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Pharmacologie de la morphine

Dans le document La substitution de l'héroïne par la morphine (Page 101-104)

III. La morphine

6. Pharmacologie de la morphine

Les spécialités à base de morphine n’ont qu’une seule indication en France, le traitement de la douleur. Cet antalgique de palier 3 est en effet indiqué « dans les douleurs persistantes, intenses ou rebelles aux autres antalgiques, qu’elles soient néoplasiques ou non ». C’est la seule AMM attribuée à la morphine.

a) Mécanisme d’action dans la douleur

La définition de la douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en des termes évoquant une telle lésion ». La perception de la douleur, ou nociception comprend trois étapes correspondant au cheminement des voies nerveuses nociceptives :

1) La première étape de la nociception est l’élaboration en périphérie d’un potentiel d’action au niveau des récepteurs de la douleur, les nocicepteurs. Ce sont des récepteurs sensoriels qui correspondent aux extrémités des fibres nerveuses sensitives de la peau et des organes internes. Leurs corps cellulaires sont situés dans les ganglions rachidiens à la racine dorsale des nerfs rachidiens. Il existe différents types de fibres, les fibres C sont fines, non myélinisées et donc à transmission lentes, responsables de douleur diffuses de type brûlure. Les fibres Aδ sont également fines, faiblement myélinisées, à vitesse moyenne et responsables des douleurs vives et localisées de type piqûre. On trouve sur les extrémités périphériques de ces deux types de fibres des canaux TRPV1. Une fois stimulés, le potentiel d’action est généré par l’ouverture de ces canaux TRPV1, ce qui permet alors la transmission de l’information nociceptive vers la moelle épinière. On trouve également des récepteurs

101 µ à proximité de ces canaux. Leur stimulation, à l’inverse des précédents, diminue le signal algogène en empêchant la phosphorylation des canaux TRPV1. En agissant sur ces récepteurs µ, la morphine exerce une antalgie périphérique. Il existe d’autres fibres, Aα et Aβ, qui elles sont myélinisées et répondent aux stimulations mécaniques modérées comme le toucher. 2) La deuxième étape de la nociception est le relais du signal algogène dans

la corne dorsale de la moelle épinière. Ce relais fait intervenir des interneurones, qui dans le cas des fibres Aα/β, libèrent des enképhalines. Celles-ci vont agir sur les neurones intégrateurs, dont le rôle est de se projeter vers le cerveau. Les neurones intégrateurs sont pourvus de récepteurs µ qui une fois activés, notamment par la morphine, diminuent le signal nociceptif. On trouve à ce niveau une autre propriété de la morphine après l’antalgie périphérique, qui est l’antalgie spinale. A l’inverse, pour les autres fibres C et Aδ, l’interneurone stimule les neurones intégrateurs qui continue alors la transmission du signal nociceptif vers le cerveau.

3) Enfin la troisième étape de la nociception va être la transmission du signal algogène de la moelle épinière vers les différentes structures du cerveau, essentiellement le noyau ventrocaudé du thalamus et le cortex. Après modulation du signal, celui-ci parcourt alors les voies descendantes dont la substance grise péri-aqueducale et la moelle épinière. Dans chacune de ces structures du cerveau on retrouve des récepteurs µ qui vont être responsables de l’antalgie supra-spinale de la morphine. En effet dans ces sites, les opioïdes vont inhiber directement les neurones mais aussi stimuler d’autres neurones qui vont envoyer des prolongements médullaires inhibiteurs des neurones nociceptifs. De plus, la voie descendante aboutit à la libération de sérotonine qui stimule les interneurones sécréteurs d’endorphines vues précédemment. L’apport d’opioïdes exogènes comme la morphine, stimule la libération d’opioïdes endogènes, ce qui augmente les effets antalgiques des opioïdes exogènes. La répartition des récepteurs µ dans toutes les étapes de la voie nociceptive permet donc de comprendre les propriétés antalgiques périphériques, spinales et supra-spinales de la morphine.

De plus, la morphine va agir sur les deux composantes de la douleur, l’une sensitive l’autre émotionnelle, et en particulier la composante émotionnelle.

102 Enfin, il faut préciser que l’action analgésique de la morphine est dose- dépendante.

b) Pharmacocinétique

 Résorption

La morphine, comme la plupart des antalgiques opioïdes, est bien résorbée lors d’une administration par voie sous cutanée, intramusculaire et par voie orale. Cependant, elle subit un fort effet de premier passage hépatique, ce qui explique par exemple que les posologies par voie orale doivent être bien plus importantes que pour la voie parentérale afin d’obtenir la même antalgie. Cet effet de premier passage hépatique est du aux groupements hydroxyles libres présents dans la morphine. Ainsi la biodisponibilité par voie orale par rapport à la biodisponibilité par voie sous cutanée est de 50%, et de 30% par rapport à la voie parentérale.

 Distribution

Après résorption, la morphine est liée aux protéines plasmatiques à raison de 30%. Elle se localise ensuite dans des tissus fortement vascularisés à de fortes concentrations. Ainsi, elle se concentre principalement dans le cerveau, les poumons, le foie, la rate et les reins. Il faut noter également que la morphine traverse le placenta.

 Métabolisation

La morphine est métabolisée de façon importante en dérivés glucuronoconjugués qui subissent un cycle entéro-hépatique. On trouve essentiellement deux composés issus de cette réaction qui se produit sur les groupements hydroxyles. Le premier métabolite est la morphine-3- glycuroconjugué (M3G), qui a des propriétés neuro-excitatrices. Le deuxième métabolite est la morphine-6-glycuroconjugué qui est un métabolite environ 50 fois plus actif que la substance-mère. La morphine est également déméthylée, ce qui conduit à un autre métabolite actif, la normorphine.

 Elimination

L'élimination des dérivés glucuronoconjugués se fait essentiellement par voie urinaire, à la fois par filtration glomérulaire et sécrétion tubulaire. L'élimination fécale est faible (< 10 %).

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