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Le Bien et le Mal dans la pensée chinoise

À propos du bien, du mal, du beau et du laid, Lacan fait référence au deuxième chapitre du Dao de Jing道德經, le Livre de la Voie et de la Vertu (rédigé aux alentours du IVe siècle av. J.-C.), pour articuler cette question du bien qui fait naître le mal comme effet du langage même. « Définir le bon, c’est du même coup définir le mal », de même que, du beau surgit, du laid. Que tous sachent ce qu’il en est du beau, c’est de cela que naît la laideur113.

« […] Bien sûr, cela ne fait que recouvrir des choses bien connues depuis longtemps, et je me suis dispensé de vous donner ici la première phrase du chapitre II du Dao de Jing道德經, parce qu’aussi bien il aurait fallu que je commente chacun des carac-tères. Mais ces caractères sont tellement, pour qui-conque peut se donner la peine d’en appréhender la référence, tellement signifcatifs, que l’on ne peut pas croire qu’il n’y ait pas quelque chose de la même veine logique dans ce qui est énoncé, en ce point original pour une culture, autant que pour nous l’a pu être la pensée socratique de ce qu’il y a d’origi-nel.

Que, pour tout ce qui est du ciel et de la terre, que tous – le terme universel est bien, bien isolé, posant la fonction de l’affrmative universelle comme telle –, que tous sachent ce qu’il en est du beau, alors c’est de cela que naît la laideur.

Ce qui n’est pas pure vanité de dire que, bien sûr, défnir le bon, c’est du même coup défnir le mal. Ce n’est pas une question de savoir que ce que l’on dis-tingue, en quelque sorte, c’est un nœud interne. Il ne s’agit pas de savoir ce qu’on distingue comme on distinguerait les eaux supérieures et les eaux inféri-eures dans une réalité confuse ; ce n’est pas de ce qu’il soit vrai ou pas que les choses soient bonnes ou

113. J. Lacan, Séminaire, « Problèmes cruciaux de la psychanalyse », 10/03/1965.

mauvaises qu’il s’agit – les choses sont –, c’est de dire ce qu’il en est du bien qui fait naître le mal ; le fait non pas que cela soit, non pas que l’ordre du langage vienne recouvrir la diversité du réel, c’est l’introduction du langage comme tel qui fait non pas distinguer, constater, entériner, mais qui fait surgir la traversée du mal dans le champ du bien, la traversée du laid dans le champ du beau. »

Dans le deuxième chapitre du Dao de Jing道德經, les anciens prove-rbes paysans sont savamment placés dans des contextes agencés de manière à leur faire dire le contraire des vérités primaires qu’ils dev-aient énoncer originellement.

Nous allons reproduire certaines traductions « autorisées » de ce texte, puis la modification que nous proposons.

天 下 皆 知 美 之 為 美 斯 惡 已 皆 知 善 之 為 善 斯 不 善 已 故 有 無 相 生 難 易 相 成 長 短 相 形 高 下 相 傾 音 聲 相 和 前 後 相 隨 是 以 聖 人 處 無 為 之 事 行 不 言 之 教

萬 物 作 焉 而 不 辭 生 而 不 有 為 而 不 恃 功 成 而 弗 居

夫 唯 弗 居 是 以 不 去 Stanislas Julien (1842) :

Dans le monde, lorsque tous les hommes ont su ap-précier la beauté (morale), alors la laideur (du vice) a paru.

Lorsque tous les hommes ont su apprécier le bien, alors le mal a paru.

C'est pourquoi l'être et le non-être naissent l'un de l'autre.

Le diffcile et le facile se produisent mutuellement.

Le long et le court se donnent mutuellement leur forme.

Le haut et le bas montrent mutuellement leur inéga-lité.

Les tons et la voix s'accordent mutuellement.

L'antériorité et la postériorité sont la conséquence l'une de l'autre.

De là vient que le saint homme fait son occupation du non-agir.

Il fait (consigner) consister ses instructions dans le silence.

Alors tous les êtres se mettent en mouvement, et il ne leur refuse rien.

Il les produit et ne se les approprie pas.

Il les perfectionne et ne compte pas sur eux.

Ses mérites étant accomplis, il ne s'y attache pas.

Il ne s'attache pas à ses mérites ; c'est pourquoi ils ne le quittent point.

Léon Wieger (1913) :

Tout le monde a la notion du beau, et par elle (par opposition) celle du pas beau (du laid). Tous les hommes ont la notion du bon, et par elle (par contraste) celle du pas bon (du mauvais).

Ainsi, être et néant, diffcile et facile, long et court, haut et bas, son et ton, avant et après, sont des notions corrélatives, dont l’une, étant connue, révèle l’autre.

Cela étant, le Sage sert sans agir, enseigne sans parler.

Il laisse tous les êtres devenir sans les contrecarrer, vivre sans les accaparer, agir sans les exploiter.

Il ne s’attribue pas les effets produits, et par suite ces effets demeurent.

Les corrélatifs, les opposés, les contraires comme oui

et non, sont tous entrés dans ce monde par la porte commune, sont tous sortis du principe UN (Chap. 1.

C). Ils ne sont pas des illusions subjectives de l’esprit humain, mais des états objectifs répondant aux deux états alternants du Principe, yin et yang, concentra-tion, et expansion.

La réalité profonde, le Principe, reste toujours le mê-me, essentiellement ; mais l’alternance de son repos et de son mouvement crée le jeu des causes et des effets, un va-et-vient incessant.

À ce jeu, le Sage laisse son libre cours.

Il s’abstient d’intervenir, ou par action physique, ou par pression morale. Il se garde de mettre son doigt dans l’engrenage des causes, dans le mouvement perpétuel de l’évolution naturelle, de peur de fausser ce mécanisme compliqué et délicat.

Tout ce qu’il fait, quand il fait quelque chose, c’est de laisser voir son exemple.

Il laisse à chacun sa place au soleil, sa liberté, ses œuvres. Il ne s’attribue pas l’effet général produit (le bon gouvernement), lequel appartient à l’ensemble des causes. Par suite, cet effet (le bon ordre), n’étant pas en butte à la jalousie ou à l’ambition d’autrui, a des chances de durer.

Ma Kou (1984) :

Dans le monde, chacun décide du beau Et cela devient laid.

Par le monde, chacun décide du bien Et cela devient mal.

L’être et le vide (ce qui a une forme et ce qui n’a pas de forme) s’engendrent

L’un l’autre.

Facile et diffcile se complètent Long et court se défnissent Haut et bas se rencontrent

L’un l’autre.

Voix (notes) et sons s’accordent Avant et après se mêlent.

Ainsi le sage, du non-agir (respect de l’ordre naturel) Pratique l’œuvre

Et enseigne sans paroles.

Multitudes d’êtres apparaissent Qu’il ne rejette pas.

Il crée sans posséder Agit sans rien attendre

Ne s’attache pas à ses œuvres Et dans cet abandon

Ne demeure pas abandonné.

Arthur Walley (1934) :

It is because every one under Heaven recognizes beauty as beauty, that the idea of ugliness exists.

And equally if every one recognized virtue as virtue, this would merely create fresh conceptions of wickedness.

For truly, Being and Not-being grow out of one another;

Diffcult and easy complete one another.

Long and short test one another;

High and low determine one another.

Pitch and mode give harmony to one another.

Front and back give sequence to one another.

Therefore the Sage relies on actionless activity, Carries on wordless teaching,

But the myriad creatures are worked upon by him; he does not disown them.

He rears them, but does not lay claim to them, Controls them, but does not lean upon them,

Achieves his aim, but does not call attention to what he does;

And for the very reason that he does not call attention to what he does

He is not ejected from fruition of what he has done.

Richard Wilhem (1911) :

« Wenn auf Erden alle das Schöne als schön erkenne, so ist dadurch schon das Häßliche gesetzt.

Wenn auf Erden alle das Gute als gut erkennen, so ist dadurch schon das Nichtgute gesetzt.

Denn Sein und Nichtsein erzeugen einander.

Schwer und Leicht vollenden einander.

Lang und Kurz gestalten einander.

Hoch und Tiefverkehren einander.

Stimme und Ton sich vermählen einander.

Vorher und Nachher folgen einander.

Also auch der Berufene:

Er verweilt im Wirken ohne Handeln.

Er übt Belehrung ohne Reden.

AlIe Wesen treten hervor,

und er verweigert sich ihnen nicht.

Er erzeugt und besitzt nicht.

Er wirkt und behält nicht.

Ist das Werk vollbracht, so verharrt er nicht dabei, Und eben weil er nicht verharrt, bleibt er nicht verlassen. »

Avec la modification que nous proposons :

Tout le monde sait apprécier la beauté – la laideur provient de là.

Tout le monde sait apprécier le bien – le mal provient de là.

Ainsi, l’être et le néant s’engendrent,

Le diffcile et le facile se produisent, le long et le court se forment,

Le haut et le bas s’inclinent, les tons et la voix s’accordent,

Avant et après se suivent.

C’est pour cela que le Sage ne se mêle pas d'intervenir.

Il souffe ses instructions sans l'entremise de la parole, laisse les dix mille êtres croître sans les parrainer, les cultive sans se les approprier.

Il œuvre en silence, se tient à l'écart des honneurs qu'il mérite, c’est pour cela que sa gloire demeure.

La question du Bien et du Mal est au centre de la philosophie occi-dentale, de la pensée européenne, de la théodicée, d’Aristote au chris-tianisme. L’Occident a oscillé entre l'idée d’un Dieu-Principe (Aristote) et celle d’un Dieu-Personne (le christianisme), entre le Logos et la Révélation. Dans la religion chrétienne, le sentiment du péché s'éprouve en relation avec la souffrance. Le mal doit être distin-gué de la culpabilité et compris sur de nouvelles bases : il est ce qui empêche de vivre, ce qui s’oppose à l’affirmation du désir.

La pensée chinoise n’ayant pas développé de théodicée n'a pas reçu de message divin. Elle n'a perçu le mal qu'en terme de blocage, d’obstruction dans les processus vitaux. Le mal – le non-bien – s'ex-prime quand la circulation est entravée, lorsqu'il n’y a pas de passage, que la voie est bouchée. La Chine n’a pas eu besoin d’organiser sa pensée morale autour du choix, de la tentation, de la transgression, comme l’Occident.

Elle n’a pas pensée l’être, elle a pensé le processus. Comme le montre François Jullien :

« Ainsi, l’opposition du bien et du mal, de l’amer et du doux, du fort et du faible, du courbe et du droit, est abstraite et toujours contestable. Dès lors, le grand art et la suprême sagesse, comme l’attestent la peinture, la poésie et la cuisine chinoise, consistent à saisir la réversibilité des opposés, à faire goûter le sel sous le sucre, à révéler l’infni dans le fni, la présence par l’allusion, l’éternité sous l’éphémère. Si le Chinois n’est pas en quête d’universalité et de réconciliation dialectique, c’est parce que toute différence exige pour exister son contraire. Le yin suppose le yang, comme

l’ombre la lumière. Le monde est par avance harmo-nieux, et c’est à l’artiste d’en saisir le subtil équi-libre114. »

Transformer un négatif obstruant ou paralysant en négatif moteur, c’est aussi la fonction de la cure psychanalytique. Par la cure, on ne cherche pas à éliminer le mal, le négatif ; au contraire, on cherche comment le débloquer, le libérer. C’est pourquoi nous pouvons dire que la pensée chinoise et la psychanalyse se rejoignent sur le même terrain.

Si pour la pensée chinoise le mal n’est que le non-passage, c'est parce que la notion la plus importante est Tao, la Voie. Cette voie-là ne mène pas à la vérité ou à la révélation, elle ne mène pas à la sainteté. La voie chinoise, c’est par où ça passe. Le mal sourd quand cela ne passe plus, dès lors qu'il y a fixation, non-communication. Le mal, comme non-bien, est obstruction du processus moral et vital.

114. F. Jullien, Éloge de la fadeur : à partir de la pensée et de l’esthétique de la Chine, éd.

Philippe Picquier, 1991.

Chapitre III

Les origines de la pensée de mutation

Yi-Jing

易經

115

Il nous paraît indispensable ici de nous pencher sur la donnée fondamentale, à savoir la cosmologie chinoise. Elle est à la base même de toutes les constitutions des domaines et des conceptions en tant que langage. À travers le Yi-Jing易經 (Livre des Mutations), on comprendra l’aspect vivant de cette pensée, dans laquelle les ancêtres chinois pensaient que le monde était fait de la relation entre le Ciel, la Terre et l’Homme.

« On ne peut comprendre la nature de la transcen-dance qu’en se référant aux Grandes Origines – comme le font d’ailleurs tous les textes anciens qui abordent ce problème. Les théories cosmologiques sont communes à toute la Chine, elles font partie des idées fondamen-tales. Élaborées essentiellement depuis l’Antiquité dans le Livre des Mutations (Yi-Jing)易經, elles trouvent leur forme actuelle dès les premiers siècles avant le début de notre ère. La cosmologie est une élaboration savante et abstraite de mythes de l’origine, que d’ail-leurs les philosophes confucianistes rejettent et occul-tent.

La situation du taoïsme est particulière : les Mystères conservent des éléments importants de la mythologie, mais ils ont contribué de façon décisive à l’élaboration de la science cosmologique actuelle et du système général des énergies et des correspondances qui sont à la base de toute la pensée chinoise116. »

115. Yijing易經, également orthographié Yi-King, traduit généralement le Livre des mutations ou Classique des changements.

116. Schipper Kristofer, Le Corps taoïste, Fayard, coll. « L’Espace intérieur », Paris, 1993, 336 p.

Le nom originel du Yi-Jing 易 經 est Zhou-Yi 周 易. Loué par Confucius, il devint plus tard le premier livre canonique du confu-cianisme, d’où vient son nom actuel. Connu surtout en Occident par la traduction de Richard Wilhelm117, le Yi-Jing 易 經 , l’une des écritures majeures du confucianisme, est à l’origine un manuel de divination (vocation qu’il a retrouvée en Occident grâce à la traduc-tion de Wilhelm et à la cautraduc-tion apportée à cette pratique du livre par C. G. Jung).

Il est cependant erroné d’affirmer, comme le fait Wilhelm, que la pratique de la divination par le Yi-Jing易經 serait taoïste. Les ouvra-ges du Canon taoïste ne retiennent du Yi-Jing 易 經 que le côté cosmologique. D’une façon générale, le taoïsme ne se préoccupe guère de l’art oraculaire, et les maîtres taoïstes d’aujourd’hui ne sont pas des devins. Le Yi-Jing 易 經 et les Écritures confucianistes anciennes en général ignorent le Chaos primordial.

Yi-Jing易經, livre sur la vision de l’univers des anciens Chinois, est aussi un ouvrage sur la divination basée sur cette conception.

Rédigé au début du Ier millénaire avant 1’ère chrétienne, cet ouvrage n’est originellement rien d’autre qu’un manuel de divination. La mou-vance confucéenne l’établit comme un traité dont la finalité est de rendre compte des multiples états du monde tout en envisageant ses évolutions. Premier des Cinq Classiques, considéré comme le plus ancien texte chinois, le Yi-Jing 易 經 est un modèle de dialectique pour ce qui ne peut être qu’à la condition même du mouvement. Il faut savoir que la divination dans l’ancienne Chine était une science importante sérieusement vérifiée dans la pratique.

Dans le Zhou Li 周 禮 (Les Rites des Zhou, au XIe siècle av. J.- C.), où est noté tout le système des rites de l’Antiquité, on peut lire :

« Le devin doit écrire les conclusions de ses prédic-tions sur un tissu de soie pour pouvoir les comparer et les vérifer à tout moment. À la fn de l’année, on peut examiner le pourcentage de réalisation de ses prévi-sions. »

117. Das Buch der Wandlungen, Iéna, 1924.

Le Zhou Li周禮désigne un ou plusieurs ouvrages attribués aux sages de l’époque Zhou, compilés et commentés par les confucéens, traitant des rites encadrant l’organisation sociale, administrative et politique, tenant compte de ce que le monde est en perpétuelle transformation.

L’idée fondamentale du Livre des Mutations 易 經, c'est celle de la mutation qui régit toutes choses. C'est une transformation universelle à laquelle il faut consentir : « La vie qui engendre la vie, c’est cela le changement. » Ou, comme l’énonce le Yi-Jing易經 : « La seule chose qui ne changera jamais, c’est que tout change toujours tout le temps. » Il ne s’agit pas d’une loi, mais d'un fait qui se constate.

Wei Boyang, célèbre expert du Yi-Jing 易 經 de la dynastie des Han de l’Est (25-220 ap. J.-C.), indiquait plus clairement : « J’ai appris par expérience que les paroles et les points de vue du Yi-Jing 易經 n’ont pas été inventés sans fondement, mais se sont formés dans l’observation de leurs effets et la vérification dans tous les détails au cours de la pratique. » Il suffit, à vrai dire, de le lire sans préjugés pour sentir qu’il procède par allusion à des notions connues.

Dans un ouvrage complexe, dont le titre comporte plusieurs sens possibles :

Le mot yi 易 signifie, en qualité d'adjectif, « facile », « aisé ». Il désigne aussi le processus de mutation (la tradition voit à l’origine de ce caractère la représentation d’une sorte de lézard ou de caméléon).

Le mot yi connote un changement énergique et complet. Le sens originel du jing 經 indique la chaîne d’une étoffe – il faut avoir d’abord les fils de chaîne pour tisser ensuite les fils de trame. C’est pourquoi on donna plus tard le titre de jing 經à tous les livres philo-sophiques servant de guide.

Pendant quelques 5 000 ans d’histoire de la Chine, la conduite des Chinois a été entièrement imprégnée par le Yi-Jing易經 :

« Jing veut dire la trame d’une étoffe, autrement dit les livres contenant des vérités qui, comme la trame, ne varient pas118. »

118. Liou Tse Houa : La Cosmologie des Pa Koua et l’astronomie, Paris, 1940, p. 14.

Et cela continue. Non seulement le fondement de la pensée, mais aussi la science naturelle et l’art de gouverner de la Chine n’ont cessé de puiser à cette source de sagesse, et l’on n’est pas surpris que, seul parmi les anciens écrits confucéens, le Yi-Jing 易 經 ait échappé au grand incendie des livres ordonné par Tsin Chi Houang 秦 始皇, le premier empereur (en l'an 221 av. J.-C.). La vie chinoise tout entière est imprégnée par le Yi-Jing易經 jusque dans ses aspects quotidiens.

Lorsqu’on parcourt une ville chinoise, on peut voir partout, aux coins des rue, un devin assis – souvent c’est un lettré qui a échoué aux concours – à une table recouverte proprement, pinceau et tablette à la

Lorsqu’on parcourt une ville chinoise, on peut voir partout, aux coins des rue, un devin assis – souvent c’est un lettré qui a échoué aux concours – à une table recouverte proprement, pinceau et tablette à la