• Aucun résultat trouvé

Chapitre II Etude du compactage

II.2.2 Phénomène du matelassage

Sur les chantiers de terrassement, il arrive que les sols compactés présentent du matelassage. On utilise ce terme pour désigner le phénomène suivant : sous l’effet d’une charge, le sol se déforme de façon importante et, lorsque la charge est enlevée, le matériau revient plus ou moins à son état initial (déformation quasi-réversible). Ce phénomène joue un rôle très important dans le comportement des matériaux de route, de barrage, etc.. La compressibilité des phases d’un sol est importante pour expliquer le matelassage:

- la phase solide est peu compressible, mais l’arrangement des grains entre eux peut changer si la contrainte est assez grande pour déformer le sol (le nouvel arrangement entraînant une diminution du volume des pores et donc de la porosité) ;

- la phase liquide est faiblement compressible (mais elle peut se déplacer d’un pore à un autre); - la phase gazeuse est très compressible et beaucoup plus fluide que la phase liquide (elle peut

se déplacer plus facilement que l’eau, et peut aussi être chassée plus rapidement que l’eau dans les sols sauf si elle est enfermée dans certains pores).

Le phénomène de matelassage est donc probablement dû aux bulles d’air emprisonnées dont les changements de volume sous charge sont réversibles.

Nous n’avons trouvé aucune référence qui parle de façon systématique du matelassage, mais il y a des chercheurs qui font part dans leurs recherches de ce phénomène depuis les années 1970:

- LEFLAIVE et al. (1974) indiquent que l’on risque le matelassage (ou coussin de caoutchouc) si le degré de saturation est trop élevé (dans ce cas, la densité sèche est proche de celle de saturation) en raison d’une très grande déformabilité de plates-formes.

Chapitre II : Etude du compactage 55

Ils ont ensuite réalisé une série d’essais sur une couche de un mètre de grave limoneuse avec plusieurs teneurs en eau, en utilisant divers compacteurs (vibrants et à pneus). Les résultats sont présentés sur la Figure II - 18. Ils ont trouvé que des matériels de M1/L = 41.5 kg/cm obtiennent quand w = 5.2% des résultats en densité équivalents à ceux du matériel pour lequel M1/L = 33 kg/cm quand w = 6%, avec l’avantage d’une meilleure portance dans le premier cas (matelassage à w = 6%).

- DEVAUX (1984) a effectué un essai sur les stériles des mines de potasse d’Alsace (ou résidus de résidus), dont la limite de liquidité (wL), l’indice de plasticité (IP), la densité sèche maximale à l’OPN (ρd OPN), et la teneur en eau optimale (wOPN) sont respectivement de 37%, 20%, 1.98 g/cm3, et 12%. Il a observé un important matelassage lors du passage d’un engin (sensible même au pied), par contre, le camion lourdement chargé qui approvisionnait le matériau frais ne créait pas d’ornière importante.

Il a pense que le compactage par vibration provoquait une baisse brutale des caractéristiques mécaniques en raison de la cassure de liaisons cristallines fragiles existant entre les grains. Les résultats se sont traduits par une chute du CBR immédiat : 1) avant compactage, CBR = 18 ; 2) après 3 passes de compacteur, CBR = 6 ; 3) après 6 passes de compacteur, CBR = 2. - OLIVIER et MESBAH (1986) indiquent que, dans un sol en remblai, on améliore la densité

sèche en augmentant le taux de compactage (ici en augmentant le nombre de passes du compacteur) à teneur en eau constante (w01). Mais, ils indiquent que la valeur de densité sèche peut ne pas être atteinte quand la teneur en eau naturelle (w02) est très élevée, car dans ce cas, l’augmentation du taux de compactage risque de conduire le point représentant de l’état du matériau sur la courbe de saturation, d’où le phénomène de matelassage.

Selon la Figure II - 19, on trouve que les échantillons compactés du côté sec (par exemple w01) ont moins de possibilités de rencontrer le phénomène de matelassage parce que le chemin pour arriver à la saturation est beaucoup plus long que celui du côté humide, et ils ont besoin de beaucoup plus d’énergie de compactage pour être saturés. On peut conclure qu’il est souvent plus facile de rencontrer le phénomène de matelassage du côté humide.

Figure II - 19 : Compactage d’un sol en remblai (d’après OLIVIER et MESBAH, 1986)

- PUIG et BLIVET (1973) ont rapporté l’exemple d’un ouvrage de l’autoroute A15. Il s’agit d’un remblai constitué d’une grave argileuse qui se trouve dans une vallée compressible. Ils expliquent que, le phénomène de matelassage observé lors de la mise en place du remblai est dû au degré de saturation Sr très élevé (de 94% à 98%).

Chapitre II : Etude du compactage 56 DELMAS (1988) s’est intéressé à l’exemple de l’autoroute A15 pour expliquer les avantages des ouvrages de soutènement renforcés par géotextiles : aucun désordre n’a été observé lors de la mise en oeuvre en dépit du degré de saturation (Sr = 94% à 98%) qui a entraîné un matelassage lors du compactage ; cela peut s’expliquer par l’emploi d’un géotextile drainant qui permet d’empêcher la création de surpressions interstitielles, et facilite la consolidation du matériau de remblai.

- TAIBI (1994) a trouvé que, pour le sol compacté, lorsque le degré de saturation est supérieur à 0.85, l’air se trouve sous la forme de petites bulles coincées dans les interstices et ne peut s’échapper. Il crée par conséquent des déformations réversibles (matelassage), d’où l’impossibilité pour les sols compactés à droite de l’optimum PROCTOR d’atteindre la ligne de saturation dans le plan (w, γd). Cette compression de l’air et sa dissolution dans l’eau diminue la compressibilité du fluide.

- MESBAH et al. (1999) ont effectué différents essais de compactage statique (ECS) sur le même matériau (wL = 31.3% ; IP = 12) jusqu’à une contrainte de compactage suffisamment élevée.

La Figure II - 20 présente les résultats pour deux teneurs en eau (w = 7.5% et 13.8%). Ils vérifient que, quand ils s’approchent de la saturation, la densité sèche tend vers une limite même si l’énergie de compactage (ou la contrainte de compactage) augmente, et la densité ne varie quasiment plus quand les bulles d’air ont disparu (ou sont sous haute pression). Ils pensent donc que le matériau pendant le compactage passe d’un état non saturé à un état qui peut, à l’extrême, être saturé, et le phénomène de matelassage apparaît à ce moment-là. Ils notent que c’est de fait un phénomène de type consolidation.

Figure II - 20 : Relation entre la contrainte de compactage et l’énergie absorbée par la densification du matériau en fonction de la densité sèche (d’après MESBAH et al., 1999)

- Afin de valoriser des sédiments de dragage, BOURABAH et al. (2011) ajoutent un sable au sédiment naturel, et le mélange est constitué de 30% de sédiment naturel et 70% de sable. Les résultats d’essais de compactage-portance montrent une baisse de l’indice portant immédiat (IPI) et de la teneur en air à l’optimum PROCTOR modifié (AOPM) avec une baisse de la teneur en eau optimale dans le cas du mélange par rapport au sédiment naturel (Tableau II - 4). Ils en déduisent que c’est probablement dû à l’emprisonnement des bulles d’air occluses générant une compressibilité réversible du fluide interstitiel et donc l’apparition du phénomène de matelassage (Figure II - 21).

Chapitre II : Etude du compactage 57 Tableau II - 4 : Optimum PROCTOR modifié pour le sédiment naturel et le sable d’ajout

Matériaux wOPM (%) γdOPM (kN/m3) AOPM (%) IPIOPM

Sédiment naturel 23.3 15.54 5.57 14

Sable d’ajout (0/4) mm 8.83 21.23 2.62 38

Figure II - 21 : Variation de la compacité et de la portance en fonction de la teneur en eau (d’après BOURABAH et al., 2011)

Documents relatifs