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Passage des grandeurs locales aux observables astrophysiques

Les grandeurs locales du système modélisé par le code PDR de Meudon étant calculées, les grandeurs homogènes aux observables astronomiques habituelles (intensités spécifiques, densités de colonne) peuvent être obtenues par intégration le long de la ligne de visée. L’équipe PDR a développé un programme dédié à cet usage qui respecte la géométrie plane-parallèle du modèle PDR. Nous le présentons dans le prochain paragraphe, et tâchons d’en montrer les limites. Dans le paragraphe suivant, nous présenterons deux nouveaux programmes que j’ai développés en collaboration avec Jacques Le Bourlot permettant de contourner ces limites au prix de quelques approximations et de nouvelles limitations.

5.4.1 Intégration sur la couche plane-parallèle

La méthode la plus rigoureuse pour comparer les résultats du modèle PDR à des données observationnelles consiste à modéliser l’objet observé par une tranche de gaz plane-parallèle observée sous un angle à déterminer, θ. Pour calculer une densité de colonne, il suffit alors d’intégrer la densité volumique correspondante le long de la ligne de visée (ldv) en tenant compte de l’angle θ :

NX(θ) =

5.4 Passage des grandeurs locales aux observables astrophysiques 61

en respectant les conventions proposées parLe Petit et al.(2006) dans la figure reproduite

ici (Fig. 5.1). De même, l’intensité spécifique à une longueur d’onde donnée se déduit de l’intégration des émissivités le long de la ligne de visée, en tenant compte toutefois de l’absorption de la poussière et du gaz :

IX(θ, λ) =

ldvds �(s, λ)/cos(θ) exp(−τλ(s)) (5.7)

où �(s, λ) est l’émissivité locale totale à l’abscisse s et à la longueur d’onde λ, tandis

que τλ(s) est l’opacité à la longueur d’onde λ de la couche de matière comprise entre

le point d’abscisse s et la surface du nuage du côté de l’observateur (point O sur la Fig. 5.1).

Ces calculs ont été programmés dans le programme PREP. Appliquer cette méthode soulève quelques difficultés. Les résultats dépendent de l’angle θ qu’il n’est pas évident de déterminer observationnellement. En pratique, on est le plus souvent confronté à deux cas de figure : des régions observées presque de face (θ ≈ 0) ou presque de profil (θ ≈ π/2). Dans le premier cas, la sensibilité à θ est faible (grâce au cosinus), et l’utilisation de PREP est utile pour calculer l’intensité émergente en tenant compte du détail de la répartition de l’émissivité locale au sein du nuage et des effets de réabsorption. Dans le second cas, les équations (5.6, 5.7) montrent que les quantités intégrées divergent pour θ → π/2, traduisant la trop grande simplicité du modèle qui ne tient pas compte de la taille finie du nuage dans les directions orthogonales à l’axe étoile - PDR (axe (Os) sur la Fig. 5.1). Utiliser PREP au voisinage de cet angle serait donc un non-sens.

Cependant, il semble peu probable qu’un nuage réel soit d’une part effectivement plan-parallèle, et d’autre part vu de profil. Il a été proposé dans le cas de la nébuleuse

de la Tête de Cheval (Habart et al., 2005) que la PDR observée, apparemment de

profil, présente en fait une géométrie cylindrique. Dans le cas du filament observé dans ρ Oph, Habart et al. (2003a) proposent d’interpréter les observations par un modèle

en coquille sphérique. Goldsmith et al. (2010) proposent des hypothèses comparables

pour interpréter les observations du nuage moléculaire du Taureau, et vont plus loin en plaquant les résultats 1D du code PDR Meudon sur une géométrie cylindrique de grand rayon de courbure avant d’intégrer sur des lignes de visées traversant le bord du nuage.

Nous avons adopté la même démarche et développé des modules réalisant ces intégrations pour des géométries sphériques.

5.4.2 Intégration sur des géométries sphériques

Adopter des géométries sphériques permet de lever la difficulté liée à l’angle par- ticulier θ = π/2. Il convient cependant de rester prudent dans la mesure où seuls les calculs de post-traitement sont ici menés dans l’hypothèse de géométries sphériques, tandis que le code lui-même conserve sa géométrie plane-parallèle. Malgré tout, dans l’hypothèse de grands rayons de courbure, il semble raisonnable de supposer que les effets de courbure seront faibles.

(a) (b)

Figure 5.2: Schémas des modèles de géométries sphériques proposés en post-traitement du code PDR

de Meudon. (a) Le nuage est supposé être une portion de sphère, éclairée de toute part. (b) Le nuage est supposé prendre la forme d’une portion de coquille sphérique centrée sur l’étoile. La longueur de la PDR le long de la ligne de visée est limitée à LPDR, paramètre ajustable.

5.4 Passage des grandeurs locales aux observables astrophysiques 63 5.4.2.1 Globule sphérique

La géométrie que nous appellerons globule sphérique est représentée sur la Fig. 5.2(a) et consiste en un nuage sphérique convexe éclairé de toute part. Ce modèle pourrait convenir à la description d’une condensation (clump) sphérique dense immergée dans un milieu inter-clump plus ténu assurant l’irradiation du clump sous tous les angles par la diffusion d’un champ incident moins isotrope, à l’image du modèle KOSMA-τ (Cubick et al., 2008). Il en va de même pour la description d’un filament cylindrique

comme celui proposé par Habart et al. (2005) pour le filament de la Tête de Cheval, ou

plus généralement pour n’importe quelle surface convexe de nuage qui serait observée sous incidence rasante.

Le calcul est conceptuellement assez simple : il suffit d’intégrer le long de la ligne de visée des grandeurs (densités, émissivités) connues en des positions discrètes (les couches iopt représentées sur la Fig. 5.2(a)). Une difficulté provient de ce que ces positions sont inégalement réparties le long de la ligne de visée du fait de la courbure du

nuage. La stratégie adoptée par Jacques Le Bourlot, l’auteur de ce module7, consiste à

calculer les positions siopt des couches iopt le long de la ligne de visée, puis à discrétiser

l’intégration pour faire explicitement intervenir ces positions : NX(Rimp) = � ldvds nX(s) � 2 iimp−1 0 1

2(nX(siopt) + nX(siopt+1))(siopt+1− siopt) (5.8)

où Rimp désigne la distance projetée sur le ciel entre le bord de la sphère et la ligne de

visée. Le coefficient 2 provient de la symétrie du système qui permet de n’intégrer que sur la moitié de la ligne de visée. Le coefficient 1/2 provient de la méthode d’intégration

(méthode des trapèzes). Les nX(siopt) sont connus puisque ce sont les résultats du

code PDR. Il ne reste que les siopt à calculer. On les compte à partir du plan médian,

orthogonal à la ligne de visée et contenant le centre de la sphère. On note Rsph le rayon

de la sphère, et diopt la position de la couche iopt (fournie par le code PDR) comptée

depuis la surface de la sphère. Le théorème de Pythagore permet d’écrire :

s2iopt+ (Rsph− Rimp)2 = (Rsph− diopt)2 (5.9)

dont le réarrangement donne : siopt =

[2Rsph− (diopt + Rimp)] (Rimp− diopt) (5.10)

Le calcul des intensités spécifiques repose sur le même principe, avec toutefois quelques difficultés supplémentaires liées à la brisure de la symétrie du système par l’absorption le long de la ligne de visée.

Ce modèle géométrique présente certaines limites. Nous avons déjà mentionné qu’en toute rigueur, les résultats du code rapportant l’état d’un système plan-parallèle, il faudrait se limiter à des géométries où le rayon de courbure reste grand devant la profondeur maximale du nuage plan-parallèle 1D. Dans la perspective d’une application 7. sur ce module, ma participation s’est restreinte aux tests, à la correction de certaines erreurs et à étendre les conditions d’application à une couche de gaz courbe.

à un clump sphérique de faible rayon, cette condition n’est pas remplie. Toutefois, si les couches internes violent significativement cette hypothèse, ce n’est pas nécessairement le cas des couches les plus superficielles. L’étude des couches chaudes dans lesquelles

on observe notamment les émissions de H2 et CO rotationnellement excitées (comme

il a été observé dans le cas de la Barre d’Orion avec l’instrument PACS sur Herschel,

Goicoechea et al., 2011) et les bandes aromatiques peut donc être raisonnablement menée à l’aide de ce modèle.

Une autre limitation provient de la description du champ de rayonnement. L’utilisa- tion d’un champ isotrope comme l’ISRF ne pose pas de problème particulier, puisqu’il reste isotrope lorsqu’on enroule la couche 1D sur une sphère. En revanche, la modélisa- tion d’une irradiation par une étoile additionnelle s’avère gênante. Dans la géométrie plane-parallèle du code, ce rayonnement est unidirectionnel, perpendiculaire à la surface du nuage. Une fois enroulé autour d’un nuage sphérique, on obtient un champ qu’aucune situation astrophysique ne permet de générer. Il faut également remarquer qu’on ne pourra pas modéliser un nuage sphérique éclairé de côté.

5.4.2.2 Coquille sphérique

La figure 5.2(b) illustre ce que nous appelons une coquille sphérique, c’est-à-dire une couche de gaz à symétrie sphérique entourant une cavité sphérique supposée vide et centrée sur une étoile. Ce modèle pourrait convenir à la description d’une nébuleuse par réflexion comme NGC 7023.

Je me suis inspiré de la méthode développée pour le modèle de globule sphérique pour programmer les calculs du modèle en coquille sphérique. L’équation (5.8) et son équivalent pour l’intensité spécifique s’appliquent ici, à condition toutefois d’adapter la gestion des indices, puisque la ligne de visée traverse désormais les couches indexées par

iopt= iimp à iopt = npo (les notations sont indiquées Fig. 5.2(b)). Il faut également

adapter le calcul des abscisses siopt :

siopt =

(dsour+ diopt)2− Rimp2 (5.11)

où dsour est la distance entre la source et la surface du nuage, et Rimp est la distance

entre l’étoile et la ligne de visée.

Cette géométrie présente des difficultés différentes de la précédente. On ne s’attend pas à être confronté à de faibles rayons de courbure. En revanche, il est rare d’observer des coquilles sphériques entières. On aurait donc plutôt intérêt à modéliser des portions de coquilles sphériques, ce qui soulève le problème des surfaces supplémentaires alors générées. Dans le cas d’émissions optiquement minces, ces problèmes de surface pourront

être négligés, et on pourra supposer que le nuage présente une certaine profondeur LPDR

le long de la ligne de visée, en interrompant l’intégration aux frontières du modèle (cf. Fig. 5.2(b)).

La situation est plus contraignante dans le cas d’émissions optiquement épaisses, pour lesquelles l’émission sera largement dominée par la surface la plus proche de l’observateur. On est alors confronté à deux cas de figure. Soit l’émission de la surface sphérique face à l’étoile est négligeable par rapport à celle de la surface la plus proche de