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tuelle, qui s’intéresse à l’héritage historique, notamment du fait de leur position sociale ainsi que de leur éducation.

De plus, étant donné le contexte politique et économique du pays, les élites intellectuelles, au lendemain de la révolution, semblent vouloir réclamer une certaine légitimité et recon- naissance à conduire des projets. Notons également que ces élites ont sans doute plus de ressources à la fois sociales et économiques pour s’organiser en tant qu’association. En effet, la plupart des membres des associations présentes dans la Médina ont déjà eu plusieurs ex- périences passées dans le milieu associatif, parfois même à l’étranger. Il en va ainsi pour un grand nombre des membres de Collectif Créatif, dont certains étaient déjà actifs dans le mi- lieu associatif, ou au sein de l’ASM. Ils semblerait donc récurrent qu’ils soient à l’initiative de la création de projets en lien avec la Médina, qui se veulent en dialogue avec les communau- tés habitantes. Ainsi, ces projets ne seraient-ils pas sans cesse décidés et gouvernés par des élites intellectuelles, qui ne représentent qu’une petite partie de la population de la Médina ?

En effet, une partie considérable de la population habitante de la Médina dispose de moins de ressources pour s’impliquer pleinement dans des projets dans le but d’agir sur leur territoire. Une réelle avancée résiderait donc peut-être dans une meilleure considération de ces popu- lations, en leur offrant un cadre de vie plus confortable, qui leur permet d’être eux-même à l’initiative de projets de revalorisation et de dynamisation de leur territoire.

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CONCLUSION

L’étude du territoire riche que peut représenter la Médina de Tunis nous a dans un premier montré que la notion de patrimoine était, pour la plupart des cas, le point de départ pour une mobilisation de la société en son sein. Critère immuable de son histoire et de sa richesse, la Médina offre un panel large d’appropriation de son patrimoine : parfois objet de rénova- tion strictement “physique”, parfois à visée touristique, elle offre également des possibilités de dépassement de cette dimension patrimoniale afin de faire émerger des initiatives qui tentent de mêler cette discipline à d’autres notions. Force est de constater l’impact qu’a pu avoir la révolution tunisienne sur un certain essor associatif dans la Médina, qui deviendra un nouveau territoire de mobilisation de la société civile. Cette mobilisation ne se fera rarement sans y intégrer l’héritage patrimonial, qui peut toutefois être perçu comme un objet vecteur de considérations élitistes. En effet, même si la Médina a vu se développer de nombreux projets depuis 2011, la plupart restent initiés par une certaine catégorie de population, ce qui pose des questions en termes de représentativité des communautés habitantes de la Médi- na.

La Médina reste tout de même un territoire appauvri par un manque de considération de la part des politiques publiques pendant des années, un fait encore visible autant en terme de dégradation du bâti, qu’en terme de dynamisme. Cet état dégradé du bâti s’est vu néanmoins amélioré dès la création de l’Association de Sauvegarde de la Médina, qui s’est progressi- vement muée en un organe de la Municipalité de Tunis. Ce manquement d’investissement de la part des politiques publiques dans le territoire de la Médina, ainsi que la révolution tunisienne a fait émerger des volontés de se rapprocher de ce territoire en y proposant des initiatives avec des ancrages territoriaux plus ou moins forts, et plus ou moins en lien avec les habitant.e.s. Toutefois, ces initiatives et ces projets existent et tentent chaque jour d’in- vestir une Médina trop connue pour ses monuments et son artisanat, mais pas encore assez pour les compétences citoyennes qui y existent. Ces compétences sont, pour la plupart du temps, initiées et revendiquées par une classe d’élites qui connaît et comprend le territoire d’un point de vue technique et théorique, et moins dans une pratique et dans un vécu quo- tidien. La plupart des projets portés par Collectif Créatif fonctionnent de cette manière : un chef de projet spécialiste dans un domaine (que ce soit l’architecture, le design, la commu- nication etc…) propose un projet qui peut s’ancrer dans un territoire, et donc avec ses ha- bitant.e.s. Parfois cet ancrage reste quelque peu superficiel - car le pouvoir décisionnel et d’action reste entre les mains du chef de projet, ou les actions proposées ne répondent pas vraiment au contexte local - mais parfois cet ancrage peut réellement exister, dans le cas où le lien avec les communautés habitantes se fait de manière collaboratif. Cela va nous amener

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à étudier dans une troisième partie El Warcha Collaborative Design Studio, qui est un atelier de design participatif, située dans le quartier de la Hafsia et porté par l’association Collec- tif Créatif. La création de l’atelier a certes été initiée par un spécialiste non originaire de la Médina, à savoir Benjamin Perrot, architecte de formation et de nationalité française, mais nous verrons dans quelles mesures l’atelier est devenu avant tout un projet de quartier, par et pour les habitant.e.s de la Hafsia, avec une volonté sincère de devenir un lieu ouvert pour tous et toutes, dans une optique de requalification et de réappropriation de ce quartier.

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L’intérêt de développer dans le corps de ce mémoire le projet El Warcha71 - Collaborative

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