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Un avantage indéniable de la technique de télédétection par GNSS-R est la possibilité de

l’uti-liser à différentes échelles, en fonction de la géométrie créée par le vecteur satellite/récepteur

et la surface de réflexion. En envisageant des systèmes au sol par exemple, avec une hauteur

d’antenne de quelques mètres au-dessus de la surface de réflexion, la zone couverte par les

mesures s’étendra sur quelques mètres carrés seulement, mais la densité de points de

ré-flexion sera très importante (voir figure4.6page82). A l’inverse, on atteindra une couverture

de quelques dizaines de kilomètres carrés mais une densité de points moins importante en

utilisant un système embarqué à bord d’un avion, voire une couverture de plusieurs

cen-taines de kilomètres carrés si le système de réception est installé à bord d’un LEO (Low Earth

Orbiter). Ainsi, pour optimiser les installations, de nombreuses études théoriques ont été

réa-lisées. Des simulateurs ont été proposées pour modéliser la trajectoire des ondes directes et

réfléchies en fonction de la position du récepteur par rapport à la surface de réflexion.

Dans le cadre de ma thèse, j’ai réalisé un simulateur permettant de déterminer la position

précise des points de réflexion spéculaire soit en approximant la surface de la Terre à un plan,

soit comme une sphère, un ellipsoïde, ou soit en intégrant un modèle numérique de terrain.

Ce simulateur, basé sur les éphémérides réelles et précises des satellites mises à disposition

par l’IGS, est présenté dans le chapitre4. Les principaux résultats issus de ce simulateur sont

présentés sur la figure4.6page82, et un exemple de sortie est présenté en figure3.16.

Historiquement, ce sont les vecteurs mobiles, essentiellement des avions, qui ont été les

pre-miers utilisés (Aubertet al.,1994;Martin-Neira,1993). Depuis, avec l’essor de la technique

GNSS-R, de nombreux autres moyens ont été mis en place et vont être présentés sous trois

grandes familles :

– les vecteurs fixes, adaptés aux mesures in situ ;

– les systèmes aéroportés pour des cartographies fines des paramètres environnementaux ;

– les systèmes satellites qui devraient permettre à terme d’établir des surveillances globales

des réservoirs des masses d’eau (océans, eaux continentales, neiges et glaces) y compris

sols et biomasse, et de l’atmosphère (ionosphère, troposphère).

Dans le cadre de cette thèse, je me suis focalisé sur les applications côtières et continentales

exclusivement. Pour plus d’informations, le "tutoriel" développé parZavorotnyet al.(2014)

constitue une source d’informations précieuse.

3.5. PLATEFORMES ET CONTRAINTES

F

IGURE

3.16 – Exemple de simulation des points de réflexion et des surfaces de Fresnel

asso-ciées ; (a) en milieu côtier (phare de Cordouan, France) et (b) en milieu continental (Lac

Lé-man, Suisse), où la topographie influe non seulement sur la position des points de réflexion

mais aussi sur l’existence même des points de réflexion (phénomènes de masque).

Adapté deRousselet al.(2014).

3.5.1 Plateformes fixes / in situ

Dans une premier temps, les sites de mesures in situ étaient en grande partie dédiés à l’étude

de l’humidité du sol par la méthode d’analyse du SNR (Larsonet al.,2008) : figure3.17. Puis

de nombreuses autres applications in situ ont vu le jour :

– mesure de la hauteur de neige (Larsonet al.,2009) ;

– mesure de la croissance de la végétation (Rodriguez-Alvarezet al.,2011b) ;

– suivi des marées océaniques (analyse des formes d’onde :Löfgren(2014);Hobigeret al.

(2014), ou du SNR :Larsonet al.(2012);Rousselet al.(2015)) : figure3.18.

3.5.2 Systèmes aéroportés

Que ce soit à bord d’avions, ou même de drones RPAS (Remote Piloted Aircraft Systems),le

vecteur aéroporté est très certainement celui le plus utilisé pour réaliser des mesures de

ré-flectométrie GNSS.

A titre d’exemple, le tableau3.3est une compilation des principales missions européennes

aéroportées menées entre les années 2005 et 2012, essentiellement axées sur les surfaces

océaniques, avec quelques survols au-dessus de zones neigeuses et de glace. Ce tableau est

issu du projet GOLD RTR MINING (www.ice.csic.es/research/gold_rtr_mining/), financé par

le ministère de la recherche espagnol, qui vise à promouvoir le GNSS-R en fournissant des

données gratuites à tout utilisateur désirant travailler sur les formes d’ondes et les DDM.

Je citerai par exemple les campagnes CAROLS, organisées par le CNES, qui ont permis de

faire des mesures d’humidité dans la région de Bordeaux, France, ainsi que dans le nord de

l’Espagne. Les campagnes du projet européen H2020 MISTRALE (figure3.19), dédiées aux

mesures d’humidité du sol pour aider à l’agriculture raisonnée axée sur la cartographie des

zones humides et des zones inondables, devraient apporter de nouvelles données sur ces

problématiques environnementales.

Une nouvelle campagne de mesures, financée par l’ESA, devrait avoir lieu en 2015 à bord de

la plateforme française SAFIRE et effectuera une des premières missions GNSS-R à partir du

F

IGURE

3.17 – Station SMAPSITEA2 dédiée à la mesure de l’humidité par analyse du SNR du

réseau PBOH

2

0 (USA) développé par K. Larson.

récepteur GLORI (Motteet al.,2015) : figure3.19.

Certaines mesures sont même réalisées à bord de ballons habités à faible altitude de vol, qui

présentent le très grand avantage d’avoir des vitesses lentes, ce qui contribue à la stabilité des

mesures GNSS. Des essais avec des ballons rapides dans la troposphère haute ont aussi été

réalisés en 1999 dans le cadre de l’expérimentation MEBEX. L’altitude de vol était d’environ

37 km et l’objectif de cette expérience était l’étude de la rugosité de la surface marine afin de

déterminer la vitesse des vents à la surface de la mer (Cardellachet al.,2003).

3.5.3 Satellites

Les dernières années voient l’émergence d’un grand nombre de satellites, voire de

constella-tions entières, dédiées aux mesures GNSS-R. Je présente brièvement dans cette partie quelques

missions parmi les plus connues.

3.5.3.1 TechDemoSat-1

Le récepteur SGR-ReST embarqué sur le satellite TechDemoSat-1 a été lancé le 8 juillet 2014.

Il doit être l’instrument de base des futures missions CYGNSS dédiées à la surveillance des

cyclones et autres tempêtes. Il travaille en bi-fréquences sur les bandes L1 et L2 et fournit

directement des DDM. Son orbite est héliosynchrone et l’altitude de vol est de 635 km. La

pé-riode de révolution est de 93 min. Plus d’informations sont disponibles sur le site internet de

la mission :http://www.sstl.co.uk/Missions/TechDemoSat-1-Launched-2014. Une

descrip-tion des applicadescrip-tions GNSS-R sur ce satellite est présentée dans l’acte de conférence suivant :

3.5. PLATEFORMES ET CONTRAINTES

F

IGURE

3.18 – Marégraphe GNSS-R de l’observatoire spatial de Onsala.

(modifié d’aprèsLöfgren(2014))

3.5.3.2 CYGNSS :Cyclone Global Navigation Satellite System

La mission CYGNSS désigne une future constellation de 8 satellites qui devraient être mis

en place sur une orbite inclinée à 35° (altitude de 500 km) à partir de 2016. Ils fourniront

des DDM de la zone équatoriale et tropicale (équateur±35°) avec un pas temporel de 1.5 h

(médiane) et 4 h (moyenne). Cette mission a pour but d’étudier la ceinture tropicale dans la

région de formation de la plupart des cyclones. Elle devrait regarder en détail les variations

des vitesses des vents et des états de surfaces des océans, et devrait aussi fournir des données

pour les modèles de climat global de la Terre. Cette constellation fournira aussi des

informa-tions continentales pour estimer l’humidité des sols. Plus d’informainforma-tions sont disponibles

sur le site internet de la mission : http://clasp-research.engin.umich.edu/missions/cygnss

ou dans la présentation de la mission réalisée dans l’article suivant :Rufet al.(2013).

3.5.3.3

3

C AT−2

3

C AT−2 est un nano-satellite multi-constellations GNSS, bi-fréquences et bi-polarisations

basé sur le récepteur PYCARO (P(Y) and C/A ReflectOmeter) et devrait être mis en orbite en

avril 2016. Il devrait intéresser à l’altimétrie océanique, la biomasse et la cryosphère. Plus

d’informations sont disponibles dans cet article :Carreno-Luengoet al.(2015).

3.5.3.4 PARIS-IoD :Passive Reflectometry and Interferometry System In orbit

Demonstra-tor

Dédié à l’altimétrie océanique à méso-échelle, ce satellite disposera d’une double antenne

de plus d’un mètre de diamètre pour mesurer les signaux GNSS directs et réfléchis. Lorsqu’il

sera opérationnel, le récepteur sera capable de suivre jusqu’à 20 satellites simultanément,

pour une précision altimétrique attendue de 5 cm. Les résultats de simulations de données

traitées par ce récepteur sont présentés dansCampset al.(2014).

T

ABLE

3.3 – Principales campagnes GNSS-R européennes.

(modifié d’aprèswww.ice.csic.es/research/gold_rtr_mining)

F

IGURE

3.19 – Structure du projet H2020 Mistrale visant à faciliter l’agriculture raisonnée et

le suivi des zones inondées à partir d’un GNSS-R embarqué sur un RPAS.

(Source :www.mistrale.eu)

3.5.3.5 GEROS ISS : GNSS REflectometry, Radio Occultation and Scatterometry onboard

the International Space Station

Ce projet ambitieux est financé par l’ESA et vise une mise en place d’un instrument de mesure

GNSS-R sur la station spatiale internationale, en 2019 (voir figure3.20). Le projet est

actuelle-ment en phase d’étude de faisabilité. Il devrait égaleactuelle-ment être utilisé pour faire des mesures

de radio-occultation, et de diffusiométrie pour étudier les océans, l’atmosphère terrestre et

les continents.

3.6 Perspectives

Les enjeux et les retombées scientifiques du développement de la réflectométrie GNSS sont

très importants. Le panel d’applications potentielles de cette technique de télédétection

op-portuniste est impressionnant :

3.6. PERSPECTIVES

F

IGURE

3.20 – Principe du récepteur multi-constellations GEROS embarqué sur la station

spatiale internationale.

(source :

www.gfz-potsdam.de/en/section/gps-galileo-earth-observation/projects/geros-iss/)

– suivi altimétrique des eaux océaniques et continentales ;

– détermination des propriétés des surfaces maritimes : rugosité, hauteur de vagues,

cou-rants et vents de surface, salinité (Campset al.,2006), etc.

– détermination des propriétés des surfaces continentales : humidité des sols, hauteur de

neige, mesure du couvert végétal, etc.

– cartographie locale du géoïde ;

– suivi des zones inondées ;

– détection d’objets sur la surface océanique ;

– etc.

Utiliser la constellation des satellites de type GNSS pour capter puis analyser leurs signaux

réfléchis à la surface de la Terre présente de nombreux avantages par rapport à l’altimétrie

radar classique car :

– la configuration de plusieurs satellites offre une couverture spatio-temporelle plus dense,

et non plus uniquement le long de traces espacées au sol comme dans le cas de l’altimétrie

radar. De plus, les signaux GNSS peuvent être captés n’importe où dans le monde ;

– la continuité et la pérennité du système de positionnement sont assurées, alors que les

missions altimétriques ont une durée de vie limitée dans le temps, généralement de l’ordre

de la dizaine d’année. Le réseau de satellites disponibles est même amené à de densifier

avec l’arrivée des constellations européennes Galileo, chinoise Compass-Beidou, indienne

IRNSS, japonaise QZSS, etc.

Certaines études démontrent même la potentialité du GNSS-R pour la détection de

tsuna-mis (Stosiuset al.,2010) en mettant en place une constellation de quelques satellites à basse

altitude effectuant en continu des mesures altimétriques GNSS-R. Il ne s’agirait donc pas de

prédire l’apparition future d’un tsunami mais de le détecter et de mesurer son importance

avec une grande rapidité pour avoir le temps d’alerter la côte et de prendre les mesures

né-cessaires.

Le nombre d’applications du GNSS-R n’a fait que s’agrandir ces dernières années, et de plus

en plus d’études scientifiques prouvent l’intérêt d’une telle méthode de télédétection

pas-sive, basée sur un réseau déjà existant.

Chapitre

4

Modélisation et simulations de la

trajectoire des ondes GNSS directes et

réfléchies à la surface de la Terre

Sommaire

4.1 Introduction . . . 74

4.2 Principe de fonctionnement du simulateur . . . 75

4.2.1 Approximation géométrique . . . 75

4.2.2 Jeu de données . . . 75

4.2.3 Algorithmes de détermination des positions des points de réflexion

spéculaire . . . 76

4.2.3.1 Approximation en un ellipsoïde local . . . 76

4.2.3.2 Approximation en une sphère locale . . . 77

4.2.3.3 Approximation en un plan local . . . 77

4.2.3.4 Intégration d’un modèle numérique de terrain . . . 77

4.2.3.5 Correction de la réfraction angulaire due à la traversée de la

troposphère . . . 78

4.2.4 Sorties des simulations . . . 79

4.3 Résumé des principaux résultats. . . 80

4.3.1 Influence de la constellation . . . 80

4.3.2 Influence de la hauteur du récepteur et de l’élévation du satellite . . . 81

4.3.3 Influence de l’approximation de la surface terrestre . . . 83

4.3.3.1 Comparaison entre les approximations géométriques . . . 83

4.3.3.2 Impact de la topographie sur la visibilité et la position des

points de réflexion . . . 84

4.3.4 Réfraction angulaire due à la troposphère . . . 85

4.4 Conclusion . . . 86

4.5 Article publié : GMD 2014 - Simulations of direct and reflected wave

4.1 Introduction

La réflectométrie GNSS est une technique de télédétection opportuniste basée sur l’analyse

des signaux GNSS reçus par une antenne après réflexion sur la surface terrestre (

Martin-Neira,1993). Le but de cette analyse est l’estimation de différents paramètres géophysiques

concernant cette surface de réflexion. Il faut donc bien distinguer deux choses :

– leparamètre géophysique que l’on souhaite déterminer par inversion des signaux GNSS

d’une part : humidité (Larsonet al.,2008;Chewet al.,2014), rugosité (Cardellach,2001),

distance verticale par rapport à l’antenne (Löfgrenet al.,2011), etc. ;

– lazone géographiqueoù l’on veut observer ce paramètre géophysique d’autre part.

En effet, de nombreux paramètres sont susceptibles d’influencer la trajectoire des ondes

GNSS et donc la position des points de réflexion spéculaire de ces ondes. On comprend

dès lors qu’avant même de songer à la chaîne de traitement à mettre en place pour

parve-nir au(x) paramètre(s) géophysique(s) que l’on souhaite observer, la connaissance des

posi-tions des points de réflexion des ondes et des différents paramètres pouvant l’influencer est

primordiale. Il serait en effet assez paradoxal d’essayer d’estimer différentes variables

géo-physiques caractérisant une surface autour d’une antenne GNSS sans savoir véritablement

quelle est cette surface analysée. Une détermination robuste de la position des points de

ré-flexion au cours du temps est donc cruciale. Et idéalement, cette détermination doit se faire

en amont des campagnes de mesure afin de laisser à l’opérateur la possibilité d’adapter la

configuration qu’il mettra en place afin de répondre à ses besoins. C’est dans cette optique

que j’ai réalisé un modèle déterminant la trajectoire des ondes GNSS directes et réfléchies,

afin d’avoir un outil d’aide à la décision permettant de choisir les meilleurs sites de mesures

réunissant les meilleurs conditions possibles. Grâce à ce simulateur, de nombreuses

confi-gurations ont pu être testées et l’influence des principaux paramètres en jeu est analysée. On

notera particulièrement la prise en compte des éventuels masques provoqués par la

topo-graphie terrestre en intégrant un modèle numérique de terrain, ainsi que la prise en compte

des perturbations liées à la traversée de la troposphère. Il est très important de noter que les

simulations présentées dans ce chapitre s’intéressent uniquement à la position des points

de réflexions (et premières surfaces de Fresnel), peu importe le mode de réception du signal

(réflectomètre à double antenne ou à antenne unique). C’est pourquoi des tests seront

réali-sées à des hauteurs d’antennes supérieures à celles que pourraient théoriquement atteindre

les réflectomètre à antenne unique (les signaux directs et réfléchis ne sont plus corrélés et ne

produisent plus d’interférences cohérentes si le déphasage est supérieur à la longueur d’un

chip).

Cette étude a fait l’objet d’un article publié dansGeoscientific Model Developpement, présenté

dans la section4.5:

Roussel N., Frappart F., Ramillien G., Darrozes J., Desjardins C., Gegout P., Pérosanz F.,

Bian-cale R. :Simulations of direct and reflected wave trajectories for ground-based GNSS-R

experi-ments. Geosci. Model. Dev. 7, 2261-2279. doi : 10.5194/gms-7-2261-2014. 2014.

Les sections4.2et4.3sont une synthèse des principaux points de cet article.Pour plus de

détails, se reporter à l’article lui-même.Les premiers résultats de cette étude ont également

fait l’objet d’une publication de vulgarisation dans la revue XYZ de l’Association Française de

Topographie, et a remporté le premier prix de l’AFT 2012 :