• Aucun résultat trouvé

La phase de sensibilisation

Dans le document en fr (Page 68-73)

Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

4. La dermatite allergique de contact

4.1. La phase de sensibilisation

Cette phase apparaît lors du premier contact de la peau avec l’haptène. Elle mène à la génération d’une réponse primaire spécifique des lymphocytes T spécifiques de cet haptène, présents dans les ganglions lymphatiques drainant la peau. Deux propriétés sont nécessaires aux haptènes pour induire la sensibilisation cutanée :

o une propriété d’interaction avec les protéines de la peau dans le but de former un complexe antigénique,

Introduction – Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

I

71

o une propriété pro-inflammatoire qui va délivrer des signaux permettant d’activer l’immunité innée de la peau.

Ces signaux sont appelés « signaux de danger », selon la théorie évoquée par Polly Matzinger (1992). Ce sont des structures moléculaires présentées sur les pathogènes ou des molécules produites par les cellules épithéliales suite à l’intrusion de xénobiotiques dans l’organisme. Ces structures seront reconnues par des récepteurs extracellulaires et intracellulaires, les PRR, du système de défense inné.

4.1.1. Activation des cellules présentatrices d’antigène par l’haptène

Les KCs étant abondamment présents dans la peau, ce sont les premières cellules qui rencontrent l’haptène. Ils sont considérés comme indispensables dans la phase de sensibilisation pour plusieurs raisons :

- ils contiennent des enzymes avec une activité métabolique requise pour la conversion des pro-haptènes en haptènes biologiquement actifs, telles que le cytochrome P450. Ces haptènes vont interagir avec les protéines pour former le complexe antigénique.

- ils expriment des facteurs chimiotactiques après exposition aux molécules allergisantes, incluant des chimiokines telles que CXCL9, CXCL10 et CXCL11. Ces chimiokines permettent d’attirer les cellules immunitaires, telles que les LCs (Van der Veen et al., 2011).

Selon la théorie évoquée par Polly Matzinger (1992), les DC ont besoin non seulement de l’haptène, mais également de recevoir des « signaux de danger » exogènes ou endogènes afin d’être complètement matures et de pouvoir activer de manière efficace les LTs. Dans le cas où l’haptène est une molécule oxydante, le signal de danger correspondra aux EROs (Heil and Land, 2014).

Les LCs et les DDCs sont dotées de prolongements cytoplasmiques qui facilitent leur rencontre avec le complexe antigénique. Elles résident dans l’épiderme et le derme en tant que DCs relativement immatures, caractérisées par une haute capacité de capture de l’Ag (Streilein and Grammer, 1989). L’Ag est capturé via le processus d’internalisation. Il en existe différents types, selon la taille des xénobiotiques (Kumari et al., 2010):

Introduction – Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

I

72

o la phagocytose, qui permet l’internalisation de particules de taille supérieure à 10 µm (Groves et al., 2008),

o la macropinocytose qui permet l’internalisation des molécules de taille comprise entre 0,2 et 10 µm (Kerr and Teasdale, 2009),

o l’endocytose concerne les particules de taille inférieure à 500 nm (Donaldson et al., 2010). Ces mécanismes consistent en la formation de replis membranaires qui s'intègrent dans le cytoplasme sous forme de petites vésicules. Les DCs peuvent absorber l’équivalent de leur volume en l'espace d'une heure. Les KCs sont également capables de capturer des Ag, seules les DCs peuvent assurer leur transport jusqu’aux ganglions lymphatiques afin de les présenter aux LT naïfs et induire une réponse immunitaire primaire, ce sont des cellules présentatrices d’Ag professionnelles (Nestle et al., 2009) (Figure 25).

Figure 25. Voies d’internalisation de l’antigène et association aux molécules du CMH de classe II D’après Roche and Furuta (2015).

Introduction – Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

I

73

4.1.2. Migration des cellules présentatrices d’antigène

Les DCs vont migrer à travers l’épiderme et le derme vers le système lymphatique proximal (Randolph et al., 2005). Cette mobilisation est déclenchée principalement par deux cytokines : le TNF-α et l’IL-1β (Cumberbatch et al., 1997; Nedoszytko et al., 2014). Elles participent à la diminution de l’expression de l’E-cadhérine à la surface des LCs, une molécule d’adhésion qui permet leur interaction avec les KCs et donc leur rétention dans l’épiderme (Tang et al., 1993). Les DCs vont devenir matures et acquérir leur fonction de cellule présentatrice d’Ag. Les LCs vont donc se détacher de l’épiderme et traverser la jonction dermo-épidermique, par le biais de l’expression d’enzymes protéolytiques MMP-2 et MMP-9 qui permettent la dégradation du collagène (Ratzinger et al., 2002). Cette étape est dépendante de l’axe CXCL-12-CXCR-4 : CXCL-12 est exprimé sur les fibroblastes du derme et va interagir avec CXCR-4, exprimé sur la DC (Ouwehand et al., 2008). Les DCs vont ensuite exprimer le CCR-7, récepteur des chimiokines CCL-19 et CCL-21 (Jiang et al., 2007). CCL-21 est exprimé par les cellules endothéliales des vaisseaux lymphatiques et CCL-19 par les zones T des ganglions drainant la peau. Ces deux chimiokines concourent donc à attirer les DCs au niveau des ganglions lymphatiques où elles vont pouvoir interagir avec des LT naïfs. Une fois dans les vaisseaux lymphatiques, les DCs sont transportées par le flux de lymphe afférente et arrivent au niveau du sinus sous-capsulaire du ganglion lymphatique. A l’intérieur du ganglion, leur localisation sera déterminée par deux gradients distincts de chimiokines : CXCL-13, synthétisée par les DCs folliculaires, oriente les DCs vers les follicules B, tandis que les fibroblastes réticulaires sécrètent CCL-19/CCL-21 orientant les DCs vers le paracortex riche en LT (Figure 26) (Förster et al., 2012).

Des modifications phénotypiques s’opèrent également au cours de la migration des cellules présentatrices d’Ag. Elles perdent leur caractère de capture de l’Ag et acquièrent la capacité de stimuler les LTs naïfs.

Introduction – Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

I

74

Figure 26. Les étapes clé de la migration des DCs vers les ganglions lymphatiques D’après la thèse de B. Todorova, 2014.

4.1.3. Présentation antigénique et expansion clonale

Après avoir rejoint les ganglions lymphatiques drainant la peau, les DCs vont pouvoir interagir avec les LTs via leur CMH (Martins and Reis, 2011). Mais pour induire l’activation des LTs, l’interaction entre le CMH et le TCR est insuffisante. Les cellules présentatrices d’Ags doivent également fournir des signaux de co-stimulation et sécréter des cytokines nécessaires à la différenciation des LT naïfs en LTs effecteurs ou en LTs mémoires. C’est une synapse immunologique qui se crée entre les DCs et les LTs (Figure 27). De façon autocrine, les DCs vont activer les LTs naïfs, qui vont produire plusieurs cytokines, dont l’IL-2, qui est un puissant facteur de croissance (Gómez et al., 1998). Les LTs vont proliférer selon un processus appelé l’expansion clonale. Cette expansion permet la formation d’un grand nombre de LTs spécifiques de l’haptène. Des ganglions lymphatiques, les LTs spécifiques de l’haptène vont rejoindre la circulation sanguine en exprimant le cutaneous lymphocyte-associated antigen, qui va leur permettre de rejoindre le

Introduction – Partie II : La dermatite allergique de contact aux fragrances

I

75 lieu de l’inflammation cutanée.

Figure 27. La synapse immunologique entre DC et LT D’après Kapsenberg, 2003.

Dans le document en fr (Page 68-73)

Documents relatifs