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Pilotage de systèmes hybrides

3. Etat de l’art du pilotage de système multi-sources pour le bâtiment

3.2. Pilotage de systèmes hybrides

3.2.1. Application portables – applications transport

L’intérêt de la comparaison avec les systèmes hybrides destinées à des applications portables ou de

transport réside dans une bibliographie importante prenant en compte une problématique parallèle de

celle du pilotage énergétique de système multi-sources stationnaire.

L’utilisation rationnelle des ressources d’un véhicule électrique impose, outre une optimisation de la

chaîne de traction, une hybridation de la source principale (batteries, groupe électrogène à moteur

thermique, à turbine ou à pile à combustible) par un dispositif tampon permettant le stockage

intermédiaire de la puissance. Le système embarqué doit à la fois fournir une énergie suffisante pour

assurer l’autonomie du véhicule et également délivrer une puissance importante lors des phases

transitoires, correspondant dans ce cas précis à une accélération ou un franchissement de pente. Le

concept général consiste à considérer le système comme devant être source d’énergie et source de

puissance. L’ensemble multi sources doit donc répondre à ces deux besoins distincts, tout en

respectant d’autres critères de dimensionnement (masse, volume, prix).

Dans le cas des applications de transport, on constate que l’hybridation permet la récupération de

l’énergie au freinage, facilite le démarrage, permet d’éviter à la source principale de fonctionner à trop

faible charge, permet un maintien des éléments dans une bonne plage de fonctionnement. Malgré une

complexité accrue de commande et d’architecture électrique, l’hybridation peut améliorer la

dynamique de puissance de la source d’énergie par le choix d’une source auxiliaire de faible temps de

réponse [CAND-02].

Cette problématique est la même que pour les systèmes stationnaires en alimentation autonome non

connectée au réseau, en fonctionnement de type groupe électrogène ou en mode îloté, où le faible

foisonnement de charges n’aboutit pas à un lissage de courbe de charges.

Les stratégies de commande développées pour les véhicules hybrides électriques ont donc de fortes

similarités avec la problématique dans le bâtiment, à la différence près que dans le cas du véhicule, le

système est énergétiquement très contraint, du fait de l’autonomie. Il doit assurer l’équilibre

énergétique consommation / production, sans recours possible à la connexion avec un réseau

électrique stable, qui équilibrerait naturellement l’échange de flux.

D’autre part, le critère de performance de la commande n’est pas la minimisation d’un coût

économique mais la minimisation de la consommation de carburant, réelle ou équivalente.

On peut distinguer deux catégories de stratégies de commande, correspondant aussi à deux niveaux

d’abstraction.

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1- Optimisation déterministe :

Lorsque le parcours du véhicule est connu a priori, et donc la charge mécanique du système, le

problème de minimisation de la consommation en carburant et de la séquence optimale de commande

à appliquer correspondante peut être résolu par un algorithme d’optimisation globale, sous certaines

hypothèses de modélisation. Ainsi, des algorithmes basés sur la théorie des graphes [SCOR-04], sur la

commande optimale [DELP-02], [SCIA-07] ou sur la programmation dynamique [BERN-08].

La gamme de méthodes mises en œuvre à ce niveau est très large, et dépend dans une certaine mesure

des modèles énergétiques de l’architecture et de la formulation comme problème d’optimisation.

Ces méthodes ne donnent pas de commande applicable directement ; toutefois cette étape permet de

fournir :

- une expertise sur les commandes idéales à appliquer, en fonction de l’état du

système et des charges ;

- une référence en terme de consommation globale, pour la comparaison avec

les stratégies sous-optimales en temps réel.

2- Stratégies temps réel :

Lorsque le parcours du véhicule n’est pas connu a priori, les stratégies de commande appliquées sont

alors nécessairement sous-optimales. Le paramétrage est généralement empirique, adapté à chacune

des architectures – et donc, non généralisable. Parmi les stratégies temps réel relevées, on peut

trouver :

• Règles heuristiques en fonction de l’état de charge :

Les consignes de puissance des différentes sources dépendent uniquement de l’état de charge

de la source secondaire d’énergie (ou « source de puissance »). Les régulateurs sont alors de

type hystérésis ou proportionnel [BOET-01], [CAND-02] ;

• Régulateur flou à base de règles :

La stratégie est basée sur la logique floue ; les consignes de puissance dépendent de l’état de

charge et de la charge instantanée (demande en puissance mécanique de la motorisation).

Ces grandeurs d’entrée sont fuzzyfiées par le biais de fonction d’appartenance. La base de

règles et la catégorisation des fonctions d’appartenance sont paramétrées empiriquement,

suivant la connaissance de l’expert [JEON-05] ;

• Minimisation de la consommation équivalente :

Le problème du stockage au niveau de la source secondaire est écarté, en valorisant de façon

moyenne l’énergie stockée et retransmise, par la définition d’une consommation équivalente

de la source de puissance, qui dépend d’un facteur d’équivalence empirique [PAGA-02],

[RODA-03], [CAND-02].

Cet artifice permet du même coup d’optimiser à chaque pas de temps, successivement et

indépendamment, la consommation d’énergie primaire totale équivalente (celle, réelle,

additionnée avec l’équivalente) : on passe ainsi d’une optimisation de séquences à une

optimisation instantanée, applicable en temps réel.

Pour éviter la dérive de l’état de charge de la source d’énergie seconda ire, on doit ajuster le

facteur d’équivalence en fonction de l’état de charge. D’autres critères peuvent être pris en

compte comme ceux liés au confort de conduite ou à la stabilité du point de fonctionnement

de la pile.

D’autres approches tentent d’utiliser l’information fournie par des simulations passées :

• Optimisation en temps réel :

Elle vise à optimiser à chaque instant une séquence de parcours prévisionnel : les

caractéristiques de charge à venir peuvent être anticipées, à partir des observations passées

[SCHE-05], [LIN-06], ou à partir de la distribution en puissance d’une fenêtre glissante des

dernières minutes de parcours [BERN-08] ; ces approches sous-optimales peuvent conduire à

de grands écarts si la caractéristique de charge est hétérogène.

• Régulateurs paramétrés par apprentissage :

Ces approches utilise les résultats a posteriori de l’optimisation déterministe, pour se

constituer des consignes optimales de référence et une base d’apprentissage pour les

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régulateurs. Les méthodes d’apprentissage artificiel qui sont alors privilégiées sont les

réseaux de neurone, peu gourmands en données [SCOR-05], [MORE-06].

En définitive, les stratégies énergétiques rencontrées se basent souvent sur l’estimation de quelques

grandeurs non directement accessibles (essentiellement l’état de charge du dispositif de stockage

tampon de l’énergie et la puissance demandée par la charge). Les futurs développements passent par

l’utilisation d’un nombre de plus en plus élevé de paramètres d’entrée. Les règles logiques des

stratégies issues d’approches heuristiques risquent alors de devenir vite complexes à mettre en œuvre.

Une stratégie adaptative multi-critères constitue sans doute une solution adaptée à ce problème ; ce

point sera développé dans le chapitre 4.

La seconde difficulté réside dans le fait que le paramétrage s’avère toujours être très dépendant du

profil de consommation, rarement connu a priori. Une solution consiste à développer des systèmes de

reconnaissance de cycles, basés sur l’observation des paramètres significatifs, ainsi que des stratégies

de gestion capables de prendre en compte les nouvelles informations.

3.2.2. Applications stationnaires - cogénération

Une autre illustration de système hybride, pour application stationnaire cette fois, est l’installation de

cogénération.

La cogénération permet, à partir d’un combustible, la production simultanée de chaleur et d’énergie

électrique. En récupérant l’énergie thermique perdue lors de la production d’énergie électrique, la

cogénération met à disposition les deux produits – chaleur (sous forme d’eau chaude ou de vapeur) et

électricité – avec un rendement global nettement plus élevé que celui résultant de filières séparées.

Néanmoins, cet avantage de rendement élevé est contrebalancé par un coût d’investissement élevé et

un besoin de chaleur qui peut ne pas être régulier. Dans le cas de cogénération à usage climatique

(chauffage de locaux ou réseaux de chaleur), le besoin thermique peut se trouver réduit à mi-saison en

raison de températures supérieures aux normales saisonnières. Le rendement de la cogénération, qui se

calcule en moyenne annuelle, se trouvera alors affecté par la diminution du besoin de chaleur. Ces

aspects imposent une optimisation du fonctionnement de l’installation de cogénération, les principes

de planification d’une centrale pouvant tout aussi bien s’appliquer au cas à petite échelle de micro

cogénération chez un particulier ou une entreprise du secteur tertiaire.

L’optimisation vise à maximiser le bénéfice du système de CHP sur une période donnée. Les études

les plus anciennes ne prennent pas en compte la possibilité actuelle de revente de l’électricité sur le

réseau (en alternative à l’utilisation pour un usage propre) qui permet de définir à présent la fonction

objectif comme un maximum à atteindre, de différence entre le chiffre d'affaires total et les coûts

totaux.

La production des unités est décrite suivant un modèle statique, rattachant rendements et coûts aux

points de fonctionnement exprimés en terme de puissance de sortie. Des abaques de coûts de

production, d’investissement et de maintenance, élaborées à partir des caractéristiques typiques de la

technologie employée, déterminent les différents coûts (coûts d'exploitation et maintenance ;

rendement électrique ; puissance thermique) en fonction de la puissance électrique (Figure 9). La

consommation de carburant est liée à la puissance électrique par une équation linéaire ou linéaire par

morceaux. La relation entre la puissance et la production de la chaleur est décrite avec des

caractéristiques d'usine, connues comme diagrammes P-Q : pour certaines technologies, le ratio

électricité / chaleur de l’unité de cogénération n’est pas posé rigoureusement fixe : il existe tout un

ensemble faisable de solutions borné par des limites de modes d’opération.

La planification à court terme de puissance et de systèmes de chauffage utilise couramment des

algorithmes basés sur la relaxation lagrangienne, avec deux modèles séparés de base, un pour le

problème de production d'énergie et un pour le problème de production de la chaleur. Le modèle inclut

généralement la prise en compte de coûts de mise en route. Pour le problème de production de la

chaleur, le stockage de chaleur peut être soit inclus, soit traité séparément. Des temps minimums

d'opération et d'arrêt sont également considérés [CHEN-00].

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Le problème relaxé est construit en incluant les restrictions pour la demande électrique, les conditions

de réservation, les contraintes de demande et de stockage de chaleur dans la fonction objectif du

problème principal. Une fois les multiplicateurs de Lagrange déterminés, le problème relaxé se

décompose alors en un sous–problème dual pour chaque unité de cogénération. Le problème dual d’un

problème détendu lagrangien est résolu itérativement, avec une mise à jour des multiplicateurs de

Lagrange à chaque itération.

Figure 9: Région de faisabilité de centrale de cogénération ([RONG-07]) – grandeurs exprimées en %

par rapport aux valeurs nominales

Dans les études, le profil de demande thermique est la donnée essentielle du problème mais elle n’est

pourtant pas directement accessible et ne peut être que difficilement mesurée. Généralement, ce profil

est simplement estimé à la conception, pour le dimensionnement de l’installation. Les paramètres

utilisés pour définir les profils de consommation quotidiens, hebdomadaires et annuels sont

notamment la consommation annuelle de combustible de la chaudière combinée aux profils types de

consommation pour le consommateur concerné ; les consommations de chaleur sous forme d’eau

chaude ; le débit de gaz ; le temps de fonctionnement de la chaudière ; le débit d’eau chaude ; etc.

Le pilotage temps réel classique d’une installation de micro cogénération résidentielle est

généralement calé sur cette demande thermique. L’approche classique est un contrôle PI exercé sur la

température du circuit d’eau chaude, avec une hystérésis de températures seuils de déclenchement et

d’arrêt qui peuvent être différentes de celles commandant le fonctionnement de l’éventuel brûleur

complémentaire. Une telle structure ne réalise pas d’optimisation économique.

3.2.3. Synthèse pour le pilotage de systèmes hybrides

La revue rapide des méthodes mises en œuvre pour le pilotage énergétique de systèmes hybrides

autres (applications portables, transport, cogénération) a mis en lumière l’importance de la

connaissance de la demande, et notamment de sa dynamique, qui, il est vrai, est surtout primordiale

pour la conception et le dimensionnement.

Par une modélisation adéquate du système ou par simulation pour les systèmes plus complexes (avec

pile à combustible, par exemple), on sait déterminer, pour un profil de charge donné, la séquence de

consignes qui optimiserait les performances. Cette optimisation déterministe n’est néanmoins pas

applicable en tant que tel, du fait soit de l’autonomie du système (transport) soit de contraintes

thermiques fortes (petite cogénération). Des stratégies basées sur des règles simples, ou provenant de

système expert sont alors préférées : ces choix conduisent à des performances dégradées. Enfin,

certaines propositions tentent de contourner le problème posé par l’incertitude de la demande, par des

approches novatrices : apprentissage artificiel, logique floue.

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