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2. REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 VOLET 2 GÉOPOLYMÈRES

2.3.4 Performance face à la réaction alcalis-silice (RAS)

Plusieurs chercheurs ont soulevé l'importance d'évaluer la performance en durabilité des géopolymères, spécialement contre la RAS (Bakharev et al. 2001, Garcia-Lodeiro et al. 2007, Fernandez-Jimenez et al. 2007, Kupwade-Patil & Allouche 2013). En effet, les géopolymères sont généralement caractérisés par un contenu élevé en alcalis, mais aussi par une faible teneur en calcium (i.e. pour l'activation de cendres volantes de type F) ou par une forte teneur en calcium (i.e. pour l'activation de laitiers de haut fourneau ou de cendres volantes de type C). En introduisant une quantité importante d'alcalis, provenant en bonne partie de la solution alcaline, toute porte à croire que la RAS puisse se produire

davantage dans ce type de système que dans les systèmes cimentaires conventionnels (Garcia-Lodeiro et al. 2007).

À ce jour, il n'existe pas de méthodes d'évaluation qui ont été conçues exclusivement pour l'évaluation des géopolymères face à la RAS. Dans le cas des systèmes cimentaires conventionnels, les normes CSA et ASTM proposent deux essais pour évaluer l'expansion causée par la RAS. Il s'agit de l'essai d'expansion sur barres de mortier (CSA A23.2-25A, ASTM C1260/C1567) et de l'essai d'expansion sur prismes de béton (CSA A23.2-14A, ASTM C1293). Ces essais ont donc été utilisés par certains auteurs pour évaluer la durabilité des géopolymères face à la RAS.

En général, les géopolymères semblent plus performants que le ciment portland contre la RAS, en raison de ce que Garcia-Lodeiro et al. (2007) explique par une certaine compétition pour la disponibilité des alcalis. D'un côté, les alcalis sont utilisés par la réaction de géopolymérisation et de l'autre, ils participent à la RAS. La Figure 2.20, tirée des travaux de Garcia-Lodeiro et al. (2007), démontre que des géopolymères produits à partir d'une cendre volante de type F et d’une solution de NaOH 8M, donnent des valeurs d'expansion sous la limite de 0,10% à 16 jours à l'essai d'expansion sur barres de mortier (ASTM C1260). Cependant, ils ont noté que dans le cas de l'utilisation d'un granulat très réactif, les conditions extrêmement agressives de l'essai entraînent une expansion excessive au début de l'essai. C'est pour cette raison qu'il y a absence de courbe pour FA2 sur la Figure 2.20b.

Figure 2.20: Expansion de barres de mortier à l'essai ASTM C1260. a) OPC1 et FA1 (100%

granulat modérément réactif); b) OPC2 (100% granulat réactif); c) OPC3 et FA3 (90% granulat modérément réactif + 10% granulat réactif). Images des barres de mortiers d) OPC1 à 90 jours; e) FA1 à 90 jours; f) OPC 3 à 56 jours (Garcia- Lodeiro et al. 2007). Les échantillons (respectivement dans leurs moules) ont été mis dans une étuve à 85oC pour 20 heures. Ils ont été démoulés suite à cette cure.

Une étude menée par Fernandez-Jimenez et al. (2007) a permis d'observer que la nature de la solution d'activation affecte la performance des géopolymères pour contrer la RAS. En effet, la Figure 2.21 montre que les barres de mortier

à l’aide de NaOH 8M ont subi une expansion inférieure à 0,10% à 16 jours à l'essai ASTM C1260 (AAFAN), alors que les barres utilisant une combinaison de NaOH et de Na2SiO3 (85% NaOH + 15% Na2SiO3) comme solution d'activation

ont subi une expansion supérieure à la limite de 0,10% à 16 jours (AAFAW). L'expansion est même semblable à celle enregistrée par un mélange comprenant 100% de ciment portland (OPC).

Figure 2.21: Expansion à l'essai ASTM C1260 (Fernandez-Jimenez et al. 2007). Granulat: grès

arkosique. La courbe OPC représente le mélange 100% ciment. La courbe AAFAN représente l’activation alcaline d’une cendre volante de classe F avec du NaOH 8M. La courbe AAFAW représente l’activation de la même cendre volante de classe F avec une solution 85% NaOH 8M et 15% Na2SiO3. La température et la période de cure utilisée correspond à 20 heures dans une étuve à 85oC.

Les observations de Kupwade-Patil & Allouche (2013) donnent aussi avantage aux géopolymères à l'essai sur barres de mortier (ASTM C1260). En utilisant différentes cendres volantes (deux de type F et une de type C), trois granulats de réactivité variable et une cure de 72 heures à 80oC, ils ont produit 36 mélanges qu'ils ont ensuite comparé à des mélanges de ciment portland. Tous les mélanges de géopolymères ont subi une expansion inférieure à 0,10% à 34 jours, tandis que les mélanges de ciment portland ont offert des valeurs moyennes d’expansion de 0,18% (quartzite), 0,12% (calcaire) et 0,16% (grès) à

contre, des analyses au microscope électronique à balayage ont révélé la présence de gel de silice, produit de la RAS, dans les mélanges de géopolymères fabriqués à partir d'une cendre volante de type C.

L'ensemble des résultats de ces études suggère que l'activation alcaline de cendres volantes est efficace en présence de granulats réactifs et lorsque les conditions favorables à la RAS sont présentes, soit lors de l'essai accéléré sur barres de mortier (ASTM C1260). Ce n'est toutefois pas nécessairement le cas lorsque l'essai d'expansion sur prismes de béton (ASTM C1293) est utilisé pour évaluer la durabilité de bétons de géopolymères synthétisés à partir de laitier de haut fourneau (Bakharev et al. 2001). Dans ce cas-ci, aucune cure n'a été utilisée pour l'activation des laitiers avant de démarrer l'essai. La Figure 2.22 montre qu’une expansion supérieure à la limite de 0,040% à 52 semaines est obtenue dans le cas des géopolymères incorporant un granulat « réactif » et que cette expansion augmente de façon linéaire au cours de la deuxième année d’essai. Cette expansion est nettement plus importante que celle mesurée pour les bétons de ciment portland illustrée à la Figure 2.22b. Sur la Figure 2.22a, il est même possible d'observer que de l'expansion a rapidement été générée (environ 0,02%) lorsqu'un granulat non réactif a été utilisé mais qu’elle n’a évolué que très lentement et est demeurée plutôt marginale par la suite. En considérant les courbes de la Figure 2.22b, correspondant aux mélanges avec ciment portland seulement, les éprouvettes incorporant le granulat dit « réactif » n’avait en fait subi que 0,02% d'expansion à 1 an. Il apparait donc que ce granulat n'était pas réactif selon la pratique normalisée CSA A23.2-27A (i.e. < 0,040%). Toutefois, l'expansion d’éprouvettes fabriquées avec ce granulat mais cette fois-ci dans un système de géopolymères s’est avérée supérieure à la limite. Bref, il semble très difficile de comprendre le comportement des géopolymères face à la RAS à partir des différentes études réalisées jusqu’ici. Il n'y a pas de corrélation entre les résultats obtenus sur mortier et béton, ni lorsque le matériau source diffère.

Figure 2.22: Expansion en fonction du temps (jours) à l'essai sur prismes de béton (ASTM

C1293) a) Bétons de géopolymères, b) Bétons de ciment portland (Bakharev & al. 2001).