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L'analyse des rapports entre travail et famille, entre famille et salariat, entre travail domestique et travail professionnel construisent peu à peu les rapports sociaux de sexe comme nouveau rapport social structurant l'économique et le social. Ces nouveaux concepts émergents constituent une remise en cause des savoirs de nos disciplines respectives et enrichissent en même temps qu'ils complexifient nos vies et le métier de chercheuses. S'ils ont du mal à s'imposer, ces concepts restent pour nous incontournables pour avancer dans l'analyse de l'invisibilité et de la double exploitation des femmes (Jacqueline Martin dans Travail et rapports sociaux de sexe, 2010, p. 70).

Ce chapitre présente la perspective théorique retenue dans le cadre de cette thèse. Rappelons que la thèse s’intéresse aux limites paradigmatiques du courant dominant en relations industrielles à expliquer adéquatement le fonctionnement des relations d’emploi et de travail. Nous avons abordé précédemment les apports de l’interdisciplinarité du point de vue épistémologique. Chacun de ces différents courants tente d’expliquer et de pallier les limites de la théorie systémique. À cette étape-ci de la thèse, nous retenons la théorie des rapports sociaux de sexe. Ce chapitre s’applique à présenter cette théorie et l’argumentation soutenant le choix de cette perspective analytique féministe.

2.1- La nécessité d’adopter une perspective théorique

intégrant l’étude du fonctionnement des relations sociales

dans le champ des relations industrielles

Hyman (1975; 1997; 2001) s'inspirant entre autre des écrits de Giddens (1973 et de Touraine (1987) sera l'un des premiers théoriciens dans la discipline des relations industrielles à affirmer l'importance d'intégrer l'étude des relations sociales dans le champ des relations industrielles puisqu'une industrie est forcément composée de gens qui entretiennent des relations sociales. Statuant ainsi que les relations sociales sont plutôt considérées en dehors des frontières des relations industrielles.

Cependant, Hansen (2002) comme d'autres (Danieli, 2006; Kirton, 2006; Greene, 2003) souligne que l'attachement à la théorie systémique entraîne un biais d'analyse puisque le fonctionnement du système de relations industrielles est organisé selon les rapports sociaux de sexe. Cette critique est également relevée par Bradley (1996) et Franzway (2001). Nous avons vu précédemment que les difficultés d'intégrer les éléments de la reproduction à la production ont pour conséquence d'exclure les préoccupations féminines (Healy et al., 2006; Hansen, 2002; Forrest, 1993) et de conduire à l'invisibilité des femmes comme actrice dans le système des relations industrielles (Forrest, 1993; Wajcman, 2000; Jones, 2002).

L'exclusion de la prise en compte de l'effet de rapports sociaux de sexe comme élément central d'analyse en relations industrielles entraîne des difficultés pour les théoriciens de la discipline à rendre compte des changements plus subtils affectant le monde du travail (Baird et Williamson, 2008; Hansen, 2002; et Healy et al., 2006). Hansen (2002) écrit à ce sujet: « When focus is on stability and accommodation, women’s entrance into the labour market and the IR will not be perceived as

changing the system, the contrary will be the focal point: how women adopt the rules, norms, habits and regulations of the system » (Hansen, 2002, p. 198).

Les lacunes épistémologiques et les résultats pratiques mitigés de la recherche en relations industrielles que nous avons exposés précédemment posent la nécessité d’intégrer le regard théorique féministe et d'incorporer une analyse tenant compte des rapports sociaux de sexe dans l'analyse en relations industrielles.

Nous avons vu que la recherche féministe accorde une place centrale à la dimension sexuée des rapports sociaux (Ollivier et Tremblay, 2000, p. 9). Ses apports sur le plan scientifique sont nombreux. Ainsi la recherche féministe a formulé une critique des savoirs établis et des cadres théoriques qui naturalisent l'infériorité des femmes35, a remis en cause des prétentions universalistes et objectivistes de la science moderne, et a articulé des visions autres de la société et des savoirs sur les sexes en y incluant la spécificité féminine.

De nombreuses chercheuses féministes36 sont d'avis que le champ des relations industrielles retirerait des bénéfices à intégrer des analyses féministes se concentrant sur la compréhension de la vie des travailleurs et des travailleuses. Ces chercheuses rappellent que la recherche en relations industrielles n'a pas osé s'approprier la notion de rapports sociaux de sexe comme processus social par lequel l'expérience de travail des femmes et des hommes et de leurs institutions se construit de manière nettement différente.

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La différence biologique justifie la division sexuelle des rôles (Lorber, 1994 et Risman, 2011).

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Cockburn, 1991; Colgan and Ledwith, 1996; Cunnison and Stageman, 1993; Healy and Kirton, 2000; Kirton and Healy, 2004; McBride, 2001; McNally, 1979; Parker, 2003; Rubery, 1992; Forrest, 1993; Greene, 2003). Holgate et coll (2009).

Pour Flahault et Jaurand (2012), même si le recours aux théories féministes favorise l’interdisciplinarité et l’élargissement des disciplines concernées en permettant « d’enrichir les questionnements de multiples disciplines » (p. 67), cette analyse féministe reste encore peu intégrée dans la recherche qui porte son intérêt sur le fonctionnement sociétal. L’interdisciplinarité est la plupart du temps réduite à juxtaposer des disciplines alors qu’un des enjeux mêmes de l’analyse fémininiste est de remettre en cause les différentes normes et pratiques formant ces disciplines. Dans ces circonstances, il devient essentiel de recourir à un cadre théorique et analytique féministe.

Les paragraphes suivants présentent le concept de rapports sociaux de sexe. Ce concept est à la base de la théorie retenue pour faire l’analyse du fonctionnement du système de relations industrielles.

2.1.1- Le concept de rapports sociaux de sexe

Le concept de « rapports sociaux de sexe » provient de la tradition féministe française37 ayant pour base une conception marxiste (matérialiste) des rapports sociaux au sens où « les inégalités de genre sont considérées comme une des manifestations d’inégalités liées au système capitaliste » (Flahault et Jaurand, 2012, p. 65). Ce cadre a été initié par une sociologue française qui s’intéressait aux effets de la division sociale et sexuelle du travail sur la santé des ouvrières (Kergoat, 1978). Le travail apparaît ici comme un objet d’étude central. Sur la base du matérialisme38, « le travail n’est pas considéré comme une activité humaine parmi d’autres qu’il convient

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Il s'agit ici d'un féminisme à tendance radicale. Plus précisément d'un féminisme de deuxième vague qui s'intéresse à la critique de la séparation du travail en deux s phères l'une privée et l'autre publique (Lucas et Ballmer-Cao, 2010).

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Sur le féminisme matérialiste, Chetcuti (2009) dira « ces analyses ont relevé que le rapport social se construit autour du marqueur de sexe et opère ainsi un classement entre les individus qui, en les hiérarchisant, justifie le rapport de domination des h ommes sur les femmes » (p. 2).

d’étudier pour comprendre la société, mais comme le principe organisateur de cette dernière. La « division du travail » organise la répartition des richesses et des statuts sociaux, d’un point de vue économique (entre patrons et salariés) et d’un point de vue moral (il structure le lien social) ». (Clair, p. 16, 2012).

Les travaux de Guilbert (1946) ouvriront la voie à une analyse de la situation des femmes en lien avec cette conception du travail et qui feront le constat de la dévalorisation du travail des femmes et de l’inégalité entre les hommes et les femmes au travail. Nous ne pouvons passer à côté de la réflexion de Simone de Beauvoir (1949) qui pour sa part marque la réflexion théorique sur la place inférieure des femmes dans la société et conduit à l’idée que le sexe est socialement construit imbriqué dans des enjeux politiques et sociaux. Clair (2012) dira sur ce point « ce qui revient à reconnaître que les effets de ce processus sont à la fois profondément intériorisés par les individu-e-s, et modifiables puisque ne relevant pas de la nature » (p. 17). S’éloignant du déterminisme biologique, De Beauvoir oppose ainsi les notions de nature et de culture, de même que les notions d’inné et d’acquis (Chetcuti, 2009). Chetcuti (2009) dira « Ces travaux ont inauguré un changement dans les sciences humaines, en remettant en cause le déterminisme biologique fondé sur une opposition nature/culture, innée/acquise, et ont ouvert la voie à ce que l’on appelle aujourd'hui le constructivisme dans les études sur les rapports sociaux de sexe. Ces analyses ont été également à l’origine des critiques soulevées par les mouvements et les théorisations féministes contemporains, qui ont décrit et analysé les diverses formes d’exploitation que subissent les femmes, tant dans la construction collective et individuelle des corps que dans l’organisation sociale de l’espace domestique et public » (p. 2). Cette conception de la place des femmes dans la société forme les bases d’une analyse constructiviste féministe qui se développera plus intensément durant les années 1970.

La conceptualisation chez les féministes matérialistes fera éventuellement ressortir que le système de domination « a comme corollaire fondamental : le corps « féminin ». Un corps non existant, toujours perçu comme Autre en référence au général : le masculin. Un corps qui a comme caractéristique le fait d’endosser la maternité comme essence / nature propre » (Chetcuti, 2009, p. 10).

C’est à travers l’ouvrage de référence Le deuxième sexe que Simone De Beauvoir (1949) fera le constat que bien que la Révolution industrielle ait permis une plus grande place aux femmes dans la sphère publique de la société par son intégration au travail, un problème perdure celui de « la conciliation de son rôle reproducteur et de son travail producteur. » (page 203). La société rendant la grossesse comme un handicap au bon fonctionnement du capitalisme. De Beauvoir souhaitait d’ailleurs dès 1949 une acceptation et une aide de la part de l’État en matière de conciliation travail et maternité. Nous verrons ultérieurement que même si l’État accepte le travail de la femme enceinte et qu’il offre une aide (davantage à travers la législation) pour concilier travail et grossesse ou travail et famille, les problèmes de conciliation sont encore bien réels à l’heure actuelle.

Les féministes vont ainsi plus loin que la seule reconnaissance du rapport social de classe, elles y intègrent une autre « logique structurant les relations interindividuelles, le rapport de sexe » (Clair, 2012, p. 19). Ainsi, les relations entre les hommes et les femmes sont donc le produit d’un rapport social dans lequel le groupe des hommes domine et exploite le groupe des femmes. « Il faut entendre ce rapport dans son sens littéral de rapport de production, c’est-à-dire que le travail est conçu comme « l’enjeu

du rapport social de sexe »39, la question autour de laquelle s’organise le conflit entre

les deux groupes sociaux : les femmes produisent un travail gratuit, invisible, dans la

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sphère domestique, au service des hommes, et ce, quelle que soit leur classe sociale40. Ce mécanisme fonde une condition commune à l’ensemble des femmes, et structure les inégalités entre les sexes dans tous les espaces sociaux » (Clair, 2012, p. 18).

Cette approche du féminisme s’intéressant au travail des femmes intègrera le nécessaire lien existant entre le travail productif (sphère professionnelle) et le travail reproductif (sphère domestique).

À la base ici, le concept de la division sexuelle du travail. «Les situations des hommes et des femmes ne sont pas le produit d'un destin biologique, mais sont d'abord des construits sociaux. Ils forment deux groupes sociaux qui sont engagés dans un rapport social spécifique: les rapports sociaux de sexe. Ces derniers, comme tous les rapports sociaux, ont une base matérielle, en l'occurrence le travail, et s'expriment à travers la division sociale du travail entre les sexes ou plus concrètement la division sexuelle du travail» (Hirata et al. 2004, p. 35). Hirata et al. (2004) rappellent que les groupes sociaux hommes et femmes sont en tension permanente autour de l'enjeu principal qu'est le travail et ses divisions. La théorie reconnaît que les hommes et les femmes agissent à travers leurs actions sur les rapports sociaux. Le travail, et plus précisément la division sexuelle du travail, est l'enjeu des rapports sociaux de sexe (Kergoat dans Bidet-Mordrel, 2010, Hirata et al. 2004).

Le concept de rapports sociaux de sexe est, comme le propose Hirata (1997), un « concept corrélatif » à celui de problématique de la division sexuelle du travail. Sur ce plan, la théoricienne s’appuie sur sur les écrits de Kergoat (1992) qui précise :

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La théorie des rôles sociaux d’Eagly (1987) propose une conception similaire en s’attardant davantage sur les comportements attendus selon les sexes. Cette théorie sera utilisée dans la discipline de la psychologie.

rapports sociaux de sexe et division sexuelle du travail sont deux termes indissociables et qui forment système. La réflexion en termes de rapports sociaux de sexe est tout à la fois antérieure et postérieure à celle en termes de division sexuelle du travail : elle lui est préexistante comme notion, mais postérieure comme problématique » (p. 16).

Les termes rapports sociaux de sexe et division sexuelle du travail apparaissent ici comme deux termes indissociables sur le plan épistémologique. Cette analyse considère que le travail se divise d’abord sexuellement. Ainsi, cette division sexuelle du travail qui s'exerce dans un premier temps dans l'attribution des rôles au sein de la famille entre homme et femme se transpose sur le marché du travail. Plus explicitement, « la problématique de la division sexuelle du travail prend à revers les dichotomies « privé/public », « travail/famille », « production/reproduction » pour tenter de penser l’ensemble du rapport dissymétrique que les hommes et les femmes entretiennent au travail » (Galerand et Kergoat, 2013, p. 46).

Martin (dans Dunezat et al. 2010) rappelle que le concept de la division sexuelle du travail a bousculé les analyses du travail. En effet, avant l’introduction de ce concept, la sociologie du travail ne s’était pas attardée au fait que les conditions de travail des femmes étaient moins favorables que celles des hommes et que leur travail était dévalorisé parce que reconnu comme étant naturel ou vocationnel.

Martin dans Travail et rapports sociaux de sexe publié en 2010 souligne que «le développement de la problématique de la division sexuelle du travail dans la sphère professionnelle comme dans la sphère domestique a eu pour conséquence, sur le plan théorique et épistémologique, de faire éclater des clivages apparaissant finalement peu opératoires, comme ceux entre production et reproduction, ou entre système productif et structure familiale. Elle a eu aussi pour conséquence de faire éclater des

catégories construites exclusivement à partir de la prise en compte d'une population masculine considérée comme norme ou référent universel (des catégories comme celles de qualification, de mouvement social, de temps social, etc.) » (p. 82).

Pfefferkorn (2012) précise que le rapport social englobe la notion du lien social dans le sens que cette dernière notion met l’accent sur ce qui lie les personnes entre-elles. Mais, la notion de rapport social vient indiquer pour sa part que les êtres humains vivants en société sont à la fois liés et divisés dans leur unité même. Le concept de rapport social est donc défini comme une tension traversant le champ social. «Cette tension érige certains phénomènes sociaux en enjeux autour desquels se constituent des groupes sociaux hommes et femmes aux intérêts antagoniques» (Hirata et al., 2004, p. 39). Toujours selon Pfefferkorn (2012), la notion de rapports sociaux ne s’articule pas uniquement autour du système capitaliste, mais dépasse cette conception en s’articulant aux autres types de rapports sociaux tels les rapports de sexe, de génération ou de racisation. Ces rapports s’imprègnent les uns les autres. Ce terme incorpore la notion « gender » de la tradition anglo-saxonne41 qui réfère chez Acker (1992) à une distinction socialement construite entre les hommes et les femmes marquant les relations de pouvoir à travers un processus différencié selon les sexes qui se répercute à tous les niveaux de la société et dans toutes les activités de la vie quotidienne (p. 251).

Il importe d'ajouter que la recherche féministe possède une double dimension. Elle porte d’abord un projet scientifique d'élaboration de connaissances. Plus précisément, la production de connaissances questionne «les catégories d'analyses fondamentales des disciplines constituées» (Bereni et al. 2008, p. 11). La recherche féministe

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Robert Stoller un psychiatre psychanalyste nord -américain (1968) distinguera à partir de ces travaux sur l'identité sexuelle le sexe biologique et le sexe socialement acquis. La sociologue Ann Oakley (1972) reprend le terme gender roles et soulignera à son tour que sex et gender ne sont associés entre eux par convention sociale. Ses travaux vont cependant plus loin que ceux de Stoller puisqu’elle remet en cause cette convention sociale selon une perspective féministe.

impose, par ailleurs, un projet sociopolitique de transformation des rapports sociaux42 (Ollivier et Tremblay, 2000 en référence à Dagenais, 1987). Kitts et Hatcher et Robert (1996) sont plus explicitent et ajoutent que «les informations fournies par la recherche doivent servir à donner du pouvoir aux femmes ainsi qu'aux communautés auxquelles la recherche s'applique, afin de favoriser le processus de changement» (p. 44). La notion « rapports sociaux de sexe » implique donc une action politique. Nous reviendrons sur cet aspect spécifique à la fin de la présente section. Nous traiterons également de cette implication de la recherche féministe à l’étape de la discussion dans cette thèse.

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«Le féministe désigne une perspective politique reposant sur la conviction que les femmes subissent une injustice spécifique et systématique en tant que femmes, et qu'il est possible et nécessaire de redresser cette injustice par des luttes individuelles ou collectives» (Bereni et al., 2008, p. 11).

2.1.2- Pourquoi parler de rapports sociaux de « sexe » et non de

« genre »?

Le « genre » ne peut se comprendre que dans la dynamique des « rapports sociaux de sexe ». Ce rapport de sexe se construit aussi bien dans la sphère privée et domestique que dans la sphère publique et professionnelle (Sandrine Caroly, 2009, p. 4).

Certaines féministes croient que l'utilisation du terme « gender » permet de dépasser le concept « sex ». Le terme « sex » référant plutôt chez les anglophones plus strictement à la définition biologique distinguant les hommes et les femmes (Daune- Richard et Devreux, 1992, Scott, 1988).

Le terme "gender" issu des travaux de la psychanalyse anglo-saxonne s'éloigne de l'anatomie et vise à s'en différencier par la référence à l'expérience de soi en tant que femme ou homme dans le fonctionnement de la société (Oakley, 1972). Il renvoie entre autres aux rôles sociaux ou au sexe social tout en suggérant que le terme "sexe" renvoie à la biologie (Bereni et al., 2008). On voit donc poindre une dichotomie nature-culture qui risque selon Butler (2006 et 1993)43 de renforcer l'idée essentialiste visant à différencier les hommes et les femmes en fonction d'attributs anatomiques. Un tel retour vers l'essentialisme conduit à une conception du genre ne réussissant pas à "s'affranchir de la nature" (Bereni et al. 2008). Il y a un risque de remettre d’actualité le discours suggérant qu’il existe une incompatibilité entre le travail et certaines spécificités féminines, telles la grossesse et la maternité.

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Butler (1993) proposera une vision "anti-biologique" du masculin et du féminin. Le sexe étant une invention sociologique (Martin, 2010). Nous reviendrons à la conception de Butler plus loin dans le texte.

Cependant, le genre défini comme étant pluriel peut s'avérer problématique à certains égards. À titre d'exemple, la conciliation de la grossesse et du travail doit certes être analysée comme un construit social, mais la prise en compte des dimensions biologiques de la grossesse dans l’expérience de travail est nécessaire pour comprendre la situation des femmes au travail. Cette prise de position est d’ailleurs partagée par d’autres chercheur(euse)s utilisant la théorie des rapports sociaux de sexe comme le précise cette citation de Chetcuti (2009) :

Toutefois dans le domaine des recherches sur les rapports sociaux entre les sexes, certains auteurs s’interrogent sur l’utilisation de la notion de genre parce que, d’une part, son usage reléguerait le sexe à un registre biologique invariant et réduit à l’anatomie. D’autre part, le maniement de la notion de genre aurait tendance à neutraliser, en la masquant, la relation de domination régissant les rapports entre les sexes (Chetcuti, 2009, p. 2)

Ainsi, la notion "sexe" émanant de la sociologie française semble pour les tenants de la théorie des rapports sociaux de sexe plus inclusive. Le "sexe" englobant les réalités

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