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Physiopathologie

Dans le document La myocardite aigue chez le sportif. (Page 89-94)

Toutes les études soulignent la grande variabilité du tableau clinique des myocardites aigues et mettent l’accent sur l’imprédictibilité de son évolution, et de ce fait, cerner le processus physiopathologique qui sous-tend cette pathologie semble impératif.

Ces dernières années, les techniques de biologie moléculaire ont permis de mieux comprendre la physiopathologie des myocardites, en particulier des myocardites d’origine virale. Si le mécanisme de cette pathologie n’est pas complètement élucidé, ces différentes techniques ont montré que les myocardites expérimentales des souris causées par le Coxsackie virus B3 entraînent des modifications tissulaires cardiaques similaires aux myocardites humaines, ce qui en a fait le modèle expérimental le plus judicieux pour cette étude.

La myocardite est habituellement décrite comme une séquence chronologique comprenant 3 phases pathologiques, avec des périodes de transition plus ou moins longues les séparant :

La première phase, aigue, correspond à l’infection et aux lésions des myocytes par le virus lui-même.

La deuxième phase, subaiguë, est responsable de la majorité des lésions, et permet d’éliminer les particules virales des myocytes infectées.

La troisième et dernière phase (non systématique) est chronique et infraclinique, et peut aboutir à la constitution d’une cardiomyopathie dilatée.

 La reconnaissance de la phase de la maladie en cours va avoir un impact déterminant sur la compréhension de son mécanisme physiopathologique, sur les techniques diagnostiques à mettre en œuvre et enfin sur le traitement à administrer au malade. (2,52)

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1. Phase de l’invasion virale (durée : quelques jours) : atteinte

virale des myocytes :

Lors de l’infection virale, les premiers effecteurs de la réponse de l’hôte sont les acteurs de la réponse immunitaire innée. Les récepteurs Toll reconnaissent certaines protéines virales et activent ensuite des signaux intracellulaires responsables de la synthèse rapide de cytokines pro-inflammatoires, d’interféron et de grandes quantités de monoxyde d’azote. Les cytokines pro-inflammatoires vont ensuite d’une part attirer de nombreuses cellules immunitaires vers le site de l’agression virale et, d’autre part, être directement responsables de lésions cardiomyocytaires (hypocontractilité, apoptose). Ces effecteurs de la réponse immune innée ont été récemment mis en évidence au niveau du myocyte cardiaque.

Par ailleurs, la prépondérance des Coxsackie virus et des adénovirus parmi les agents étiologiques des myocardites aiguës est maintenant bien expliquée par la présence d’un récepteur commun (« Coxsackie-Adenoviral Receptor », ou CAR) (Figure 24), présent à la surface des myocytes cardiaques. Ce récepteur, appartenant à la superfamille des immunoglobulines, permet l’internalisation du virus à l’intérieur de la cellule, ce qui représente l’étape critique de l’invasion virale.

2. Phase « auto-immunitaire » (durée : quelques semaines à

quelques mois) : réponse immunitaire inadaptée :

L’activation du système immunitaire initiée lors de la phase 1 se poursuit par la mise en jeu du système de l’immunité cellulaire spécifique. Les particules virales sont recyclées par l’appareil de Golgi, puis présentées à la surface de la cellule infectée dans le contexte de restriction par les antigènes du complexe majeur d’histocompatibilité. Les cellules T spécifiques reconnaissant l’antigène viral dans ce contexte vont tenter de détruire la cellule infectée par la production de cytokines ou de perforines.

91 L’amplification de ce phénomène peut conduire à une destruction massive des cardiomyocytes. D’autre part, certains antigènes cellulaires myocardiques de l’hôte peuvent présenter des similitudes avec les antigènes viraux et être responsables d’une activation auto-immunitaire continue de la réponse inflammatoire, majorant et pérennisant les destructions d’unités contractiles. L’activation des cellules T s’accompagne par ailleurs de l’expansion de clones B et de la production d’anticorps dirigés contre certains antigènes cardiaques (myosine, laminine, récepteur bêta).

Enfin, lors de cette 2e phase, une importante activation de la sécrétion des cytokines pro-inflammatoires persiste (IL1, IL6, TNF-alpha). Dans les études sur les myocardites induites chez des souris, il existe une production accrue de ces cytokines, l’interféron gamma parait augmenter l’expression des molécules CMH 1(et donc la présentation des particules virales depuis les myocytes), ainsi que les molécules d’adhésion cellulaire (I-CAM, assurant l’adhésion des lymphocytes T spécifiques à la surface des myocytes). Le Tumor Necrosis Factor (TNF alpha) jouerait également un rôle dans la production de molécules d’adhésion cellulaire ainsi que dans la nécrose myocytaire. Ces molécules possèdent un effet délétère propre sur la fonction contractile myocytaire ce qui est corrélé à la dégradation de la fraction d’éjection du ventricule gauche.

3. Phase tardive : évolution vers la cardiomyopathie dilatée :

Lorsque les agressions virales directes puis auto-immunitaires ont détruit une partie significative des cellules cardiaques, le cœur se dilate et les signes d’insuffisance cardiaque apparaissent. Plusieurs hypothèses tentent d’expliquer ce phénomène : expression de protéases virales, activation de protéases par les cytokines, rôle direct des virus dans l’apoptose des myocytes. Cependant, les particules virales peuvent rester détectables au sein des myocytes dans près de 20% des cas de myocardiopathies dilatées idiopathiques(2). Les signes histologiques de myocardite ont le plus souvent disparu à ce stade et on met alors en évidence un appauvrissement myocytaire associé à une fibrose diffuse.

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Figure n°24 : Coopération entre le Coxsackie-Adenoviral Receptor (CAR) présent à la surface du myocyte et le decay accelerating factor (DAF) permettant l’adhésion du Coxsackie virus B (CVB) à la membrane myocytaire et

l’internalisation du virus (52).

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Infection virale

Nécrose myocytaire Infiltration des cellules mononucléaires

Activation des macrophages

Expression des cytokines Cellules Natural killer Lymphocytes T cytotoxiques

Interleukine 1 Lymphocytes B

Interleukine 2 Perforine Fibrose

Tumor necrosis factor Anticorps neutralisants Dilatation cardiaque

Interferon γ Oxyde nitrique Défaillance cardiaque

0 jours 4 jours 14 jours 90 jours

Virémie Nettoyage viral Absence de virus

Figure n°25 : Le cours de la myocardite virale expérimentale (80)

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