• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE II : Suivi des cultures par télédétection radar - Complémentarité avec les images optiques

2. NORMALISATION ANGULAIRE DES SIGNAUX SATELLITES RADAR

2.1. Sensibilité des coefficients de rétrodiffusion à l’angle d’incidence

2.1.2. En période de végétation

Ulaby et al., 1979 présentent des mesures effectuées sur différents couverts bien établis (à savoir le blé, le soja, le maïs et le sorgho), avec des conditions de surface contrastées concernant l’humidité de surface, à savoir des sols secs et humides. Les mesures radar in-situ sont effectuées sur une gamme d’angles d'incidence allant de 0 à 60°, à des fréquences de 1,5 et 4,25 GHz, en polarisation HH. Les résultats montrent d’une part que les coefficients de rétrodiffusion diminuent avec l’angle d’incidence, quel que soit la fréquence, la culture ou les conditions d’humidité de surface (Figure 61). Cette diminution est importante pour les angles compris entre 0 et 20°, elle est comprise entre 6 et 26 dB dans les exemples ci-dessous, soit 0.30 à 1.30 dB.°-1. Au-delà la diminution est moins prononcée, comprise entre 2 et 8 dB (soit 0.05 et 0.20 dB.°-1). D’autre part, cette sensibilité à l’angle d’incidence est d’autant plus importante que la fréquence est basse. Elle est plus élevée à 1,5 GHz (où elle supérieure à 22 dB sur la gamme d’angle d’incidence, soit 0,37 dB.°-1

), comparée à celle observée à 4,5 GHz (où elle est au maximum de 18 dB, soit 0,30 dB.°-1). Elle est également spécifique de la culture considérée, comme le montrent les signatures angulaires associées aux cultures de soja et de blé, ci-dessous.

Figure 61 : Réponses angulaires des coefficients de rétrodiffusion acquis en polarisation HH, avec des fréquences de 1,5 et 4,25 GHz, en conditions sèche et humide, pour des cultures de soja (a et c) et de blé (b et d). (Ulaby et al., 1979)

En outre, les signaux acquis sur des cultures de soja ou de maïs (Figure 62) montrent que l’influence de l’angle d’incidence est dépendante de la polarisation considérée. Dans cette étude, Ulaby (1975) présente des signaux acquis à une fréquence de 5,9 GHz, pour des angles d’incidence compris entre de 0 et 70°. Les réponses

a) b) c) d) a) b)

97 angulaires observées en co-polarisation (HH ou VV) sont assez proches, avec une sensibilité sur l’intervalle d’angle d’incidence, supérieure à 6 dB (soit 0,09 dB.°-1). Concernant les signaux acquis en polarisation croisée, l’impact de l’angle d’incidence est moindre, avec une sensibilité inférieure à 4 dB (soit 0,06 dB.°-1). Ces résultats sont également confirmés par les approches physiques de modélisation, telles que celles effectuées par (Karam et al., 1992; Picard et al., 2003).

Figure 62 : Réponses angulaires des coefficients de rétrodiffusion acquis à une fréquences de 5,9 GHz, en co- et cross-polarisation, sur des cultures de soja (a) et de maïs (b). (Ulaby, 1975)

Les mesures présentées par (Mattia et al., 2003) en bande C confirment les observations précédentes, avec des mesures de coefficients de rétrodiffusion effectuées durant la saison de culture du blé, à des angles d’incidence compris entre 23 et 60°. Les analyses permettent cependant de mieux renseigner la différence de sensibilité entre les polarisations, pour des stades phénologiques précis (Figure 63). Par exemple, les coefficients de rétrodiffusion acquis avant épiaison en polarisation HH présentent une sensibilité proche de 10 dB (soit 0,27 dB.°-1), contre 6 dB (soit 0,16 dB.°-1), pour ceux acquis avec la polarisation VV. Cette sensibilité évolue ensuite au cours du développement de la culture, avec une influence de l’angle d’incidence plus prononcée avant l’épiaison, que pour les données acquises pendant la période allant de l’épiaison à la maturation.

Figure 63 : Réponses angulaires des coefficients de rétrodiffusion acquis en polarisations HH et VV, à une fréquence de 5,3 GHz, sur une culture de blé : avant (a et b) et après (c et d) épiaison. (Mattia et al., 2003)

Cette évolution de la sensibilité à l’angle d’incidence durant le développement des cultures agricoles est également évoquée dans les travaux de (Balenzano et al., 2011; Skriver et al., 1999) (Figure 64 et Figure 65). Dans ces travaux, les coefficients de rétrodiffusion sont acquis en bandes C et L, avec la polarisation VV, pour des angles d’incidence compris entre 30 et 60°. La sensibilité des signaux rétrodiffusés à l’angle d’incidence est

a) b) c) d) a) b)

98 mesurée au cours du cycle phénologique de différentes cultures (à savoir le blé, le colza, et l’orge). Dans chacune des études, les résultats sont présentés pour deux dates : en phase de croissance de la végétation, puis de sénescence. Les réponses angulaires sont alors contrastées, avec des dynamiques propres au site d’étude considéré et à la fréquence radar.

Figure 64 : Coefficients de rétrodiffusion tracés en fonction des angles d’incidence, pour la bande L (le 22 mars a), et le 4 juillet b)) et la bande C (le 24 mars c), et le 4 juillet d)), avec la polarisation VV, sur des cultures de blé, d’orge et de colza. (Skriver et al., 1999)

Figure 65 : Coefficients de rétrodiffusion tracés en fonction des angles d’incidence (30°, 40° et 50°), en bandes C (a) et L (b), en polarisation VV, sur des cultures de blé et de colza, aux jours 131 et 186. (Balenzano et al., 2011)

En bande X, les travaux de (Prasad, 2009) présentent des valeurs de rétrodiffusion régulièrement acquises au cours du développement de l’okra (plante tropicale cultivée pour son fruit, consommé comme légume ou condiment). Les mesures sont effectuées à l’aide d’une antenne fonctionnant à 9,89 GHz, délivrant des signaux co-polarisés (HH et VV). Elles couvrent la gamme d’angle d’incidence allant de 20 à 70°. Les résultats montrent que l’influence de l’angle d’incidence décroit avec le développement de la culture (Figure 66). Trente jours après

a) b) a) b)

99 le semis, la différence entre les signaux acquis à des incidences contrastées (20 et 70°) est proche de 10 dB (soit 0,20 dB.°-1). Cette différence n’est plus que de 3 dB (soit 0,06 dB.°-1), pour les mêmes signaux acquis 90 jours après le semis. D’autre part, les co-polarisations (HH et VV) présentent des évolutions proches, comme en témoignent les graphiques ci-dessous.

Figure 66 : Réponses angulaires des coefficients de rétrodiffusion acquis en polarisations HH (a) et VV (b), à une fréquence de 9,89 GHz, lors du développement de la culture d’okra. (Prasad 2009)

Toujours en bande X, les mesures effectuées sur le blé, l’orge et l’avoine par (Bouman and van Kasteren, 1990) montrent une nouvelle fois que les niveaux de rétrodiffusion atteints (gamma dans ce cas), sont fonction de l’angle d’incidence considéré (Figure 67). Elles confirment également que la réponse angulaire évolue avec la succession des stades phénologiques. Enfin, leurs résultats témoignent de la spécificité de la réponse, vis-à-vis de la culture considérée. Concernant les cultures de blé et d’orge (Figure 67a et b), les évolutions temporelles des coefficients de rétrodiffusion sont assez proches, et contrastées par rapport à celles collectées sur l’avoine (Figure 67c).

Figure 67 : Signaux rétrodiffusés (gamma, correspondant au rapport des coefficients de rétrodiffusion par le cosinus de l’angle d’incidence, soit °/cosθ) acquis à 20, 50 et 70°, durant différents stades de développement des cultures de blé a), d’orge b) et d’avoine c), en bande X, avec la polarisation VV. (Bouman et Van Kasteren, 1990)

En résumé, quel que soit l’occupation du sol (période de sol nu, ou de culture), les différents travaux présentés montrent que l’effet de l’angle d’incidence est observable en bandes L, C et X, avec une sensibilité d’autant plus importantes que la fréquence est basse, et que le taux de développement de la culture est faible (influence du stade phénologique). Les signaux acquis en co-polarisation présentent une sensibilité à l’angle d’incidence importante, comparés aux signaux acquis en cross-polarisation, pour lesquels la sensibilité est quasi-nulle en période de végétation.

a) b) c) a) b)

100 Dans ce contexte, la méthode proposée pour la normalisation angulaire des coefficients de rétrodiffusion doit être spécifique à la configuration des capteurs (en séparant les différentes fréquences, et les états de polarisation), et des cultures étudiées. De plus, elle doit être applicable durant l’intégralité du cycle phénologique, en rendant compte des changements de la végétation. La méthode mise en œuvre, prenant en compte ces différents impératifs, est présentée dans le paragraphe ci-dessous.