• Aucun résultat trouvé

Le patrimoine de Montmagny et Cap-Saint-Ignace : un contexte patrimonial

CHAPITRE 1 : LA CÔTE-DU-SUD : UN MICROCOSME SEIGNEURIAL

1. Le patrimoine de Montmagny et Cap-Saint-Ignace : un contexte patrimonial

Malgré une agglomération très différente2, les municipalités de Montmagny et

Cap-Saint-Ignace ont des biens relativement semblables au répertoire du patrimoine culturel du Québec. Au total, Montmagny contient sept éléments distincts dans le

1 Jean-René Thuot, « L’imaginaire seigneurial : les points de convergence entre recherche fondamentale,

initiatives touristiques et mémoires communautaires », dans Benoît Grenier et al., Nouveaux regards en

histoire seigneuriale, Québec, Septentrion, 2016, p. 372.

2 Selon le recensement de statistique Canada de 2016, on dénombre 11 255 habitants à Montmagny et 3 089 habitants à Cap-Saint-Ignace

répertoire tandis que Cap-Saint-Ignace en compte quatre. La similitude patrimoniale des municipalités ne se retrouve pas dans leur nombre, mais bien dans la nature des biens protégés. Comme on peut le constater dans le tableau 3, on retrouve dans les deux municipalités une maison avec une laiterie représentant une fonction industrielle et résidentielle, une patrimonialisation religieuse3, avec l’ancien couvent de Montmagny et

le noyau institutionnel de Cap-Saint-Ignace qui inclut une église, un presbytère et une grange à dîme et, bien entendu, un manoir seigneurial.

Tableau 3 – Le patrimoine de Montmagny et de Cap-Saint-Ignace selon le répertoire du patrimoine culturel du Québec

Patrimoine de Montmagny (date de

construction)

Patrimoine de Cap-Saint-Ignace (date de construction)

Maison Têtu (1739) Moulin à vent de Vincelotte (1690)

Maison et laiterie Casault (1767) Maison et laiterie Guimont (début XVIIIe siècle)

Manoir et four à pain Couillard (1800) Manoir Gamache (1744)

Maison Étienne-Paschal-Taché (1825) Noyau institutionnel de Cap-Saint-Ignace (1891) Ancien couvent de Montmagny (1853)

Fabrication artisanale d'accordéons à Montmagny (fin XIXe siècle)

Pratique de l'accordéon diatonique à Montmagny (début XXe siècle)

Le tableau 3 permet d’observer les biens du RPCQ de chacune des municipalités étudiés dans ce chapitre. On observe que le patrimoine des deux municipalités se

3 Il est à noter que l’ancien couvent de Montmagny a été détruit en 1986, même s’il avait été reconnu par le

ministère en 1982. D’ailleurs, il est intéressant de noter qu’une résiliation de reconnaissance a été effectuée en 2005, soit près de 20 ans après sa destruction.

ressemble sur plusieurs points. Cependant, les maisons privées4 et le patrimoine

immatériel5 sont différents. Il y a toutefois une similitude dans le fait de protéger des

ensembles maison et laiterie.

Les principaux thèmes qui ont suscité un intérêt pour les autorités gouvernementales dans ces deux municipalités sont des témoins du religieux, du régime seigneurial et de la transformation agroalimentaire. Évidemment, avec une agglomération plus de trois fois supérieure à celle de Cap-Saint-Ignace, il n’est pas surprenant de voir qu’il y a plus de thèmes abordés à Montmagny, qu’à Cap-Saint-Ignace.

Si on s’intéresse plus précisément aux éléments semblables du patrimoine, on dégage une corrélation dans les années d’attribution de statut protégé. Par exemple, la désignation du patrimoine relié au monde seigneurial a été réalisée en lien avec les prérogatives du ministère à ce moment qui rappelons-le, avait principalement protégé les immeubles de types seigneuriaux dans les années 1960. Comme le mentionne Thuot : « À l’époque (dans les années 1960), c’est un peu le vacuum au niveau de l’héritage seigneurial sur la Côte-du-Sud 6». Si on observe notre échantillonnage, on remarque que

les manoirs qui sont demeurés debout et qui ont obtenu un statut particulier ont tous été patrimonialisés au cours de cette décennie. Dans ces années, le ministère tente de remédier à la situation en étant plus proactif dans la protection des manoirs seigneuriaux pendant cette période. Évidemment, le manoir de Saint-Roch-des-Aulnaies a accaparé une place

4 Bien entendu, j’entends ici la maison de l’ancien premier ministre du Canada Étienne-Paschal Taché et la

maison Têtu qui a connu plusieurs fonctions, notamment lors de l’occupation des Anglais, elle a servi de prison et de palais de justice et de 1817 à 1854 et de manoir seigneurial pour l’arrière-fief de Saint-Luc.

5 Il s’agit de la « fabrication artisanale d'accordéons à Montmagny » et la « pratique de l'accordéon

diatonique à Montmagny ».

importante dans l’exploitation de la mémoire seigneuriale, et ce même s’il a obtenu la protection des autorités gouvernementales après les manoirs de Cap-Saint-Ignace et Montmagny.

1.1 L’ancienneté, l’authenticité et l’intégrité du patrimoine seigneurial de Montmagny et de Cap-Saint-Ignace

Si nous nous concentrons sur le patrimoine seigneurial présent aujourd’hui, protégé ou non, on compte dans les deux municipalités analysées dans ce chapitre un total de huit bâtiments seigneuriaux. Plus précisément, il s’agit pour Montmagny des moulins Jean-Baptiste Couillard-Dupuy et William-Randall Patton, du Manoir des Érables et du manoir et four à pain Couillard. Pour Cap-Saint-Ignace, ce sont le moulin à vent de Vincelotte et le moulin à eau Ouellet, ainsi que les manoirs Chenest et Gamache. Comme le remarque Thuot à propos des démarches de patrimonialisation seigneuriales du ministère des Affaires culturelles pour le cas de la Mauricie : « [Elles] s’ancrent d’abord autour des structures les plus imposantes, caractérisées par leur niveau d’ancienneté, d’authenticité et d’intégrité, qui font écho à des personnages "plus significatifs"7 ». Il

s’agira ici de mettre en relation les caractères d’ancienneté, d’authenticité, d’intégrité et les personnages illustres impliqués dans la nature des biens seigneuriaux des deux municipalités afin d’obtenir un portrait de la patrimonialisation des biens seigneuriaux à Montmagny et à Cap-Saint-Ignace.

Les moulins de ces municipalités constituent des vestiges seigneuriaux qui ont subi divers processus de patrimonialisation et peuvent avoir influencé celui-ci en donnant à l’agglomération un bien supplémentaire du régime seigneurial et permettant la création

d’un ensemble représentatif de cette période. Par exemple, le cas du centre d’interprétation de la Seigneurie des Aulnaies, illustre bien cette idée de rassembler ces témoins seigneuriaux. Entre autres, la figure du meunier associée au moulin ajoute un aspect intéressant à la mémoire seigneuriale et à sa patrimonialisation, puisqu’elle représente l’application du droit de banalité, la préparation de la farine et le rôle du d’intermédiaire entre les censitaires et le seigneur.