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5. ANALYSE DES CONSTATS ET RECOMMANDATIONS

5.1. Analyse des constats

5.1.3. Planification et arbitrages financiers

La planification n’est pas une science, mais plutôt une technique qui fait appel à plusieurs outils dont la manipulation appelle les planificateurs à une plus grande rigueur dans les analyses, à un sens élevé de responsabilités dans le choix des options et un discernement dans la vision globale.

L’expérience prouve que le total des crédits demandés par les différents organes spécialisés dans la préparation du plan dépasse les possibilités de financement et, en conséquence, les arbitrages gouvernementaux peuvent conduire à réduire les demandes présentées par tel ou tel secteur.

L‘arbitrage sur la répartition des crédits est une opération difficile tant sur le plan des techniques de planification que sur le plan purement politique. Du point de vue des techniques de planification, il n’existe pas encore de critères objectifs évidents pour déterminer les priorités.

Pour ce qui concerne le Bénin où domine la planification sectorielle, il n’existe pratiquement pas de cadrage financier des plans stratégiques ou des politiques sectorielles lors de leur adoption par le gouvernement. Seuls les cadrages à la suite des débats budgétaires (CDMT, une allocation de ressources qui ne repose sur pas sur une base rationnelle, s’imposent sans aucune forme de procès. Il arrive même qu’au fil des années, les mêmes enveloppes budgétaires soient affectées aux mêmes secteurs comme si les priorités demeurent inchangées, loisibles aux secteurs concernés de définir leurs priorités, sans que personne ne se soucie de la cohérence globale et intersectorielle.

Or plusieurs critères entrent en ligne de compte pour établir les priorités. Il s’agit en l’occurrence des critères d’ordre économique, politique, social, voire même environnemental.

PROCESSUSCONCEPTS

FORMULATION EVALUATION ADOPTION

Non

L’établissement des priorités et les cadrages budgétaires en cascade (du sommet vers le bas, généralement en partant de la Présidence de la République jusqu’aux services en charge de la mise en œuvre) n’occasionnent souvent que frustrations et déception à tous les niveaux. Au regard de ce qui précède, on est en droit de se demander comment les options du plan sont faites.

La prise de décision

L'expression « prise de décision », de même que le terme « politique » impliquent des conceptions et des hypothèses différentes. Une étude des travaux théoriques et pratiques des chercheurs en sciences sociales révèle les deux dimensions essentielles de la prise de décision : qui la prend (les acteurs) et comment (le processus). Plus récemment, les analystes politiques ont introduit le modèle organisationnel (d'intérêt public) et le modèle individuel (d'intérêt personnel). L'analyse du processus a fluctué entre une approche synoptique (globale) et une approche progressive.

Charles Lindblom (1979) a défini les différences entre les méthodes globale et progressive de prise de décision. Selon lui, la méthode globale suppose dans sa forme extrême une autorité centrale de planification pour l'ensemble de la société, combinant un contrôle économique, politique et social en un processus de planification intégrée rendant inutiles les interactions. La prise de décision progressive d'un autre côté, s'appuie sur l'interaction plutôt que sur une analyse complète de la situation pour développer un projet, afin de résoudre les problèmes.

Graham Allison (1971) a élaboré deux modèles alternatifs par rapport au modèle généralement admis du décideur unique et rationnel : (a) le modèle de processus organisationnel et (b) le modèle de politique gouvernementale.

Un modèle amélioré de prise de décision. Aucune des deux dimensions de la prise de décision (processus et acteurs) ne rend compte totalement à elle seule de sa dynamique. Elles doivent être combinées et restructurées en une nouvelle configuration, comme le montre la Figure … ci-dessous. L'acteur de la prise de décision est placé sur l'axe horizontal - à l'une des extrémités du spectre se trouve le mode sociétal/individuel, dans lequel on arrive à la décision par la négociation entre des groupes d'intérêts variés (ministères, syndicats, etc.), poussés par leur conception propre du problème et par leurs valeurs. A l'autre extrémité, se trouve le mode organisationnel/bureaucratique, dans lequel les décisions sont prises au sein de l'entité organisationnelle (militaires, communauté internationale, etc.). Le processus de prise de décision - de l'approche progressive à l'approche globale - se trouve sur l'axe vertical. Ces deux dimensions créent une nouvelle topographie. A l'une des extrémités de cette nouvelle topographie (dans le quadrant I) on trouve le modèle rationnel, qui mélange la méthode globale et le mode organisationnel/bureaucratique. La prise de décision à cet extrême est unique,

128 rationnelle, contrôlée de manière centralisée, entièrement technique et tient compte au maximum des valeurs. A l'autre extrême (dans le quadrant III), on rencontre un mélange de la méthode progressive et du mode sociétal/individuel. La prise de décision est alors une activité politique caractérisée par l'intérêt personnel, la négociation politique, le jugement de valeur et la multiplicité des rationalités. On peut facilement affirmer que la plupart des décisions se situent quelque part entre ces deux extrêmes.

Figure n° : Dimensions de la prise de décision

Source : Wadi D. Haddad in principes de la planification de l'éducation 51, UNESCO 1995

Les techniques analytiques utilisées sans tenir compte des réalités politiques, sociales et bureaucratiques ne vont pas très loin. De même, des décisions politiques vagues et non systématiques, influencées par l'intérêt personnel, le népotisme et les jugements de valeur peuvent entraîner des ruptures, voire même le chaos. En résumé, une prise de décision équilibrée replace la rationalité dans le contexte des aspects politiques et institutionnels de la prise de décision. Cette position est en accord avec le travail de pionnier de Douglas North sur l'économie institutionnelle, qui lui a valu le prix

Nobel en 1993. Il a non seulement modifié le postulat de la rationalité, mais aussi élargi la théorie économique en ajoutant des idées et des idéologies à l'analyse et

en attribuant un rôle fondamental aux institutions dans le changement sociétal : elles sont le « déterminant sous-jacent de la performance à long terme des économies » (North 1990).