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Chapitre VI. Étude Monte Carlo de la transition Coulomb- Coulomb-cristal

VI.2. Phase basse température

Puisque le modèle Éq. (26) possède un spectre discret, l’ordre colonnaire présent dans les fondamentaux va subsister à température finie. Pour le caractériser et par analogie avec le paramètre d’ordre complexe du modèle bidimensionnel Éq. (3), il est utile d’introduire un paramètre d’ordre vectoriel à trois composantes

sur tous les sites du réseau. La somme m = 2/L3��P

r2Am(r)�

, normalisée pour valoir 1 dans un état colonnaire de la Fig. 39, va nous servir de paramètre d’ordre.

Traçons le paramètre d’ordre m en fonction de la température, pour différentes tailles de systèmes (voir Fig. 46). Il apparaît clairement que le système s’ordonne à basse température,

m(r) = 0 @ ( ) rx[dx(r) d x(r)] ( )ry[dy(r) d y(r)] ( )rz[dz(r) d z(r)] 1 A Éq. (28)

Fig. 45 Corrélations courant-courant hJ↵(0)Jβ(r)i du modèle courant de liens [Éq. (24)] au point critique Kc= 0.33305. La taille linéaire de l’échan-tillon est L=64. 0 2 4 6 8 10 12 14 16 r -0.008 -0.004 0 0.004 0.008 <J x(0)J x(r)>.r 3 [100] [010] [110] [111] K=Kc hJ x(0) J x(r)i .r 3 r K = Kc

et le paramètre d’ordre semble commencer à prendre des valeurs non nulles pour une tem-pérature proche de T⇠ 1.7, avec encore une fois des effets de taille finie importants dans cette région. Cette température semble proche de celle où la phase Coulombienne s’annule, suggérant un point de transition unique entre les deux phases. Pour aller plus loin, il est nécessaire de faire une analyse de taille finie poussée proche de ce point de rencontre des deux ordres, ce que nous effectuons dans la Sec. VI.3. Avant cela, remarquons que la nature relativement régulière des courbes du paramètre d’ordre proche de T ⇠ 1.7 semblent indi-quer une mise en ordre colonnaire continue. La nature second ordre du point critique sera elle aussi discutée dans la Sec. VI.3.

VI.3. Transition

Comment déterminer de façon la plus précise l’existence d’une ou plusieurs transitions de phase, ainsi que leur nature ? Pour les transitions de phase continues, l’utilisation de l’ana-lyse de taille finie (finite size scaling) est à la fois cruciale et pratique pour déterminer un point critique à partir de données numériques sur des échantillons finis.

Depuis la phase haute température

Commençons par l’extension de la phase Coulombienne, caractérisée par sa rigidité K 1. Nous avions vu avec l’analogie avec une phase superfluide, que K 1 pouvait s’interpréter comme une densité superfluide ⇢s dans un modèle bosonique. Filant l’analogie, il est natu-rel de s’attendre à ce que K 1 suive la même loi d’échelle que celle dérivée pour la densité superfluide [FiSher89], pour une transition superfluide-isolant continue :

L est la taille linéaire de l’échantillon, f une fonction d’échelle universelle non connue, Tc

la température critique et l’exposant critique de la longueur de corrélation. Deux choses sont à noter. Premièrement, dans le cas général le préfacteur 1/L est élevé à la puissance z (exposant critique dynamique) : ici nous avons simplement z = 1, par isotropie du système

Fig. 46 Évolution du paramètre d’ordre colonnaire m = 2|Pr2Am(r)|/L3

en fonction de la température pour différentes tailles de systèmes.

1 1.2 1.4 1.6 1.8 2 T 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 m L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 1.67 1.675 1.68 1.685 1.69 0.05 0.1 0.15 0.2 T m K 1 = L 1f (|T Tc|.L1/⌫) Éq. (29)

dans la troisième direction, correspondant à celle du temps imaginaire dans l’analogie avec le système superfluide. Secondement, nous ne supposons pas en écrivant l’Éq. (29) que la longueur de corrélation (associée à l’exposant par ⇠⇠ |T − Tc| ) soit associée à un ordre spécifique (par exemple à la fonction de corrélation du paramètre d’ordre colonnaire). Il s’agit simplement de l’échelle caractéristique en dessous de laquelle le système n’est plus Coulombien : pour r. ⇠(T), les corrélations dimère-dimère ne sont plus dipolaires. Cette échelle caractéristique ne se voit pas forcément sur les corrélations de la Fig. 43, car masquée par les contributions supplémentaires (fonction g) dues aux fluctuations cristallines colon-naires. Elle peut éventuellement être observée dans la Fig. 44 (cas ↵6= β où l’on s’attend à ce que la contribution cristalline soit plus faible) : les corrélations n’atteignent en effet leurs valeurs asymptotiques que pour des distances r de plus en plus grandes à mesure que la température diminue. Il est toutefois difficile de distinguer ce qui est dû à l’augmentation de la longueur de corrélation de ce qui est provoqué par de faibles effets cristallins résiduels pour ↵6= β (comme discuté dans la Sec. VI.1.2) ou d’une renormalisation de l’amplitude des corrélations due à la diminution de K 1. Dans ce cadre, cette longueur de corrélation se repère certainement mieux dans le modèle de courants où il n’y a pas de fluctuations cristallines : on voit clairement dans la Fig. 45 que le régime Coulombien asymptotique est retrouvé pour des distances r bien plus grandes à Kc qu’à haute « température » K = 0.5 . Notons que dans toutes ces analyses, la longueur de corrélation est toujours limitée par la taille finie des échantillons.

Si la transition de phase est du second ordre, l’Éq. (29) prédit qu’à T = Tc, la quantité K 1.L est une constante universelle puisqu’égale à f (0). En dehors de la région critique, on s’attend à ce que, dans la phase colonnaire gapée, K 1 décroisse exponentiellement vers 0 (et donc K 1.L aussi). Par ailleurs dans la phase Coulombienne, K 1 est constante, donc K 1.L va diverger. En pratique, nous allons tracer K 1.L pour différentes tailles de sys-tèmes, et l’obtention d’un point de croisement fixe et stable de ces différentes courbes sera un signe fort en faveur d’une transition du second ordre. C’est effectivement ce que nous observons dans la Fig. 47, où les courbes pour différentes tailles se croisent clairement pour Fig. 47 Point de croisement en fonction de la température pour la quantité K 1.L, pour différentes tailles d’échantillon. Encart : loi d’échelle suivie par la dérivée L.dK 1/dT au point critique Tc, en fonction de la taille du système (échelle log-log). La ligne droite indique le meilleur fit en loi de puissance pour les tailles L 48.

1.670 1.672 1.675 1.677 1.680 T 0 0.2 0.4 0.6 K -1 . L L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 10 100 L 10 100 L.dK -1/dT T K 1L L.dK 1 /dT L

T = 1.675(5). À noter que s’il existe un petit déplacement du point de croisement pour les petites tailles de systèmes, le point de croisement est stable pour L 48. La déviation observée pour les petites tailles est très faible (il suffit de noter l’échelle très précise de tem-pérature de la Fig. 47) et est naturelle pour les petites tailles, pour lesquelles des corrections d’échelle à la loi Éq. (29) sont attendues.

Par ailleurs, la dérivation de l’Éq. (29) par rapport à T fournit la relation L.dK 1/dT = L1/⌫(df /dT )|T =Tc. La dérivée dK 1.L/dT varie donc au point critique comme L1/⌫ et peut être obtenue soit numériquement avec une grille de température assez fine, soit thermodynamiquement comme L.dK 1/dT =h 2Ei K 1hEi/T2. L’encart de la Fig. 47 présente cette dérivée en fonction de la taille du système, pour la valeur de tempé-rature TcCoulomb= 1.675 estimée à partir du croisement précédemment étudié. Le caractère linéaire de cette courbe en échelle log-log confirme la présence d’une dépendance en loi de puissance, et un fit sur les 4 systèmes de plus grande taille fournit ⌫ = 0.50(4). La barre d’erreur sur cet exposant critique tient compte des incertitudes statistiques inhérentes au Monte Carlo, de celle sur la détermination de Tc ainsi que celles dues à la procédure de fit. Finalement, l’Éq. (29) peut être ré-écrite de la façon suivante : 2= f (|T Tc|.L1/⌫) indi-quant que les fluctuations de flux sont universelles au point critique. En fait, il est possible de vérifier numériquement que c’est toute la distribution de flux P ( ) qui est universelle à Tc. Sur la Fig. 48, nous avons représente P (| |) (normalisée par P ( = 0)) pour trois tailles de systèmes, pour diverses valeurs de la température. Il apparaît clairement qu’à basse (haute) température, les flux diminuent (augmentent) avec la taille, alors qu’à Tc, la distribution P ( ) est indépendante de la taille du système. Les petites déviations visibles sont dues aux tailles plus modestes des systèmes présentés sur cette figure, et par ailleurs à une estimation de Tc légèrement différente de celle dans la limite thermodynamique (pour la même raison).

Depuis la phase basse température

L’ensemble des données des Fig. 47 et Fig. 48 valide de façon quantitative l’hypothèse d’une Fig. 48 Distribution de probabilité P (| |) de présence d’un flux (dans une

direction quelconque) pour trois tailles de systèmes et pour différentes tempé-ratures (deux dans les phases haute et basse température, et une proche de Tc).

0 1 2 3 4 5 1e-06 0.0001 0.01 1 L=16 L=32 L=48 | | T = 1.6 T = 1.66 T = 1.672' Tc T = 1.8 T = 3 P (| |) /P (0)

transition du second ordre à Tc : la chute de la phase Coulombienne est continue. Il reste à montrer que c’est aussi le cas pour la naissance de l’ordre colonnaire, et si les deux phéno-mènes se produisent simultanément. Pour une phase qui brise une symétrie caractérisée par un paramètre d’ordre tel que donné par l’Éq. (28), il est habituel de considérer le cumulant de Binder [biNder81]

comme nous l’avions fait dans la Sec. II.1. Étant donné le nombre de composantes de m, on s’attend à ce que B tende vers 4/9 dans la phase haute température, et 2/3 dans la phase basse température. C’est ce que l’on observe dans la Fig. 49 où le cumulant de Binder est représenté en fonction de la température pour différentes tailles de systèmes.

On observe aussi un croisement de courbes très net pour T = 1.6745(5), aux déviations près pour les systèmes de petite taille. Tout comme pour L.K 1, il est possible d’écrire une théorie d’échelle pour le cumulant de Binder [biNder81], et celle-ci prédit un comportement identique à l’Éq. (29) :

avec la fonction h là-aussi universelle, et où col est a priori différent de l’exposant mesuré par les fluctuations de flux. L’Éq. (30) explique donc le croisement des courbes observé à Tccol= 1.6745(5), et indique que l’on peut déterminer à partir du scaling de la dérivée de B par rapport à la température : dB/dT = L1/⌫. (dh/dT )|T =Tc. La variation de cette dérivée (obtenue thermodynamiquement de manière identique à celle de K 1.L) en fonction de L est représentée en échelle log-log dans l’encart de la Fig. 49. Un fit numérique sur la loi de puissance observée fournit col= 0.51(3).

1.67 1.6725 1.675 1.6775 1.68 T 0.45 0.5 0.55 0.6 0.65 B L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 10 100 L 1 10 100 |dB/dT| T B |d B / d T | L

Fig. 49 Point de croisement du cumulant de Binder B en fonction de la tem-pérature pour différentes tailles de systèmes. Encart : loi d’échelle suivie par la dérivée |dB/dT | au point critique Tc, en fonction de la taille du système (échelle log-log). La ligne droite indique le meilleur fit en loi de puissance effectué pour les tailles L 48.

B = h(|T Tc|.L1/⌫col

),

B = 1 hm4i

3hm2i2

L’égalité (dans les barres d’erreur) entre TcCoulomb et Tccol, ainsi qu’entre et col est frap-pante et indique que le modèle Éq. (26) présente une transition de phase unique et continue entre la phase Coulombienne et la phase colonnaire. Nous discuterons dans le Chapitre VII de la nature surprenante de ce résultat.

Continuons pour l’instant la caractérisation de cette transition de phase continue. Pour une transition du second ordre, nous nous attendons à ce que la susceptibili-té = L3(hm2i hmi2) associée au paramètre d’ordre diverge à la transition comme

(Tc)/ Lγ/⌫ avec γ/⌫ = 2 . C’est en effet ce que nous observons dans la Fig. 50 avec un pic marqué de à Tc = 1.675, en accord avec les autres déterminations de la tempéra-ture critique. Le comportement de en fonction de la taille du système au point critique Tc est quant à lui donné dans l’encart de la figure, et un fit sur les systèmes de plus grandes tailles donne ⌘ = 0.02(5).

Symétrie émergente du paramètre d’ordre à la transition

Avant de passer à l’obtention d’un autre exposant critique par des méthodes thermodyna-miques, il est important de signaler une observation supplémentaire au sujet du paramètre d’ordre qu’il a été possible d’effectuer numériquement. Cette observation et l’analyse ci-dessous ont été effectuées par G. misGuich.

Considérons la distribution du paramètre d’ordre et en particulier celle du vecteur norma-lisé m=2/L3P

r2Am(r). Dans les états fondamentaux colonnaires, m pointe dans une des six directions données (±1, 0, 0), (0, ±1, 0), (0, 0, ±1) alors que dans la phase Coulombienne

m =|m| s’annule. Que se passe-t-il proche de Tc ? Pour étudier cela, il est pratique tout d’abord d’imposer mz⇠ 0 (dans les simulations, nous ne choisissons par exemple que les configurations avec |mz| < 0.03) : nous avons vérifié que cela n’influençait pas les résultats. On représente ensuite graphiquement la distribution de probabilité P (mx, my, mz⇠ 0)

1.55 1.575 1.6 1.625 1.65 1.675 1.7 T 0 100 200 300 400 500 600 χ L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 10 100 L 10 100 1000 χmax T L m a x

Fig. 50 Évolution de la susceptibilité colonnaire = L3(h|m|2

i h|m|i2)

en fonction de la température pour différentes tailles de systèmes. L’encart montre la loi de puissance suivie par son maximum en fonction de la taille du système (échelle log-log). La ligne indique le meilleur fit en loi de puissance effectué pour les tailles L 48.

sous forme d’une courbe de « chaleur », comme dans la Fig. 51. Sur cette figure, les histo-grammes du paramètre d’ordre ont été représentés pour plusieurs températures (au-delà, en dessous et à Tc) et pour des tailles d’échantillon croissantes. On y observe qu’à basse température (sous Tc), la distribution est piquée sur les points (±m(T ), 0) et (0,±m(T )) (la valeur m(T ) n’est pas égale à 1 car le paramètre d’ordre n’est pas saturé pour cette tempé-rature). Pour la plus petite taille (L = 32), on observe toutefois une distribution assez dif-férente, avec une forme de symétrie centrale modifiée par des anisotropies carrées. À plus haute température (T = 1.673, juste sous Tc) cette symétrie centrale émerge complètement et est clairement visible pour le système de plus grande taille (L = 128). À notre estimation de Tc = 1.675, l’histogramme se « remplit » et se présente sous la forme d’une boule de petite amplitude (le paramètre d’ordre étant très faible à cette température), et ceci pour toutes les tailles d’échantillon étudiées.

La Fig. 51 semble donc indiquer qu’une forme non attendue de symétrie centrale (de type O(3)) semble émerger proche de la température critique. Ceci est assez inattendu, connais-sant la forme particulièrement anisotrope du paramètre d’ordre dans les fondamentaux et à basse température. Notons finalement que cette symétrie est visible de plus en plus proche de Tc au fur et à mesure que la taille des échantillons est augmentée. Pour quantifier cette sy-métrie émergente, construisons une mesure du caractère O(3) de la distribution angulaire :

Dans le cas d’une distribution isotrope, C4 doit s’annuler alors qu’il prend une valeur posi-tive si un axe cristallin est privilégié. En particulier C4 vaut 1 pour les états fondamentaux colonnaires. Bien sûr, ces prédictions ne sont valables que dans la limite thermodynamique, et il faut étudier les effets de taille finie de C4 pour comprendre ce qui se passe proche

C4= 1

2hcos(4 arg[mx+ imy]) + cos(4 arg[my+ imz]) + cos(4 arg[mz+ imx])i. Fig. 51 Histogramme de la distribution de probabilité P (mx, my, mz⇠ 0) en fonction de mx (axe horizontal) et my (axe vertical), pour différentes tailles de systèmes et températures T Tc. Les unités sont arbitraires.

         T = 1.673 T = 1.675 T = 1.66 L = 32 L = 64 L = 128 0

de Tc. C’est ce qui est effectué dans la Fig. 52, où C4 est représenté en fonction de 1/L pour différentes valeurs de températures. Encore une fois, on retrouve les comportements limites attendus : C4 s’annule (probablement de façon exponentielle) à haute température alors qu’il tend bien vers l’unité pour des systèmes de grande taille à basse température (non visible sur l’échelle de la figure).

La dépendance de C4 précisément sous et proche de Tc est non triviale : on observe que toutes les courbes passent par un minimum à L0(T ) avant de remonter pour saturer pour des systèmes de plus grande taille. Cette taille L0(T ) est donc une échelle sous Tc où l’ani-sotropie du paramètre d’ordre est minimale, confirmant de façon quantitative ce qui avait été observé sur la distribution du paramètre d’ordre dans la Fig. 51. Les données numé-riques de la Fig. 52 indiquent que cette longueur semble diverger à Tc, et qu’en particulier C4 s’extrapole vers 0 en 1/L à la température critique. La légère remontée pour L = 128 et T = 1.675 est interprétée comme une légère sous estimation de Tc (qui doit être légère-ment supérieure à T = 1.675). À noter que cette taille d’échantillon la plus grande est assez demandeuse en termes de temps de calcul et n’a pas été utilisée pour la détermination de Tc par les méthodes des sections précédentes (il aurait fallu pour cela avoir une grille de température plus fine).

Au final, l’analyse des effets de taille finie de C4 confirme donc que la distribution du para-mètre d’ordre possède bien une symétrie O(3) à, et uniquement à, Tc. Nous reviendrons sur cette constatation dans le chapitre suivant.

Chaleur spécifique

Pour conclure l’étude numérique du modèle Éq. (26) et de sa transition de phase, intéres-sons-nous à sa thermodynamique et en particulier à la chaleur spécifique par site définie dans l’Éq. (5). Son évolution en fonction de la température est représentée dans la Fig. 53 pour différentes tailles de systèmes.

Deux choses sont remarquables dans cette courbe. Tout d’abord, nous observons un pic très marqué autour de T ⇠ 1.52. Il est clair que ce pic n’est pas une singularité thermodyna-mique : il n’évolue pas en augmentant la taille des systèmes (cet effet est déjà présent pour un système de taille modeste L = 16). Par ailleurs, nous n’avons observé aucune autre

indi-Fig. 52 Dépendance en taille finie de la mesure d’anisotropie C4 de la distri-bution du paramètre d’ordre m.

0 0.01 0.02 0.03 0.04 0.05 0.06 1/L 0 0.05 0.1 0.15 C4 T=1.66 T=1.67 T=1.673 T=1.675 T=1.68 T=1.8 1/L C4

cation éventuelle d’une transition de phase à cette température. À noter que cette dernière remarque est complémentaire de la première, car il existe des transitions de phase (celles continues avec un exposant critique ↵ < 0) où la chaleur spécifique ne diverge pas. Bien qu’il ne soit pas inhabituel d’observer des bosses, pics ou effet similaires dans une chaleur spécifique sans relation avec une transition de phase, nous n’avons pas d’explication simple pour cet effet. Tout juste pouvons-nous imaginer qu’il correspond à la libération d’entropie par un mode de mouvement des dimères, qui doit être extrêmement local puisque déjà présent pour l’échantillon L = 16. Nous n’avons pas poussé plus loin cette interprétation, mais il est possible que cette bosse de chaleur spécifique contienne plus d’informations. Un second effet notable est présent proche de T⇠ 1.67 où l’on voit apparaître un pic très marqué de Cv qui diverge avec la taille du système, et qui présente une enveloppe en loi de puissance caractéristique d’une transition de phase du second ordre. Il est particulièrement remarquable de constater que ce pic est très dur à détecter, car complètement masqué par la partie régulière de la chaleur spécifique pour des systèmes de petite taille. Ce pic est par exemple tout simplement absent pour L = 16. La divergence de ce pic est donc très soudaine : il faut une grille assez fine de température pour la capturer, comme visible sur l’encart supérieur de la Fig. 53. Bien que pour les tailles d’échantillon considérées, la hau-teur de ce pic est plus faible que celle de la bosse vers T ⇠ 1.52, c’est clairement lui qui est associé à la transition de phase Coulomb-colonnaire. La température pour laquelle le pic est maximal est Tc= 1.676(1) pour les plus grandes tailles de systèmes, en accord avec les autres estimations de Tc des sections précédentes. La divergence de ce pic peut être carac-térisée par un exposant critique et nous avons effectué un fit de Cv/N pour les quatre plus grands échantillons en utilisant la forme suivante :

Fig. 53 Évolution de la chaleur spécifique par site Cv/N en fonction de la température pour différentes tailles de systèmes. Panneau de droite supérieur : zoom proche de la température de transition. Panneau de droite inférieur : dépendance en taille de Cv/N au point critique (échelle log-log). La ligne droite indique le meilleur fit en loi de puissance effectué pour L 48 .

0.8 1.2 1.6 2 T 0 0.4 0.8 1.2 1.6 Cv /N L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 0 20 40 60 80 100 L 0 0.5 1 1.6 1.65 1.7 1.75 0.6 0.8 1 L=16 L=32 L=48 L=64 L=80 L=96 Cv /N T L C m a x v /N Cv(Tc)/N = Creg+ AL↵/⌫.

L’inclusion de la partie régulière constante Creg, qui est souvent oubliée dans les mesures d’exposants critiques (car négligeable en général devant le second terme), est ici essentielle pour cette transition. Le fit représenté par une ligne continue dans l’encart inférieur de la Fig. 53, fournit l’estimation ↵/⌫ = 1.11(15). Cette fois-ci est associé indifféremment à la longueur de corrélation cristalline à basse température, ou à la longueur caractéristique du « désordre » de la phase Coulombienne, les deux estimations de étant en accord. Par propagation de l’estimation de et de sa barre d’erreur, nous obtenons ↵ = 0.56(7). Dans les barres d’erreur, la relation d’hyperscaling ↵ = 2 d⌫ est satisfaite (ici d = 3).

Chapitre VII. Éléments analytiques pour comprendre la