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9.2.1 État d’hydrogénation

Dans l’ensemble, on constate que les PAH adoptent essentiellement deux états : soit l’état normalement hydrogéné, soit l’état totalement déshydrogéné. Les états partiellement déshydrogénés sont toujours minoritaires. Sur le plan de la modélisation des PAH, ce résultat laisse entrevoir la possibilité d’une simplification considérable de la description de leur état d’hydrogénation. Sur le plan astrophysique, ces résultats indiquent qu’il est nécessaire de s’intéresser aux propriétés des espèces totalement déshydrogénées, les agrégats carbonés.

Agrégats carbonés

Il est intéressant de mettre en perspective notre prédiction que le circumcoronène

(C54H18) devrait évoluer vers la forme d’un agrégat carboné (C54) en surface de la PDR

nord de NGC 7023 avec la récente identification spectroscopique du fullerène C60 dans

le même objet parSellgren et al.(2010). La figure 9.7 montre que la position relative des

émissions AIB et de C60 est compatible avec une prolongation du scénario d’évolution

présenté au Chp. 4, consistant à ajouter une étape de photodestruction des PAH pour former des agrégats carbonés.

Les propriétés des agrégats carbonés ne peuvent pas être directement déduites de celles des PAH. Des études sont nécessaires pour caractériser la stabilité de ces espèces dans les divers environnements du milieu interstellaire, et leur spectroscopie pour permettre l’identification d’espèces spécifiques.

Par ailleurs, si ces espèces sont stables dans les PDR, leur contribution au chauffage par effet photoélectrique et à la courbe d’extinction mérite d’être étudiée.

9.2 Conséquences astrophysiques 133 La taille des PAH

Les agrégats carbonés n’étant pas des PAH, la déshydrogénation totale des PAH représente une perte pour la population PAH. La borne inférieure de la distribution de taille des PAH peut donc être évaluée pour un environnement donné à partir de notre modèle. Dans le cas de la PDR NGC 7023 NW, nous prédisons une borne inférieure comprise entre 54 et 96 atomes de carbone dans la zone où les AIB sont émises.

9.2.2 État de charge

Nos résultats indiquent que la fraction de PAH ionisés augmente avec la taille des PAH. Ce résultat est cohérent avec le fait que les taux de recombinaison électronique

que nous avons choisis augmentent sensiblement comme √NC (cf. Sec. 7.6) alors que le

taux d’ionisation augmente plus vite que NC. Cependant, les écarts entre les différents

PAH restent faibles, et les résultats pour une taille de PAH constituent une prédiction raisonnable de l’état de charge d’un PAH plus grand. De plus, nous avons utilisé les mêmes propriétés de photoionisation et de recombinaison électronique pour les différents états d’hydrogénation d’un même PAH, ainsi que pour l’agrégat carboné correspondant

(par exemple C54 pour C54H18). Dans notre modèle, l’état de charge d’une espèce est

donc indépendant de son état d’hydrogénation (l’inverse n’est pas vrai). Ainsi, dans la suite de cette section, nous référons aux espèces par leur nombre d’atomes de carbone, prises comme la somme de leurs différents états d’hydrogénation.

Nous prédisons une forte abondance de cations au bord de la PDR. Étant donné que le potentiel d’ionisation des cations est inférieur à 13.6 eV (cf. double ionisation dans la Sec. 7.2.5), ce résultat indique que la présence d’une fraction appréciable de dications est probable. Nous ne les avons pas inclus en raison de l’absence de données concernant la recombinaison électronique des dications.

La figure 9.8 compare les profils spatiaux des espèces ionisées prédites par notre modèle pour les dérivés du coronène et du circumcoronène, à la fraction des PAH ionisés déduite des observations à l’aide de l’outil d’analyse des AIB présenté au chapitre suivant (cf. Sec. 10.1). Les valeurs prédites pour la fraction de PAH ionisés, et la distance typique de leur évolution sont comparables aux données observationnelles. Cependant un décalage important sépare les deux évolutions, qui peut être vu soit

comme un décalage spatial de typiquement 10�� , soit comme un facteur d’échelle de

l’ordre de 2 sur la fraction de cations.

Une interprétation en termes de décalage spatial n’est pas immédiate dans la mesure où les résultats de notre modèle sont des quantités locales, alors que les observations sont intégrées sur la ligne de visée, et une modélisation de la géométrie du nuage comme celle proposée en Sec. 6.2 pourrait permettre une comparaison plus pertinente. Une

autre difficulté provient du fait qu’une partie de la transition PAH+/PAH0 est observée

dans la cavité (positions entre -10 et 0�� sur la figure 9.8), partie que nous n’avons pas

considérée dans notre modélisation avec le code PDR de Meudon.

L’interprétation en termes de facteur d’échelle implique de remettre en question soit l’intensité du champ de rayonnement UV incident, soit la densité des électrons libres, soit les valeurs utilisées pour les coefficients de recombinaison électronique. Nous

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

-10

-5

0

5

10

15

20

0.5

1

1.5

2

2.5

3

cations / ( cations + neutres )

Flux [ 10

-4

W m

-2

sr

-1

]

Position [ arcsec ]

Observations

∆α(54)

N

C

=24

N

C

=54

N

C

=96

AIB

Figure 9.8: Profil spatial de la fraction d’espèces (PAH + agrégats carbonés) ionisées prédit par notre

modèle dans la PDR nord de NGC 7023 pour les espèces contenant NC =24 (pointillés longs), 54

(pointillés courts) et 96 (tirets courts et longs alternés) atomes de carbone. La zone grisée représente la dispersion des résultats pour NC=54 due à l’incertitude ∆α sur le coefficient de recombinaison

électronique. Les données issues de l’analyse de l’émission AIB sont représentées en traits pleins bleus. La courbe noire représente le flux de AIB intégré sur le domaine spectral 5.5 - 14 µm. Le profil spatial est le même que celui discuté au Chp. 6. La position 0 se trouve à 42��de l’étoile et correspond au bord

de la PDR dans le modèle.

discutons la sensibilité des résultats à ce coefficient dans la prochaine section.