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Sélection des patients

Entre Janvier 2012 et Décembre 2018, tous les patients ayant eu une CCR avec CHIP dans notre centre, pour une CP d’origine primitive ou secondaire, ou pour une

situation à risque de développer une CP, ont été rétrospectivement inclus. Ils ont été répartis en deux groupes en fonction de l’âge : Groupe A (< 65 ans) et Groupe B

(≥ 65 ans), conformément au rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé sur le vieillissement et la santé 45.

L’éligibilité des patients à la CCR avec CHIP a été validée, avant traitement, lors de la réunion de concertation multidisciplinaire hebdomadaire de notre institution. Les critères d’exclusion pour la CCR avec CHIP étaient les suivants : la présence de métastases extra-abdominales (à l’exception des métastases pulmonaires accessibles à un traitement par radiofréquence), l’envahissement massif de l’intestin grêle ou de son mésentère, la présence d’adénopathies tumorales dans le pédicule hépatique ou le rétropéritoine, un score de la Société Américaine d’Anesthésie (ASA) > 3, et la présence de contre-indications liées à l’âge avancé 46. Un indice de carcinose péritonéale (PCI) ≥ 20 pour les CP d’origine colorectale 47 et un PCI ≥ 12 pour les CP d’origine gastrique 10 étaient considérés comme une contre-indication relative à la CCR avec CHIP. Une carcinose péritonéale étendue avec un PCI > 20 ne représentait pas une contre-indication au traitement par CCR avec CHIP en cas de pseudomyxome ou de mésothéliome péritonéal 16,48,49. Les patients atteints de CP d’origine colorectale avec métastases hépatiques synchrones n’étaient pas exclus si le nombre de métastases était limité (≤3) et si la résection des lésions était possible avec une hépatectomie mineure 50,51.

Les données recueillies étaient les suivantes : les caractéristiques démographiques des patients (sexe, âge lors de la chirurgie, indice de masse corporelle [kg/m²], surface corporelle calculée selon la méthode de Dubois 52 [m²], score ASA), les antécédents médicaux et de chirurgie abdominale, l’existence d’un traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire, les caractéristiques de la tumeur primitive et de la CP (origine de la CP, traitement néoadjuvant, résection de la tumeur primitive, caractère synchrone de la CP, indication prophylactique ou thérapeutique,

5 résultats biologiques), les données peropératoires (PCI, durée opératoire, nombre de résections digestives, nombre d’anastomoses, nombre de stomies, autres résections associées, drainage thoracique, complications peropératoires, type de chimiothérapie), les résultats post-opératoires (morbidité à J30, mortalité à J30 et J90, durée de séjour), et les résultats à long terme (fermeture de stomie, réintervention, réadmission, récidive, survie globale et survie sans récidive).

Bilan préopératoire

Le bilan préopératoire comprenait la réalisation d’un examen clinique, d’un bilan sanguin, et l’évaluation de la fonction cardiaque par une échographie trans-thoracique. L’évaluation gériatrique approfondie était réalisée chez les patients les plus âgés (> 70 ans) après dépistage des fragilités du patient à l’aide du questionnaire G-8 53,54. En cas de vulnérabilité avérée (score G-8 ≤ 14), l’ évaluation gériatrique standardisée était réalisée selon les recommandations de l’étude prospective multicentrique ONCODAGE 55, et le groupe d’appartenance des patients âgés était ensuite déterminé selon la classification de Balducci 46. Le bilan d’extension de la maladie comprenait la réalisation systématique d’un dosage des marqueurs tumoraux sanguins et d’une tomodensitométrie (TDM) thoraco-abdomino-pelvienne. D’autres examens complémentaires pouvaient être réalisés en fonction de l’origine de la CP : une coloscopie totale en cas de cancer colorectal, une fibroscopie oeso-gastro-duodénale et une écho-endoscopie haute en cas de cancer de l’estomac, une imagerie par résonnance magnétique (IRM) pelvienne pour les localisations rectales ou gynécologiques, et une IRM hépatique pour caractériser d’éventuelles métastases hépatiques. Une tomographie par émission de positons et/ou une cœlioscopie exploratrice étaient réalisées lorsque le diagnostic de CP était incertain.

Procédure chirurgicale

Tous les patients ont été opérés par laparotomie médiane. L’extension de la CP était évaluée par le score PCI décrit par Sugarbaker 56,57. Les patients ne présentant pas de CP macroscopique, mais chez qui la cytologie péritonéale (en cas de cancer de l’estomac) ou l’examen histologique (en cas de cancer de l’estomac ou colorectal)

6 était positif, étaient considérés comme des stades précoces de CP et classés PCI=0 58,59. En l’absence de résection initiale, la tumeur primitive était réséquée au moment de la CCR. L’exérèse du grand épiploon, de la vésicule biliaire, de l’appendice et des ovaires était systématiquement pratiquée. La CCR concernait tous les organes atteints par la CP, y compris le péritoine, afin d’obtenir une résection macroscopiquement complète 4. La qualité de la CCR était évaluée par le score de Complétude de la

Cytoréduction (score CC) 60 : CC0 = pas de résidu tumoral macroscopique; CC1= résidu tumoral ≤ 2,5 mm, CC2 = 2,5 mm < résidu tumoral < 2,5 cm; et CC3 = nodules ≥ 2,5 cm. Une exérèse complète était classée CC0 ou CC1.

La CHIP était réalisée « à ventre ouvert » selon la technique du « colisée » 61. La température du bain de CHIP était maintenue entre 41 et 43°C, et le type de chimiothérapie était administré en fonction de l’origine de la CP. L’oxaliplatine était la drogue la plus fréquemment utilisée, associée à la perfusion d’une chimiothérapie intraveineuse (20 mg/m² d’acide folinique et 400 mg/m² de 5-fluoro-uracile), et administrée dans 2L/m² de sérum glucosé à 5% pendant 30 minutes, en cas de pseudomyxome péritonéal (460 mg/m²), de CP d’origine colorectale (460 mg/m²) et de CP d’origine gastrique (250-360 mg/ m²). En cas de mésothéliome péritonéal, du cisplatine (50mg/m²) combiné à de la doxorubicine (15 mg/m²) était administré dans 2L/m² de dialysat pendant 90 minutes. En cas de CP d’origine gynécologique, du

cisplatine (75 mg/m²) était administré dans 2L/m² de sérum physiologique pendant 60 minutes. En cas d’intolérance aux sels de platine, l’oxaliplatine était remplacé par

de la mitomycine C (30-35 mg/m² administrés dans 2L/m² de solution saline pendant 60 minutes).

Les anastomoses et/ou les stomies étaient toujours réalisées à la fin de la CHIP, après évacuation de la solution. Toutes les anastomoses étaient manuelles, à l’exception des anastomoses colorectales. Les stomies regroupaient les stomies de protection (double iléostomie en canon de fusil, iléostomie latérale, iléo-colostomie) et les stomies terminales (iléostomie, colostomie). La cavité abdominale était systématiquement drainée avant fermeture. Un drain thoracique était mis en place en cas de brèche diaphragmatique peropératoire. Tous les patients étaient admis en Unité de Soins Intensifs (USI) en fin d’intervention.

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Évaluation post-opératoire

La morbidité était évaluée selon la classification de Clavien-Dindo 62. La morbidité majeure était définie par des complications de grade III ou IV, nécessitant une intervention (chirurgicale, endoscopie ou radiologique) et/ou une surveillance en réanimation.

La survie globale (SG) était définie par l’intervalle de temps entre la date de

l’intervention et la date du décès, quelle qu’en soit la cause. La survie sans récidive (SSR) était définie par l’intervalle de temps entre l’intervention et la première récidive (locorégionale ou à distance) ou le décès. Les patients toujours en vie et sans récidive aux dernières nouvelles étaient censurés.

Suivi

La fermeture des stomies de protection était réalisée au moins 2 mois après l’intervention, après contrôle endoscopique de la cicatrisation de l’anastomose colorectale. Une chimiothérapie adjuvante était systématiquement indiquée en cas de CP d’origine colorectale ou gastrique afin de compléter la chimiothérapie péri- opératoire 6,63,64, et chez les autres patients en cas de CCR incomplète ou de critères histologiques de mauvais pronostic.

Tous les patients étaient régulièrement suivis les 5 premières années par l’oncologue et le chirurgien. La surveillance systématique comprenait un examen clinique, un dosage biologique des marqueurs tumoraux, et une TDM thoraco-abdomino-pelvienne ou une radiographie de thorax couplée à une échographie abdominale. Une tomographie par émission de positons était réalisée en cas de suspicion de récidive afin d’en évaluer l’étendue. Le traitement des récidives consistait essentiellement en une chimiothérapie systémique complémentaire et/ou une exérèse chirurgicale de la métastase si celle-ci était résécable. Dans certains cas, la réalisation d’une seconde CCR avec CHIP pouvait être discutée.

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Analyse statistique

Les données quantitatives étaient exprimées en moyenne et écart-type (ET), et les données qualitatives en nombre de patients (et pourcentage de patients). Les valeurs quantitatives étaient analysées avec le test t de Student en cas de distribution normale et avec le test de Mann-Whitney dans le cas contraire. La comparaison des données qualitatives était réalisée avec le test du 2 de Pearson ou le test exact de Fisher, en fonction des valeurs. Les courbes de survies étaient obtenues selon la méthode de Kaplan et Meier et les différences entre les distributions de survies étaient évaluées avec le test du log-rank. Tous les tests étaient bilatéraux, avec un seuil de significativité défini par une valeur de P inférieure à 0,05. Toutes les analyses étaient réalisées à l’aide du logiciel Statistical Package for the Social Sciences (SPSS) (SPSS Inc., version 24.0, Chicago, IL). Cette étude était menée conformément aux normes éthiques du Comité des Expérimentations Humaines de notre établissement, et rapportée selon les recommandations du Rapport des Études Épidémiologiques Observationnelles (STROBE) 65.

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RESULTATS

Population

Entre 2012 et 2018, 95 patients ont eu une CCR avec CHIP, pour une CP avérée ou à visée prophylactique. Ils ont été répartis en deux groupes en fonction de l’âge : Groupe A (âge < 65 ans, n=65, 68%) et Groupe B (âge ≥ 65 ans, n=30, 32%).

Les caractéristiques démographiques des patients sont rapportées dans le

Tableau 1. Les patients du Groupe A avaient moins de comorbidités (65 vs 90%,

p=0,01) et de traitement anticoagulant (2 vs 13%, p=0,04) que ceux du Groupe B.

Les caractéristiques de la CP sont résumées dans le Tableau 2. Le cancer colorectal était la première cause de CP dans les deux groupes (41 et 54%, p=0,2), et était associé à des métastases hépatiques synchrones chez 22 et 19% des patients des deux groupes (p=1,00). Quelle que soit son origine, la CP était synchrone à la tumeur primitive chez 50 et 73% des patients des Groupes A et B, sans différence significative (p=0,06).

La CCR avec CHIP était le plus souvent réalisée à visée thérapeutique (92 vs 87%, p=0,5), après un précédent traitement de la CP (78,5 et 77%, p=1,00). L’exérèse de la

tumeur primitive avait déjà été pratiquée avant la CCR avec CHIP chez 32 et 13 patients des Groupes A et B (49 vs 43%, p=0,7) : adénocarcinome colorectal (n=21

vs n=9), pseudomyxome péritonéal d’origine appendiculaire (n=3 vs n=4), adénocarcinome gastrique (n=2 vs n=0), de l’ovaire (n=3 vs n=0), de la trompe (n=1 vs n=0), de l’intestin grêle (n=1 vs n=0), et mésothéliome péritonéal (n=1 vs n=0). Les résultats biologiques préopératoires étaient comparables entre les deux groupes.

Résultats peropératoires

Les données peropératoires sont rapportées dans le Tableau 3. Le PCI moyen, tout primitif confondu, était similaire entre les groupes (8,9 ± 6,9 vs 9,7 ± 8,2, p=0,6). Le PCI moyen de la CP d’origine gastrique était plus élevé dans le Groupe A que B (5,2 ± 4,8 vs 0,0 ± 0,0, p=0,03), en raison du nombre plus élevé d’indications thérapeutiques pour la CCR avec CHIP dans le Groupe A par rapport au Groupe B dans ce type de cancer (n=16/18, 89% vs n=1/3, 33%, p=0,08).

10 Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes en termes de caractère complet de la chirurgie de cytoréduction (respectivement : 94 et 90%, p=0,7). Le nombre de patient ayant eu une cholécystectomie était plus important dans le Groupe A que B (94 vs 77%, p=0,03), tout comme celui des patients ayant eu une résection digestive (86 vs 63%, p=0,02). Le nombre de patients chez qui une anastomose digestive avait été réalisée, que ce soit après une résection digestive ou à l’occasion d’une fermeture de stomie préexistante, était plus élevé dans le Groupe A que B (82 vs 57%, p=0,01). Le nombre de stomies réalisées en fin d’intervention était comparable entre les deux groupes (40 et 27%, p=0,25). Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes en termes de complications peropératoires (29 vs 37%, p=0,5) ni de durée opératoire (8,1 ± 1,9 vs 7,4 ± 1,8 heures, p=0,1). La prise en charge anesthésique était comparable quel que soit l’âge.

Résultats post-opératoires

Il n’y avait pas de différence entre les groupes en termes de morbidité globale (85 vs 90%, p=0,7), chirurgicale (59 vs 60%, p=1,00), médicale (71 vs 87%, p=0,1) et majeure (33 vs 23%, p=0,4), à 30 jours post-opératoires. Les complications post- opératoires sont précisées dans le Tableau 4.

Quatorze patients du Groupe A (22%) et 7 patients du Groupe B (23%, p=1,00) ont eu besoin d’une prise en charge spécifique de ces complications, que ce soit chirurgicale ou interventionnelle. Les causes de reprise chirurgicale (n=9, 14% vs n=5, 17%, p=0,8) étaient les suivantes : hémorragie (n=4, 6% vs n=2, 7%, p=1,00), splénectomie (n=2,

3% vs n=0, p=0,5), éviscération (n=1, 1,5% vs n=1, 3%, p=1,00), et complications septiques (i.e. fistule, collection intra-abdominale ou péritonite) nécessitant la confection d’une stomie de protection (n=2, 3% vs n=1, 3%, p=1,00). La prise en charge interventionnelle des complications comprenait : le drainage radiologique percutané de collections intra-abdominales (n=6, 9% et n=2, 7%, p=1,00), l’embolisation radiologique d’un saignement artériel (n=4, 6% et n=2, 7%, p=1,00) et l’hémostase endoscopique (n=2, 1% et n=0, p=1,00) d’un saignement intra-digestif. La durée moyenne de séjour était plus longue dans le Groupe A (26,7 ±19,4 jours) que B (22,4 ±10,3 jours), sans différence significative (p=0,3). Il semblait y avoir moins de patients réadmis dans le Groupe A que B (15 vs 33%), mais cette différence n’était pas statistiquement significative (p=0,06).

11 Aucun décès n’est survenu dans le Groupe A au cours des 90 jours post-opératoires, alors que 3 patients du Groupe B sont décédés pendant cette période (0 vs 10%, p=0,03). Deux d’entre eux sont décédés suite à des complications post-opératoires majeures pour lesquelles une chirurgie en urgence à due être réalisée. Le premier, survenu au 9ème jour post-opératoire (J9), était lié à un arrêt cardiaque avec nécrose digestive étendue. Le second, survenu à J37, était consécutif à un choc septique et hémorragique, compliqué de défaillance multi-viscérale. Enfin, le troisième patient est décédé plus tardivement, à J88, d’un syndrome occlusif secondaire à une progression de la maladie.

Suivi à long terme et survies

La durée moyenne de suivi était significativement plus longue dans le Groupe A (23,0 ± 17,2 mois) que B (15,4 ± 14,2 mois, p=0,04) (Tableau 5).

Les patients du Groupe A étaient plus nombreux que ceux du Groupe B à recevoir une chimiothérapie adjuvante (55 et 27%, p=0,02). A la fin du suivi, la remise en continuité digestive avait été réalisée chez 24 et 5 patients ayant une stomie (86 et 56%, p=0,08). Toutes les stomies de protection avaient été fermées dans les deux groupes. Quatre patients de chaque groupe n’avaient pas été rétablis et avaient donc conservé leur stomie terminale pour cause de progression ou récidive de la maladie (n=2 et n=3) et de décès (n=2 et n=1). Le taux de stomie définitive par rapport à l’ensemble des patients était finalement de 6 et 13% dans les Groupes A et B (p=0,3).

36 patients du Groupe A (56%) et 11 patients du Groupe B (37%, p=0,1) avaient eu une récidive de la maladie, avec un intervalle de temps par rapport à la chirurgie qui semblait plus long dans le Groupe A que B (11,2 ± 8,0 vs 6,7 ± 6,5 mois, p=0,1), mais ces différences n’étaient pas significatives. Un traitement de la récidive avait été effectué chez la majorité des patients concernés (n=35, 97% et n=10, 91%, p=0,4), et consistait essentiellement en une chimiothérapie (81 et 91%, p=0,7) ou de la chirurgie additionnelle (22 et 18%, p=1,00). Une seconde CCR avec CHIP avait été réalisée chez 4 patients du Groupe A, exclusivement (6% vs n=0; p=0,3). Un patient du Groupe A (3%, p=1,00) avait reçu une radio-chimiothérapie pour récidive pelvienne et osseuse. Une prothèse endoscopique avait dû être positionnée chez un patient de chaque groupe (3 et 9%, p=0,4) en raison d’une sténose duodénale et biliaire.

12 Les taux de SG à 1, 3, et 5 ans étaient respectivement de 86, 64 et 52% dans le Groupe A et de 85, 74% et non atteinte dans le Groupe B (p=0,8) (Figure 1). Les taux de SSR à 1, 3, et 5 ans étaient respectivement de 61, 28 et 28% dans le Groupe A et de 56, 45% et non atteinte dans le Groupe B (p=0,6) (Figure 2). La médiane de SG n’avait pas été atteinte dans les deux groupes tandis que la médiane de SSR était respectivement de 16,9 et 23,6 mois dans les Groupes A et B.

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DISCUSSION

Dans cette étude, nous avons montré que les complications peropératoires, les résultats post-opératoires ainsi que les survies à long terme après CCR avec CHIP pour CP étaient comparables entre les patients de moins de 65 ans et les patients plus âgés, malgré le nombre plus important de comorbidités dans la population âgée. La principale différence entre les deux groupes concernait la mortalité à 90 jours, nulle dans le Groupe A, alors que 3 patients du Groupe B sont décédés dans cette période.

L’âge avancé a longtemps été considéré comme un facteur de risque important de morbidité et de mortalité post-opératoire après chirurgie oncologique majeure 28, compte-tenu des comorbidités et de la dénutrition 66,67 plus fréquentes dans cette population, et de la maladie qui est plus souvent évoluée au moment du diagnostic dans ce groupe de patients 29,68. Cependant, il n’existe pas de consensus pour définir le patient âgé, puisque les âges limites varient dans la littérature entre 65 29,30,32,36,41,43,44 et 75 34,40 ans. Quel que soit l’âge limite, l’âge supérieur à 60 ans a été décrit comme un facteur de risque indépendant de mauvais résultats post-opératoires à 30 jours, avec 44% de morbidité majeure et 3,2% de mortalité, après CCR et CHIP 69. Dans notre étude, nous avons considéré la limite de 65 ans pour définir le patient âgé, conformément au rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé sur le vieillissement et la santé 45.

Malgré les comorbidités et la prise de traitement anticoagulant plus fréquentes dans le groupe des patients âgés, nous n’avons pas observé de différence au niveau des données peropératoires entre les deux groupes, que ce soit en termes de complications hémorragiques, de durée opératoire, de nécessité de transfusion sanguine ou de la gestion anesthésique (remplissage, amines). Ces résultats sont sensiblement comparables aux autres séries qui ont rapporté une durée opératoire médiane variant de 5,5 à 11,3 heures 30–32,38–42 et une nécessité de transfusion sanguine peropératoire chez 7 à 50% des patients 31,32,38,40, quel que soit l’âge. Par ailleurs, nous avons observé que le nombre de patients ayant eu une résection digestive était plus important chez les jeunes patients (86 vs 63%, p=0,02), aboutissant à un nombre plus élevé d’anastomoses digestives dans ce groupe (1,1 ± 0,7 vs 0,7 ±

14 0,7, p=0,01), et ce, malgré un PCI moyen et des antécédents de chirurgie abdominale similaires entre les deux groupes.

De plus, malgré la fréquence plus élevée des comorbidités chez les patients du Groupe B, nous n’avons pas observé de différence significative entre les groupes en termes de morbidité globale (85 vs 90%, p=0,7), morbidité majeure (33 vs 23%, p=0,4) et mortalité (0 vs 3%, p=0,3) post-opératoire à court-terme (30 jours). La morbidité globale que nous avons observée chez les sujets âgés apparaît sensiblement plus élevée par rapport aux autres séries (entre 38 et 80%) 29,31–37,40,41, probablement parce que nous avons réellement considéré toutes les complications post-opératoires, y compris celles qui ne nécessitaient pas de traitement médical (i.e Clavien-Dindo I). En revanche, nos résultats sont comparables aux autres études, en termes de morbidité majeure (13 à 55%) et de mortalité (0 à 18%) 29,30,41–44,31–37,40.

A notre connaissance, seules deux études ont observé des résultats post-opératoires défavorables chez les patients âgés en comparaison aux patients plus jeunes, après CCR et CHIP réalisée pour CP d’origines ovarienne 39 ou diverses 42. En effet, Cascales-Campos et al 34 ont comparé les résultats post-opératoires entre 9 femmes âgées d’au moins 75 ans et 57 femmes plus jeunes, opérées d’un cancer de l’ovaire avancé. Ils ont rapporté une durée moyenne de séjour significativement plus longue (10 ± 5,5 vs 7,3 ± 3,1 jours, p<0,05) et une morbidité significativement plus élevée chez les patientes âgées, qu’il s’agisse de la morbidité globale (78 vs 35%, p<0,05) ou majeure (56 vs 16%, p<0,05). En revanche, la mortalité était nulle quel que soit l’âge 34. Dans une autre étude, Beckert et al 37 ont comparé les résultats post-opératoires entre 29 patients âgés d’au moins 70 ans et 352 patients plus jeunes. Ils ont observé une morbidité globale significativement plus élevée chez les patients âgés (76 vs 47%, p=0,048), sans différence significative en termes de morbidité majeure (21 vs 12%, p=1,00) et de mortalité (3 vs 5%, p=1,00) 37.

Dans notre étude, la principale différence entre les groupes concernait la mortalité à 90 jours, qui était nulle chez les patients de moins de 65 ans tandis que 3 décès survenaient chez les patients plus âgés (p=0,03). Cependant, nous n’avons pas identifié de facteurs prédictifs indépendants de mortalité post-opératoire (données non publiées). La mortalité à 90 jours a déjà été évaluée par certains auteurs 32,37,39,41,42.

Dans la grande série multicentrique cas-témoins de Alyami et al 39 , la mortalité à 90 jours était sensiblement plus élevée chez les 188 patients âgés d’au moins 70 ans

15 que chez les 704 patients plus jeunes (5,4 vs 2,7%, p=0,052). De la même manière, Kitai et al 42 ont rapporté une mortalité à 90 jours plus importante (14 vs 0%, aucune donnée statistique) chez les patients âgés (≥ 70 ans, n=14) en comparaison aux patients plus jeunes (< 70 ans, n=28). Enfin, Wong et al 41 ont observé 11% de mortalité à 90 jours chez des patients âgés d’au moins 65 ans (n=18) contre seulement 0,2% (p=0,001) chez des patients plus jeunes (< 65 ans, n=159).

Dans notre centre, la prise en charge des patients âgés par CCR avec CHIP s’est faite plus récemment que celle des patients plus jeunes, expliquant la durée moyenne de suivi plus longue (23,0 ± 17,2 vs 15,4 ± 14,2 mois, p=0,04) dans le premier groupe. De la même manière, les patients jeunes étaient plus nombreux que les patients âgés à avoir une chimiothérapie adjuvante (55 vs 27%, p=0,02), qui était souvent indiquée à notre début d’expérience, avant d’être remise en cause par de récentes études. En effet, Maillet et al 70 ont suggéré qu’une chimiothérapie post-opératoire précoce n’améliorait pas la SG en comparaison à une simple surveillance après CCR avec CHIP (49 vs 43 mois, p=0,9). Devilee et al 71 ont également démontré que la SG à 3 ans était significativement améliorée chez les patients ayant eu une chimiothérapie

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