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6 RECOMMANDATIONS : VERS L’AMÉNAGEMENT DURABLE DU TERRITOIRE

6.1 Perturbations de la biodiversité et aménagement durable du territoire

Il a été constaté que les politiques abordaient peu les autres types de perturbation de la biodiversité que la perte et la fragmentation des milieux naturels. Il est donc recommandé que les municipalités considèrent tous les types de perturbation de la biodiversité (perte et fragmentation, pollution, espèces exotiques envahissantes, surexploitation des espèces et des écosystèmes et changements climatiques) comme étant des menaces potentiellement significatives au maintien de la capacité de support des écosystèmes et à la préservation de la biodiversité. Considérant l’ampleur du problème des espèces exotiques envahissantes, de la pollution, et de la perte et de la fragmentation des milieux naturels dans certaines régions (CNC, 2010), les municipalités devraient concentrer leurs efforts dans et autour des zones où la conservation est la priorité.

Chaque municipalité devrait concevoir sa politique de développement durable ou son Agenda 21 en amont de sa politique de conservation des milieux naturels. La préservation de la biodiversité est l’un des enjeux contribuant au bien-être de l’humain. Les autres enjeux sont aussi importants dans une perspective de durabilité. L’objectif du développement durable au Québec est de repenser les rapports qu’entretiennent les humains entre eux et avec la nature afin de porter un regard critique sur les atteintes à l’environnement et les injustices sociales (MDDEP, 2002e). Une politique de développement durable ou un Agenda 21 devrait ainsi établir la vision que la municipalité souhaite adopter dans un horizon de planification à long terme (MAMROT, 2013f). La préservation de la biodiversité et le maintien de la capacité de support des écosystèmes sont des conditions essentielles à une démarche de développement durable. Ils devraient donc faire partie d’une politique de développement durable.

À cet égard, il est recommandé que le MDDEFP assujettisse également les municipalités à la Loi sur le développement durable. La façon dont est planifié l’aménagement du territoire doit subir des réformes importantes en fonction des impératifs de développement durable, notamment en ce qui a trait à la préservation de la biodiversité et au respect de la capacité de support des écosystèmes (CQDE, 2007). Une étape primordiale de ce processus serait l’adoption d’une réforme de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Le projet de Loi sur l’aménagement durable du territoire et l’urbanisme, qui semble avoir été relégué aux oubliettes, doit revenir à l’agenda politique. L’objectif souhaitable de ce projet de loi est de modifier substantiellement les orientations actuelles du MAMROT en matière d’aménagement du territoire afin d’y inclure plus de considération à l’égard du développement durable, donc de la préservation de la biodiversité et du respect de la capacité de support des écosystèmes (RNCREQ, 2011). Il est aussi recommandé d’accompagner les nouvelles orientations d’indicateurs de pertinence et de performance, ce qui permettrait un suivi de l’efficience et de l’efficacité des municipalités (RNCREQ, 2011).

Le MAMROT en partenariat avec le MDDEFP doit former les municipalités sur leurs responsabilités à l’égard de l’environnement et de l’aménagement durable de leur territoire. Le témoignage de la Ville de Québec (2006, p.72) indique clairement un manque de connaissances à cet égard :

« […] une des faiblesses du régime juridique actuel à l’égard de la conservation est qu’il repose essentiellement sur le droit de propriété et que la Ville n’a pas les moyens d’acheter tous les sites à protéger. Qui plus est, les lois québécoises et canadiennes qui renferment des dispositions offrant une forme de protection à des sites naturels s’adressent principalement aux terres du domaine de l’État. Seules les désignations « de réserve naturelle » et « d’habitat floristique » sont applicables sur les terres du domaine privé. Force est de constater qu’il n’existe pas actuellement, au Québec, de lois ayant comme objectif immédiat d’assurer une protection aux espaces boisés lorsque ces milieux ne comprennent pas d’éléments particuliers, tels que milieux humides ou des espèces menacées ou vulnérables. Ce sont les outils de contrôle de l’utilisation du sol, disponibles aux municipalités, qui sont les plus nombreux. Toutefois, en pratique, on constate que plusieurs d’entre eux ont, jusqu’à maintenant, été sous-utilisés ou carrément mis de côté. ».

De plus, plusieurs jugements impliquant directement des municipalités viennent confirmer les pouvoirs et les responsabilités des municipalités à l’égard de l’environnement ou de la conservation des milieux naturels. Le juge dans l’affaire 114957 Canada Ltée (Spraytech, société d’arrosage) contre Hudson (ville de) (2001) met en évidence le principe de subsidiarité à l’égard du droit de règlementation des municipalités à l’égard de l’environnement. Aussi, dans l’affaire Entreprises

Sibeca inc. contre Frelighsburg (municipalité de) (2004), le juge légitime la protection de l’environnement naturel du territoire municipal par le conseil de cette municipalité. Également, le jugement de l’affaire Wallot contre Québec (ville de) (2010) accorde la légitimité d’une municipalité d’adopter des règlements visant la protection des berges d’un lac ou d’un cours d’eau, notamment en ce qui a trait à leur restauration. Le juge répond aux citoyens contestant la légalité du règlement de restauration des berges de la ville de Québec : « Le droit de propriété absolue n’existe pas. Le droit de propriété a constamment été modifié par les exigences sociales. » (Traduction libre de Lamontagne, 2005 p. 167). L’équilibre délicat qui existe entre les droits individuels et l’intérêt commun doit évoluer et les municipalités ont un rôle prépondérant à jouer à cet égard (CQDE, 2007).

6.2

Préservation de la biodiversité et maintien de la capacité de support des