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Chapitre II. ETUDE BIO-ECOLOGIQUE DE S maroccana

II.4 Période de dégâts

II.4.1 Matériels et méthodes

Cette partie du travail concerne l’analyse des causes de mortalité des jeunes plants de chênes- lièges, en faisant la part des dégâts dus aux vers blancs et ceux liés à d’autres facteurs (sécheresse, facteurs humains …).

Trois parcelles de régénération du chêne-liège (AII5, BV10 et BV11) dans la forêt de la Mamora ont été échantillonnées pour identifier les dégâts sur les jeunes plants au cours de l’année 2008. Nos observations et analyses ont porté principalement sur :

 La détermination des périodes où les dégâts sont maximums dans les différentes parcelles ;

 L’analyse des pratiques de plantation, avec possibilité ou non de les relier à la mortalité des jeunes plants ;

II.4.2 Résultats

Symptômes : les dommages causés par les larves de S. maroccana sont directement visibles au niveau des parcelles infestées. Les jeunes plants dépéris sont identifiables par le jaunissement de leurs feuilles. Les plants dépéris suite à la section de leurs racines par les vers blancs s’arrachent très facilement à la main et on observe des morsures au niveau du collet et

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de la racine principale, souvent coupée, tandis que le chevelu des racines secondaires est réduit. En creusant le sable jusqu’au niveau des racines, on trouve effectivement à la base une larve de S. maroccana. Dans les parcelles fraîchement labourées, la présence d’oiseaux (pique-bœufs) est par ailleurs un autre indicateur de la présence massive souterraine des vers blancs.

Période de dégâts : les premières attaques de S. maroccana débutent au milieu ou en fin d’automne dès la tombée des premières pluies, pour se poursuivre jusqu’aux mois d’avril ou mai selon les années. Pendant toute cette période, le sol humide est favorable au déplacement des larves à la recherche des racines des végétaux. Les densités des larves près de la surface augmentent progressivement, devenant particulièrement importantes au printemps entre mars et fin avril. C’est la période où le maximum de dégâts a été enregistré.

Les pratiques de plantation par les forestiers jouent un rôle important dans les variations des dégâts. La mortalité des plants est faible dans les parcelles non systématiquement nettoyées par un labour profond. Dans ce cas, les vers blancs s’attaquent surtout aux racines des autres espèces végétales présentes dans la parcelle, le chêne-liège n’étant qu’une espèce parmi d’autres. La pratique de labourage de très grandes parcelles (parfois plusieurs hectares totalement mis à nu) (figure 37a) modifie les conditions microclimatiques, en particulier la température et l’humidité. Les conditions deviennent alors souvent arides, avec une température au sol pouvant dépasser 50°C et le déclenchement de tourbillons de sable qui déterrent les plants, ou au contraire les enfouissent à parfois une vingtaine de centimètres de profondeur (Ibekwe et al., 2002 ; Peigné et al., 2009 ; Nicou, 1977). Ce défrichement total élimine alors la majeure partie des végétaux d’origine dans la parcelle et déstructure les sols. Les vers blancs s’attaquent alors à la seule ressource disponible, les jeunes plants de chêne- liège (figure 37b). Les conditions d’aridité sont telles qu’un arrosage estival régulier et important s’impose, avec des mouvements verticaux des larves dans le sol en cas d’excès d’eau.

Les nouvelles pratiques consistant à labourer les parcelles par bandes alternées (une rangée labourée et replantée en chêne-liège, en alternance avec une rangée laissée avec sa végétation naturelle) ont permis de réduire la mortalité des jeunes chênes-lièges (conditions microclimatiques moins contraignantes ; larves restant en place au niveau des bandes engazonnées) (figure 37c).

66 Figure 37. Parcelle de régénération du chêne-liège (AII5, sol systématiquement nettoyé) (a) ;

racine sectionnée d’un jeune plant de chêne-liège (b) ; parcelle de régénération du chêne liège (AI7) dans la forêt de la Mamora (Plantation par bandes) (c)

II.4.3 Discussion

La mortalité des jeunes plants de chênes-lièges est due à la fois aux attaques des vers blancs, mais aussi au manque d’eau durant les périodes sèches de l’année. Les attaques sur le terrain se reconnaissent par le jaunissement des feuilles, la mortalité des plants pouvant toucher des surfaces importantes en l’absence de traitement spécifique.

Ghaioule et al. (2007, 2010) ont suivi individuellement de jeunes chênes-lièges depuis le moment de leur plantation. Les plants avaient été répartis en quatre blocs de 500 potets chacun, suivis mensuellement. La mortalité totale annuelle mesurée, due à la fois aux attaques

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des vers blancs et à la sécheresse estivale combinée, était comprise entre 41 et 68% selon les blocs. La mortalité directement imputable aux attaques des larves de S. maroccana était comprise entre 24 et 43%, avec une répartition sur l’année différente selon les mois. Entre 49 et 61% de la mortalité annuelle liée aux vers blancs se concentre durant les mois d’avril ou mai selon les parcelles, période où le sol est humide et la température modérée (Ghaioule et

al., 2007).

Une étude antérieure réalisée en 1997 sur des parcelles de régénération dans les cantons A, B et D soumis à un gradient croissant de continentalité avait montré que le taux de mortalité des jeunes plants liée aux vers blancs était respectivement de 14, 20 et 13% en moyenne (Rachdi & Haddan, 1998). Les observations effectuées dans le canton B par Ghaioule et al. (2007) sont plus précises car les jeunes plants ont été suivis individuellement, en faisant la part des vers blancs par rapport à la mortalité globale. Cette différence par rapport aux travaux de Rachdi et Haddan peut être due à une pluviométrie différente lors de l’année d’observation et à une densité différente des larves présentes dans les parcelles. Les attaques larvaires répétées entraînent des dégâts importants (mortalité) durant au moins les 2 premières années de la vie des jeunes chênes-lièges (Rachdi & Haddan, 1998 ; Lumaret et al., 2005).

Dans de nombreuses régions dans le monde, des dégâts liés aux vers blancs sur les systèmes racinaires ont été rapportés. En France, les pullulations spectaculaires de Melolontha sont anciennes ; à partir de 1935 elles avaient entraîné de gros dommages dans les prairies herbagères (Hurpin, 1957) et les cultures comme celle de la pomme de terre (Bedin, 1982). En milieu forestier, Abgral (1991) rapporte que les hannetons en général sont des ravageurs qui provoquent de nombreux dégâts dans les pépinières et les jeunes plantations de feuillus et de résineux. Une autre espèce, Melolontha papposa Illiger, cause des dégâts importants dans les plantations d’olivier en Espagne (Duran et al., 1996). Plus récemment, Randriamanantsoa (2010) a signalé des dégâts sur les plants de riz dans l’Ouest de Madagascar, dus à Apicencya

waterloti (Dewailly (Coleoptera : Melolonthidae).