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Paramètres influençant la stabilité colloïdale

2. Les systèmes colloïdaux : ici c’est la taille qui compte !

2.4. Paramètres influençant la stabilité colloïdale

2.4.1. Types d’instabilité

Comme nous l’avons introduit plus haut, la déstabilisation d’un système colloïdal peut être plus ou moins réversible.

Lorsque le système tombe dans le minimum primaire, c’est-à-dire lorsque les interactions attractives de Van der Waals l’emportent, l’agrégation est irréversible, nous parlerons de coagulation.

Lorsque le système s’agrège en petits agrégats qui peuvent crémer ou sédimenter mais qu’il est possible de redisperser, nous parlerons de floculation ou d’agrégation réversible. Dans ce cas, le système se trouve dans ce cas au niveau d’un minimum secondaire de potentiel d’interaction. Un apport d’énergie, telle que l’agitation, permet au système de sortir de ce minimum secondaire.

2.4.2. Impact du sel

Nous avons vu que la concentration et la valence de l’électrolyte avait un impact important sur l’énergie d’interaction totale entre deux sphères à travers son effet sur la portée et l’amplitude des interactions de répulsion électrostatique. Ce qui peut provoquer l’agrégation des colloïdes.

Cependant, dans certains cas, c’est la valence du contre-ion qui peut avoir un effet particulier. Nous avons vu plus haut que la valence de l’électrolyte peut entrainer des écarts à la théorie

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DLVO. En particulier les cations divalents peuvent former des ponts ioniques entre des groupements de surface (typiquement –COO-) de particules différentes et entrainer la

formation d’agrégats plus cohésifs qu’avec des ions monovalents. La capacité des cations multivalents à former des ponts ioniques entre des groupes négatifs est connue depuis longtemps avec notamment la gélification de solutions de polysaccharides (comme l’alginate) en présence de cations divalents (Grant, et al., 1973).

De nombreuses études se sont intéressées à l’adsorption spécifique de cations multivalents sur des particules chargées négativement. Ces études ont montré l’impact spécifique de la valence au-delà de la règle de Schulze-Hardy (Lee, et al., 2012; Ehrl, et al., 2009) ou ont permis de mesurer la force de ces ponts ioniques (Pantina, et al., 2006).

Enfin, précisons, que selon la nature des ions de l’électrolyte, la concentration critique de coagulation peut varier significativement. Elle peut varier de plusieurs ordres de grandeur. En effet, pour des sels de sodium monovalents, dont l’anion varie, la concentration critique de coagulation d’une dispersion de colloïdes chargés positivement varie selon un ordre donné appelé série de Hofmeister. Cet ordre est lié à la nature chaotrope ou kosmotrope des ions, c’est-à-dire à leur capacité à se débarrasser de leur couche d’hydratation. Ces critères sont liés à la polarisabilité des ions (Dos Santos, et al., 2011). Des effets similaires peuvent être observés dans le cas de sels monovalents dont le cation varie et l’anion est fixe.

2.4.3. Présence d’un polymère soluble dans la phase continue

La stabilité des mélanges de colloïdes et de solutions de polymères a été le sujet de nombreuses études tant théoriques que pratiques (Oosawa, et al., 1954; Vrij, 1976; Schmidt, et al., 1951). En effet, l’ajout d’un polymère dans un système colloïdal peut avoir des conséquences diverses selon la quantité et la nature du polymère (non-ionique, polyélectrolyte, protéines). Les effets de l’ajout de polymère dans une dispersion colloïdale sont présentés de façon simplifiée dans la figure 1-17.

Figure 1-17 Représentation schématique de l'influence de l'ajout de polymère dans une dispersion colloïdale, d’après (Hiemenz, et al., 1997)

Lorsqu’un polymère, ayant une affinité avec la surface des particules, est ajouté en petite quantité, un phénomène de pontage entre deux particules peut être observé, cas a) de la

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figure 1-17. Cette situation est rencontrée lorsque l’interaction polymère/particule est particulièrement favorable et que la surface des particules n’est pas trop couverte. Lorsque la concentration en polymère ajouté augmente, l’adsorption de polymère à la surface des particules devient importante et conduit à la stabilisation stérique de la dispersion (Ramiandrisoa, 2014). Cette stabilisation peut être le résultat de deux phénomènes conjugués. Tout d’abord, si les chaines s’étendent suffisamment loin de la surface des particules, il peut y avoir un écrantage des attractions de Van der Waals. Ensuite, si la phase continue est un bon solvant pour le polymère, les chaines vont favoriser le contact avec celle-ci. Donc si deux particules se rapprochent, l’interpénétration des segments polymères va entrainer l’apparition d’une force répulsive d’origine entropique. En revanche, ce dernier point n’est pas valable si le solvant est mauvais pour le polymère. Dans ce cas, le contact entre segments sera favoriser et conduira à l’agrégation des particules. Enfin, si la concentration en polymère augmente encore jusqu’à la formation de pelotes dans la phase continue, une interaction attractive dite de déplétion entrainera la floculation des particules. L’apparition d’un volume exclu pour les polymères entre les particules sous l’effet de l’agitation thermique entraine l’apparition d’une pression osmotique proportionnelle à la concentration en polymère. Cette pression osmotique provoque la floculation des particules. Ce phénomène est réversible par dilution avec de la phase continue (Hiemenz, et al., 1997).

Nous signalons ici que les interactions de répulsion stérique peuvent apparaitre dans d’autres systèmes. Leur origine repose sur le fait que des molécules suffisamment grandes s’étendent de la surface vers la phase continue. Elles peuvent donc assurer la stabilité de systèmes colloïdaux dans le cas par exemple de polymères greffés à la surface de particules.

Il faut garder à l’esprit que ces interactions sont complexes et nécessites de considérer le système dans son ensemble et notamment l’affinité du polymère avec les particules et avec le solvant.

2.4.4. Ajout d’un tensioactif

Nous avons présenté les différentes interactions mises en jeu au sein des systèmes colloïdaux et déduit les facteurs influençant leur stabilité. Il faut préciser que la plupart des systèmes colloïdaux courants (mayonnaise, peinture, crème cosmétiques) sont maintenus stables à l’aide de molécules dites amphiphiles ou tensioactives. Ces molécules ont la capacité de par leur structure de s’adsorber aux interfaces entre deux milieux non miscibles. Elles sont généralement composées d’un corps apolaire, et d’une tête polaire. Le corps apolaire, hydrophobe peut être une longue chaine carbonée, une chaine polymère hydrophobe. La tête polaire, hydrophile peut être un groupe polaire, un ion ou une chaine polyéthoxylée.

Les tensioactifs, en s’adsorbant aux interfaces, influencent les interactions entre les objets colloïdaux. Ainsi, les tensioactifs chargés contribuent aux interactions de répulsion électrostatiques et les tensioactifs neutres polymériques sont à l’origine d’interactions de répulsion stérique.

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Selon leur structure, les molécules amphiphiles peuvent être classées en quatre catégories. Les tensioactifs anioniques, cationique, zwitterioniques ou non-ioniquess (Cabane, et al., 2003), (tableau 1-6).

Tableau 1-6 Présentation des différentes catégories de tensioactifs

Catégorie Structure générique Description Exemple

Anionique Chaine carbonée + tête polaire anionique Dodécylsulfate de sodium

Cationique Chaine carbonée + tête polaire

cationique

Bromure de

cétyltriméthylammonium Zwitterionique

Molécule portant une charge positive et une charge négative non dissociables

Coco amphocarboxy glycinate

Non-ionique

Molécule non ionique dont une partie de la structure est

polaire et l’autre apolaire

Polyéthylène glycol sorbitan monolaurate

Ces composés sont caractérisés par plusieurs grandeurs, leur masse molaire ou leur Balance Hydrophile-Lipophile (HLB) qui indique si la molécule est majoritairement polaire ou apolaire et donc ses préférences en termes de solvant. Ce dernier critère est très important pour la formulation des émulsions car il constitue un des facteurs déterminant le sens de l’émulsion (eau dans huile ou huile dans eau). Mais aussi par leur concentration micellaire critique (CMC). Lorsque la concentration en tensioactif dans la phase continue dépasse une concentration seuil, appelée concentration micellaire critique, les molécules de tensioactifs se regroupent sous forme de petit agrégats appelés micelles. La formations des micelles favorise le contact entre les parties de même polarité de la molécule de tensioactif et parallèlement diminue le contact avec la phase continue. Ces micelles, si elles sont présentes en quantité suffisante, peuvent être à l’origine d’un phénomène de déplétion qui provoque l’agrégation des colloïdes. Ce phénomène est abordé en détails dans le paragraphe 3.4 de ce chapitre. Les espèces de surface des particules de NR jouent donc le rôle de tensioactifs et contribuent ainsi à assurer sa stabilité.