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Paramètre de maille de Ge aux premiers stades de la croissance

Dans un article publié en 200948, Saint-Girons et al. décrit un mode d’accommodation observé pour le sys-tème InP/STO. Dans ce syssys-tème, présentant le même alignement cristallographique SC<110>//STO<100>, l’accommodation du désaccord paramétrique suivant cet axe est dû à la formation d’un réseau de dislo-cations confinées à l’interface.

FigureV.3 – (a) Image HRTEM d’une interface InP/STO et (b) la même image filtrée par transformée de Fourier pour laisser apparaitre les plans verticaux STO(200) et InP(220)48.

On visualise bien sur la figure V.3, montrant une couche 2D d’InP/STO, les dislocations d’interface. Contrairement au système Ge/STO, sur lequel nous avons pu montrer des images d’îlots, cette image d’une couche bi-dimensionnelle permet de voir un réseau de dislocation complet. Pour ce système, les dislocations visibles tous les 16 (ou 17) plans InP(220) permettent d’accommoder exactement le désaccord paramétrique à cette interface, qui est de 6,27% (≈ 1

16).

Pour comprendre et mettre en évidence les spécificités de ce mode d’accommodation et sa mise en place, on s’intéresse par la suite au comportement du Ge pour de très petites tailles d’îlots. On cherche, en particulier, à observer le mécanisme d’apparition des dislocations d’interface.

V.2 Paramètre de maille de Ge aux premiers stades de la

crois-sance

Pour explorer le système Ge/STO aux très petites tailles, une expérience de croissance et mesure de diffraction en incidence rasante in situ a été mise en place sur l’installation INS de la ligne BM32 de l’ESRF. Cette expérience a été mise en place en collaboration avec N. Blanc, T. Zhou, V. Favre-Nicolin et G. Renaud dans le cadre de deux campagnes de mesures.

L’installation INS de la ligne BM32 de l’ESRF (voir section II.3.2.4) permet de réaliser dans le même temps un dépôt de Ge et une mesure de diffraction en incidence rasante in-situ et en temps réel. Le bâti est équipé d’un filament situé derrière l’échantillon pour le chauffage et d’un pyromètre à infrarouge pour la mesure de la température. Le pyromètre est réglé sur l’émissivité de l’In, le substrat de STO ayant été collé sur le porte-échantillon à l’aide d’une bille d’In.

Chapitre V - Accommodation à l’interface Ge(001)/STO(001)

Un substrat de STO, préparé selon la procédure décrite au chapitre III et reconstruit (2× 1), est porté à 450 °C. À cette température de dépôt le Ge et le substrat de STO subissent une dilatation thermique qui modifie leur paramètre de maille relaxé (a450

ST O=3,91Å ; a450

Ge=4,011 Å). Le désaccord paramétrique est donc en réalité de 2,58%.

Pour favoriser la mesure à de très petites tailles de dépôt, le Ge est déposé sur ce substrat à une vitesse faible de 0,107 Å/min. À cette vitesse de dépôt et à cette température de substrat, le diagramme RHEED indique un dépôt mêlant les orientations (001) et (111) hors plan.

L’étude en diffraction de rayons X en incidence rasante est limitée à la seule réflexion 111 du Ge(001) le long de l’azimut [110]. La mesure est réalisée en temps réel, pendant la croissance. La croissance a duré 5h pour une durée de scan de 10 min. Un tel scan permet, notamment, de mesurer le paramètre de maille dans le plan des îlots de Ge.

FigureV.4 – Scans à travers la réflexion 111 du Ge le long de l’axe [110] pendant la croissance de Ge/STO.

V.2. Paramètre de maille de Ge aux premiers stades de la croissance

Une partie des courbes expérimentales est rassemblée figure V.4. La position exacte du pic de diffrac-tion (traits rouges) et la largeur intégrale sont évaluées, par ajustement, à l’aide de foncdiffrac-tions pseudo-voigts (courbes rouges) à chaque instant. La couverture de la surface indiquée pour chaque mesure est une valeur indicative déterminée à partir de la vitesse de dépôt et qui néglige les effets de désorption par ailleurs très importants à cette température de dépôt. Le trait plein vertical indique la position du Ge relaxé et le trait pointillé la position correspondant au paramètre de maille du STO.

Avec la seule mesure de la réflexion 111 du Ge, il est impossible de déterminer précisément la taille des îlots de Ge par la méthode de Scherrer. La raison principale est que les effets de contraintes engendre une élargissement des pics de diffraction. La méthode de Williamson-Hall permet de tenir compte de ces effets mais nécessite la mesure de plusieurs pics de diffraction. Cette méthode a été utilisée sur un échantillon similaire afin d’en extraire l’évolution des tailles d’îlots en fonction de la quantité de Ge dé-posée et de la largeur des pics. Par comparaison, nous avons déduit la taille des îlots dans l’expérience de croissance in situ (cf. annexe V.5).

Figure V.5 – Évolution de la déformation moyenne dans les îlots de Ge en fonction de la taille des îlots. Les barres horizontales et verticales à chaque point de mesure donnent une indication de l’erreur expérimentale dans la mesure du paramètre de maille et de la taille des particules.

Finalement, la courbe d’évolution de la déformation moyenne des îlots, dans le plan de croissance, le long de l’axe [110], en fonction de la taille des îlots de Ge, est tracée (voir fig. V.5).

Chapitre V - Accommodation à l’interface Ge(001)/STO(001)

Ces valeurs sont représentatives du comportement moyen de la distribution d’îlots, et correspondent également à une moyenne de la déformation sur tout le volume de chaque îlot. Le trait plein horizontal indique la position du Ge complètement relaxé (0%) à 450° C, le trait pointillé en bas du graphique correspond à l’état pseudo-morphique (on retrouve la valeur de désaccord paramétrique 2,58%).

Le comportement du dépôt de Ge pendant la croissance des îlots peut être séparé en trois régimes à partir de la courbe de la figure V.5.

Dans un premier temps, pour des diamètres inférieurs à 4 nm, aucun signal de diffraction n’est dé-tecté. Cela peut s’expliquer d’une part, par la faible quantité de matière, ou, d’autre part, par le fait que le diamètre correspondant à la taille critique de nucléation n’ait pas été atteint. Pour les plus petits îlots (D≃ 4 nm), le Ge est complètement contraint par le substrat de STO. Jusqu’à cette taille de particule, la croissance est donc pseudo-morphique.

Pour des particules de diamètre supérieur à 10 nm, le paramètre de maille du Ge est celui d’un cris-tal relaxé. La déformation des îlots est nulle. Cette taille de particule est extrêmement petite pour avoir une relaxation plastique du type dislocations traversantes comme décrit par Matthews et al6. À titre de comparaison, dans le système SixGe1−x/Si, et à désaccord paramétrique équivalent (x≃ 0, 4), la première dislocation de relaxation entre quand les îlots de SiGe atteignent un diamètre de 120nm181, 182.

Enfin, dans la région intermédiaire (entre D = 7 nm et D = 9 nm), la déformation oscille autour de la valeur du paramètre de maille relaxé du Ge. Les îlots sont alternativement contraints en compression et en tension. Cette oscillation présente une période très courte, de l’ordre du nm.

Ces résultats expérimentaux permettent de mettre en évidence le comportement du Ge et l’évolution de la déformation en fonctions de la taille des particules. La rapidité avec laquelle le système Ge/STO relaxe, est en désaccord avec le paradigme de la croissance contrainte. Un mécanisme de relaxation dif-férent de celui mettant en jeu de la relaxation plastique sur le modèle décrit par Matthews et al. est à l’origine de ce phénomène. Il s’agit de la mise en place du réseau de dislocations d’interface que nous avons décrit précédemment (cf. section V.1). Ce type de relaxation se rapproche de ce qui a pu être observé pour les systèmes Pt/MgO84, 87, 183, Ag/MgO86 ou GaSb/GaAs46, et la mise en évidence d’un régime oscillatoire de la déformation aux petites tailles est, à notre connaissance, tout à fait originale. Le modèle de Frenkel-Kontorova que nous développons dans la suite a pour objectif d’expliquer, à partir de ces résultats expérimentaux, le mode d’accommodation de l’interface Ge/STO.