• Aucun résultat trouvé

1.2 Analyse des écarts de rémunération et de carrière

1.2.4 Des pensions qui restent inférieures à celles des hommes

« Dans mon service, les années où les femmes sont enceintes et celles où elles reviennent de congés maternité, elles ne bénéficient pas de primes. Ce qui fait qu'une femme commençant son congé maternité en fin d'année et revenant l'année suivante se voit en plus pénalisée 2 ans ! D'autre part, les temps partiels sont très majoritairement pris par des femmes et cette diminution de temps de travail influe sur la reprise d'ancienneté au moment du concours et sur le temps de stagiairisation. Ceci a également un impact sur la retraite... encore une raison de plus pour les femmes d'être moins valorisées. »

- Témoignage d’une fonctionnaire hospitalière, ingénieure, catégorie A, titulaire, 36 ans

[91] L’écart de pension entre femmes et hommes existe même s’il est moindre que dans le secteur privé. L’annexe 5 développe de façon détaillée la question des inégalités de retraite.

[92] Pour les pensions en paiements (ensemble des retraités), en incluant les pensions de réversion, les pensions des femmes représentent 78% de celles des hommes dans les versants d’Etat et territorial mais 96% pour le versant hospitalier. Il convient de noter que les femmes actuellement retraitées ont souvent moins travaillé que les hommes, le travail féminin rémunéré s’étant développé plus tard.

[93] Les femmes sont aussi plus nombreuses que les hommes à avoir de très petites retraites, portées au minimum garanti (6,8% pour 5,2% pour les hommes pour les pensions liquidées en 2015)13.

[94] Pour les pensions liquidées, la différence est moindre pour les fonctionnaires hospitaliers que pour les fonctionnaires d’Etat et territoriaux pour lesquels la différence va de 12 à 14% :

13Hors temps partiel de droit, le temps partiel est pris en compte au prorata de sa durée à la fois pour le calcul du montant de la pension normale et pour le calcul du montant de la pension garantie. Ainsi, une carrière complète à mi-temps comptera comme une demi-carrière. Les fonctionnaires ayant passé une partie significative de leur carrière à temps partiel détiennent une durée de services plus faible et bénéficient plus souvent du minimum garanti. (Jaune pensions 2017).

Tableau 6 : Montants moyens des pensions mensuelles de droits directs vieillesse liquidées en 2013, 2014 et 2015 par sexe et par fonction publique (en €)

2013 2014 2015 peuvent jouer : la durée, c’est-à-dire que les femmes cotisent moins de trimestres que les hommes en raison des interruptions, et l’indice atteint en fin de carrière.

[96] Les bonifications de service permettent aux femmes de compenser en partie le retard pris en termes de carrière.

[97] La situation des femmes dans le secteur public n’est pas plus favorable que dans le privé.

Tout en étant consciente que seule une réflexion globale14 sur les régimes de pension serait de nature à lisser les différences entre les deux régimes pour une véritable équité, la mission a souhaité souligner les différences qui pouvaient exister pour lesquels la situation des femmes dans le secteur public apparaît moins favorable par rapport au régime général :

 au niveau des droits familiaux :

○ Les majorations de pensions sont attribuées aux parents ayant élevé15 au moins trois enfants (pendant au moins neuf ans). Elles bénéficient au père et à la mère et elles existent aussi pour les salarié.e.s du secteur privé.

Cette majoration bénéficie en 2015 à 29,5% des pensionné.e.s de droit directs : 27,4%

pour les fonctionnaires d’Etat, 31,4% pour les fonctionnaires hospitalier.e.s et 33,6%

pour les fonctionnaires territoriaux.ales16.

Comme la majoration est proportionnelle à la pension calculée, les majorations des pères sont plus élevées que celles des mères : les pères bénéficient de près de deux tiers des majorations de droit direct. Pour les retraites des fonctionnaires d’Etat en paiement en 2015, le bénéfice moyen était de 3 221€ par an pour les pères et 2 301€

pour les mères17. Or, si le revenu et donc la pension des femmes est affecté négativement par le fait d’avoir trois enfants, en raison des interruptions et réductions d’activité, ce n’est pas le cas des pères.

Recommandation n°6 : Forfaitiser la majoration de pension, à budget constant.

14 Le Conseil commun de la fonction publique débat, chaque année, des orientations de la politique des retraites dans la fonction publique

15 Sauf déchéance de l’autorité parentale, le parent est réputé avoir élevé ses enfants même si il n’a pas exercé de droit de visite ou contribué financièrement à leur éducation

16 Cf. chiffres-clefs 2015 CNRACL – SRE. Aucune donnée sexuée n’est disponible auprès de l’ERAFP.

○ le dispositif de bonification de la fonction publique qui bénéficiait uniquement aux mères a été étendu aux pères pour les enfants nés avant le 1er janvier 2004. Pour les enfants nés ou adoptés après le 1er janvier 2004, le dispositif a été modifié : une majoration de deux trimestres est accordée aux femmes au titre de l’accouchement et les pères ou mères ayant interrompu ou réduit leur activité peuvent valider gratuitement des trimestres dans la limite de trois ans par enfant au total (12 trimestres).

Le dispositif en vigueur dans la fonction publique est plus défavorable aux mères que celui appliqué aux salariées du privé puisqu’une femme ayant accouché mais n’ayant pas interrompu ou réduit son activité bénéficiera de quatre voire huit trimestres18 de majoration dans le secteur privé pour deux dans le secteur public.

Recommandation n°7 : Aligner le nombre de trimestres de bonification accordés au titre de la maternité sur le régime du privé, de deux à quatre.

 au niveau de la réversion : dans le régime des fonctionnaires et des militaires, la pension est versée au conjoint ou conjoint divorcé survivant à la condition qu’il ne soit pas remarié ou qu’il ne vive pas en situation de concubinage notoire, alors que, dans le régime général, aucune condition d’absence de vie maritale n’est exigée.

Recommandation n°8 : Supprimer la condition de non-remariage pour bénéficier d’une pension de réversion.

[98] En matière de départ anticipé, les femmes fonctionnaires mères de trois enfants ont perdu la possibilité de partir précocement en retraite. Jusqu’en 2011, dans la fonction publique, les assurés ayant eu au moins trois enfants ou ayant un enfant de plus d’un an avec une invalidité de 80% pouvaient prendre leur retraite à tout âge après quinze ans de services effectifs. Le dispositif a été fermé par l’article 44 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : seuls les parents qui, à la date du 31 décembre 2011, avaient au moins trois enfants et avaient effectué quinze années de service effectifs peuvent encore en bénéficier.

[99] En outre, le système des catégories actives est un dispositif qui bénéficie désormais essentiellement aux hommes avec la sortie progressive des infirmières et des institutrices. La catégorie active concerne, pour les fonctionnaires civils, les emplois de la fonction publique « présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » (1° du I de l’article L. 24 du code des pensions civiles et militaires) justifiant, à ce titre, un départ anticipé à la retraite.

[100] Dans la fonction publique d’Etat, 33,8% des hommes et 18 % de femmes partant en retraite en 2015 ont bénéficié du régime de la catégorie. Ces proportions sont comparables pour les pensions entrées en paiement de 2013 à 2015. Les hommes ont représenté 67% des départs en catégorie active en 2015 (66% en 2013 et 2014).

[101] Dans la fonction publique hospitalière, en 2015, les départs en catégorie active ont représenté 49,3% des départs19. Entre 2009 et 2014, cette part était égale ou supérieure à la moitié des départs, sauf en 201120.

18En effet, en l’accord de choix d’option des parents (partage ou attribution au père) la majoration pour éducation est accordée à la mère

19 Cf. recueil statistique 2015 de la Cnracl

20 En raison de nombreux départs pour raisons familiales de parents de trois enfants liés à la mise en extinction du

[102] Dans la fonction publique territoriale, les départs en catégorie active n’ont représenté que 7% des départs en 2015 ; cette part varie entre 5,6% et 8% depuis au moins 2005. Les principales professions concernées sont les sapeurs-pompiers professionnel.le.s et les agent.e.s de police municipale.

[103] Le nombre de femmes et la part des femmes dans les départs en catégorie active est amené à baisser, sous l’effet de la mise en extinction du corps des instituteurs en 2003 et de la réforme du statut des infirmier.e.s par la loi du 5 juillet 2010, avec un droit d’option, à exercer avant 2011, entre le maintien de la catégorie active et de la catégorie B et un passage en catégorie A avec perte du bénéfice de la catégorie active.

[104] Cette réforme a eu des effets rapides puisque dans la fonction publique hospitalière, la part des départs en catégorie active était ainsi encore de 69% en 200421. Selon la Cnracl, à terme (en 2050), la part des agent.e.s classé.e.s en catégorie active atteindrait 33% des effectifs de la fonction publique hospitalière affiliés à la caisse.