espagne. Après le rachat du groupe Aique Grupo Editor en Argentine en 2004 et de Grupo Editorial Patria en 2007 au Mexique, Lagardère étend son leadership en Amérique latine.

Après ces acquisitions Lagardère peut mettre en œuvre une première synergie ; la collaboration entre Larousse et Anaya aboutit à l’édition de dictionnaires en langue espagnole.

Aujourd’hui, le groupe Anaya, composé de huit sociétés et de quatorze maisons d’éditions, a accru ses activités au-delà de l’éducation, pour publier aussi des ouvrages de culture, de loisirs et de divertissement.

Hachette Livre était déjà présent dans la péninsule ibérique après avoir racheté dès 1988, Editorial Salvat, un éditeur fondé à la fin du XIXe siècle à Barcelone et réputé pour ses encyclopédies. Hachette avait pris pied non seulement en Espagne mais aussi au Portugal et dans cinq pays latino-américains, l’Argentine, le Mexique, le Chili, le Pérou et, surtout, le Brésil où elle commercialise les produits du groupe. Acquérir Anaya avait un sens pour Hachette.

2 – Dans le bassin anglophone

Arnaud Nourry va accélérer le développement international d’Hachette Livre au Royaume-Uni. Le terrain n’est pas vierge puisque Jean-Louis Lisimachio avait déjà affirmé l’ambition de Lagardère de s’implanter dans le bassin linguistique anglo-saxon dès 1998. Cette année-là et à deux mois d’intervalle, il avait mené à bien le rachat d’Orion, éditeur spécialisé aussi bien dans les livres de grande diffusion que dans les beaux livres, les poches ou les ouvrages pour la jeunesse et Cassell, spécialisé en littérature générale, en livres grand public et ouvrages de référence. En 2001, Jean-Louis Lisimachio a continué sa politique d’implantation dans le bassin linguistique le plus porteur en rachetant Octopus, un éditeur dont le catalogue est riche de plus de 100 000 titres illustrés consacrés à la décoration, le bricolage, le jardinage, la cuisine ou le voyage.

Le Royaume-Uni reste un terrain privilégié pour Hachette Livre qui multiplie les rachats pour atteindre le format international, tel que le définit Arnaud Nourry. Il réussit à racheter en 2005 le quatrième éditeur britannique, Hodder Headline (lui-même issu de la fusion entre Hodder & Stoughton, éditeur d’une congrégation protestante, et Headline Publishing Group en 1993) ; la transaction a été difficile, le groupe Pearson (Penguin Books, Simon & Schuster, Fremantle Media et Financial Times) étant lui-même candidat au rachat.

Avec Hodder Headline, principal éditeur en Australie et en Nouvelle-Zélande, dont le catalogue rassemble des auteurs de best-sellers comme Stephen King, John Le Carré ou Harlan Coben, Hachette Livre s’implante profondément dans le bassin anglophone.

Après avoir pris le contrôle de Hodder Headline, Hachette Livre rachète, en 2006, le célèbre éditeur d’encyclopédies écossais Chambers (qui a lui-même racheté Harrap’s en 1992). Le groupe se conduit comme un véritable prédateur puisqu’en 2009, Chambers ferme son bureau d’Edimbourg et licencie les 27 employés, lexicographes pour la plupart, et scinde les activités : les publications de Chambers seront gérées par Hodder Headline et les dictionnaires Harrap’s seront gérés en France par Larousse.

C’est la première fois que le groupe Hachette fait éclater une maison d’édition, démontrant ainsi que l’indépendance des maisons, affirmée en permanence, a des limites économiques.

Après les éditeurs du Royaume-Uni, Arnaud Nourry se tourne vers les Etats-Unis :

« Restait un tabou : les Etats-Unis, jusqu’ici synonymes de désastre pour les ‘’Hachette boys’’. « Nous avions ciblé Time Warner comme priorité stratégique. Pas trop gros, il partageait une véritable ‘’affectio societatis’’ ainsi que quelques auteurs avec nos amis anglais. » Coup de chance, la cible est mise en vente, et Hachette remporte l’affaire malgré la rude concurrence de HarperCollins, qui est tout sauf un nain de jardin. Avec un chèque plus gros sur la table ? « Pas du tout, répond Nourry. Nous étions face à des gens puissants, mais nous avions une bonne réputation et les équipes en place nous voulaient. C’est ce qui a fait la différence. Le pire dans un rachat, c’est quand les cinq ou six personnes qui comptent dans la boîte se tirent avec leur portefeuille d’auteurs. On n’achète pas un éditeur pour les contrats déjà signés mais pour les contrats à venir. »

(Cité par Thierry Gandillot, Challenges, avril 2009)

A la suite du rachat de la division livre de Time Warner, le cinquième éditeur américain qui édite 400 nouveautés par an, le groupe crée une filiale américaine, Hachette Book Group pour gérer ses diverses maisons d’édition aux Etats-Unis, où l’indépendance éditoriale n’est pas aussi sensible qu’en France.

Avec les rachats de VUP en France, de Hodder Headline au Royaume-Uni et de Warner Book aux Etats-Unis, le groupe Lagardère a investi plus de 750 millions d’euros en deux ans.

Son principal concurrent en Europe, le groupe allemand Bertelsmann, lui, a investi plus tôt aux Etats-Unis en prenant le contrôle dès 1998 du premier éditeur américain, Random House, devenant ainsi le leader mondial du livre, prenant de vitesse un groupe Hachette qui recherche alors de nouveaux terrains à investir dans la course à la domination mondiale de l’édition du livre.

3 – Dans les BRICS

Après avoir acquis des positions fortes dans les trois grands bassins linguistiques, Hachette Livre se tourne vers la conquête des marchés des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Le groupe ne délaisse pas les autres marchés comme celui du Moyen-Orient où, en janvier 2010, il crée un joint-venture à 50/50 avec la Librairie Antoine au Liban (son siège est à Beyrouth) pour l’édition d’ouvrages en langue arabe exclusivement.

L’Afrique est également un axe de développement pour Hachette Livre, notamment les pays francophones, misant sur leur croissance économique et démographique, mais surtout sur leurs besoins en alphabétisation et en matière de livres scolaires. Dans l’ensemble de ces pays, le livre est un secteur d’activité « qui n’est ni

concentré, ni parvenu à maturité » (Thierry Gandillot, Challenges, 2009).

Les BRICS font l’objet d’une attention particulière du groupe. En 2008, Lagardère s’appuie sur les liens tissés par ses acquisitions au Royaume-Uni avec les états des anciennes colonies britanniques pour créer Hachette India. La gestion de la société est confiée à Hachette United Kingdom. La nouvelle filiale sort son premier livre en mai 2009 et adopte ensuite le rythme d’une cinquantaine de nouveautés par an, dans la littérature générale ou jeunesse comme dans les livres de références ; elle commercialise par ailleurs les titres édités par Hachette UK et Hachette Book Group, la filiale américaine. Les particularités de ces nouveaux terrains de conquête, parlant la même langue, permettent des synergies ; le groupe évite les traductions.

Le marché chinois étant plus délicat à pénétrer, Hachette Livre conclut un accord avec le quatrième éditeur du vaste pays, Phoenix Publishing &Media Group (PPMG), le 15 octobre 2009 pour la création d’un joint-venture sous le nom de Phoenix

Hachette, dont le capital est réparti entre PPMG (50 %), une de ses filiales, Yilin Press (1 %) et Hachette (49 %).

Phoenix Publishing & Media Group est présent dans le livre (huit maisons d’édition), l'impression et la distribution (dans 1701 librairies), l’édition de périodiques et de journaux (il édite 24 journaux et revues), les produits électroniques et audiovisuels (réalisés par sa société de production) ainsi que la gestion des droits d'auteur. La filiale Yilin est, elle, spécialisée dans la littérature étrangère, les livres scolaires et universitaires et les sciences sociales. En 2008, le groupe chinois avait un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros.

« En avril 2009, le gouvernement chinois a exprimé son intention d'ouvrir son industrie de l'édition à la concurrence et des investisseurs privés. Arnaud Nourry, Président d'Hachette Livre, et Tan Yue, président de PPMG, ont exprimé leur satisfaction avec un partenariat qui réunit, d'une part, l'expertise d’Hachette Livre dans le développement de contenu éditorial, la fabrication du livre et de sa commercialisation, et son vaste catalogue de livres, et, d'autre part, la connaissance intime par PPMG du marché du livre chinois et de sa distribution, de la logistique et des installations, ainsi que de son expertise en matière de fabrication. » (Communiqué du 15 octobre 2009)

En investissant en Inde et en Chine, le groupe franchit un pas important dans sa diversification géographique en pénétrant les marchés des deux plus grands pays du globe.

Deux ans plus tard, en 2011, Hachette Livre réalise sa première opération en Russie en entrant à hauteur de 25 % dans le quatrième groupe d’édition de Moscou, Azbooka Atticus, avec une option pour renforcer sa participation qui se concrétise en octobre 2014 par l’accroissement de la part du capital détenu par Hachette à 49 %. L’opération présente un double intérêt pour Hachette Livre : l’accès à un catalogue de 3500 titres (dont les best-sellers de Nabokov ou de Maria Semenova) d’un éditeur qui publie 1500 titres par an et l’accès au marché en langue russe pour ses propres productions.

« Maintenant, nous avons besoin de prendre un peu plus de risques et de nous

installer dans des pays à fort potentiel de croissance » (Arnaud Nourry,

Actualitté, 22 mars 2011 ; consulté le même jour ; URL :

https://www.actualitte.com/economie/hachette-investit-le-marche-du-livre-en-russie-25047.htm).

Le groupe Bertelsmann, dont le chiffre d’affaires est généré à 65 % hors d’Allemagne, a fait des pays émergents une priorité (Chine, Inde et Brésil), mais il estime que les opportunités sont très limitées en Russie en raison de la situation économique du pays et n’en a pas fait un axe de développement immédiat comme Lagardère.

4 – A la recherche de la taille mondiale aux Etats-Unis

En 1999, l’ensemble des maisons d’édition du groupe pèse 6,7 % du marché du livre, avec une bonne rentabilité. Depuis, Hachette Livre est devenu le troisième éditeur mondial, présent dans les trois grands bassins linguistiques et en voie d’implantation dans les pays émergents.

Ses principaux concurrents, Pearson et Bertelsmann, ont une stratégie de concentration très agressive. D’ailleurs, les deux groupes Pearson, le Britannique, et Bertelsmann, l’allemand, ont fusionné leurs filiales livre en juillet 2013, Penguin Books pour le premier et Random House pour le second. Le nouvel éditeur, Penguin Random House, a réalisé en 2012 un chiffre d’affaires cumulé de 3,259 milliards d’euros contre 2,066 milliards à Hachette Livre.

Le conglomérat (Bertelsmann détient 53 % du capital et Pearson 47 %) domine le marché de la fiction de langue anglaise, avec environ 50 % du marché et 25 à 30 % de l’ensemble des livres du même bassin linguistique, et présente un catalogue prestigieux avec une dizaine de prix Nobel.

« Cette fusion rassemble les deux plus grands éditeurs mondiaux de langue anglaise, avec des compétences et des forces très complémentaires. Random House est la principale maison d’édition aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, tandis que Penguin est la marque la plus célèbre dans l’édition mondiale et dispose d’une forte croissance dans les marchés en plein développement. Les deux sociétés ont une longue histoire d’excellence dans l’édition, et toutes deux ont été des pionnières dans la transformation de l’édition et de la librairie dans

le numérique. » (Communiqué commun des deux groupes le 29 octobre 2012)

La fusion des deux premiers éditeurs de langue anglaise, Penguin et Random House, est symptomatique du mouvement de concentration en cours au niveau international. Est-il marqué par la seule volonté de réaliser des économies d’échelle,

notamment dans la diffusion, de mieux contrôler le marché en étant le plus gros éditeur, d’acquérir les droits des best-sellers ? Ou ce mouvement est-il le résultat d’opérations purement financières menées par les acteurs de la sphère financière ? La fusion des deux groupes est encore trop récente pour en apprécier les conséquences sur l’organisation de chacune d’elles. En revanche, on peut apprécier la riposte avortée de Lagardère.

Le 25 juin 2014, Hachette Book Group avait annoncé l’acquisition du sixième éditeur américain, Perseus : « La transaction permettra à Hachette d'être en meilleure position dans le litige sur le prix des livres électroniques qui l'oppose depuis des mois

à Amazon.com ». (Dépêche de l’agence Reuters 25 juin 2014). Lagardère attendait

d’autres retombées de cette annonce :

« Lagardère (-0,31% à 23,93 euros) surperforme le CAC 40 (-1,31%) après l'annonce du rachat par sa filiale Hachette Book Group de Perseus Books Group aux Etats-Unis (…) Kepler Cheuvreux (entreprise de services financiers indépendante spécialisée dans les services de conseil et de courtage pour les sociétés d’investissement) indique que Lagardère entend réaliser une marge d'Ebitda de 10% sur les activités de Perseus d'ici 2016, ce qui devrait accroître de 3 à 4% le bénéfice par action de Lagardère en cas de succès, estime le broker. Kepler Cheuvreux reste à l'Achat avec un objectif de cours de 32 euros. » (Site Zonebourse, 25 juin 2014, consulté le jour même).

Lagardère annonçait moins de deux mois plus tard avoir renoncé à acquérir Perseus,

les parties « n’arrivant pas à se mettre d’accord sur l’ensemble des éléments de

l’opération » (Dépêche de l’agence Reuters, 8 août 2014). L’opération a buté autant sur son volet industriel (Hachette Book Group ne souhaitant pas acquérir la filiale de distribution de Perseus) que sur le volet financier (Lagardère n’ayant pas obtenu les crédits suffisants pour acquérir l’ensemble du groupe, avant de rechercher un repreneur potentiel de la plateforme de distribution). L’échec du rachat de Perseus vient confirmer les limites du développement du groupe.

Penguin Random House, lui, affiche ses ambitions ; elles sont clairement avouées : conquérir encore de nouveaux marchés, amplifier la mutation dans le numérique et peser plus lourd dans les négociations avec les industriels de la communication, Amazon notamment, mais aussi Google.

Penguin Random House n’en a pas fini avec le mouvement de concentration ; en mars 2014 il a racheté une filiale du groupe Prisa, Santillana Ediciones Generales, un éditeur de Barcelone présent au Portugal et dans toute l’Amérique latine (Mexique, Argentine, Colombie, Chili, Uruguay, Pérou, Equateur, Bolivie, Paraguay, Venezuela, etc.), l’acquisition de la filiale brésilienne devant intervenir avant la fin de la même année :

«Il y a un an à ce jour, nous avons renforcé l'étendue et la diversité de notre édition de langue anglaise dans le monde entier avec la formation de Penguin Random House, et aujourd'hui, nous célébrons les nouvelles opportunités significatives pour notre édition internationale en langue espagnole avec l'achèvement de l'acquisition qui unit Ediciones Generales de Santillana avec Penguin Random House Grupo Editorial. C'est une combinaison de rêve, un partenariat de deux merveilleuses traditions. » (Communiqué de Markus Dohle, président du groupe, 1er juillet 2014).

La stratégie de Lagardère se heurte à celle du premier éditeur mondial. Et le rapport de force n’est pas en faveur d’un groupe Hachette, qui s’interroge, notamment après l’échec du rachat de Perseus aux Etats-Unis, le pays où le marché du livre est encore en progression.

L’attrait des principaux groupes d’édition pour les Etats-Unis et le Royaume-Uni s’explique aussi par le nouveau contexte de l’économie du livre ; les deux pays sont devenus incontournables en fournissant depuis quelques années les best-sellers mondiaux. Lagardère, confronté à la course aux livres à gros tirage, est souvent contraint d’en acheter les droits à ses concurrents dans ces deux pays, comme Da Vinci code, acheté par Lattès à Doubleday, filiale de Bertelsmann. Mais jusqu’à quand et, surtout, à quel prix ? Si Lattès a pu acheter les droits de Da Vinci code pour un montant modeste (30 000 dollars), en revanche, Inferno, du même Dan Brown, a coûté beaucoup plus cher ; Isabelle Laffont, la directrice de Lattès reconnaît avoir dû signer « un chèque à six zéros » (L’Express, 22 mai 2013).

5 – Sous la pression des marchés financiers

« Pour le livre, nous n’avons pas de problème de périmètre (nous sommes éditeur sur trois bassins linguistiques, l’anglophone, l’hispanophone et le francophone), mais nous nous posons la question de notre taille relative aux