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CHAPITRE 4 : Applications thérapeutiques des peptides natriurétiques

C. Autres peptides natriurétiques

L’urodilatine humaine recombinante (Ularitide) est actuellement en développement clinique en Europe et aux Etats-Units (Lee and Burnett 2007). Elle induit des effets diurétiques et natriurétiques et une diminution de la pression sanguine (Carstens, Jensen et al. 1998). Elle a une demi-vie un peu plus longue que l’ANP (5,57 min) et ne diminue que la pression sanguine diastolique, alors que l’ANP diminue les pressions sanguines diastolique et systolique. Par contre, l’urodilatine est plus puissante pour induire l’excrétion de sodium que l’ANP (Saxenhofer, Raselli et al. 1990). Chez les patients en IC décompensée chronique, l’urodilatine réduit significativement la pression dans les capillaires pulmonaires et la pression artérielle rénale, mais n’a pas d’effet supplémentaire sur la diurèse (Mitrovic, Luss et al. 2005).

Le DNP, un peptide natriurétique identifié dans le venin de serpent, mais dont l’existence endogène chez l’humain reste à vérifier, serait un autre peptide intéressant dans le traitement de l’IC. Il a les mêmes propriétés cardiorénales que les autres peptides natriurétiques, mais a plus d’affinité pour le NPRA que l’ANP et le BNP (Singh, Kuc et al. 2006). Chez le chien, le DNP réduit significativement la pression artérielle moyenne et la pression dans les capillaires pulmonaires. Il réduit la précharge et la post-charge cardiaque, augmente légèrement la contractilité et améliore la relaxation. Il a des effets diurétiques et natriurétiques. Dans un modèle d’insuffisance cardiaque chez le chien, le DNP supprime l’activité plasmatique de la rénine, induit la diurèse et la natriurèse, augmente le taux de filtration glomérulaire et réduit la pression de remplissage cardiaque (Lisy, Jougasaki et al. 1999; Lisy, Lainchbury et al. 2001). Le DNP aurait de plus une demi-vie plus longue que l’ANP puisqu’il est résistant à la dégradation par la NEP (Chen, Lainchbury et al. 2002).

Plusieurs peptides natriurétiques chimériques ont été mis au point dans le but d’obtenir un profil pharmacologique unique. Le peptide vasonatrine par exemple est une chimère des 22 acides aminés du CNP et des 5 derniers acides aminés C- terminaux de l’ANP. Il présente les effets vénodilatateurs et natriurétiques caractéristiques du CNP et de l’ANP respectivement. Il possède de plus des effets vasorelaxants sur les artères et les veines plus puissant que l’ANP ou le CNP seul (Wei, Kim et al. 1993). Plus récemment, un autre peptide chimérique a été mis au point, le CD-NP, qui combine la structure en anneau et l’extrémité exocyclique N- terminale du CNP et l’extrémité exocyclique C-terminale de 15 acides aminés du DNP. Le CD-NP a été mis au point pour combiner les propriètés venodilatatrices et cardiaques uniques du CNP et les propriètés rénales bénéfiques du DNP. Chez le chien, le CD-NP diminue les pressions de remplissage cardiaque, induit la diurèse et la natriurèse et inhibe la relâche de rénine. De plus, il a un effet hypotenseur plus faible que le BNP, ce qui est un avantage puisque l’hypotension est l’effet secondaire néfaste des peptides natriurétiques utilisés jusqu’à présent (Lisy, Huntley et al. 2008). Les propriétés uniques du CD-NP s’expliquent aussi par le fait qu’il est également capable d’activer le NPRA (agoniste partiel) contrairement au CNP (Dickey, Burnett et al. 2008). Le CD-NP fait actuellement l’objet d’une étude clinique chez des sujets sains volontaires. Les premiers résultats montrent que le CD-NP a des effets

natriurétiques et préserve la fonction rénale, sans induire d’hypotension excessive. De plus, il supprime les niveaux plasmatiques d’aldostérone (Lee, Chen et al. 2009). Ces propriétés sont particulièrement intéressantes dans le traitement de l’IC ou pour réduire le remodelage ventriculaire après un infarctus du myocarde. L’efficacité du CD-NP chez les patients souffrants d’IC reste encore à prouver.

La plus grande limitation de l’utilisation des peptides natriurétiques dans le traitement des maladies cardiovasculaires est sa voie d’administration. À cause de leur nature peptidique et de leur demi-vie très courte, les peptides natriurétiques doivent être administrés en IV, un mode d’administration qui ne convient pas à un traitement chronique. Le développement de peptides pouvant être administrés par voie orale a été un défi pendant longtemps, étant donné les nombreuses barrières à l’absorption et à la pénétration des protéines. Récemment, une forme orale de BNP, attaché de façon covalente à de petits oligomères amphiphiles a été mise au point. Chez le chien, cette forme orale conjuguée du BNP induit une production de GMPc et a des effets hypotenseurs (Cataliotti, Schirger et al. 2005). Dans un modèle d’hypertension aiguë chez le chien, cette forme orale de BNP diminue également la pression artérielle moyenne (Cataliotti, Chen et al. 2008). L’existence d’une forme orale de BNP permettrait sont utilisation dans le traitement de l’hypertension. Une forme recombinante du BNP humain fusionnée avec l’albumine humaine a également été mise au point. Elle montre une demi-vie étendue comparée au BNP (12 à 19h vs 3 min) et réduit la pression sanguine des rats spontanément hypertendus (Wang, Ou et al. 2004).

Outre ses propriétés cardiovasculaires, le CNP joue un grand rôle dans la croissance osseuse. Cette propriété unique pourrait aussi être utilisée en clinique dans le traitement des dysplasies squelettiques. Il a récemment été démontré dans un modèle d’achondroplasie (la forme la plus répandue de nanisme chez l’humain) chez la souris que l’administration systémique et la surexpression de CNP renversait le phénotype de croissance osseuse réduite sans effets secondaires significatifs (Yasoda, Kitamura et al. 2009). Le CNP pourrait également être utilisé pour accélérer la guérison des fractures osseuses. En effet, il a été observé que les souris dont le gène

de la PKGII, le principal effecteur du CNP dans l’os, a été inactivé guérissent beaucoup plus lentement que les souris contrôle (Chikuda, Kugimiya et al. 2004).