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9.1) Pertinence de la méthode développée

Ce sont actuellement les méthodes empiriques qui sont prédominantes pour la conception des chaussées non revêtues. Étant donné que ces méthodes sont généralement très spécifiques aux contextes dans lesquels elles ont été développées, les concepteurs tendent désormais à privilégier les méthodes mécanistes-empiriques qui apparaissent comme plus « universelles ». C’est dans ce cadre que la méthode présentée dans ce document, qui s’appuie sur un code de calcul ainsi que sur des lois d’endommagement déterminées expérimentalement, a été développée. Cette méthode allie physique et empirisme, elle apparait comme plus rigoureuse qu’une méthode purement empirique qui ne peut s’appliquer que pour des cas bien précis. Il est question par la suite d’analyser la pertinence de la méthode développée en examinant la qualité de construction des échantillons de laboratoire ainsi qu’en étudiant la validité et la mise en application des résultats obtenus.

9.1.1) Qualité de construction des échantillons

L’étude présentée dans ce document n’a pas été réalisée sur le terrain mais en laboratoire en recréant des modèles réduits de chaussées. Il a été question de simuler au mieux les conditions structurales des chaussées non revêtues. En premier lieu, le logiciel WinJULEA a permis de simuler le comportement rhéologique de chaussées non revêtues typiques constituées d’une couche de roulement-fondation granulaire (module réversible de 300MPa) comprise entre 300 et 450mm d’épaisseur sur un sol d’infrastructure de faible portance (module réversible de 50MPa). Ces simulations ont fait apparaitre des déformations au sommet du sol d’infrastructure comprises entre 1010µε et 2020µε lors d’un passage d’un demi-essieu simple (charge de 5000 kg sur une aire de contact de 70686 mm ²). Compte tenu des contraintes liées au simulateur (charge maximale applicable de 950kg) et à la cuve dont la profondeur n’était que de 563mm, il a été choisi de construire des échantillons composés, en termes d’épaisseurs, de 25mm d’asphalte, 200mm de fondation et 338mm de sol d’infrastructure. Des simulations avec le logiciel WinJULEA ont fait apparaitre que de telles structures de chaussées permettaient d’obtenir en simulateur des déformations relativement proches de celles qui seraient apparues dans des chaussées réelles. Il s’est avéré par la suite, lors des essais, que les déformations aux sommets des sols d’infrastructures construits furent comprises entre 535µε et 4270µε lors de l’application de la charge maximale sur le simulateur. Ces valeurs sont du même ordre de grandeur que celles simulées pour des chaussées non revêtues réelles, laissant penser que la fine couche d’asphalte ajoutée sur les échantillons d’essais n’a pas eu de grande influence sur le comportement structural du sol d’infrastructure.

La qualité de construction des échantillons est également reflétée par le degré de compaction des différentes couches dans la cuve. Le degré de compaction se défini comme le rapport entre la masse volumique sèche in-situ et la masse volumique sèche maximale déterminée avec l’essai Proctor. L’espace dans le laboratoire étant réduit, la compaction a eu lieu à l’aide d’un marteau vibrant qui a permis d’atteindre des degrés de compaction compris entre 89,7% et 99% pour les sols d’infrastructures et compris entre 95,9% et 98,8% pour le MG-20. Cela indique de très bonnes compactions qui auraient pu être atteintes en conditions de terrain avec des plaques vibrantes ou des rouleaux.

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9.1.2) Validité des résultats et des travaux

Les résultats obtenus lors des essais en simulateur sur les échantillons de chaussées sont cohérents. L’augmentation de la déformation au sommet du sol d’infrastructure a été progressive sur chacun des échantillons lors de l’accroissement de la charge par paliers. Les résultats obtenus ont permis d’établir des courbes de Wöhler et de distinguer le comportement d’un sol suivant qu’il soit saturé ou non. Ces résultats ont pu être validés par de véritables données de terrain, permettant ainsi de mettre en évidence toute la légitimité d’effectuer des essais de chargement accélérés sur des échantillons de chaussées en laboratoire.

Au total, ce sont trois courbes de Wöhler qui ont été développées pour chacun des critères d’endommagement (ornière de 25mm ou 50mm) : une courbe pour les sables-silteux/silts- argileux, une courbe pour les argiles et une courbe pour les sables. Au final, la courbe correspondant aux sables n’a pas été analysée car il manque des données dans la littérature pour pouvoir la valider. Les courbes correspondants aux sols fins ont pu être validées avec des données de terrain. La courbe pour les sables-silteux/silts-argileux s’articule également très bien avec les courbes de Wöhler établies pour les routes à faible volume par Gupta et al. (2004), Shell (1978), Sahoo (2009), Austroads (2004), TRRL (1987) et Theysse et al. (1996). Cependant, la courbe développée pour l’argile dans le présent projet s’éloigne sensiblement des courbes citées précédemment et ne s’appuie pas sur suffisamment d’essais pour pouvoir être pleinement validée.

La méthode a été développée en considérant la loi d’endommagement pour les sables- silteux/silt-argileux et en utilisant le code de calcul de Boussinesq-Odemark pour la détermination de la déformation réversible au sommet du sol d’infrastructure. Ensuite, les résultats obtenus avec la méthode ont été comparés avec ceux obtenus par les principales méthodes de conception des chaussées non revêtues actuelles. Les écarts entre les conceptions effectuées par la méthode développée et celles effectuées par la méthode de l’AASHTO, en termes de hauteurs granulaires de fondation, sont en moyenne de 25%. Cette observation tend à démontrer que d’importants gains de matériaux pourraient être obtenus en appliquant une méthode de conception mécaniste empirique. La problématique soulevée est d’autant plus importante que la méthode AASHTO est actuellement la méthode la plus utilisée pour la conception des chaussées non revêtues en Amérique du Nord. Les écarts de conception sont encore plus significatifs avec la méthode de l’U.S. Corps of Engineers, ce qui tend à montrer les limitations de cette méthode qui est purement empirique. La comparaison entre la méthode développée et celle de Giroud et Han a montré que ces deux méthodes semblent proches lorsque le module réversible du sol d’infrastructure est supérieur à 10MPa.

9.1.3) Mise en application des résultats de la recherche

Finalement, la recherche, dont les résultats sont décrits dans le présent document, a permis de mettre en place une méthode de conception mécaniste-empirique pour les chaussées non revêtues. Des lois d’endommagement empiriques ont été développées qui, utilisées en parallèle avec le code de calcul de Boussinesq et d’Odemark, ont permis l’élaboration d’abaques de conception. Ces abaques ressemblent beaucoup à ceux développés par la méthode mécaniste- empirique de Gupta et al. Les lois d’endommagement développées sont spécifiques au contexte des chaussées non revêtues et pourront être implantées dans le logiciel I3C-ME. Cela permettra à ce logiciel, actuellement spécialisé dans la conception mécaniste-empirique des chaussées revêtues, de prendre en compte les chaussées non revêtues. Les conceptions effectuées avec ce

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logiciel seront très rigoureuses car celui-ci prend en compte le dommage saisonnier et utilise un code de calcul plus puissant que les modèles de Boussinesq et d’Odemark.