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II.2.1. Caractéristiques morphologiques

La SNr présente une densité neuronale relativement faible chez le rat comme chez le primate (Juraska et al., 1977; Yelnik et al., 1987). Elle se compose principalement de neurones GABAergiques mais contient également quelques neurones dopaminergiques. Ainsi, chez le rat, on estime le ratio neurones dopaminergique/GABAergique à 0.11± 0.02 (Nair-Roberts et al., 2008). Ces neurones présentent de nombreuses différences, tant sur le plan morphologique qu’électrophysiologique. Les neurones GABAergiques sont caractérisés par un corps cellulaire de grosse taille pouvant présenter différentes formes (fusiforme, triangulaire, polygonale, ovoïde ou ronde). Une à cinq dendrites primaires sont émises depuis le soma et présentent un degré de ramification plus important au niveau des parties distales (Mailly et al., 2001; Cebrian et al., 2007). Les quelques neurones dopaminergiques sont regroupés en clusters au sein de la SNr et sont des neurones multipolaires (Fallon, 1995). Plus précisément, ces neurones sont surtout retrouvés au niveau caudal et sont organisés en couches verticales séparées par des aires dépourvues de neurones dopaminergiques. Les neurones GABAergiques sont plus nombreux au niveau rostral et s’organisent selon l’axe dorsoventral remplissant ainsi les zones laissées vacantes pas les neurones dopaminergiques (Gonzalez-Hernandez and Rodriguez, 2000).

II.2.2. Caractéristiques électrophysiologiques

Les neurones GABAergiques et dopaminergiques présentent de nombreuses différences du point de vue électrophysiologique. Ces différences sont la conséquence d’une spécificité d’expression

plus négatif (figure 8) (Nakanishi et al., 1987; Richards et al., 1997; Rohrbacher et al., 2000). Les neurones dopaminergiques sont doués d’une forte rectification entrante, faible voire inexistante dans les neurones GABAergiques (figure 8) (Richards et al., 1997; Rohrbacher et al., 2000; Atherton and Bevan, 2005; Lee and Tepper, 2007; Ding et al., 2010; Ding et al., 2011; Zhou and Lee, 2011). Cette rectification est soutenue par un courant de type Ih, courant entrant porté par les ions K+ et Na+ et d’activation lente. Le courant Ih est activé lors d’hyperpolarisations et contribue à ramener le potentiel de membrane à des valeurs proches du seuil d’émission du potentiel d’action. Il est porté par des canaux particuliers perméables au K+ et Na+, les canaux HCN (pour hyperpolarization-activated cyclic nucleotide-gated channels) (Chu and Zhen, 2010). Certaines études décrivent également la présence d’un courant de type IA, responsable d’une rectification sortante (Liss et al., 2001). Le courant IA est un courant sortant potassique précoce et transitoire (qui s’inactive rapidement). Ces neurones diffèrent également du point de vue de leur fréquence de décharge. En effet, les neurones GABAergiques présentent des fréquences de décharge relativement élevées (de 25 à 65 Hz in vivo selon les espèces, et de 10 à 15 Hz in vitro) alors que les neurones dopaminergiques ont une fréquence de décharge beaucoup plus faible aussi bien in vitro qu’in vivo (1 à 6 Hz) (Zhou and Lee, 2011).

L’ensemble de ces différences électrophysiologiques s’explique par une différence d’expression des canaux ioniques membranaires responsables des phases de dépolarisation et de repolarisation membranaires. La phase de dépolarisation résulte d’un courant entrant sodique qui s’inactive

Figure 8 : Les neurones GABAergiques et dopaminergiques de la SNr présentent différentes caractéristiques électrophysiologiques. Enregistrements électrophysiologiques en configuration cellule entière et en mode courant imposé de l’activité d’un neurone GABAergique ou dopaminergique de la SNr chez le rat. Les potentiels d'actions des neurones GABAergiques sont de plus grande amplitude et de plus courte durée (A). La rectification entrante est plus prononcée pour les neurones dopaminergiques qui présentent une fréquence de décharge plus faible (B). D’après Ding et al., 2011. Flèche: courant Ih en réponse à des sauts de courant hyperpolarisant.

rapidement, ce qui lui vaut le nom de courant sodique transitoire (INaT). Ce courant est généré par des canaux sodiques dépendants du voltage (les Nav). Les Nav sont composés d’une sous-unité Į formant le pore du canal et de deux sous-unités ȕ qui en régulent la fonction. Des différences de composition au niveau de ces sous-unités sont à l’origine des différences de conductance et de cinétique portées par les INaT entre les deux types neuronaux (Ding et al., 2010). Concernant la phase de repolarisation, elle résulte de l’activation de canaux potassiques dépendants du voltage (Kv). Des différences d’expression au niveau de ces canaux sont également retrouvées entre les deux types neuronaux où ils génèrent deux types de courants distincts (Ding et al., 2011). L’ensemble de ces différences confèrent aux neurones de la SNr, une signature électrophysiologique spécifique.

Comme beaucoup d’autres noyaux des GB, les neurones de la SNr sont doués d’une activité spontanée de type « pace-maker » (Nakanishi et al., 1987; Atherton and Bevan, 2005). Ce type d’activité nécessite une dépolarisation membranaire afin d’atteindre le seuil d’émission du potentiel d’action. Le mécanisme impliqué dans cette dépolarisation fait appel au même courant que celui décrit dans le NST : le INaP (courant sodique persistant) (Atherton and Bevan, 2005). Cependant, ce courant n’est activé que par des potentiels plus positifs que le potentiel de repos des neurones de la SNr, ce qui suggère l’intervention d’un second type de courant dépolarisant. Ce courant de nature sodique, décrit par Fu-Wen Zhou et collaborateurs (2008), est porté par des canaux actifs de manière constitutive : les canaux TRPC3 (figure 9) (Zhou et al., 2008). Les canaux TRP (pour « Transient Receptor Potential ») comptent sept sous-familles de canaux dont les TRPM (pour melastatin), les TRPC (pour canonical), ou encore les TRPV (pour vanilloid). Ce sont des canaux cationiques non sélectifs, présentant différents modes d’activation [pour revue voir (Nilius and Owsianik, 2011)]. Ainsi, le courant résultant des TRPC3 permet de dépolariser légèrement la membrane avant d’être suppléer par le courant INaP. Ensemble, ces deux types de courants contribuent à dépolariser suffisamment la membrane des neurones GABAergiques pour atteindre le seuil d’émission du potentiel d’action (Zhou et al., 2008).

Comme nous l’avons décrit précédemment, la modulation de l’AHP permet de réguler la fréquence de décharge des neurones. Ce phénomène est le même pour les neurones de la SNr (l’entrée de calcium par les canaux calciques dépendants du voltage active les SKCa responsables de l’AHP) (Atherton and Bevan, 2005). Dans les neurones GABAergiques de la SNr, l’entrée de calcium est médiée par les canaux de type T et de type N (Yanovsky et al., 2005).

De façon similaire à celle décrite pour les neurones du NST, les neurones de la SNr sont capables d’émettre des potentiels d’actions en bouffées, sous-tendus par l’induction d’un plateau de potentiel dépolarisé. Ce plateau de potentiel résulte également d’entrées de calcium, responsables de l’activation de la conductance sodique ICAN (décrite au niveau du NST). Ces entrées de calcium seraient permises par l’activation des canaux calciques de type L (lors d’hyperpolarisations) ou par l’activation des récepteurs NMDA (suite à une libération de glutamate par les neurones du NST) (Lee and Tepper, 2007). Par ailleurs, la conductance ICAN

résulte, au niveau de la SNr, de l’activation de canaux TRPM de type 2. La présence de ce plateau de potentiel confère donc aux neurones de la SNr, la capacité de décharger en « bursts ». Ce phénomène est relativement peu fréquent en condition physiologique mais prend de l’importance dans certaines conditions pathologiques comme nous le verrons par la suite.

Au même titre que les autres noyaux des GB, la diversité et la spécificité d’expression des canaux ioniques de la SNr confèrent aux neurones nigraux une signature électrique bien Figure 9 : Les neurones GABAergiques de la SNr sont spontanément dépolarisés par deux types de courants sodiques. Enregistrements en cellule entière et en courant imposé d’un neurone GABAergique. A. L’inhibition des canaux sodiques dépendants du voltage par la tetrodotoxine (TTX) inhibe l’émission de potentiels d’action. La diminution de concentration du sodium extracellulaire induit une hyperpolarisation membranaire nécessitant l’intervention d’un courant sodique pour induire une dépolarisation. D’après Atherton and Bevan 2005. B. Après inhibition des potentiels d’action par application de TTX, le blocage des canaux TRPC3 par l’acide flufenamic (FFA) induit une hyperpolarisation membranaire, preuve de l’intervention de ces canaux dans la dépolarisation des neurones nigraux. D’après Zhou et al., 2008

spécifique. De plus, les nombreuses conductances qui en résultent constituent un premier niveau de régulation de l’activité neuronale de la SNr, primordiale pour la bonne transmission des informations entre les GB et les aires corticales.

II.3. Afférences de la SNr : régulation de l’activité neuronale par les